Entendre.
Parler, c'est trébucher sur les mots, hésiter, s'interrompre; entendre, c'est aller tout droit. (p. 94)
J'étais seul dans les ténèbres.
La lumière n'éclaire pas.
Elle trouve seulement des endroits à illuminer.
Moi, elle ne m'avait pas trouvé.
Je resterais toujours dans la pénombre.
Je m'étais habitué à tous les emplois que j'avais occupés, mais jamais à la vie. A ses souffrances, à ses chagrins, à ses joies.
Après le séisme, le piédestal de la statue de Saigô Takamori était couvert d'avis de recherche de famille en quête des leurs. L'empereur Hirohito, qui n'était encore que prince impérial, était venu dans le parc, en tenue militaire, afin de constater l'étendue des dégâts. Il avait compris à quel point cet espace vert était important pour la capitale en cas de catastrophe, et c'était pour cela qu'il en avait fait don à la ville en janvier 1924. D'où le nom officiel du parc : "Parc d'Ueno, cadeau impérial".
Je vivais tourné vers le passé, j'allais vers l'avenir à reculons. (Page21)
Dans la foule qui attend l'arrivée du train de la ligne Yamanote en direction de Shinjuku, je cherche celui que j'étais la première fois que je suis descendu à la gare d'Ueno.
Je ne me suis jamais senti sûr de moi en me voyant dans un miroir, une vitre ou sur une photo. Je ne me trouvais pas laid, mais je n'ai jamais pensé que mon physique pouvait arrêter le regard.
Plus encore que de mon apparence, je souffrais de mon impuissance, de mon incapacité à m'exprimer, et surtout de mon manque de chance.
Je n'ai pas eu de chance.
Tous mes souvenirs de ce passé dont je ne pouvais me débarrasser étaient enfermés dans une boîte dont le temps avait scellé le couvercle. Il ne fallait pas l'ouvrir.
Quelqu’un qui tombe dans un piège pourra réussir à s’en extraire, mais quelqu’un qui dévisse du haut d’une falaise verticale ne parviendra plus à reposer ses pieds dans la vie. Seule la mort mettra fin à la chute.
Le calendrier sépare aujourd'hui d'hier et de demain, mais dans la vie,mais dans la vie, rien ne sépare le passé, le présent et l'avenir.
Des groupes de jeunes s'étaient mis à attaquer les SDF à Tokyo, à Yokohama et à Osaka, nous avions tous peur d'être le prochain et j'étais terrorisé chaque fois que j'entendais parler de lui.
Les jeunes frappaient les sans-abris à coups de bâton ou de batte métallique, mettaient le feu aux abris...
Ils lançaient des pétards dans les cabanes et jetaient des pierres sur les hommes qui en jaillissaient, terrifiés...
Ils attaquaient les tentes à l'extincteur et quand on en sortait, on se faisait asperger de neige carbonique, tirer dessus au pistolet à bille ou frapper avec des panneaux ou des barres en métal...
Une fois qu'ils avaient assommé à coups de poing et de pied leurs victimes, ils les aveuglaient en faisant éclater un pétard tout près de leurs visages, et les achevaient au couteau...