Caroline Gaynes

J’ai trop subi le jugement de mes proches, je les ai trop souvent vus estimer les gens à leur statut social et non à leurs valeurs. J’aurais aimé avoir les arguments pour leur répondre, pour me défendre, mais je me suis toujours tue et qui ne dit mot consent. La première fois que j’ai vu plaider Maître Ginsburg, je me suis dit : “c’est ça que je veux faire plus tard !” Plaider, convaincre les autres avec mon éloquence. Je sais les conséquences qu’ont les mots, je connais leur poids pour l’avoir subi sous mon propre toit. J’aurais voulu plaider ma cause, mais à défaut, je vais plaider celles des autres.

Certains appelleraient cette opération : la mission suicide, mais qui mieux que les quatre fantastiques pour triompher ? L’état-major nous a donné l’ordre de débusquer un certain William Wagner, plus connu sous le nom de Lord W. D’après nos informations, la ville tout entière lui appartient. Il contrôle toute la zone, chacun lui obéit, ceux qui se sont rebellés ne sont plus là pour en témoigner. Un dictateur craint de tous, arrivant par je ne sais quel subterfuge à s’échapper. Plusieurs escouades ont été mandatées pour l’empêcher de nuire… sans succès jusqu’à ce jour. À croire qu’il a des yeux partout. Mon équipe ne connaît aucun échec, d’ailleurs je me demande bien pourquoi ils n’ont pas fait appel à nous avant.

Je sais qu’il est bien trop tôt et qu’agir de la sorte me condamnerait à une mort certaine. Je suis bien plus malin, plus expérimenté, plus déterminé pour ne pas commettre ce genre d’erreur. Ma soif de savoir n’aura pas raison de moi, pas ce soir du moins. Pas après tout ce que j’ai mis en œuvre pour en arriver là.
Il a fallu des jours pour que je trouve comment l’approcher, des mois à épier ses moindres faits et gestes. Elle est si méfiante, troublante. Je devais faire en sorte que Sunshine croie à une rencontre fortuite. Elle ne doit pas avoir de soupçon sur mes intentions. Je dois absolument gagner sa confiance et réussir à l’utiliser pour atteindre mon objectif.

Je n’ai jamais cru au hasard, pour la simple et bonne raison que tout dans ma vie a toujours été prémédité. À commencer par le jour de ma naissance : césarienne planifiée. Ma mère s’amusait à dire à qui voulait bien l’entendre que j’étais bien en sécurité dans son ventre et que je viendrais quand je le désirerais. Ce n’était clairement pas l’avis de mon père qui était constamment très occupé. Étant attendu à l’autre bout du pays pour affaires, il avait décrété qu’il fallait que je sorte le quatre octobre. Encore un de ses caprices. Sa liste a un début, mais à ce jour, aucune fin.

La silhouette de Regard de glace se matérialise devant moi, des flammes rougeoyantes dansent dans ses yeux. Ses mains forment des poings le long de son corps. Ses muscles thoraciques se soulèvent au rythme de ses profondes inspirations. On dirait une bête sauvage prête à charger sa future victime.
Il ne faut pas être devin pour savoir qu’il est capable de ne faire qu’une bouchée de Sam.

On a tous notre petit caractère, mais le mélange est un véritable succès. Quand l’un de nous n’a pas le moral, vous pouvez être sûrs que le téléphone arabe s’active. Dans l’heure, vous voyez débarquer tous vos amis avec des tonnes de choses à manger et nous voilà partis pour une soirée déconnade. Je les considère comme ma famille, ils font partie de moi.

Il était trop exigeant et excessivement jaloux. Ça ne nous empêche pas de remettre le couvert parfois, surtout lorsque l’alcool a pris possession de nos corps. Il est charmant et très attentionné quand on passe la porte de sa chambre. Je finis par embrasser Dana. Elle fait une tête de plus que moi. Nous sommes physiquement opposées. Alors que je suis petite aux yeux bleus avec des petites formes, çà et là, elle est grande, brune, avec des prunelles d’un vert irréel, outrageusement bien maquillée. Elle travaille dans le monde de la mode, étonnant, non ? Elle est l’égérie d’une marque de sous-vêtements ; en même temps, vu sa plastique, ça ne m’étonne pas. Mary me répète que je suis magnifique, mais je doute de son objectivité de meilleure amie.

Au début de notre collaboration, je n’étais pas à l’aise avec son comportement, y compris pour dire bonjour, il avait besoin de me toucher. Et puis, quand j’ai appris qu’il était gay, je n’avais plus de doutes sur ses intentions.

— Vos atouts sont incontestables, mais… c’était trop beau pour être vrai, je suis désolé de vous dire que vous n’êtes pas mon genre. Vous me voyez navré de refuser cette charmante proposition, Mademoiselle Lopez.
Je tombe des nues. L’arroseur arrosé. Et dans ce cas précis, c’est carrément une douche froide que je prends sur la gueule. Qu’il aille au diable !

Il me semble que le temps tourne au ralenti. Je suis dans l’expectative. J’imagine déjà la suite : je lui donne mon numéro de téléphone, et le jour où il m’appelle, je trouve une excuse bidon pour lui fausser compagnie. Je lui fais le coup plusieurs fois, puis de lui-même, il finira par abandonner.

Je me demande quel goût a sa langue. Je fais tout pour ne pas la fixer, mais l’attraction est plus tenace que ma raison. Cette soudaine proximité devrait m’effrayer, mais au lieu de cela, elle m’attire comme un papillon le serait par la lumière. J'humecte mes lèvres asséchées. Andy ne perd pas une miette de mon geste sans équivoque. Le goût du danger a pris une tout autre saveur. Andy fait naître un côté sauvage que je ne me connaissais pas.

Il continue de m’observer, sans desceller ses lèvres si charnues. Je suis quelque peu déstabilisée, mais je ne laisse rien paraître pour autant. Après quelques secondes, ses traits semblent s’adoucir. Ce con est ferré comme un poisson.
La tension monte quand il incline dangereusement son visage vers le mien. Assez proche, pour sentir la caresse de son souffle chaud sur ma bouche. Mon cœur se met à battre avec plus de vigueur.

Comment un homme aussi antipathique peut manipuler à sa guise mon thermostat corporel ? Dans ce jeu, c’est toujours moi qui mène la danse, mais ce mufle a trouvé le bouton ON. Je récupère le contrôle en stoppant toute émotion et me remets dans mon rôle de séductrice sans cœur.

J’ai la drôle de sensation qu’il tire un malin plaisir de sa position de force, se régalant de me pousser à bout. Bon d’accord, je ne suis pas tendre non plus, mais ce n’est pas une raison.

Avec un peu d’imagination, on pourrait apercevoir de la fumée sortir de ses narines, tel un taureau s’apprêtant à charger. Son corps est si tendu que sa chemise menace de craquer sous ses muscles puissants.

Avec une jupe courte, j’aurais peut-être eu une petite chance. J’ai toujours réussi à user de mes charmes pour me sortir d’une situation délicate quand j’étais plus jeune. Enfin ça, c’était avant. Je grimace en me remémorant cette sombre partie de mon existence.

On passe la majorité de notre temps à répondre à ses exigences… Et Dieu sait qu’il en a des loufoques. Il nous appelle dès qu’une idée lui traverse la tête. Parfois, je me demande s’il avait réellement besoin de nos services pour promouvoir sa marque de vêtements de luxe.

Son regard est dur, rempli de haine.
Plus désagréable, tu meurs !  Comment peut-il être le fils d'une aussi gentille femme !?

Je pourrais facilement me prendre d'amitié pour cette vieille femme, à la fois douce, rafraîchissante et avenante. Si toutes les personnes que je rencontrerai durant mon séjour pouvaient être comme elle ...
Jusqu'à présent, j’ai toujours été très hostile aux personnes âgées, à commencer par ma voisine de palier, madame Perdruchon. Cette vieille bique est une vraie calamité. Alors qu’elle ne se gêne pas pour pousser au maximum le son de sa télévision tard le soir et le dimanche, à sept heures du matin, elle ne se prive pas de me reprocher tout bruit qui émanerait de chez moi, d’une porte qui claque (« elle va finir par se dégonder, si ça continue ») à ma machine à laver (« je connais un plombier, si vous le souhaitez »).
Bref, une vraie peau de vache.

Comme la majorité des femmes, je me trouve un million de défauts : trop petite, pas assez de poitrine par-ci, fesses trop rondes par-là... Mais grâce à mon goût prononcé pour la mode et aux heures passées devant l'émission de Cristina Cordula, j'arrivais à pallier ces vilains petits défauts par un tas d’astuces.