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Critique de montmartin


L'émergence de tous ses souvenirs refoulés, Clémantine est une enfant comme les autres, elle vit à Kigali au Rwanda, son surnom est Casette car elle répète tout ce qu'elle voit, tout ce qu'elle entend. Elle a six ans, mais l'âge n'a désormais plus aucun sens. Elle vient de s'enfuir par la porte de derrière pour échapper au génocide. La sauvagerie des massacres et l'usage du viol et de la contamination du sida comme armes de guerre.

« C'était la première fois que je la voyais verser une larme. Ça ne se faisait pas chez les adultes rwandais. Quant aux enfants, ils y étaient autorisés tant qu'ils ne savaient pas parler. Ensuite, ils ne pleuraient plus. Si, après ça, quelqu'un ne pouvait pas s'en empêcher, il devait le faire en chantant, comme un oiseau mélancolique. »

Choléra, dysenterie, mouches et insectes qui pullulent. Les caniveaux répugnants, les décharges d'ordures en plein air. Les enfants en haillons et sans chaussures, le regard vide. Les filles qui se prostituent ouvertement. Six ans passés dans des camps de réfugiés, être loin de chez soi, quelqu'un qui n'a plus de foyer. Elle n'est plus qu'un numéro, un simple numéro, si elle meurt personne ne sera au courant. Elle a perdu son identité. Avec sa soeur, elle va vivre dans sept pays africains différents un parcours déchirant et dramatique avant d'arriver aux États-Unis. le choc de l'abondance après les privations.

« Comment pouvait-il exister quelque part un tel excès de nourriture tandis qu'ailleurs, à quelques heures d'avion, des gens mouraient de faim ? »

Un livre témoignage poignant et émouvant, si bien entendu j'ai été touché par la description de cette errance pour échapper à la barbarie, ce qui m'a le plus intéressé dans ce récit c'est sa lutte pour se reconstruire, recommencer à zéro. Avec une écriture simple sans fioriture, Clemantine Wamariya nous parle de la difficulté de témoigner avec des mots, regrouper les atrocités vécues. L'impossibilité d'oublier que des membres de sa famille ont été massacrés par d'autres membres de sa famille. Ne plus penser au passé, poursuivre sa vie. Ne pas exposer ses blessures aux autres. Ne pas afficher son chagrin, le garder au fond de soi, l'enfouir. L'auteur aborde aussi la responsabilité des colonisateurs, ici les Belges, dans la haine entre Tutsis et Hutus.

Alternant passé et présent ce livre fait partie selon moi des textes forts au même titre que les témoignages sur les atrocités des nazis dans les camps, d'ailleurs la jeune Clemantine Wamariya a été troublée par la lecture de "La nuit" le récit des souvenirs qu'Élie Wiesel conserve de la séparation d'avec sa mère et sa petite soeur qu'il ne reverra plus jamais et du camp où avec son père il partage la faim, le froid, les coups, les tortures… et la honte de perdre sa dignité d'homme quand il ne répondra pas à son père mourant.

« Nous avons besoin de dire : j'honore ce que tu respectes et j'accorde de l'importance à ce que tu chéris. Je ne suis pas meilleur que toi. Tu n'es pas meilleur que moi. Personne ne vaut plus qu'un autre. »

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