Transcrire un modèle est le travail où l'on mesure le mieux les capacités d'un auteur. En ce domaine le plus grand fut Shakespeare : pensez aux passages de Plutarque qu'il a repris sans presque rien changer dans « Antoine et Cléopâtre ». […] Chez Shakespeare [...] un rien, un souffle, un rythme suffisent pour tout porter à un niveau supérieur, dans l'éclairage héroïque qui est le sien.
(Rilke parlant de S)
Au temps où, âgé de six ans, il vivait auprès de sa mère, il possédait un petit lapin blanc. Au cours d'une cure qu'il faisait avec elle dans une de ces petites villes thermales démodées que compte la Bohême, le petit animal tomba malade. Rilke était inconsolable. Or, la ville d'eaux se trouvait sur l'un des domaines des Tour et Taxis et un jour, au passage de la princesse, à laquelle des paysans adressaient toutes sortes de doléances, le petit Rilke lâcha brusquement la main de sa mère, courut vers la princesse, qu'il croyait investie d'un pouvoir supérieur, et la pria de guérir son lapin.
Cette petite histoire d'enfant, émouvante et drôle, resta gravée dans la mémoire de la princesse, et c'est pourquoi, lorsque quelqu'un évoqua en sa présence le pauvre jeune poète, son visage s'éclaira, et elle se montra bien disposée à son égard.
Une boutique étroite et obscure où les livres s’entassaient des deux côtés, jusqu’au plafond. Ils occupaient aussi les longues tables branlantes et recouvraient le sol dans les coins.
De même que les tyrannies s'élèvent, grandissent et se consolident, de même grandit en leur sein le germe fatal d'où sortiront pour elles le trouble et la ruine. Les auteurs ne font pas assez ressortir un contraste plus frappant : en ce temps là, Florence était occupée du développement le plus large des individualités, pendant que les tyrans n’admettaient d'autre individualité que la leur et celle de leurs plus proches serviteurs.
L'illégitimité est le vice originel dont le pouvoir des princes est entaché; il s'y attache une sorte de malédiction contre laquelle rien ne peut prévaloir.
Dante (...) établit une ligne de démarcation entre le moyen âge et les temps modernes. Chez lui l'esprit et l'âme font tout d'un coup un pas immense vers la connaissance de leur vie la plus intime. Mais ce que la Divine Comédie renferme en fait de révélations de ce genre est absolument incommensurable; il faudrait parcourir tout ce grand poème , chant par chant, pour bien montrer tout ce qu'il vaut à cet égard.
C'est ainsi qu'on formera, à force d'intelligence et de travail, une langue qui ne sera pas, il est vrai, le vieux toscan pur, mais qui sera italienne, qui sera riche comme un délicieux jardin plein de fleurs et de fruits. (...) Comme la langue était devenue pour la société une question d'intérêt commun, les archaïstes et les puristes virent en grande partie échouer leurs efforts. Il y avait dans la Toscane même trop d'auteurs remarquables et d'hommes distingués qui méprisaient leurs prétentions ou qui même s'en moquaient. (...) Il suffit de l'apparition et de l'influence d'un écrivain comme Machiavel pour mettre à néant ces toiles d'araignées; archaïstes et puristes furent impuissants contre cette pensée vigoureuse, contre cette expression si simple et si claire.
Qui sait ce qui menaçait la papauté elle-même à cette époque, si la Réforme ne l'eut sauvée ?