AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de C Pam Zhang (26)


Comme des milliers d'autres, il a cru que l'herbe jaune de cette région, ses reflets d'or au soleil promettaient des richesses plus étincelantes encore. Mais aucun de ceux qui sont venus creuser l'ouest n'a envisagé la soif inextinguible de cette terre.
Commenter  J’apprécie          190
Tu n'en as pas marre d'être regardée ?/ Mais là-bas ils feront mieux que me regarder. IIs me verront.
Or herbe or herbe or herbe
Commenter  J’apprécie          00
Est-ce donc cela, les grands espaces que cherchait Ba ? Cette impression qu'elles pourraient disparaître dans le paysage - une revendication de leurs corps comme l'invisibilité, ou le pardon ? Le vide à l'intérieur de Lucy rétrécit à mesure qu'elle rétrécit, insignifiante face aux montagnes, et la lumière dorée, filtrée par les chênes droits, devient verte. Même Sam se calme sous un vent qui a un goût de vie autant que de poussière.
Commenter  J’apprécie          00
Le monde est tellement beau qu'on en mangerait. Les cheveux du professeur Leigh sont de la soie de maïs quand il salue depuis le porche. Les lèvres de Ma sont aussi sombres que de la moelle.
"Je suis heureuse. Mais, Ma ? Pourquoi tu ne lui as pas dit où tu as appris à lire ?"
La maison disparaît de leur champ de vision. Pour toute réponse, Ma ôte son gant. Ses doigts farfouillent dans sa poche et ressortent maculés de terre. "Essaie ça", dit-elle en tendant la main vers la bouche de Lucy.
Celle-ci sent un soupçon d'odeur sucrée. Prudemment, elle lèche.
Commenter  J’apprécie          00
Lucy veut demander : Pourquoi pas maintenant ? Qu'est-ce que ça veut dire, plus grande ? Mais Ma sourit de nouveau, un sourire que le professeur Leigh n'a pas vu, car il n'a pas sa place dans ce salon baigné de lumière. Cela rappelle à Lucy que ce qui rend Ma belle, ce sont ses contradictions. La voix rêche contre la peau lisse. Le sourire qui enveloppe la tristesse- cette étrange douleur qui fait penser que les yeux de Ma sont à des kilomètres et des kilomètres. Débordants d'un océan de larmes.
Commenter  J’apprécie          00
Qu'est-ce qui fait un homme ? Elles font basculer la malle. est-ce un visage à montrer au monde ? Des mains et des doigts pour le façonner ? Deux jambes pour le parcourir ? Un cœur qui bat, des dents et une langue qui chantent ? A Ba, il ne reste plus grand chose de tout cela. Il lui manque même la forme d'un homme. Il a la forme de la malle comme le ragoût celle de la casserole
Commenter  J’apprécie          70
Sam s'approche du lac salé en courant. Le soir c'est comme si une grande lune blanche était tombée par terre, en laissant dans le ciel une plus petite qui s'élève, faiblarde.
Commenter  J’apprécie          20
Parce que cette contrée est une contrée de choses disparues. Une contrée dépouillée de son or, de ses rivières, de ses bisons, de ses tigres, des ses chacals, de ses oiseaux, de sa verdure et de sa vie.
Commenter  J’apprécie          20
Le soleil brûle ; l'eau abandonne Lucy a une vitesse stupéfiante. Où est-elle passée, toute cette eau perdue ? Un lac peut-il sans enterrement digne de ce nom, devenir un fantôme ? Un lieu peut-il se souvenir , et souffrir et fulminer contre ce qui le fait souffrir ? Elle pense que c'est possible. Elle pense : Pas moi je ne t'ai pas fait souffrir. Aide-moi.
Commenter  J’apprécie          20
Ba serre les poings. Les hommes derrière lui se rapprochent ,commencent à hurler. Tu ne sais pas compter, mon gars ? Dis plutôt que tu n'y vois rien. Pas avec ces yeux là ! Quelqu'un dit : Autant essayer de faire entrer une vache dans un citron.
Commenter  J’apprécie          20
« C’est quoi la vraie richesse ? »
Ce très beau roman, à l’écriture aérienne et poétique se décline en quatre parties. La première nous parle d’un présent où Lucy et Sam, filles d’immigrants chinois, fuient avec le corps de leur père décédé. Leur mère n’est plus là pour les aider, l’argent manque, le choix de partir s’impose. Dans la deuxième partie, ce sont les souvenirs avec la mère qui resurgissent. En troisième, le paternel s’exprime. Il raconte comment il a connu son épouse, les liens qui se créent entre immigrés. Et dans la quatrième partie, on revient au présent, un peu plus tard, cinq ans après. On découvre ainsi l’évolution de Lucy et Sam, comment leur passé a conditionné leurs choix de vie et la relation à la fois trouble, troublante, mystérieuse, envoutante qui les unit.
Au début de ce récit, les deux fillettes avancent vers l’avenir avec un mort. C’est bizarre d’agir ainsi mais c’est parce qu’elles souhaitent offrir un bel enterrement à leur père, Ba. Il faut trouver le lieu, le moment, ce qui ira le mieux. Tout le vécu avec lui les assaillent, le travail dans la mine, la faim, le froid…. Le désir d’apprendre de Lucy, avec un professeur, monsieur Leigh, qui l’observe car il écrit une monographie…. Elles sont là, dans ce pays de grands espaces et de cow-boys, de chercheurs d’or, de villes qui apparaissent au bout de routes poussiéreuses. Les rencontres qu’elles font sont source de questions et leur permettent de continuer le chemin. Elles espèrent, elles aimeraient, elles voudraient… mais elles ne sont à leur place nulle part, elles ne sont pas d’ici, pas de là-bas non plus. Elles s’appartiennent et n’ont pas de racines. Pour autant, ce n’est pas une errance, chacune a soif de vivre sa vie, de pouvoir décider.
Est-ce que ce sera possible ? Parfois, il est plus facile de se faire enterrer (« elle a laissé une part d’elle-même toujours plus grande se faire enterrer. ») C’est plus confortable que de lutter sans arrêt, sans obtenir de résultat, mais sans être vraiment libre, quitte à s’oublier soi-même …..
« Qu’est-ce qui fait un chez soi ? » Lucy et Sam sont en recherche perpétuelle, avec un besoin constant d’exister, de trouver leur place, de prouver qu’elles ont le droit « d’être » tout simplement.
Elles pensent à leurs parents, à ce qu’ils ressentaient :
« Lui, c’était un monde perdu, voué à rendre le présent et l’avenir bien ternes en comparaison. Elle, c’était un monde si étroit qu’il ne pouvait accueillir qu’une seule personne. »
Il m’a fallu trois ou quatre pages pour rentrer dans ce récit. Au début, j’ai été un peu désarçonnée par le rythme, certaines phrases très courtes, d’autres plus longues, un style parfois épuré puis des détails, des descriptions de la nature qui campent un paysage, le rendant plus réel, plus visuel. Mais très rapidement, je me suis laissée porter par l’écriture (merci au traducteur) et par l’histoire singulière, belle et douloureuse comme une longue complainte, formée de couplets sombres et tragiques mais emplie d’un désir farouche de liberté, de vivre. C’est une lecture bouleversante, qui laisse une trace une fois la dernière page refermée. Quelle belle découverte !
Commenter  J’apprécie          00
Lui, c’était un monde perdu, voué à rendre le présent et l’avenir bien ternes en comparaison. Elle, c’était un monde si étroit qu’il ne pouvait accueillir qu’une seule personne.
Commenter  J’apprécie          00
Il était une fois où ces collines étaient désolées. Et ce n'étaient pas encore des collines. C'étaient des plaines. Pas de soleil, uniquement de la glace. Rien ne poussait, jusqu'à l'arrivée des bisons. Certains disent qu'ils ont franchi un pont de terre par-dessus l'océan de l'Ouest, et que le pont s'est effondré sous leur poids.
Les sabots des bisons ont labouré la terre, et leur souffle l'a réchauffée, et dans leurs gueules ils transportaient des graines, et dans leurs peaux des nids d'oiseaux. Leurs sabots ont creusé des rigoles pour retenir les rivières, leurs souilles ont fait des vallées. Ils se sont répandus à l'Est, au Sud, par les montagnes, les plaines et les forêts. A travers tout les territoires, si bien qu'il fut un temps où ils parcouraient presque chaque arpent de ce pays, plus grand à chaque nouvelle génération, s'étirant jusqu'à emplir le ciel pur.
Et puis, bien après les Indiens, sont arrivés des hommes nouveaux, venus d'une autre direction. Ces hommes semaient des balles à la place des graines. Ils étaient chétifs et pourtant ils ont repoussé les bisons, toujours plus loin, jusqu'à ce que le dernier troupeau se retrouve encerclé dans une vallée près d'ici. Une jolie vallée, traversée par une rivière profonde. Les hommes voulaient capturer les bisons plutôt que les tuer. Ils voulaient les apprivoiser, et les mêler à leur bétail. Les rapetisser.
Mais, au lever du soleil, les hommes ont vu que les collines avaient grandi pendant la nuit.
Ces collines étaient les corps de mille milliers de bisons morts qui avaient marché dans la rivière et s'étaient noyés. Les collines sentaient si mauvais que les hommes ont dû partir. Même après que les oiseaux ont nettoyé les bisons, la rivière n'a plus jamais coulé, et ce qui a repoussé entre les os n'était plus la même herbe verte. Elle était jaune, maudite, sèche. Impropre à la culture. Personne ne pourra habiter ces collines comme il convient tant que les bisons n'auront pas décidé de revenir.
Commenter  J’apprécie          110
Un jour qu'elles chevauchent, tout à coup la lumière disparaît à moitié. Elles lèvent les yeux à travers la pénombre. Il est là. Comme si un pan des collines avait bougé, s'était rapproché. L'une ou l'autre respire-t-elle ? Même le vent s'arrête. Vieille créature avec sa fourrure devenue blonde aux extrémités, corps brun frangé d'or. Ses sabots sont plus larges que la main de Lucy. Elle lève la sienne pour comparer. La maintient en l'air pour saluer. Puis le bison bouge, lâche son doux souffle d'herbe, et son poil effleure la paume de Lucy. A ses côtés, Sam lève aussi une main. Le bison passe et repart se fondre dans les collines qui ont sa couleur et sa forme. Je croyais qu'ils étaient tous morts. Moi aussi.
Commenter  J’apprécie          194
Tout ce qui comptait, ma petite Lucy, c'est qu'il fut un temps où ta ma n'avait d'yeux que pour moi.
J'ai oublié plein de choses de ma vie : le visage de Billy, la couleur des pavots, comment dormir paisiblement pour ne pas se réveiller avec les poings serrés et déjà une douleur dans les épaules, le mot pour dire l'odeur de la terre après la pluie, le goût de l'eau propre. Et il y a d'autres choses que j'oublie dans la mort : quand je balançais mon poing et que je sentais les phalanges craquer, la boue qui clapotait entre mes doigts de pied, ce que ça faisait d'avoir des doigts, des orteils, et la faim. Je pense qu'un jour viendra où j'oublierai tout de moi, après que Sam et toi m'aurez enterré - non pas seulement mon corps, mais le peu de moi qui est dans votre sang et votre langage. Mais. Même si un jour je ne suis plus qu'un vent errant dans ces collines, je pense que ce vent se souviendra encore d'une chose et la chuchotera à tous les brins d'herbe : ce que je ressentais quand ta ma ne regardait que moi. C'était si puissant qu'un homme plus faible aurait pu s'en effrayer.
Commenter  J’apprécie          70
Voilà ce qu'elles trouvent au crépuscule dans le bosquet :
Un feu mourant.
Un cheval attaché à un pieu.
Un homme mort à moitié enterré sous des feuilles.
Pas de puanteur encore, bien que des mouches bourdonnent autour de sa barbe. Il est emmitouflé dans un manteau fait de plusieurs peaux, comme quelque créature sortie d'un conte. C'est l'heure du chacal, quand les contours s'estompent et que la frontière se brouille entre le réel et l'irréel.
Commenter  J’apprécie          170
Mort, la mort, est mort.
Commenter  J’apprécie          81
Des bouts d'os de bisons, elles en ont vu le long de la piste, mais jamais en entier. Au fil des ans, les voyageurs ont brandi maillets et couteaux, ennui et besoin, prenant ce qui était facile à trouver pour faire du feu, ou des piquets de tentes, ou pour sculpter à leurs heures perdues. Ce squelette-là n'a pas été touché. Les orbites scintillent - un jeu d'ombres. Sam pourrait marcher dans la cage thoracique intacte sans se baisser.
Lucy imagine les os habillés de poils et de chair, l'animal debout. Ba prétendait que ces géants parcouraient jadis les collines, et les montagnes, et les plaines au-delà. Trois fois plus grands que n'importe quel homme, et néanmoins d'une douceur inimaginable. Un fleuve constant de bisons, disait Ba. Lucy laisse cette image ancienne l'inonder.
Commenter  J’apprécie          91
Le soleil les vide. Milieu de la saison sèche, la pluie désormais lointain souvenir. Leur vallée n'est que terre nue, coupée en deux par un tortillon de ruisseau. De ce côté sont les pauvres cahutes des mineurs, de l'autre les bâtiments des riches avec de vrais murs, des fenêtres en verre. Tout autour, qui encerclent, les collines infinies dorées par la chaleur ; et cachés parmi les hautes herbes desséchées, les campements disparates des prospecteurs et les Indiens, les groupes de vaqueros, de voyageurs, de hors-la-loi, et la mine, et d'autres mines, et plus loin, et plus loin.
Commenter  J’apprécie          120
Puis vient la nuit où Nellie manque de s'évader.
Lucy ne saura jamais exactement comment, mais elle aime à penser que ç'a commencé comme la plupart des évasions : au cœur de la nuit. Ce qu'on appelle encore l'heure du loup. Des décennies auparavant, avant que les bisons soient massacrés et que meurent aussi les tigres qui s'en nourrissaient, un cheval solitaire, dans ces collines, eût frémi de peur face aux carnivores venus saliver. Bien qu'il n'y ait pas de tigres, Nellie tremble comme ses ancêtres. Elle est plus intelligente que la plupart des gens, disait son maître. Elle sait qu'il est des objets à craindre pires que n'importe quelle menace vivante. L'objet sanglé sur son dos, par exemple, cette chose morte dont elle ne peut se débarrasser. Nellie attend que les étoiles regardent à travers leur judas dans le ciel et que les eux dormeuses ne bougent plus. Puis elle se met à creuser.
Nellie creuse pendent les heures du loup, du serpent, du hibou, de la chauve-souris, de la taupe, du moineau. A l'heure où les vers de terre s'agitent dans leurs trous, Lucy et Sam sont réveillées par les coups de sabot de Nellie contre le piquet.
Commenter  J’apprécie          130



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de C Pam Zhang (52)Voir plus

Quiz Voir plus

Normandie : 1870

"Pendant plusieurs jours de suite des lambeaux d’armée en déroute avaient traversé la ville. Ce n’était point de la troupe, mais des hordes débandées. Les hommes avaient la barbe longue et sale, des uniformes en guenilles, et ils avançaient d’une allure molle, sans drapeau, sans régiment. […] Les Prussiens allaient entrer dans Rouen, disait-on." [...] Il y avait cependant quelque chose dans l'air, quelque chose de subtil et d'inconnu, une atmosphère étrangère intolérable, comme une odeur répandue, l'odeur de l'invasion. Elle emplissait les demeures et les places publiques, changeait le goût des aliments, donnait l'impression d'être en voyage, très loin, chez des tribus barbares et dangereuses." La débandade de l'armée française, l'occupation prussienne en Normandie, le cortège des horreurs de la guerre de 1870 servent de motif à de nombreux contes et nouvelles de Maupassant où sa férocité s'exerce avec maestria dans la plus connue et réussie de toutes dont le titre est le sobriquet de l'héroïne principale : "Boule de Suif". Mais quel est l'état-civil de Boule de suif dans le récit ? 👩‍🦰👩‍🦰👩‍🦰

Jeanne Vallin
Élisabeth Rousset
Charlotte Tuvache

10 questions
1 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , Guerre franco-allemande (1870-1871) , littérature , nouvelles réalistes , contesCréer un quiz sur cet auteur

{* *}