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3.21/5 (sur 27 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Naples , 1978
Biographie :

Angelo Petrella, né en 1978, a vécu à Rome, Paris et Sienne avant de regagner Naples, sa ville natale.

Docteur ès lettres modernes, poète, scénariste pour le cinéma et la télévision, collaborateur du quotidien Il Mattino et de la revue Vanity Fair, et écrit des romans noirs,

2006 "Cane rabbioso"
2007 "Nazi paradiso"
2008 "La città perfetta"
2012 "Le api randage"
2014 "Pompei. L'incubo e il risveglio"

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Bibliographie de Angelo Petrella   (3)Voir plus

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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Denis ouvrit son paquet et glissa une Rothmans entre ses lèvres.

Il faisait chaud. Une maudite chaleur d’été, et on n’avait pas encore terminé d’installer l’air conditionné au commissariat. L’unique ventilateur, au plafond, était trop éloigné de sa table.

Il se leva brusquement et ouvrit la fenêtre, crachant la fumée vers les pins. Il avait mal à la tête depuis le matin, et les deux Aulin qu’il avait avalés n’avaient eu aucun effet. Son taux de transaminases était trop élevé, le médecin lui avait ordonné de se calmer : « Bordel, laisse tomber ces saletés… Baise plus souvent ou fais du sport, remets-toi par exemple au tennis. Mais arrête le cognac.

– C’est du Macallan.

– Peu importe. Tu m’as compris. »

Denis avait acquiescé avant de poser l’argent de la consultation sur la table. Puis, en sortant du cabinet, il avait cherché le premier bar à vins pour acheter un flacon de 33 centilitres.

Il travaillait à Pausilippe depuis dix ans. Dix années de limbes : dix années à s’occuper de chiens enlevés, d’accidents de la route, de permis de conduire égarés et tout au plus d’un cambriolage.

Chaque soir, il repensait aux raisons qui l’avaient conduit là. Et il se torturait comme un de ces condamnés à la perpétuité qu’il avait lui-même flanqués en prison avant de gagner le lieu de son exil.

Mais c’était une autre époque. Une époque de gloire, de cuites fabuleuses, de baises dans les villas des riches. Une époque qui lui avait coûté la seule femme qu’il avait aimée : « Je te quitte, tu as un caractère de merde, Denis. » Il ne l’avait même pas accompagnée à la porte. Il s’était enfermé dans sa chambre, avait fracassé les meubles et le soir, ivre mort, avait dragué une Ukrainienne du côté de Mondragone. Il s’était fait sucer sans préservatif et avait attrapé une infection qui lui avait valu une cure interminable d’antibiotiques. Heureusement ni VIH ni hépatite. Du moins pas à cette occasion.

Ç’avait été aussi une époque d’argent facile. Les sociétés de paris sportifs en ligne n’étaient pas encore répandues. Il suffisait de presser les bookmakers ou de coincer deux ou trois joueurs pour les persuader de vous donner un tuyau gagnant ou de rater une passe au moment décisif. Le football était un cloaque. Le monde entier était un cloaque, mais Denis avait trouvé le moyen de surnager sans se salir.

Il entendit le téléphone sonner au standard. C’était rare en ce mois d’août où les millionnaires étaient en vacances et les maisons sans surveillance. Teresa passa d’abord l’appel au chef et, quinze minutes plus tard, apparut à la porte du bureau de Denis.

« Il te demande. Y a du boulot.

– Quel genre de boulot ?

– Je ne sais pas. Un 8,75, je crois.

– Oh ! putain. Du free jazz, enfin.

– À ce qu’il paraît. »

Elle tourna ses fesses vissées dans une jupe de bibliothécaire. Denis la fixa un instant. Une idée mauvaise lui vint à l’esprit.

« Et ce soir ? »

Teresa eut un geste agacé et poursuivit son chemin sans se retourner. Denis éteignit sa Rothmans, puis éclata de rire.

Le commissaire Lettieri l’attendait, les yeux rivés sur le bois de pins situé derrière le bâtiment. Il pinçait entre ses lèvres, qui dissimulaient ses dents jaunes, son habituelle Marlboro diminuée du filtre. Les cimes des arbres étaient sèches, comme fouettées par une maladie qui semblait avoir envahi tout le quartier, toute la ville. Pausilippe n’avait plus rien du buen retiro qu’il était vingt ans plus tôt : les riches étaient devenus avares, violents. Dangereux. Papiers sales, verre brisé, ordures et rats morts jonchaient le sol. Le dispensaire du coin était toujours plein. Personne ne le savait, mais il arrivait au commissaire adjoint Finamore de dératiser les rues à l’aide de son Beretta 92, les nuits de samedi et dimanche, quand il y avait beaucoup de bordel dans les bars de la via Petrarca ou dans les sandwicheries qui poussaient comme des champignons.
Son chef l’invita à s’asseoir et jeta à la corbeille un gobelet en plastique qui avait contenu du café.

« Je ne t’aime pas, tu sais, Carbone.

– Si je peux me permettre, c’est réciproque.

– Exact. Et ça ne me dérange pas. »

Il portait un complet bleu foncé, très élégant comme toujours, mais ses cheveux blancs, négligés, lui donnaient l’air d’un directeur d’hôtel.

« Il y a trop de favoritisme dans cette maudite ville. Le problème, ce n’est pas la Camorra, c’est le chômage. C’est le favoritisme qui a baisé Naples.

– Je suis d’accord.

– Des conneries. Tu es payé pour être d’accord. Ou plutôt, tu y es obligé. Car ce commissariat est le dernier endroit qui te reste avant de devoir chercher un emploi de maçon ou de barman. Un emploi que personne n’est prêt à te donner, entre parenthèses. »

Denis commença à balancer les jambes. Ces discours le rendaient dingue. Depuis qu’il connaissait le commissaire, il rêvait régulièrement de le ficeler à sa chaise et de lui tirer une balle dans le front. En attendant, il se contentait d’allumer une Rothmans et de lui souffler la fumée au visage.
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Quel fumier avait pu faire une chose pareille ? Il imaginait la panique et l’horreur que la petite avait ressenties juste avant que les mains la saisissent à la gorge ou que la lame lui déchire la peau. Il alluma une Rothmans et s’efforça de ravaler l’empathie qu’il éprouvait pour elle. Autrement, il le savait bien, une souffrance aiguë l’envahirait, suivie d’un sentiment d’impuissance et de frustration.
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Il était pour sa part un limier, il avait commis un tas d’erreurs stupides et en avait payé les conséquences en essayant de tenir la vie à une distance de sécurité. Mais son chef avait la morale d’un bouledogue, une morale qui ne correspondait pas nécessairement à celle des tribunaux. Il l’appliquait froidement sans se soucier des répercussions.
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Le meurtre n’avait probablement pas été commis sur place : il n’y avait ni empreintes ni traces d’aucune sorte par terre. L’examen des vêtements de la victime n’avait rien livré non plus, à l’exception d’un papier de bonbon glissé dans la poche du jean. Il fallait passer le ravin au crible et interroger tout le monde sur un rayon de cinq cents mètres. Difficile de ne pas remarquer un fumier s’acharnant sur une fillette.
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La vision d’une portion de mer, au loin, lui causa un fourmillement au creux de l’estomac. Ces maudits comprimés n’avaient aucun effet. Le technicien écarta le pan de tissu qui recouvrait le cadavre afin que Denis puisse voir le visage.
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