C'est ici que tout se termine. Invincible est une œuvre qui aura réussi à vieillir avec son temps et à se renouveler. À faire avec talent la transition entre ses débuts : la BD Post-9/11, Patriot Act, etc. Et la fin de sa publication, en plein mouvement Me Too.
Je mettrais 4 étoiles à chacun des volumes de Invincible. Mais je mettrais 5 étoiles pour l'œuvre dans l'ensemble.
Avec le volume 3, Kirkman s'attaque à un truc que j'ignorais même que je voulais lire. Vous savez, les trucs de superhéros ont comme contrainte narrative de se dérouler sur une Terre qui est NOTRE Terre, seulement avec des gens superpuissants en plus. Mais il y a cette attente à ce que, à l'exception de ces êtres quasi divins, tout soit identique à notre réalité. Ce qui donne des trucs du genre : quotidiennement, des héros et des vilains causent des cataclysmes qui devraient complètement changer la culture et la politique du temps. Ou inventent des trucs qui devraient révolutionner la science, ou enrichir/appauvrir des groupes de gens. Ou régler la faim, la soif ou la maladie dans le monde. Mais tout ça est ensuite toujours discarté pour revenir à un statu quo qui est le nôtre.
Pas ici. Invincible en a plein le cul et décide de vraiment utiliser ses pouvoirs pour attaquer la criminalité à sa source. Et au diable le statu quo. On veut créer un monde meilleur et pour ça, il faut casser des choses et déplaire à des gens.
Et pour être honnête, c'est un truc que les Comics de superhéros ont souvent abordé. Mais toujours de la même façon : Un super héros veut changer le statu quo. Pour cela, il doit devenir un tyran et imposer sa volonté à tous. C'est pratique comme façon de faire. Ça démontre que les autres superhéros, qui conservent l'ordre établi, violentent les criminels paumés et protègent la propriété privée, sont en fait de grands démocrates.
Mais Invincible, ici, ose renverser l'expérience de pensée.
Tout ça m'amène à demander : c'est quoi, la thématique de Invincible, au final?
Mon hypothèse, c'est que Kirkman est lui-même est tiraillé entre une vision "réaliste" et une vision "idéaliste" de la politique. Il y a peu de personnages simplement bons ou mauvais, dans Invincible. C'est plutôt une palette de personnages qui ont chacun leur position quelque part entre :
1- Il y a nécessité de commettre des actes immoraux et de travailler avec des gens douteux afin d'être prêts pour la prochaine grande menace. (Extraterrestre, interdimensionnelle, etc.)
2- Il y a nécessité de travailler à l'intérieur d'un cadre moral pour éviter de devenir nous-mêmes comme ceux dont nous tentons de nous protéger.
Et, en alternance, chaque personnage aura raison et tort de tenir sa position, tout dépendant du contexte. Si ce n'était pas de la conclusion, je dirais que la position de Kirkman croit que nous avons de gens puissants défendants les deux positions afin d'être chacun le contre pouvoir de l'autre.
Mais, parlons de la conclusion justement.
Invincible devient un espèce de tyran éclairé qui libère et assure la protection de toutes les planètes de l'univers. Sans rien imposer à personne en terme de gouvernance sauf la paix. Rendant du même coup, toutes les infrastructures politiques centralisées, mises en place pour contenir des menaces extérieures, désuètes.
Weird, right?
Kirkman explique dans sa postface qu'il souhaitait un happy ending. Parce que, tout est tellement de la merde qu'une fin heureuse est le truc le plus subversif qu'il est possible d'inventer.
Mais c'est quand même amer comme fin heureuse non? L'espoir de l'humanité, c'est que pour une fois, une figure messianique toute puissante prenne le pouvoir tout en conservant des principes moraux.
Meh.
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