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Critique de MrLambda


Friedrich Nietzsche, dans l'un de ses livres et avec la finesse qu'on lui connait définissait Zola de cette manière « Zola, ou le plaisir de puer ». C'est ce que durent penser les premiers critiques de l'Assommoir, qui firent de ce roman un succès à scandale. La réprobation fut à peu près unanime, à droite, on fustigeait cette «littérature de l'ordure», à gauche, on s'offusquait d'une vision aussi désespérante du monde ouvrier. À ses détracteurs qui se bouchaient le nez, on pourrait répliquer:

"L'Assommoir est une oeuvre qui pue trop la vérité pour vos petites morales bourgeoises, le premier roman sur le peuple qui ne ment pas et qui ait l'odeur du peuple. Une oeuvre qui nous place devant la laideur du monde tout en arrivant à la sublimer par des mots orduriers, par un langage argotique et grossier. Mais continuaient à détourner les yeux sur cette misère, continuaient à ne sélectionner de la réalité que vos croyances, Zola par contre, passera la postérité car justement, il les a déboulonné avec vigueur et impétuosité"

La recette est pourtant simple: Gervaise, femme travailleuse, brave, généreuse et complaisante, bien trop malheureusement, symbole de la figure d'un bas peuple vertueux. D'un succès bref et orgueilleux dans ce petit monde de commerçant et d'ouvrier, à la longue et lente descente aux enfers dans les rouages dantesque de la pauvreté. Elle fera face à tous les vices avant d'y succomber, l'alcool, l'égoïsme, le gaspillage, l'oisiveté, la fainéantise...

C'est le récit de ces hommes qui n'ont pas compris le monde, le récit de ces hommes qui n'ont pas réussit à s'adapter à un monde cruel, froid, menteur et vicieux. C'est un darwinisme social bien drapé qui nous est donné de voir en action. C'est le roman de la morale même de ce XIXème siècle montré par la déchéance totale d'une famille ouvrière. En plus de l'ivrognerie, de la fainéantise, il y a le relâchement des liens de la famille, les ordures de la promiscuité, l'oubli progressif des sentiments honnêtes, ca empeste et nous tient au tripe cette déchéance.

Mais il y a aussi l'alentour qui empeste, les ravages de cet assommoir de malheur sont au coeur du récit tout comme la diversité du monde ouvrier. Repasseuses, blanchisseuses, cardeuses, chaînistes, boulonniers, zingueurs, serruriers apparaissent, entre autres, dans le quartier de la Goutte-d'Or. Leurs travails présentent diverses facettes, et toutes ne sont pas noires: Gervaise est heureuse dans sa boutique et Goujet manie le marteau avec noblesse et plaisir.

Mais c'est malheureusement cette sordide réalité qui prend le pas sur tout. En quelques pages, Zola décrit avec puissance cette famille Bijard : le père, ivrogne, tue sa femme d'un coup de pied au ventre, Lalie, leur fille aînée, élève son frère et sa soeur, malade, elle meurt des sévices infligés par son père. Et c'est cette partie bien évidemment qui nous marque, cette force d'évocation, cette plume dénonciatrice faite pour choquer... Ordurier peut être mais juste, assurément.
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