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Critique de Biblioroz


– Un décor aux parfums d'encens, de fumier et de fleurs.
L'Angélus sonne, la Teuse s'affaire dans l'église, un petit coup de balai, un petit coup de plumeau et un petit coup de sang en voyant un énième trou d'usure sur la nappe de l'autel.
Si jamais vous ignorez le vocabulaire inhérent au cérémonial de la messe, Zola, très méticuleux, y pourvoit dès le premier chapitre en nous gratifiant à profusion de chasuble, manipule, amict, calice, corporal…
Alors que la petite église est déserte et que l'abbé Mouret est tout à sa dévotion, Zola nous éblouit en convoquant à cette messe le soleil et la campagne : un passage de toute beauté à lire et relire.
Le soleil est d'ailleurs omniprésent dans ce volume, il sera le catalyseur de la vie, de l'amour, de la naissance ou renaissance.
Nous sommes dans un petit village du Sud, les Artaud, une terre de passions brûlantes, comme le soleil implacable du Midi.
Et, caché derrière ses murailles, il y a le Paradou et sa puissance végétale, l'explosion de la vie.

– Les personnages aux tempéraments extrêmes.
Le frère Archangias est là, avec sa grossièreté et son profond dégoût des femmes et de leurs ardeurs, pour nous brosser un tableau de gueux et de gueuses qui se reproduisent sans honte et sans gêne. Un personnage bien cru qui vocifère tout au long du roman sur les filles éhontées et leurs jupes retroussées.
Serge, l'abbé Mouret, est là pour son amour de Dieu. C'est dans le silence, le soir, alors que la nature se fait complètement oublier, qu'il se perd dans ses prières et son adoration à la Vierge.
Il se fait parfois rudoyer par la brave Teuse, peut-être l'unique personne saine, équilibrée et attachante de cette histoire, avec son caractère franc qui ne juge pas.
On retrouve aussi Désirée pataugeant, se vautrant dans sa basse-cour, son innocence, sa gaité et son rire au milieu de ses bêtes.
Et il y a Albine, le souffle de la nature, son odeur de fleurs sauvages.

– Les envolées zoliennes.
Dans le tome précédent, Zola s'est peut-être retenu au niveau des descriptions exhaustives de lieu ou d'exaltations de ses personnages mais ici, il s'est amplement rattrapé !
Nous avons droit aux embrasements et divagations sur la pâmoison de l'abbé devant Marie, même si ses multiples Ave, pour ne plus convoquer dans ses pensés l'image entrevue du Paradou et de l'éblouissante Albine, restent sans effet.
Il nous ensevelit dans la végétation du Paradou où, pour que la profusion enivrante soit plus efficace, il fait côtoyer allègrement fleurs d'été et fleurs printanières, abricots et prunes bien précoces qui mûrissent en même temps que les cerises…
Pour la renaissance de Serge au côté d'Albine, il nous sort sa plume la plus voluptueuse mais avec une puérilité que je n'avais pas retenue lorsque j'avais dévoré ce roman à l'âge de dix-sept ans. Mais trente ans plus tard, difficile de savourer et de s'émouvoir sur ces jeux amoureux très, très enfantins et débordants de naïveté. Quel dommage !

– L'indiscutable talent zolien.
La lutte intérieure de Serge face à la tentation, l'amour meurtri d'Albine, la chair animale et humaine, la vie bouillonnante qui éclate puis disparaît, envahissent chaque page, chaque phrase, avec cette qualité de plume du 19ème siècle dont je ne peux me lasser, même si ce second rendez-vous entache tout de même le beau souvenir de jeunesse de ma première découverte.
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