Citations de Brigitte Julien (53)
La voûte puissante sur laquelle repose le toit de lauzes d'une jasse (bergerie) ou la petite cazelle ronde servant d'abri au berger forcent l'admiration : quelle magnifique façon de se débarrasser des pierres qui gênent la culture de la vigne sur les côteaux ensoleillés!
Le paysan a su comprendre et saisir la vérité d'une nature, la densité d'une culture qu'il a sauvegardées, qu'il aime et qu'il féconde de son esprit et de son action.
André VALADIER
Comment expliquer cette passion pour sa terre, que ce soit chez celui qui y vit, ou chez celui qui en est éloigné? Tout simplement, parce que l'Aveyron est un département magnifique, d'une surprenante diversité : de climat, de paysage, de faune et de végétation, d'une fabuleuse richesse touristique, et que chez lui il se sent bien, chez lui il fait bon vivre.
Maurice Solignac
En ces rudes contrées
où dans le vent de solitude
l'arbre s'érige nu
comme un vivant déchiqueté
parmi les ronces et les roches
je suis à l'affût des lueurs
et des voix que la nuit
s'apprête à délivrer
Signaux indéchiffrables
torrents de la parole
de son pouvoir d'éternité
le sang des morts irrigue tout
Mais soudain quel silence
Jean Digot
A Mandailles, le quine réunit les grands et les petits, les jeunes et les moins jeunes.
Vaste région de hauts plateaux calcaires jurassiques (900 mètres d'altitude) bordée par les Cévennes, ce sont les grands causses (Sauveterre, Méjean, Noir, Larzac).les rivières ont creusé dans cette roche tendre de profonds canyons aux formes tourmentées : gorges du Tarn, de la Jonte et de la Dourbie. Plateaux arides et inhospitaliers pour qui les traverse une nuit d'hiver quand hurle la bise amoncelant le grésil en congères gelées sur les routes désertes.
Dans ces trois vallées, rien jamais ne change et pourtant à chaque endroit je m'arrête et je regarde, comme si c'était la première fois. Tout m'y ramène, tout m'y conduit. Ces rocs, ces falaises, ces rivières vertes et lentes ou blanches, cascadantes, mousseuses, grondantes. Ces chemins abrupts, rocailleux et qui sentent une liberté aux effluves balsamiques, toujours j'y reviens.
Dans cette vallée de la Dourbie, si quiète dans sa couette verte, comparée aux tortures de pierre du Tarn et aux sculptures de titan de la Jonte, celui qui n'aurait pas vu les deux gorges se croirait pourtant dans les Carpates.
Au mois de juin, sur les plateaux, le vent ondule une mer de cheveux d'ange (stipe pennée). L'été, l'air chaud embaume le thym et la lavande sauvage tandis que la "cardabelle" (carline à feuille d'acanthe) offre son coeur d'or annonciateur de beau temps.
La merveilleuse alchimie de la roche et de l'eau! L'eau, c'est elle qui a taraudé, sculpté, ciselé jour après jour depuis près de 20 millions d'années ces aiguilles pointant vers le ciel, ces champignons préhistoriques, ces arches gigantesques. C'est elle aussi qui sous terre fait croître ces stalagmites, ces concrétions translucides, ces draperies nacrées.
NATURE MORTE
Dans la maison natale
enclos de ma mémoire
sur la table déserte
mon regard s'est posé
Dehors
en lisière d'un bois
quelques chênes sans âge
attendent dénudés
l'appel du renouveau
Traversant la prairie
seul un ruisseau d'espoir
trace sillon de vie
Jean Digot
Ma terre d'ombre et de paroles
sillonnée à longueur des jours
par le silence de mes pas
Ma terre de ciel et de feu
draînée au travers des sanglots
sous le pavois de mes ferveurs
Ma terre d'amour et de joies
tu m'as porté. Je t'ai foulée
en cette marche inexorable
vers les frontières hors du temps
Jean Digot
Parlons-en du causse! Terre aride et caillouteuse mais où sait fleurir l'orchidée sauvage, où mûrit le genièvre, où chante la grive, où les bois de petits chênes exhalent la truffe, où la lumière du ciel si belle et si pure, à chaque heure différente, sait faire chatoyer la pierre que l'homme a patiemment taillée pour s'abriter : que ce soient ces nombreux mas où roucoulent les bandes de pigeons, où l'on cueille la guigne et la figue, où les cabecous s'affinent dans la cave, que ce soient ces gariottes et caselles, tradition ancestrale de l'abri agricole où l'homme a su apprivoiser la pierre, l'assembler sans mortier de ses mains nues pour y cacher sa solitude et son rêve.
Raymond LAURIERE
La pierre ocre du causse tout proche magnifie la création artistique de l'homme, lui donne toute sa profondeur et son éclat incomparable.
Raymond LAURIERE
Plus rien ne bouge, même pas l'eau de la Sorgues : il est minuit sous le pont de Saint-Affrique.
L'Aveyron, il faut aller à sa rencontre, savoir s'arrêter, admirer ses sites sans cesse renouvelés, quitter les grandes routes pour les petits chemins, ombragés, bordés de fleurs sauvages, de mûres ou de framboises, savoir écouter le chant des oiseaux, découvrir les innombrables "ribotels" (petits ruisseaux où se cachent les truites), les anciens moulin, utilisés autrefois pour moudre le blé noir, le seigle ou le froment, écraser les noix de la vallée pour en extraire l'huile, admirer les vieilles demeures de chez nous, recouvertes de lauzes, de tuiles ou d'ardoises et construites en pierre de pays : basalte, granit, calcaire, ou grès rouge.
Maurice Solignac
Au fond des gorges, sous les roches grises, frétille la belle truite blonde.
Les falaises de la Jonte et du Tarn abritent les nids des vautours fauves dont l'ombre plane au-dessus des gorges.
Sur le causse Noir (seul causse boisé), au pied de rochers travaillés par le temps, on trouve au printemps la duveteuse anémone pulsatile et, à le à la paresse.'ombre des pins sylvestres, un tapis de busseroles aux feuilles vernissées et aux baies rouges vous invite à la paresse.
L'arbre dressé sur la colline
ne ressent ni tristesse ni joie
Sans fierté ni certitude
il regarde le jour
il regarde la nuit
Face aux tourmentes qui l'assaillent
le protègent du temps
et de ce long silence
dont chaque tombe est le secret
Jean Digot