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Critique de Foxfire


Il aura suffi de 2 romans pour que je classe Connie Willis parmi mes héroïnes littéraires. A l'occasion d'une lecture commune, je devais lire "le grand livre" et l'édition que j'ai acheté comportait également "sans parler du chien" que je n'avais pas prévu de lire au départ. Finalement, je suis enchantée de cette double-lecture. Ces deux romans sont de totales réussites.

Les 2 récits prennent un même point de départ, des historiens effectuant des voyages dans le temps.
Dans "le grand livre", cet aspect est particulièrement crédible. Les historiens ne vont pas au Moyen-Age sans préparation. Tout est pensé, de la parfaite connaissance des moeurs de l'époque au transmetteur intégré sous la peau permettant de comprendre et de parler l'anglais médiéval. Et pourtant Kivrin, à son arrivée au 14ème siècle, réalise que malgré toute la préparation, des détails ne collent pas ; elle est trop grande, ses dents trop belles... le récit rend parfaitement compte des difficultés que pourraient occasionner de tels voyages.

Connie Willis a un talent de conteuse hors pair, une maîtrise de la narration qui force le respect. Elle sait créer une tension qui ferre le lecteur. Il y a ici plus de suspense que dans les 3/4 des thrillers que j'ai pu lire. Les va-et-vient entre passé et présent sont parfaitement menés. Lorsqu'on passe d'une époque à l'autre, on est désolé de quitter momentanément certains personnages, mais tellement ravis de retrouver les autres ! Ce pavé se lit à une vitesse éclair. Tout est fluide, les quelques 500 pages du livre en paraissent à peine 300. de plus, outre sa maîtrise du rythme et du suspense, Willis aère son récit avec des notes d'humour savamment dosées. Ces petites touches de légèreté renforcent l'attachement envers les personnages et ne vient jamais amoindrir l'émotion ressentie.

Car le gros point fort de ce roman, c'est l'émotion qu'il transmet. Ici, pas de combats épiques ni d'action débridée. "Le grand livre" fait le choix de l'intime en plongeant le lecteur dans le quotidien d'une famille du Moyen-Age. Et cette histoire, dont je ne veux rien dévoiler, est tout simplement poignante. L'auteure vise le coeur et fait mouche. Comment rester de marbre face à de si jolis personnages que Kivrin, Rosemonde, le père Roche ou la petite Agnès, confrontés à l'horreur totale ? L'auteure dessine si bien ses personnages, raconte si bien son histoire que tout parait vrai. Et l'on est d'autant plus touché. le début du chapitre 31 m'a bouleversée. En une phrase, Willis a réussi à me remuer profondément. 8 petits mots, 8 mots simples, qui m'ont dévastée, qui m'ont émue aux larmes... Sans parler du dénouement, magistral, tout aussi intense émotionnellement. Un chef-d'oeuvre.

Le second roman, "sans parler du chien", n'est pas une suite au "grand livre" mais reprend donc le principe des historiens voyageant dans le temps et on retrouve certains personnages. Mais le ton est radicalement différent. Là où "le grand livre" jouait sur l'émotion, "sans parler du chien" est une délicieuse comédie dans un contexte victorien.

C'est bluffant de voir une auteure aussi à l'aise dans des registres très différents. Willis manie aussi bien l'humour que l'émotion est le suspense. "Sans parler du chien" est un roman frais, léger, élégant, pétillant, une vraie bulle de champagne. L'auteure a une imagination débridée qui donne lieu à des situations hilarantes, le tout servi par des dialogues savoureux.

Là aussi, Willis fait preuve d'une grande maîtrise de la narration. Son intrigue se complexifie au fur et à mesure jusqu'à devenir assez alambique et toujours passionnante et bien menée. Lorsqu'elle fait appel à un deus ex machina, c'est pour faire preuve d'une audace narrative réjouissante en osant l'impensable, à savoir éjecter les héros de la résolution d'un des noeuds principaux de l'intrigue. L'argument SF est loin d'être secondaire, l'intrigue fait la part belle aux multiples sauts dans le temps et l'amateur de paradoxes spatio-temporels sera servi.
Ajoutez à cela une galerie de personnage aux petits oignons, une foule de référence littéraires et une réflexion intéressante sur le rôle des détails dans L Histoire... et vous avez là un très grand roman.

Vous l'aurez compris, j'ai adoré ces deux romans, Connie Willis est tout de suite devenue ma chouchoute. Il est certain que je lirai les autres oeuvres de cette fabuleuse auteure.

Challenge Pavés 2016-2017 - 2
Challenge Atout Prix 2016 - 9 et 10 (prix Hugo, Nebula et Locus 93 pour "le grand livre" et prix Locus et Hugo 99 pour "sans parler du chien")
Challenge ABC 2016-2017 - 6/26
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