Citations de Antonin Artaud (995)
Je souffre que l'Esprit ne soit la vie et que la vie ne soit pas dans l'Esprit.
Gérard de Nerval, Edgar Poe, Baudelaire, Lautréamont, Nietzsche, Arthur Rimbaud, ne sont pas mort de rage, de maladie, de désespoir ou de misère, ils sont morts parce qu'on a voulu les tuer.
On ne sait que l'on n'est plus au monde que quand on voit qu'il vous a bien quitté. C'est un vrai désespéré qui vous parle et qui ne connaît le bonheur d'être au monde, que maintenant qu'il a quitté ce monde, et qu'il en est absolument séparé. Morts, les autres ne sont pas séparés. Ils tournent encore autour de leurs cadavres. Je ne suis pas mort, mais je suis séparé.
[...]
Le monde des sensat
est un arbre
basé sur
qui dort
morale morille
Merde.
Le que
le
distinctif
n'est pas l'imperceptible perdu
d'une pensée universelle
qui se retire d'un certain point
sur lui même
mais un
de Lucifer que j'ai foutu
en l'air
en un temps où j'en savais infiniment moins que maintenant.
[...]
Extrait de "ti largar"
Je mets le doigt sur le point précis de la faille, du glissement inavoué. Car l’esprit est plus reptilien que vous-même, Messieurs, il se dérobe comme les serpents, il se dérobe jusqu’à attenter à nos langues, je veux dire à les laisser en suspens.
Je suis celui qui a le mieux senti le désarroi stupéfiant de sa langue dans ses relations avec la pensée. Je suis celui qui a le mieux repéré la minute de ses plus intimes, de ses plus insoupçonnables glissements. Je me perds dans ma pensée en vérité comme on rêve, comme on rentre subitement dans sa pensée. Je suis celui qui connaît les recoins de la perte.
Qui suis-je?
d'où je viens?
je suis Antonin Artaud
Et que je le dise
comme je sais le dire
immédiatement
vous verrez mon corps actuel
voler en éclats
et se ramasser
sous dix mille aspects
notoires
un corps neuf
où vous ne pourrez
plus jamais
m'oublier.
Sur le plan social, les institutions se désagrègent et la médecine fait figure de cadavre inutilisable et éventé, qui déclare Van Gogh fou. En face de la lucidité de Van Gogh qui travaille, la psychiatrie n'est plus qu'un réduit de gorilles eux-mêmes obsédés et persécutés et qui n'ont, pour pallier les plus épouvantables états de l'angoisse et de la suffocation humaines, qu'une ridicule terminologie, digne produit de leurs cerveaux tarés. Pas un psychiatre, en effet, qui ne soit un érotomane notoire.
Héliogabale, arrivé à Rome, chasse les hommes du Sénat et il met à leur place des femmes. Pour les Romains, c'est de l'anarchie, mais pour la religion des menstrues, qui a fondé la pourpre tyrienne, et pour Héliogabale qui l'applique, il n'y a là qu'un simple rétablissement d'équilibre, un retour raisonné à la loi, puisque c'est à la femme, la première née, la première venue dans l'ordre cosmique qu'il revient de faire des lois.
(p. 109)
Vous êtes une fleur unique que le monde ne veut pas laisser vivre.
Que je soit antisocial est un fait, mais est-ce la faute de la société ou la mienne?
Chacun de leurs mouvements trace une ligne dans l'espace, achève on ne sait quelle figure rigoureuse, à l'hermétisme très calculé et dans celle-ci un geste imprévu de la main met un point.
Et ces robes aux courbes plus hautes que la fesse et qui les tiennent comme suspendus en l'air, comme piqués sur les fonds du théâtre, et prolongent chacun de leurs sauts comme un vol.
Ces cris d'entrailles, ces yeux roulants, cette abstraction continue, ces bruits de branches, ces bruits de coupes et de roulements de bois, tout cela dans l'espace immense des sons répandus et que plusieurs sources dégorgent, tout cela concourt à faire se lever dans notre esprit, à cristalliser comme une conception nouvelle, et, j'oserai dire, concrète, de l'abstrait
(Le Théâtre balinais)
-Et à quoi vous a servi, monsieur Artaud, cette Radio-Diffusion ?
-En principe à dénoncer un certain nombre de saletés sociales officiellement consacrées et reconnues.
Dieu est-il un être ?
S’il en est un c’est de la merde.
S’il n’en est pas un
il n’est pas.
Or il n’est pas,
mais comme le vide qui avance avec toutes ses formes dont la représentation la plus parfaite
est la marche d’un groupe incalculable de morpions.
Car on ne peut accepter la Vie qu’à condition d’être grand, de se sentir à l’origine des phénomènes, tout au moins d’un certain nombre d’entre eux. Sans puissance d’expansion, sans une certaine domination sur les choses, la vie est indéfendable. Une seule chose est exaltante au monde : le contact avec les puissances de l’esprit.
Je suis celui qui a le mieux senti le désarroi stupéfiant de sa langue dans ses relations avec la pensée.
Je voudrais faire un Livre qui dérange les hommes, qui soit comme une porte ouverte et qui les mène où ils n’auraient jamais consenti à aller, une porte simplement abouchée avec la réalité.
Un homme se possède par éclaircies, et même quand il se possède, il ne s’atteint pas tout à fait.
L’imbécilisation, l’infantilisation retardée ou au contraire le gâtisme précoce sont parmi les plus efficaces moyens d’action dont se servent tous les adeptes de la parturition à distance pour imposer à un homme leurs volontés. Et leurs volontés sont de me voir abdiquer moi-même et céder dans mon propre corps ma place à Monsieur tout le monde.
J’ai eu pendant des années d’effroyables migraines que je ne savais pas à quoi attribuer. Je sais maintenant que c’étaient des êtres occupés à me déguster. Car la digestion occulte de l’homme est un des principaux moyens d’action, une des plus pertinentes science dont se repaît l’humanité.