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3.94/5 (sur 33 notes)

Nationalité : États-Unis
Né(e) à : Los Angeles, Californie , le 05/02/1962
Biographie :

Amy-Jo Albany est la fille de Joe Albany (1924-1988), un pianiste de jazz, pionnier du be-bop et proche de Charlie Parker.

En 2003, elle publie un récit autobiographique, "Low Down : Jazz, came, et autres contes de la princesse be-bop" (Low Down: Junk, Jazz, and Other Fairy Tales from Childhood).

Le livre fut adapté sur les écrans en 2014, réalisé par Jeff Preiss, avec John Hawkes (Joe Albany) et Elle Fanning (Amy-Jo Albany).



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Flea & Amy-Jo Albany - What's In My Bag?


Citations et extraits (9) Ajouter une citation
L'amoureuse des caniches

Il 'était pas facile pour un enfant de gagner trois sous dans un hôtel où la plupart des gens n'avaient pas beaucoup plus qu'une pièce de cinq cents en poche. Mais à un moment, j'eus un boulot régulier qui consistait à promener le chien d'une vieille veuve, Mrs Avery. C'était une femme à l'allure patibulaire, toujours de noir vêtue, de la tête aux pieds, avec une voilette noire accrochée à son chapeau et de longs gants noirs en toutes saisons. Son chien, un vieux caniche de base, s'appelait Stein, souffrait de cataracte dans les deux yeux, et il avait l'haleine la plus infecte que j'ai jamais connue. Ils erraient dans les couloirs telles des ombres antiques et silencieuses, leur âge additionné atteignant facilement les 200 ans, en comptant en années de chiens. Tous les jours à 17 heures, j'allais frapper à la chambre 211 pour récupérer mes cinquante cents et Stein, pour une balade sur le boulevard, allant jusqu'à Winston Place avant de retourner à l'hôtel. Un samedi, je me présentais à 16 heures, dans l'espoir de pouvoir promener le chien plus tôt, puisque papa et moi allions au Star Theatre à la séance de fin d'après-midi pour voir Bananas. Je frappais deux ou trois coups à la porte, sans recevoir de réponse, alors que j'entendais la vielle chanson : "Somewhere just around the corner, there's a rainbow in the sky - so let's have another cup of coffe, and let's have another piece of pie" qui passait à plein tube sur le phonographe. Je me mis à imaginer que Mrs Avery, et peut-être Stein aussi, avaient "casse leur pipe", comme disait papa, et je me demandais si je devais aller chercher de l'aide, ou mener l'enquête moi-même. J'optais pour cette dernière option et découvris que la porte était, malheureusement, ouverte. Lorsque je passais la tête de l'autre côté du mur séparant l'entrée de la pièce principale, je fus témoin d'une scène étrange. Mrs Avery, assise sur le lit, complètement nue à part son chapeau et sa voilette, accompagnait la musique en chantant à tue-tête tandis que son fidèle caniche fourrait la gueule entre ses jambes blanches et filiformes, enfouissant sa truffe dans sa vieille et vilaine cramouille avec une vigueur prodigieuse. Je restais pétrifiée de fascination écœurée, tâchant de réfléchir à la manière de procéder pour ne plus jamais promener le caniche dépravé. Je m'esquivais discrètement et rentai dans notre chambre, où je composai la lettre suivante : "Chère Mrs Avery, maintenant les chiens me font éternuer. Je suis désolé de ne plus pouvoir promener Stein. Amy Jo." Elle n'essaya jamais de reprendre contact avec moi après cela, ne faisant qu'une apparition occasionnelle dans mes rêves perturbés. Je me sentais un peu coupable - je l'avais peut être laissée tomber, je ne l'avais pas aidée, mais au moins elle n'était pas complètement seule. Elle avait Stein pour lui tenir compagnie, et tout le monde ne pouvait pas en dire autant.

(P104)
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Souvent, je songeais que mon père était né de la musique – une mélodie entêtée qui prit la forme d’un homme. Il entendait de la musique partout, dans le grincement de ressorts rouillés du lit et le bourdonnement des mouches. Pour lui, les robinets qui gouttent étaient remplis de rythmes, comme les clignotements irréguliers du néon déglingué derrière notre fenêtre. Certains secouaient la tête et le prenaient pour un dingo, mais je n’ai jamais cru cela. Il mettait les enregistrements d’Art Tatum, d’Arthur Rubenstein et d’autres, et s’exclamait les yeux étincelants : « Qu’est-ce que c’est bath ! De toute beauté ! » On écoutait parfois des disques toute la nuit. Quand il n’y avait pas de concerts à la régulière, Papa avait de courts engagements dans des bars d’hôtel, où son jeu exquis n’était pas souvent, et c’est le moins que l’on puisse dire, pas apprécié à sa juste valeur. C’était toujours les mêmes types qui posaient problème – un ivrogne de passage, sans la moindre oreille musicale, d’ordinaire flanqué d’une quelconque pute flasque de bar d’hôtel. Ils chancelaient jusqu’au piano, appuyés sur les touches, et disaient un truc du style : « Et la pédale douce, vieux ? » ou bien « Tu connais celui-ci ? » avant de se mettre à siffler un air mièvre en crachotant dans l’oreille de papa des sifflements faux et puants. Il prenait chaque fois son mal en patience, ne prononçant jamais le moindre mot, mais moi qui le connaissais, je voyais son esprit se flétrir juste derrière ses yeux. Quand je sentais sa blessure, je m’imaginais être l’Abominable Docteur Phibes, échafaudant des morts diaboliques pour ces critiques de comptoir de bar, ou bien je me transformais en Rodan, attrapant mes victimes par leur cou gras et rougeaud avec mes talons-rasoirs. Je les emportais à tire-d’aile vers un caveau souterrain, où, bourreau masqué, j’attendais, prête à mettre fin partout à la vie des imbéciles et des chahuteurs qui ne reconnaissaient pas la beauté quand ils l’entendaient.
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Manger chinois sur un canapé déplié, regarder La Fille de Dracula après minuit, découvrir la sublime poésie des messages des biscuits chinois – « De par votre nature mélodique, le clair de lune ne rate jamais un rendez-vous » – la porte bien fermée avec la chaînette, et Papa à mes côtés : à coup sûr, le Paradis faisait pâle figure, et était même complètement ringard, par rapport à ce bonheur absolu.
Mais ensuite, l’Homme se présentait à notre porte en frappant à sa manière discrète, funeste, s’apprêtant à pisser partout sur notre paradis, et je levais les yeux pour m’assurer que le verrou était fermé. Un furtif coup d’œil en coin à Papa qui, ce soir-là, était victorieux. Je lui disais : « Un vampire ne peut entrer dans une maison que s’il y est invité. » Il souriait, m’entourant de ses longs bras, et me disait dans un murmure que nous n’inviterions pas le vampire, et donc, cette nuit-là, son âme restait indemne.
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Je ne supportais pas le bruit du vieil ascenseur, qui s’arrêtait et s’ouvrait aléatoirement toute la nuit, généralement sans passagers. Souvent, quand je le prenais, il s’arrêtait entre deux étages et s’ouvrait sur un mur en béton. Ralph, book de l’hôtel et ex-bijoutier borgne, me dit qu’il était hanté. Dans sa vie antérieure, à Las Vegas, il était le bijoutier de la mafia. Bagues de fiançailles et au petit doigt, gourmettes de baptême, broches pour mamas – Ralph était le bijoutier attitré de la mafia de Las Vegas. De temps à autre, on lui demandait de décharger des marchandises volées, de fondre de l’or et du platine, et même, au besoin, de tailler des pierres précieuses. Un jour, Ralph fut accusé d’avoir doublé un gros caïd – histoire qu’il ne démentit jamais. Le caïd envoya deux hommes de main lui enlever l’œil droit avec un couteau en guise de punition. Son œil droit était son outil le plus précieux, que ce soit pour vérifier la qualité d’une pièce à l’aide de sa loupe ou pour réaliser une gravure finement ouvragée. Il ne put être sauvé. Il dut le faire enlever et remplacer par un œil de verre que le médecin, un charlatan patibulaire, replaça à l’envers. L’on n’en voyait que le blanc, et c’était comme si l’iris coloré s’en allait rouler quelque part au fond de son crâne. Papa lui avait demandé pourquoi il ne l’avait pas fait remettre en place. « Ils peuvent sûrement le retirer et le faire pivoter ». Ralph secoua la tête : « Joe, c’est la croix que je dois porter. Du reste, c’est mon œil intérieur – il surveille mon âme. »
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Quand le mari de Grace fut relâché, on se perdit de vue. La porte était désormais toujours fermée, les lourds rideaux noirs tirés, et même les chats restaient à l’intérieur. Grace fut rayée de ma mémoire de la manière habituelle et opportune dont j’étais accoutumée. L’astuce, c’était de garder, dès le départ, suffisamment de distance entre soi et toutes les planches pourries transitoires qui jalonnent notre route, seule manière de supporter la déception éprouvée lorsque, à tous les coups, elles décideraient de vous rejeter.
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Souvent, je songeais que mon père était né de la musique – une mélodie entêtée qui prit la forme d’un homme. Il entendait de la musique partout, dans le grincement de ressorts rouillés du lit et le bourdonnement des mouches. Pour lui, les robinets qui goutent étaient remplis de rythmes, comme les clignotements irréguliers du néon déglingué derrière notre fenêtre.
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Maman apparaissait et disparaissait aussi souvent que le soleil par une journée couverte. Dès mes cinq ans, je me donnai beaucoup de peine pour tenter de me faire aimer d’elle. Je me transformais en un lamentable bouffon de cour qui essaie d’éviter la hache jetée par une reine blasée par le spectacle.
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