Le plus beau symbole du silence ? La flamme d'une bougie dans la pénombre. sa flamme s'élève, elle brille, et pourtant elle va s'éteindre. Ce pourrait être aussi le symbole de notre action au monde. Cette chance éphémère...
J'aime aussi la neige qui tombe. Elle est moins silencieuse que le paysage de neige car elle émet alors une sorte de bruissement, un feulement léger, on l'entend tomber presque sans l'entendre. Mais cet amas de ciel qui se déverse en flocons blancs isole du monde et de ses bruits.
La neige, c'est du silence blanc.
- Tu dis pouvoir entendre les fourmis marcher ?
- Oui, mais seulement dans les lieux où le silence ambiant est assez fort.
- Tu entends donc le langage des fourmis, leurs signaux ?
- Elles tapent leur abdomen sur le sol pour communiquer. Cela forme donc une percussion tout à fait audible.
Dialogue entre l'auteur et Knud Victor, ornithologue danois. p103.
(...) la vraie beauté de l'amour réside dans le fait qu'il est grâce et effort, don et conquête permanente. Acte de foi.
La nature n'est pas muette. Mais, esperons que, dans le silence de nos consciences, le message passe.
Et j'aimerais ajouter, pour conclure, citer Guido Ceronetti, le Cioran italien qui écrit : "Si les modifications écologiques actuelles sont dues à des forces psychiques malignes en action dans notre monde (dans notre sphère), les combattre avec des moyens grossièrement matériels (le sophisme imbécile : la bonne technologie contre la mauvaise) ne peut servir qu'a nous faire bafouer par elles, parce que les moyens matériels et pratiques leur sont parfaitement indifférents. Ce qui pourrait les faire reculer est uniquement une rupture totale avec l'idée fixe dominante, à la suite de quelque prédication impensable, une conversion, une teshuva, qui agisse par les voix muettes sur les courants obscurs, brise des trames gigantesques de fils; ou encore la présence prophylactique d'un certain nombre de justes très puissants, conscients du péril et occupés à déjouer le coup.
Ceux qui aiment vraiment lire poursuivent leur méditation sur le sens de la vie à chaque moment de lecture volé au temps qui presse.
C'est le regard double qui importe : celui qu'on jette (comme un filet) sur autrui, celui qu'on porte (comme une charge) sur soi-même. Si le regard sur l'autre s'avère souvent féroce et en tout cas sans aménité, celui sur soi-même doit l'être aussi, car il est essentiel pour l'évolution de notre caractère de nous rendre compte du jeu de parade auquel notre moi égocentrique se livre sans cesse.
Si le "paraître" empiète sur l'être, notre personnalité vraie en souffre et la fausseté de ce jeu du je se révèle aux autres en pleine lumière. (...)
Nos gestes et nos silences trahissent notre jeu. À nous de savoir très bien jouer, auquel cas se pose un autre problème : quand on se retrouve seul, que reste-t-il ?
L'intellect qui n'est plus en phase avec l'intuition, la pensée qui se coupe du corps et donc de ses bases, et le concept qui ignore sa conception créent une raison qui s'aveugle, un discours qui ne s'écoute plus, une suite d'actions qui ne se considèrent ni ne se concerne plus.
Le silence vide d'un paysage de neige invite à la concentration, à la méditation et offre la possibilité d'un épanouissement.
"C'est cette force et ampleur qui manque à l'homme moderne. Ballotté entre les bureaucraties et les cirques, entre l'ennui et la distraction, incapable de se retrouver dans une civilisation sans culture profonde qui s'efforce de combler, ou du moins de camoufler, son manque fondamental en faisant beaucoup de bruit, le citoyen fuit tout ce qui ressemble au vide, où il pourrait, peut-être, rencontrer et contempler son "visage originel", et se complait, plus ou moins satisfait, mais jamais heureux, dans une médiocrité "bien remplie"."