Lecture par Anna Mouglalis & Laurent Poitrenaux
accompagnés par Dominique Mahut (musique)
Illuminé par le souvenir de son enfance, amoureux du spectacle de la nature, passionné par les cartes et les atlas, érudit, précis mais non dénué de fantaisie
C'est un François Mitterrand intime, souvent inattendu et infiniment littéraire que nous dévoile ce voyage à travers ses livres (La Paille et le grain, L'abeille et l'architecte) et ses entretiens avec Marguerite Duras ou Elie Wiesel.
Soirée présentée dans le cadre de la célébration des 40 ans du 10 mai 1981 organisée par Génération Demain, avec le soutien de l'Institut François Mitterrand.
À lire François Mitterrand, La paille et le grain et L'abeille et l'architecte, éd. Les Belles lettres ; Lettres à Anne, Gallimard Marguerite Duras et François Mitterrand, le Bureau de poste de la rue Dupin, Gallimard François Mitterrand & Elie Wiesel, Mémoire à deux voix, éd. Odile Jacob.
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J'ai juré de ne jamais me taire quand des être humains endurent la souffrance et l'humiliation, où que ce soit. Nous devons toujours prendre parti. La neutralité aide l'oppresseur, jamais la victime. Le silence encourage le persécuteur, jamais le persécuté.
Elie Wiesel, 10 décembre 1986, Oslo, dans Discours de remise du prix Nobel de la Paix.
“Ceux qui ne connaissent pas leur histoire s'exposent à ce qu'elle recommence...”
Jamais je n'oublierai cette nuit, la première nuit de camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée.
Jamais je n'oublierai cette fumée.
Jamais je n'oublierai les petits visages des enfants dont j'avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet.
Jamais je n'oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma foi.
Jamais je n'oublierai ce silence nocturne qui m'a privé pour l'éternité du désir de vivre.
Jamais je n'oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert.
Jamais je n'oublierai cela, même si j'étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même. Jamais.
J'ai vu d'autres pendaisons. Je n'ai jamais vu un seul de ces condamnés pleurer. Il y avait longtemps que ces corps desséchés avaient oublié la saveur amères des larmes.
Seuls ceux qui ont connu Auschwitz savent ce que c'était. Les autres ne le sauront jamais.
Au moins comprendront-ils ?
Préface de l'édition 2006
Le bourreau tue toujours deux fois, la deuxième fois par le silence.
Il y a un État, et il est différent de tous les autres. Il est juif, et pour cela il est plus humain que n'importe quel autre.
Discours à Kansas City en 1970.
(P. S. : Je tiens à vous rassurer, cher Elie, en ce qui concerne l'ânerie, vous n'êtes pas spécialement différent du restant de l'humanité. Je vous trouve au contraire très humain, peut-être même plus humain que la moyenne...)
Le corps n'est pas éternel mais l'idée de l'âme l'est.
Le cerveau sera enterré mais la mémoire lui survivra
L'oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n’est responsable de leur première mort, nous le sommes de la seconde.
Béni soit le nom de l'Eternel !
Pourquoi, mais pourquoi Le bénirais-je ?
Toutes mes fibres se révoltaient. Parce qu'Il avait fait brûler des milliers d'enfants dans ses fosses ? Parce qu'Il faisait fonctionner six crématoires jour et nuit les jours de Sabbat et les jours de fête ? Parce que dans Sa grande puissance Il avait créé Auschwitz, Birkenau, Buna et tant d'usines de la mort ? Comment Lui dirais-je :
"Béni sois-Tu, l'Eternel, Maître de l'Univers, qui nous a élus parmi les peuples pour être torturés jour et nuit, pour voir nos pères, nos mères, nos frères finir au crématoire ? Loué soit Ton Saint Nom, Toi qui nous as choisis pour être égorgés sur Ton autel ?"