Pendant les vacances, le temps s'inverse. La semaine devient une amie, et le Week-end une corvée. L'écoulement habituel du temps se transforme en son double négatif.
Le temps n'est pas beau. Le vent ramène jusqu'ici l'humidité du large ...
Il y a des erreurs qui contiennent une autre vérité ...
(Erri de Luca)
Le corps atrophié, à peine ancré à la terre, Cherbourg convoite l'horizon et la mer de ses deux membres immenses, deux digues de pierre élancées au milieu des flots ...
Sur l'enclos flottant, les hommes ont arrêté de travailler. Dans les caisses, certains poissons frétillent encore. Les hommes sont debout, tournés vers l'ouest, comme les tournesols du soir. Aucun ne parle. Ils contemplent la digue et, tout autour, la poussière qui retombe lentement sur l'eau calme.
Difficile de mourir si on n'a jamais existé.
Daniel voudrait bien savoir ce qu'elle cherche exactement. Mais il ne demande rien.
Le secret défense [...]la ville s'endort avec puis le retrouve au matin, déjà à ses petites affaires. Elle le laisse s'infiltrer partout, dans chaque jointure de son quotidien. Et puis, quand ça déborde un peu trop, quand viennent les bobards officiels, elle laisse dire. Comme la bonne épouse acquiesce aux explications du mari volage. Sans trop y croire. Juste parce que la vérité, c'est parfois trop d'emmerdes.
Dans la presse, le sujet se décale de l'inexplicable à l'accusable. Les journaux commencent à chercher des responsables à défaut d'autre chose.
Il y a parfois au fond de l'eau des choses inhabituelles.
Chasseneuz s’emporte contre ce penchant qu’ont les hommes à vouloir fulminer l’anathème tout de suite et contre n’importe quoi, rabaissant la justice de Dieu pour en faire une arme de superstition. Et ils s’imaginent que la Providence leur donne raison parce que, parfois, les fléaux ont semblé reculer ! Mais est-ce la marque de Dieu, ou plutôt celle du diable, que de faire croire aux esprits faibles qu’ils sont dans le juste pour mieux les attirer dans la faute ?
Or sommes-nous en train de chercher cette vérité-là ? Non ! Nous jugeons avec l’orgueil des forts, sans chercher à comprendre la raison des faibles. Nous nommons ravage et vermine ce qui nous cause du tort, pensant que cela suffit à exiger de Dieu que cela cesse. Et nous nous apprêtons à condamner en Son nom sans prendre le temps de rien écouter sinon nous-mêmes, simplement parce que ceux que nous accusons sont sans voix.
Dans ce quotidien trop étriqué pour elle, la rade s'assoupit en attendant que son heure revienne. Depuis elle se berce en écoutant la musique sourde et engourdissante que font ensemble toutes les guerres, les batailles et les rêves de gloire qui en tapissent le fond.