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Critique de Franz


Franz
06 novembre 2017
« le sens de l'espace ».
De ses nombreuses pérégrinations intellectuelles et géographiques, Kenneth White prend le chemin bleu du fleuve Saint-Laurent que les Amérindiens ont de tout temps nommé le « chemin qui marche », de Montréal au Labrador, comme un itinéraire ample et inspirant, un cheminement mental vers le dépouillement et la clairvoyance. En cherchant à remonter aux « principes », le poète fraie avec les éléments primordiaux : « roche, vent, pluie, neige, lumière » et passe des seuils jusqu'à entrer dans le « grand rapport » pour pouvoir écrire le monde.
L'auteur relate ses rencontres avec humour et empathie. Sa route démarrée à Montréal s'émaille d'anecdotes drôles et révélatrices. Des listes de mots, des expressions québécoises, des haïkus s'égrènent et s'insèrent avec naturel dans le récit à mesure que les kilomètres défilent : Québec, Chicoutimi, Pointe-Bleue, Havre-Saint-Pierre, Schefferville, Goose Bay. Les terres nues du Labrador offre enfin avec la baie d'Ungava, [« le Lieu le plus lointain » en esquimau] et ouvre sur un long poème aux accents rimbaldiens, une dérive métaphysique, sans lieu ni formule, aux abords d'un immense espace blanc.
Ecrite avec allant et simplicité, fluidité et lucidité, « La Route bleue » peut trouver de nouveaux lecteurs à travers les rééditions successives (2013, 2017) et bon marché (8 €) de l'éditeur le Mot et le reste. Sises à Marseille, les éditions ont le bon goût de plonger dans les années fécondes de Kenneth White pour en exhumer des textes remarquables épuisés depuis des années à l'instar de « La Route bleue » [Grasset et Fasquelle, cop.1983]. Alors que le fondateur de l'Institut international de géopoétique a cédé sa place de président, il peut être éclairant pour lecteur d'aller à la rencontre d'un écrivain ensemençant les paysages de ses traversées éphémères, les fécondant durablement aux regards d'autrui avec des textes évocateurs. Bien des éléments du récit retiennent l'attention et aiguisent la curiosité. Kenneth White puise aux sources inspirantes de la littérature avec Thoreau, Lawrence, Whitman, Basho… et surtout il sait donner à ressentir la vastitude des terres d'Amérique avec une économie de moyens qui est le résultat d'une remarquable assimilation et d'une longue décantation fructueuses.
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