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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dogura-Magura
Traduction : Patrick Honnoré.

Dogra Magra ou le Roman Labyrinthique.
Peut-être Yumeno Kyûsaku se sentait-il plus à l'aise dans le "court." On peut le penser car la faiblesse de "Dogra Magra" tient dans sa construction et ses longueurs - celles-ci étant peut-être plus sensibles à un Occidental : le roman policier chinois ou japonais, pour autant que je le sache, a toujours aimé les digressions.
Mais justement, dans "Dogra Magra", on ne peut pas parler vraiment de digressions mais plutôt de répétitions. Si le procédé montre très clairement dans quel état mental lamentable se trouve le principal narrateur du roman, il finit par lasser. Imaginez des poupées gigognes dont les emboîtages successifs n'auraient pas de fin et vous aurez une idée assez exacte de "Dogra Magra."
Les quatre-cents premières pages surtout sont laborieuses parce que truffées de discours et de théories sur le traitement des aliénés et aussi de réflexions philosophiques sur l'esprit, le cerveau, etc, etc ... le style n'arrange rien : il regorge de points de suspension, se fait tour à tour haché et doctoral et tout cela donne l'impression de tourner sans fin.
A la moitié du roman donc, le ton change légèrement et l'intrigue qui aurait conduit notre narrateur dans la cellule d'hôpital où nous l'avons trouvé fait mine de se mettre en place. Mais elle est elle-même si tordue, si distordue, si contournée, si nébuleuse que le lecteur n'a pas trop de toute son attention pour la suivre. (Surtout, lire "Dogra Magra" quand on a tout son temps ! Sinon vous ne le terminerez jamais.)
En substance, un jeune homme (une vingtaine d'années à peu près) se réveille un triste matin dans une cellule capitonnée et entend une voix de femme - celle de sa voisine de la cellule 6 - l'appeler et gémir. Après avoir tourné comme un ours en cage pendant on ne sait trop combien de temps, l'amnésique (car le malheureux ne se rappelle pas même son nom) reçoit la visite du Dr Wakabayashi, homme grave et volontiers pédant, qui lui donne l'impression de l'observer sans cesse du coin de l'oeil et qui l'invite à se remémorer son identité par une recherche personnelle dans des lieux et dans des archives où lui-même, Wakabayashi, se fera son guide.
L'amnésique arrive ainsi dans le bureau-bibliothèque du Pr Masaki, son médecin référent, dont Wakabayashi lui assure avec regret qu'il s'est suicidé un mois plus tôt. de fil en aiguille, le patient est amené à poser de plus en plus de questions sur le Pr Masaki et, une question en entraînant une autre, le voilà plongé dans le parcours professionnel révolutionnaire de Masaki, partisan de la "thérapie par l'émancipation des aliénés."
Mais, peu à peu, notre amnésique sent une question croître en lui : n'est-il pas la victime du machiavélique jeu de pouvoirs de deux médecins particulièrement brillants qui, bien loin de vouloir lui faire recouvrer la mémoire, s'acharnent à l'induire en erreur quant à son passé ?
Surtout, s'il y a criminel en cette affaire, qui est-il exactement ? ...
Au-delà son argument policier, teinté de fantastique, "Dogra Magra" reprend les sentiments les plus intimes de son auteur : la sensation, qu'il dut connaître très jeune, de ne pas être maître de son destin, la certitude d'être manipulé par les uns comme par les autres tout en se demandant si ceux-ci n'étaient pas eux-mêmes victimes de quelque marionnettiste aussi occulte que démoniaque, la hantise cachée de son propre déséquilibre, le mariage du malheur et du sentiment amoureux ... Et c'est sans doute cela qui parvient à fidéliser le lecteur, à faire patienter celui-ci jusqu'à la huit-centième page où, une fois de plus, c'est à lui, et à lui seul, de se faire sa propre opinion sur ce récit aux multiples facettes qui laisse le même sentiment de malaise que la contemplation hypnotique d'un motif répété sur un autre motif qui, lui-même, est répété sur ... ;o)
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Une lecture remarquable, singulière imaginée par Yumeno Kyûsaku, publié en 1935.
L'on se laisse happer par le récit, parfois complexe pour ceux qui ont quelques difficultés de concentrations, mais l'histoire mérite d'être lue jusqu'à la fin.
Il y a un peu de tout et l'on ressent ce côté légendes urbaines japonaises, une certaine atmosphère que l'on retrouve dans certains des mangas et film.
Un côté fantastique, mais aussi une part de vérité concernant "le rêve du foetus" (par ailleurs, j'ai pensé au livre d'Otto Rank : "le traumatisme de la naissance" paru en 1928). Mais aussi et surtout "théorie de l'hérédité psychologique" que mentionne le professeur Masaki, j'ai de suite pensé à la psychogénéalogie (psychanalyse, ADN), mais encore au lien d'âme (christianisme).
L'auteur est sans doute influencé par les débuts de la psychanalyse, notamment Freud, Otto Rank..
Mais quelle imagination en tout cas ! Il y a tant à dire, je suis étonné que ce roman ne soit pas plus connu en occident, pourtant vu comme un chef d'oeuvre et un livre inclassable est étrange.
J'ai aimé, mis à part quelques longueurs.
Je recommande amplement..
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Oeuvre stupéfiante, Dogra Magra est à la fois une performance d'écriture inégalée et un extraordinaire roman policier.
Un amnésique se réveille en pleine nuit dans la chambre d'un hôpital psychiatrique. Nous le verrons se débattre au milieu d'une toile d'araignée tissée par les docteurs de l'institution, à la recherche de son identité et de son éventuel rapport avec une mystérieuse affaire criminelle. Qui est Kure Ichirô ? Quelle terrible malédiction poursuit la lignée de sa famille et se réveille dans ses gènes ?
Le lecteur, entraîné dans une spirale de plus en plus serrée de coups de théâtre et de renversements de perspective, perd toute notion de l'espace et du temps et sent son esprit lui échapper, pris d'un vertige ontologique. Car ce roman, où se côtoient la doctrine bouddhiste du karma et les concepts psychanalytiques d'inconscient, est à la fois un chef-d'oeuvre d'écriture parodique qui se joue de tous les styles et une intrigue d'une intelligence labyrinthique où toutes les interprétations et leurs contraires sont autant de pièges tendus pour égarer le lecteur. Réflexion sur la folie, l'identité et les pouvoirs de la science, ce texte dérangeant à l'extrême, publié quasi confidentiellement en 1935, resta totalement inconnu du grand public jusqu'à sa redécouverte à la fin des années soixante. Lorsqu'on en referme la dernière page, on comprend pourquoi il est aujourd'hui considéré au Japon comme un des romans majeurs du XXe siècle.
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Une sacrée claque.
Toujours dans l'idée de découvrir un peu plus la littérature japonaise, je me suis lancée dans la lecture de ce passionnant roman... philosophique ? policier ? scientifique ? psychologique ? cette pièce de théâtre ? Difficile de qualifier cet ouvrage, même quelques jours après l'avoir terminé, tant il brise les codes. La narration est extrêmement variée. le style peut paraître assez déroutant de prime abord, l'écrivain employant des techniques littéraires très variées, oscillant entre les simples onomatopées et les phrases longues d'une page, réflexions personnelles et passages plus scientifiques. Pourtant, il est difficile de décrocher de sa lecture : mêmes les discours les plus complexes des personnages sont rédigés de manière à nous fasciner, à nous maintenir en haleine. Distinguer le vrai du faux, la mise en abyme du "premier plan" relève d'un véritable défi. Paradoxalement, la meilleure manière de lire ce livre est de lâcher prise, se laisser porter par le flot de dialogues, de monologues et d'histoires variées.
Quoiqu'il en soit, le résumé a tenu sa promesse : ce récit surréaliste ne laisse pas indemne.
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Une victoire que la lecture de cette oeuvre décalée et immersive, elle m'aura pris deux mois. Dogra Magra titre du livre, formule cabalistique nipponne, fait pour moi écho aux infinis retournements de cet étrange investigation. Notre narrateur (si tant est qu'il y en ait un) se réveille commotionné dans une cellule psychiatrique sans aucun souvenir, même de son propre prénom. Pris en charge par deux savants confrères, on tente petit à petit de lui faire prendre conscience de ses actes: il aurait tué 7 personnes, victime d'un crime d'un genre nouveau: "le crime à l'arme psychologique".

Mais voila, est-il vraiment ce qu'on prétend qu'il est? et puis, pris dans un tourbillon de faits, de preuves mais aussi de mensonges, la vérité se fait confuse, au grand plaisir des docteurs. Eux même ne seraient-ils pas peu ou prou mêlés à cette histoire ésotérico-scientifico révolutionnaire?! Beaucoup de questions tournoient, les styles, et les genres s'alternent et embrouillent le lecteur qui sent lui même poindre une certaine folie..

Magistral, décalé, Dogra Magra est un Ovni inclassable édité en 1932 au Japon, réédité bien des fois, étudié, et ici en France, traduit avec brio par Patrick Honnoré qui nous en laisse un gout indescriptible..
Lien : http://ranatoad.blogspot.com
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