AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Anne Bernard-Lenoir (34)


L’arpenteur avait laissé la porte de la cabane entrouverte et s’était installé sur la galerie, face au soleil, pour laver ses chaussettes. L’individu qui l’espionnait depuis un moment attendit qu’il aille remplir son seau avec l’eau du ruisseau et que sa silhouette disparaisse au coin du baraquement pour s’introduire à l’intérieur avec l’agilité d’un jeune cougar.

Il y avait là une trentaine de lits, des armoires, des monceaux de draps et de couvertures pêle-mêle, des cordes pendues à des crochets et des instruments d’arpentage. Le fouillis était indescriptible. Chaque couche présentait une planche de bois sur laquelle on avait gravé les initiales de son occupant.
L’intrus se mit à marcher sur la pointe des pieds le long des rangées, en scrutant les écriteaux pour trouver les initiales « L.M. » ou « L.MA. ». Il devait tendre l’oreille et, au moindre bruit suspect, il se faufilerait sous un lit.

C’est en arrivant au fond de la pièce qu’il aperçut ce qu’il cherchait. Le nom était écrit au complet sur un morceau de cuir.

L’individu sortit son poignard et exécuta la tâche qui l’amenait dans ces lieux.
Commenter  J’apprécie          20
La première chose qu’il vit fut les empreintes de neige sale qui recouvraient le sol. Le garçon s’aperçut qu’il gisait dans la boue, au milieu de débris d’épine et d’écorce de bois mort. Il voulut tourner la tête et bougea la nuque. Un mal terrible enserrait son crâne comme dans un étau. Le froid intense avait engourdi ses bras et ses jambes. Ses habits étaient recouverts de cristaux de glace et la toile épaisse de son pantalon était devenue aussi rugueuse que la pierre.

Il se redressa et chercha en vain son chapeau de cuir noir qu’il ne quittait jamais. Divers objets l’entouraient. Une enclume brisée, des bûches moisies, une corde lovée sur elle-même et prisonnière du gel, un crochet, une couverture et deux caisses en bois. Il se trouvait au milieu d’un fouillis de matériel de construction, dans un abri. Il n’y avait aucune fenêtre mais les planches mal ajustées laissaient passer quelques rais de lumière. À l’extérieur, il faisait grand jour.
Commenter  J’apprécie          20
Si le combat féroce était nécessaire, les membres du clan d’Eadric sortaient boucliers, arcs, épées et haches à lame de fer. Mais le chef n’exigeait pas qu’on sème la terreur ni que soit perpétué le vol sauvage des trésors. Après tout, ses compagnons n’étaient que des commerçants, des fermiers, des pêcheurs, des forgerons ou des charpentiers qui se transformaient en guerriers tacticiens lorsqu’il fallait prendre les armes pour conquérir du butin ou des terres ! Par Odin, pourquoi fallait-il toujours qu’on en fît de terribles sanguinaires portant de stupides casques à corne ?
Commenter  J’apprécie          20
La jeune femme repartit en direction du port. Malgré l'aplomb dont elle venait de témoigner devant cette dame fort inquiète, elle ne se sentait pas du tout rassurée. Était-elle venue trop tard pour sauver la médecin des griffes des rôdeurs de l'Anse aux Sirènes?

Commenter  J’apprécie          20
Young avait dû parcourir une centaine de milles avant de rejoindre le Cariboo Trail. Ce sentier accroché à la falaise spectaculaire qui longeait le fleuve Fraser était si étroit qu’une seule mule pouvait y passer à la fois. Aux côtés du mulet qui transportait ses bagages, Young avait suivi cette voie escarpée jusqu’aux champs aurifères avec courage et détermination, luttant contre ses peurs et son mal des hauteurs.

Comme plusieurs des quatre mille chercheurs d’or à l’œuvre dans la région de Cariboo, il explorait les sables du ruisseau Lowhee. Il avait délimité son claim, sa concession minière, en le marquant de piquets signés de son nom. Puis, il l’avait enregistré, acquérant le droit d’y couper du bois pour se construire une cabane et se chauffer, de s’approprier le matériel abandonné et de chasser ou de pêcher pour se nourrir.

Young travaillait seul, fouillant le lit du cours d’eau à la recherche des paillettes, des brindilles et des grains d’or descendus des montagnes par les ravins ou accumulés dans les sédiments durant les périodes glaciaires. Il commençait par cribler les alluvions pour les débarrasser des cailloux et n’en garder qu’un fin gravier. Il lavait ensuite ce dernier à l’aide de sa batée. Accroupi au bord du Lowhee, il plaçait une petite quantité de ce sable grossier au fond du récipient de métal évasé qu’il tenait entre ses mains telle une large poêle et y ajoutait de l’eau ; il inclinait la panne et la brassait d’un mouvement circulaire pour détacher les sédiments. L’or, plus pesant que le sable et le gravier, se déposait au fond du récipient. Lorsqu’un éclat scintillait, Young recueillait les paillettes d’or. Il conservait le sable noir pour le sécher et extraire la poussière de ce métal si précieux.

En cet après-midi du mois d’octobre 1862, un gros morceau était tombé au fond de la batée. La pépite, du calibre d’un demi-pois, s’ajoutait à ses richesses. Dans moins d’une année, Young posséderait suffisamment d’or pour payer le transport en diligence qui le ramènerait chez lui par la nouvelle route de Cariboo, en construction le long du Fraser. Il pourrait acheter une petite maison dans la ville de Victoria pour sa femme, lui-même et leur fils, auquel il souhaitait léguer la belle montre à gousset qu’il venait de faire plaquer d’or.
Commenter  J’apprécie          10
Walter Buster, dit Wally Buster, est un sacré gaillard. Il mesure près de deux mètres. Il est fort et gras comme un ours. Grâce à sa carrure de séquoia géant, il n’y a pas beaucoup de monde qui l’embête. Ses vêtements sont tellement crasseux qu’ils sont devenus durs et lisses, aussi doux que les cuissots de « La Louve », la danseuse du saloon. Son chapeau en peau de poisson est tordu et sent la morue. Ses bottes difformes ressemblent à des navires à vapeur, et sont aussi lourdes et pointues que le bateau Islander.

Wally a une tête patibulaire. Ses yeux noirs et huileux sont trop grands pour leurs trous. Ça lui donne un air étonné. Ses cheveux sont mous, et noir et blanc comme un putois. Sa moustache taillée en équerre a la couleur de l’écureuil. Wally dit que sa mère était écossaise, et son père, une sale moufette. Ce n’est pas pour rire que Wally dit ça — il n’aime pas trop rire — ; c’est parce que son père lui a volé un jour un chariot et un cheval, et qu’il le déteste. À voir sa tête, on ne dirait pas que Wally aime les trucs de fillette ni les bijoux. N’empêche qu’il porte une médaille autour de son cou poilu. Elle est en argent, et le nom « W. Buster » est gravé dessus.

Ce qui gâche l’allure de Wally, c’est son haleine de carcasse. Un Chinois lui a fabriqué une fausse molaire en os de caribou qui se ferme avec une vis en argent. Elle lui sert de coffret où cacher ses trésors les plus chers. Quand Wally ouvre la bouche, c’est le diable qui vous chante une berceuse.

Mais ce qui est bien avec Wally, c’est qu’il ne parle pas beaucoup. Il est plutôt du genre qui frappe ou qui tire. Ça, il ne faut jamais l’oublier.
Commenter  J’apprécie          10

Le registre présentait des fiches décrivant les objets volés. Elles étaient bâties comme celle que Léo avait découverte. Parmi les œuvres dérobées figuraient des céramiques, des tableaux, des sculptures, des cloches, des bijoux, des montres, des pièces de monnaie et des médailles, des tapis et des tapisseries, des livres et des pages de recueils, des photographies, des lampes à huile, des objets religieux et même des tombes! Les objets disparus appartenaient à des particuliers, à des musées, à des institutions gouvernementales ou à des banques. Les fiches se comptaient par centaines.
— C’est complètement débile! s’exclama Félix.
Il était impressionné. S’il possédait le sens du détail et de l’analyse, Léo, lui, était pourvu d’un don réel pour la recherche. Même si c’est le hasard qui l’avait catapulté sur le site d’Interpol, c’était un fouineur dans l’âme, aussi efficace sur le terrain que dans l’espace virtuel d’Internet.
Les deux garçons réfléchissaient. Plusieurs minutes s’écoulèrent ainsi. La maison des Valois était plongée dans un silence total, mais on pouvait entendre des bourrasques de neige fouetter la vitre des fenêtres.
— L’orteil de Paros, murmura enfin Félix. Il me semble que la sculpture du musée ne s’appelle pas comme ça.
— Ah bon? s’étonna Léo. Je ne m’en souviens plus. C’est bizarre qu’elle ne s’intitule pas plutôt Le pied de Paros.
— À part le gros orteil, tout le reste semble avoir été grignoté par une souris.
— Une souris qui bouffe du marbre! s’esclaffa Léo.
— Cette œuvre d’art a donc été subtilisée en Écosse, chez des particuliers, le 19 octobre 1985, répéta Félix, incrédule.
— Tu te rends compte qu’on a peut-être découvert dans le musée de Québec un objet volé en Écosse?
— Demain, dimanche, le musée sera ouvert, conclut Félix, dont les yeux rougis trahissaient la fatigue. Je propose d’y retourner pour vérifier si L’orteil de Paros est la sculpture de l’exposition. Après tout, il se peut que quelque chose nous ait échappé.

Commenter  J’apprécie          10
Nous sommes dans une fâcheuse situation ! Mes amis et moi avons utilisé un engin auquel nous ne connaissons rien, nous avons brisé un objet appartenant à La Patoche et Louis est maintenant coincé en l’air, à quatre mètres du sol !

― Et ce n’est pas le plus préoccupant, ajoute Louis sur son perchoir.

― Qu’y a-t-il d’autre ? lui dis-je, de plus en plus nerveuse.

― Je commence à avoir très mal au ventre.

― Nom d’une carotte ! s’exclame Rose. Combien de pommes as-tu mangées ?

― Moins de dix, je crois…

― Qu’est-ce que vous fabriquez ici ? coupe une voix lointaine.

(…)

Sans trop réfléchir, je fais rouler mon fauteuil au-dessus des débris de la cabane, afin de dissimuler notre forfait.

Le jardinier s’approche et mon cœur bat la chamade. À soixante-neuf ans, je suis aussi anxieuse qu’une fillette qui vient de faire une bêtise.
Commenter  J’apprécie          10
— S’il y a une bête dans le coin, je préfère ne pas la voir, murmura-t-il.
Commenter  J’apprécie          00
— Il y a un passage absolument terrible où Vopiscus parle des filles, poursuivit Diane. Celui où il se demande : Aurait-il mieux valu que je ne sois qu’une fille et que notre père m’abandonne au fil des eaux du Tibre ? Cela me rappelle le chapitre d’un livre que j’ai lu avant qu’on parte en voyage. Il parlait de la famille, sous l’Empire romain. Je peux vous assurer que ce n’était pas rigolo, à l’époque ! Quand un enfant naissait, il était placé aux pieds du père. S’il s’agissait d’un garçon, le père le prenait souvent dans ses bras et le confiait à quelqu’un qui en avait la charge. Si c’était une fille, il ne s’en souciait pas ; il n’avait aucun contact physique avec le nouveau-né et donnait seulement l’ordre de l’alimenter. Le père pouvait renier l’enfant, fille ou garçon, sans avoir à se justifier ! On abandonnait alors le bébé dans l’eau, comme c’est écrit dans le texte. Il était laissé à lui-même et mourait de froid et de faim. Les filles étaient plus souvent laissées que les garçons…

— On pensait que les filles ne valaient rien, c’est ça ? voulut savoir Léo.

— En tout cas, qu’elles ne valaient pas grand-chose ! précisa Diane. Lorsque le père acceptait de l’accueillir dans sa famille, la fille n’avait aucun choix et devait se soumettre à ses ordres : son destin était de se marier, et son devoir, de faire des enfants. À cette époque, la femme n’avait tout simplement pas de droits. C’était terrible. Elle appartenait à son père et n’était que prêtée à son mari, qui pouvait la répudier sans raison.

— C’est complètement débile ! lâcha Félix.

— D’une extrême injustice surtout, rectifia Diane. Mais, à cette époque, la famille n’était pas comme aujourd’hui. Ce n’était pas l’amour ni l’affection ni les liens de parenté qui la soudaient. Elle n’était unie que par sa soumission à un chef. Et ce chef, c’était le père ! Point final.

— Et ça s’arrêtait quand ? s’enquit Félix.

— Qu’est-ce que tu veux dire ?

— Quand est-ce que tu pouvais ne plus respecter les ordres de ton père et faire ce que tu voulais ?

— Jamais, leur apprit-elle. À cette époque, que tu aies été une fille ou un garçon, ta vie dépendait de celle de ton père jusqu’à ce que ce dernier meure. Même les citoyens romains haut placés étaient soumis aux décisions de leur père tant que celui-ci était encore vivant. Cela explique pourquoi il arrivait souvent que des fils tuent leur père, par exemple.

— Génial, soupira Léo. Quand tu étais bébé, on pouvait te laisser crever sur un radeau ; quand tu allais à l’école, on pouvait te battre ou te fouetter comme un chien ; quand tu avais un père ou un fils, on pouvait t’assassiner.

— En tout cas, moi, j’aurais adoré avoir une petite sœur, dit Félix.

— Moi aussi ! ajouta Léo.

Les deux frères se replongèrent dans une énième lecture du rapport de fouilles de Pierre Van Ceunebroeck. Diane et Max échangèrent un regard triste. Félix et Léo avaient perdu leurs parents dans un accident de la route alors qu’ils n’avaient que huit et sept ans. Ils avaient demandé à leurs grands-parents de ne plus leur en parler. Ils n’avaient pas changé d’idée avec le temps. Ils n’abordaient jamais ce sujet. Un jour, Léo avait précisé qu’il ne gardait aucun souvenir de ses parents biologiques et que, désormais, Diane et Max étaient ses vrais parents, même s’il les appelait Mamie et Papy.
Commenter  J’apprécie          00
Le jour était à peine levé. Rome dormait encore, à l’exception de ses esclaves, déjà à l’ouvrage. L’homme ramassa les pans de sa toge, qui traînaient par terre, et se mit en route. Il n’y voyait que d’un œil, mais son infirmité ne le gênait pas pour avancer dans la pénombre. Avec le temps, il avait acquis des capacités visuelles étonnantes, qui s’apparentaient à celles du chat dans la noirceur.
Il fallait qu’il se dépêche s’il voulait traverser la cité avant l’heure des marchés. L’esclave qui porterait son message à son destinataire ultime l’attendait près du parvis du temple de la Liberté, sur l’Aventin, l’une des sept collines de Rome.
Il longea l’enceinte du cirque, un bâtiment imposant dédié aux courses de chars. Ces minutes lui parurent une éternité. Le pain et le fromage qu’il venait d’avaler lui pesaient sur l’estomac, comme s’il avait ingéré des billes en terre cuite. Ou était-ce la peur qui le tenaillait ?
Il pénétra enfin dans le faubourg. Ses ruelles et leurs insulae laisseraient bientôt place aux édifices monumentaux construits sur la butte, dont le temple de Diane, décoré de statuettes d’albâtre et bâti par Servius Tullius, l’un des sept rois légendaires de Rome.
Des odeurs immondes d’excréments parvenaient à ses narines alors que des eaux malpropres ruisselaient sur le pavé. Malgré la Cloaca Maxima, un égout géant qui desservait la ville et débouchait sur le Tibre, certains quartiers demeuraient insalubres, comme celui-ci.
Il bifurqua sur sa droite. La rue était déserte. Des colonnades de marbre blanc lui rappelèrent celles de la domus de Tillia, la villa où il avait travaillé. Il se souvint de son jardin luxuriant, de ses fleurs odorantes et des bassins d’eau translucide au bord desquels Tillia, une belle Romaine, aimait écouter de la musique. Il se mit à sourire sans pour autant paraître plus heureux.
La fin de sa mission approchait. Il s’apprêtait à contourner le dernier îlot d’insulae lorsqu’un bruit sec lui fit tourner la tête. Une silhouette se dessinait contre un mur, à quelques pas de lui. Il s’arrêta net, le souffle coupé. L’ombre inquiétante était immobile, telle une statue en bois d’ébène dressée sous un portique. Quelqu’un l’avait-il suivi ?
Il n’eut pas le temps de réfléchir davantage. La masse sombre se jeta sur lui, tandis qu’une longue lame entaillait sa chair.
Commenter  J’apprécie          00
On marquait des points de repère sur les blocs de roche, avant de procéder à leur dégrossissage. La taille dégageait une énorme quantité de poussière, obligeant maître et tailleurs à protéger leurs visages avec des mouchoirs. La technique d’ébauchage consistait à employer une masse avec laquelle on percutait une pointe. Les coups s’appliquaient avec franchise, perpendiculairement à la surface, sans trop de puissance, car il était facile de s’épuiser à la tâche. La pointe pénétrait dans la matière, fendillant le marbre sur quelques centimètres de profondeur en provoquant le détachement de gros éclats. Puis, on façonnait la forme avec d’autres masses, d’autres pointes et des ciseaux de sculpteur, jusqu’aux étapes de finition, dont le polissage constituait l’apogée. Le travail ne nécessitait pas de nombreux outils, mais une force physique considérable.

Le marbre de Paros était le plus translucide des marbres connus des maîtres. Son grain était d’une finesse inouïe, son blanc, d’une pureté sans pareille. De cette sublime matière étaient nées les trois déesses. Plus grandes que nature, elles se tenaient debout. Leurs cheveux formaient un chignon maintenu par un bandeau, dont plusieurs mèches s'échappaient et tombaient sur la nuque. Le haut de leur corps était dénudé, et le bas, revêtu d'une draperie roulée avec art autour des hanches. Leurs pieds dépassaient de l’ourlet de leur himation. Les bras et les mains de ces Vénus étaient à la fois musclés et ronds, et leur buste, d’une grâce émouvante .

— C’est bien, murmura le maître, qui vérifiait la finition des blocs constituant les trois chefs-d’œuvre. N’oubliez jamais que c’est de la rencontre entre la masse et l’espace que naît la sculpture. Ce qui importe le plus, c’est le vide autour de la forme.

Un tailleur soupira d’aise. Il vouait une vive admiration au vieux maître, même si celui-ci avait tendance à ressasser ses enseignements et ses bonnes formules. Il se sentait fier d’avoir été choisi pour travailler à ses côtés, dans cet atelier de marbre qui regroupait certains des plus grands artistes des Cyclades.

La pierre avait été lissée à la perfection. La lumière semblait vibrer à sa surface, accentuant l’effet tridimensionnel des statues. Il ne restait qu’à préparer les déesses pour leur voyage vers Mélos.
Commenter  J’apprécie          00
Young avait dû parcourir une centaine de milles avant de rejoindre le Cariboo Trail. Ce sentier accroché à la falaise spectaculaire qui longeait le fleuve Fraser était si étroit qu’une seule mule pouvait y passer à la fois. Aux côtés du mulet qui transportait ses bagages, Young avait suivi cette voie escarpée jusqu’aux champs aurifères avec courage et détermination, luttant contre ses peurs et son mal des hauteurs.

Comme plusieurs des quatre mille chercheurs d’or à l’œuvre dans la région de Cariboo, il explorait les sables du ruisseau Lowhee. Il avait délimité son claim, sa concession minière, en le marquant de piquets signés de son nom. Puis, il l’avait enregistré, acquérant le droit d’y couper du bois pour se construire une cabane et se chauffer, de s’approprier le matériel abandonné et de chasser ou de pêcher pour se nourrir.

Young travaillait seul, fouillant le lit du cours d’eau à la recherche des paillettes, des brindilles et des grains d’or descendus des montagnes par les ravins ou accumulés dans les sédiments durant les périodes glaciaires. Il commençait par cribler les alluvions pour les débarrasser des cailloux et n’en garder qu’un fin gravier. Il lavait ensuite ce dernier à l’aide de sa batée. Accroupi au bord du Lowhee, il plaçait une petite quantité de ce sable grossier au fond du récipient de métal évasé qu’il tenait entre ses mains telle une large poêle et y ajoutait de l’eau ; il inclinait la panne et la brassait d’un mouvement circulaire pour détacher les sédiments. L’or, plus pesant que le sable et le gravier, se déposait au fond du récipient. Lorsqu’un éclat scintillait, Young recueillait les paillettes d’or. Il conservait le sable noir pour le sécher et extraire la poussière de ce métal si précieux.

En cet après-midi du mois d’octobre 1862, un gros morceau était tombé au fond de la batée. La pépite, du calibre d’un demi-pois, s’ajoutait à ses richesses. Dans moins d’une année, Young posséderait suffisamment d’or pour payer le transport en diligence qui le ramènerait chez lui par la nouvelle route de Cariboo, en construction le long du Fraser. Il pourrait acheter une petite maison dans la ville de Victoria pour sa femme, lui-même et leur fils, auquel il souhaitait léguer la belle montre à gousset qu’il venait de faire plaquer d’or.
Commenter  J’apprécie          00
La note de l'auteure, en fin de roman (L'expédition Burgess):

Ce roman est une fiction. Les personnages et l’intrigue sont une pure invention. Cependant, plusieurs données historiques et scientifiques sont avérées. La plupart des lieux existent ou sont inspirés de topographies réelles.

Charles Doolittle Walcott découvrit d’étranges fossiles d’animaux marins le long de la crête des monts Wapta et Field en 1909. Les schistes argileux de Burgess peuvent être admirés au cours d’une longue randonnée dans le parc national Yoho, en Colombie-Britannique. Ces fossiles sont d’une grande diversité et exceptionnellement préservés. Leur examen permet de croire que l’évolution de la vie sur terre ne s’est pas faite selon le principe de la survie des espèces les plus fortes ni les plus aptes, mais par une diversification rapide des espèces animales et leur extinction au hasard.

Le premier train transcanadien passait au col Kicking Horse, sur le territoire actuel du parc Yoho.

La découverte de fortes quantités d’or en Californie en 1848 donna lieu à un véritable engouement des prospecteurs, et ce, jusqu’en 1856. La ruée vers l’or de Cariboo, la plus célèbre de la Colombie-Britannique, se déroula de 1862 à 1866 environ, et celle du Klondike, dans le Yukon, de 1897 à 1902.

Les Overlanders de 1862 ainsi que l’artiste William Hind ont existé. Le Carnet Overlanders de 62 de William Hind peut être consulté en ligne sur le site de Bibliothèque et Archives Canada.
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Anne Bernard-Lenoir (31)Voir plus

Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20279 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur cet auteur

{* *}