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Critique de Flaubauski


Ce roman au format particulier fut le pari de mes lectures de la rentrée littéraire : plus de 1000 pages, cinq livres différents, à lire dans l'ordre de son choix, formant un tout romanesque qui laisse la parole à cinq personnages différents, à des époques différentes, dans des lieux différents, « écrivant » sous des genres eux aussi différents, étant malgré tout liés, soit par une découverte qui aurait pu changer la face du monde si elle avait été avérée, soit par une catastrophe qui l'a, quant à elle, indéniablement changée.

Ces personnages, ce sont Paulette Blanchard, jeune française d'une famille aisée de la fin du XIXème siècle en quête d'émancipation, qui trouvera son salut dans le voyage et la science, et qui nous raconte son histoire sous forme d'un journal intime encyclopédique ; Jona Jonas, jeune artiste autrichien en quête de son amante qui a disparu, qui se rend pour cela au Japon, en 2011, à l'aune de la catastrophe, et qui nous décrit ses états d'âme au fil de ses recherches, ainsi que son passé, sous la forme d'un récit plus classique ; Chantal Blanchard, physicienne et climatologue aux nombreuses instabilités mentales, qui nous est présentée par un de ses cahiers, le septième, renvoyant à ses pensées, idées, dessins rédigés entre novembre 2010 et mars 2011 ; Akio Itô, jeune garçon japonais qui a vécu la catastrophe au plus près, qui la raconte dans des enregistrements ici retranscrits ; enfin Abra Aoki, jeune tokyoïte, physiquement et mentalement meurtrie, dont les errances dans la ville nous sont racontées par l'intermédiaire d'un manga.

Mélange détonnant en somme que celui de ces formats, personnages, temporalités et spatialités variés, qui auraient pu être un maelstrom manquant de cohérence et de lien, mais ce n'est pas du tout le cas : c'est un mélange d'une grande qualité narrative, stylistique – du moins la traduction -, d'une grande richesse thématique également. Chaque personnage a en effet sa voix propre, son style propre, rendant au mieux compte de la personnalité et de l'histoire de chacun ; les liens qui les unissent, bien que plus ou moins ténus, sont présentés avec une impressionnante limpidité. L'ensemble coule en effet, même malgré la longueur et la complexité des idées ou pensées parfois énoncées par un personnage, avec un grand naturel qui nous emmène avec plaisir dans les méandres de ces vies accidentées.

Le grand rire des hommes assis au bord du monde est de fait un roman que j'ai vraiment apprécié, rigoureux, complexe, qui demande de la concentration à la lecture, qui incite à la réflexion, notamment philosophique, sur la place de l'Humain dans le monde, sur son omniprésence qui nuit désormais à ce qui l'entoure, sur les conséquences de ces nuisances sur lui-même, également sur la place que chacun tient dans ce monde, lui-même de plus en plus accidenté et bouleversé. Pari réussi que cette découverte, finalement, de Philipp Weiss, dont c'est le premier roman !
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