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Citations de Claudine Desmarteau (96)


L'avenir on ne voulait pas y penser. Devenir agents d'assurances, vendeurs de bagnoles, DRH, chargés de clientèle, téléconseillers, comme nos pères et nos mères. Dealers comme les grands frères. Ou grossir le rang des chômeurs.
Décrocher un CDI, le nouveau Graal. Et puis le réchauffement climatique... On ne voulait pas penser à toute cette merde. On préférait regarder des vidéos de Norman.
L'avenir, on n'en avait pas envie.

Page 121, L’Iconoclaste, 2020.
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On avait des boutons et quelques poils au menton, les cheveux gras et le nez luisant. La grâce de l'enfance nous avait quittés. Moches et cons, on était. En classe on s'emmerdait à mourir. On tenait pas en place. On avait envie de se masturber, de se lever, de renverser la table et de péter un carreau à coups de poing ou à coups de chaise. De sortir par la fenêtre ou par la porte pour se tirer en courant, dévaler les escaliers en hurlant et sortir de cette cage. Courir vite et loin, très loin de ce collège pourri qui puait la pisse et la cantine rance. Courir ailleurs, loin de nous. Le plus loin possible.

Page 47, L’Iconoclaste, 2020.
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Raphaël, c'est pas très viril comme prénom. Je ne suis pas très viril. Fils unique, en plus. J'aurais dû avoir un frère mais il est mort avant d'être né. Après, ma mère était trop vieille. Dommage, j'aurais aimé avoir un frère chiant ou une sœur pénible, comme tous mes potes.
Mes cheveux sont fins, châtain, mes yeux ni bruns ni verts. J'ai les joues un peu trop creuses et les yeux un peu trop cernés. Je me tiens mal, un peu trop voûté. Je suis grand, mes pieds sont grands. Je n'ai pas de poils sur le torse. Pas assez de muscles. Pas de tatouage, pas de piercing. J'ai coupé mes cheveux — avant je les portais assez longs, à la Kurt Cobain. Je suis quelqu'un de banal. Je ressemble à tout le monde ou à personne en particulier et c'est très bien. Je suis insipide et je rêve d'être invisible. Me promener dans les rues comme un fantôme. Voir ceux que j'aime sans être vu par eux. Juste les regarder vivre. Avoir des bras aussi inconsistants qu'un petit filet de brume pour les serrer et les envelopper en silence, sans les déranger, sans les faire pleurer.

Pages 20-21, L’Iconoclaste, 2020.
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C'est horrible, l'autoroute à n'en plus finir. Papa dit que c'est atroce de se trainer comme un escargot à 130 kilomètres heure alors qu'il a une putain d'envie d'appuyer sur le champignon pour doubler tous ces ploucs. Je vous préviens qu'on n'a pas fini de l'entendre, le mot "plouc". En vacances, tout le monde est des ploucs sauf Papa.
[...]
Et faut pas croire que les femmes, elles n'en ont pas, des instincts de tueur au volant. Quand c'est Maman qui conduit, ça gueule encore plus sur les pétasses qui font des queues de poisson ou qui déboîtent sans le clignotant. Et nous, on est obligé de supporter ça sans rien dire comme des enfants sages à l'arrière.
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Approche
T’as peur ?
T’as raison
Faut pas se fier à des inconnus
Faut rester sur ses gardes
Se fier à personne
À personne qu’à toi-même
Pas faire confiance au premier venu
On sait jamais à qui on a affaire
La confiance ça se mérite
Comment tu t’appelles ?
Moi c’est Chris
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Faut avouer que je ne suis pas très aimable. Avec mes parents c'est pas franchement la lune de miel. Ils me trouvent chiante. Absente. Décourageante. Je les trouve usés, anesthésiés, résignés.
(p 9)
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L'autre jour, j'ai demandé à ma mère :
- Est-ce que papa aime beaucoup la bière parce papy aimait le vin parce que grand-papy adorait le whisky ?
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J'avais envie de vomir. Je voulais crier mais j'y arrivais pas. J'arrivais à rien.Pas à parler, pas à bouger, même pas à pleurer. Je frissonnais. J'étais une petite chose. J'étais rien qu'une merde. Je voulais juste que ce film d'horreur s'arrête. Je voulais mourir, pour tout effacer.
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J’avais cinq ans, c’est très loin mais je me rappelle de ça. De la chape de plomb qui avait recouvert la maison devenue silencieuse, de la tristesse de ma mère qui restait prostrée dans le canapé toute la journée, de mon père qui liquidait dans la petite chambre, rapidement et discrètement, tout le mobilier, les accessoires et les vêtements que ma mère avaient achetés. Cette pièce est devenue un bureau ou personne ne met les pieds. On y stocke un tas de bordel dont on ne se sert plus mais qu’on ne veut pas jeter.
Je ne sais pas si elle s’en est remise, ma mère, du petit cadavre de quatre mois et demi. À ses accès de gaieté pleine d’énergie succèdent de longues phases de mélancolie et elle transpire le désespoir par tous les pores de sa peau. Quand elle est comme ça, j’ai envie de la prendre dans mes bras, de la bercer, de lui filer des baffes, de décaler l’escalier pour sortir de là en urgence, respirer un grand coup et m’éloigner de cette baraque qui pue le souvenir enfoui de ce petit cadavre de quatre mois et demi qui lui a brisé le cœur.
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"J’aimerais faire une petite marche arrière. Remonter le cours du temps. Effacer la journée maudite. Remonter à l’époque des dinosaures Schleich. Ou pas si loin. Quelques années. Six ans et quatre mois, pour être précis."
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C'est dingue comment on les façonne, les gens, dans nos souvenirs. Les visages vivants, on les oublie, on les fige. Même en regardant une photo, on ne voit que ce qu'on a envie de voir. On sélectionne ce qui fait plaisir. Ce qui nous arrange. Le reste on l'efface en loucedé. (p 11)
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Tout le monde a besoin de fric mais personne n’en a jamais assez, même ceux qui en ont trop.
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Il n'y a rien que j'aime plus au monde que d'être dans une salle de cinéma, dans le noir, à l'abri du monde. J'ai le sentiment que là, il ne peut rien m'arriver. Que je vais me nourrir par les yeux. Oublier le moche. Apprendre. Sans juger, sans rien risquer.
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— C’est à Toi de choisir qui tu veux être.
— Bah, c’est pas évident… de savoir qui on veut être.
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Ma bande de potes. Je les regardais et je ne pouvais plus m'arrêter de rire. Et on gueulait comme des mômes, passant et repassant sous les jets de la fontaine. L'eau étincelait, et nos rires aussi. On se sentait libres, jeunes et vivants.
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Je n'ai que vingt-deux ans et déjà, trois personnes me manquent, terriblement.
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La tristesse a une couleur – pour moi gris serpillière.
La couleur du ciel après la pluie.
La peur a une odeur. Les chiens la reniflent, on m’a appris ça quand j’étais môme. Il faut éviter de transpirer la trouille quand on croise un chien. À l’école et au collège c’est pareil. On est comme des chiens. La peur on la renifle. Elle rend agressif. Elle excite la meute.
Tu sues des mains
Tu pues des mains
Tu sues du cul
Tu pues du cul
Le dégoût de soi, il n’a ni goût ni odeur. Il serre la gorge. Il dessèche les mains et la bouche.
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Ma famille est comme une chaise à laquelle il manquerait un pied depuis que Romain, mon frère, est parti à Lyon pour faire ses études. Ça fait un an. Et une absence de plus. Elles s’additionnent les absences. Elles remplissent un puits. J’imagine que plus on est vieux plus il est profond, le puits des absences. Ma mère vire au triste. L’absence de son fils préféré a creusé les sillons qui entourent sa bouche et elle a souvent une expression amère. On ne se parlait pas beaucoup, avec Romain. On ne se faisait pas de confidences. Pas besoin. On se devine l’un l’autre. Il lit en moi et moi en lui. Enfants, on a cavalé dans les hautes herbes, grimpé dans les arbres, sauté des rochers dans la mer glacée, fait des concours de ricochets, de crachats et de crottes de nez séchées. Pissé sur le paillasson du voisin et pété sur la flamme d’un briquet. Ça lie pour la vie. J’aimerais pouvoir aimer un garçon comme j’aime mon frère. Sans avoir peur de lui. Peur d’être pas assez belle, pas assez captivante pas assez mystérieuse. J’aimerais pouvoir être aimée par un garçon comme je le suis par mon frère. Être moi-même en toute confiance. Sans être jaugée, jugée et jetée comme une merde sans comprendre pourquoi. Mon frère me manque. Il me manque sans faire de bruit, sur la pointe des pieds.
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"Les 400 coups" je l'ai aimé, comme film - surtout à la fin quand il s'évade-, mais maintenant que je sais que François Truffaut était le dernier de sa classe, je l'aime encore plus.
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« Le dégoût de soi, il encercle en douce et en silence, à toute allure, comme la marée montante par gros coefficient. »
« Il n'y a pas de requins en Bretagne-pas des grands blancs en tout cas- mais j'imagine avec angoisse que je ne peux pas voir. J'ai horreur de nager dans une eau sombre et profonde, un tas de bestioles grouillant au-dessus de mon corps blanc chétif et presque nu de nageur médiocre. Des petites bestioles vénéneuses, molles, transparentes. Des grosse bestioles visqueuses et musclées ou dures et carapaceés, équipées de pinces ou de dents tranchantes. Elles sont dans leur élément, ces bestioles. Pas moi. »
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