Citations de Dawn Dumont (35)
" Il y avait du bingo partout. En ville, dans les petits villages, dans la réserve - il suffisait de quatre murs et de quelques boules pour organiser une bonne soirée de bingo, mon ami. Il y avait du bingo tous les soirs de la semaine si on se donnait la peine de chercher un peu. Ce que plusieurs faisaient."
p.69
"- Où est-ce qu'on va aller quand il va y avoir une tornade, d'abord?
C'était au tour de Tabitha de prendre un air songeur.
- Je pourrais toujours vous attacher à un arbre.
Je la soupçonnais de nous taquiner. Mais elle ne souriait pas, alors elle disait peut être la vérité. Je l'aurais bien dénoncée, mais une partie de moi avait envie de se faire attacher à un arbre. De cette manière, je pourrais observer la tornade en toute sécurité. "
p.10
— Je pensais que j’étais pas un mauvais gars, moi.
— J’ai jamais fait quoi que ce soit de pas correct à une femme de ma vie. Pas intentionnellement.
(Hannenorak, p.444)
— Vire-moi pas, Susie, s’il te plaît, j’ai besoin de ce job-là. S’il te plaît, fais pas ça. S’il te plaît.
Le dernier « s’il te plaît, » était peut-être de trop, mais la subtilité, c’était quelque chose que seuls les gens avec une bonne convention collective pouvaient se permettre.
(Hannenorak, p.54)
Le simple fait de naître autochtone est un acte politique.
Avec Internet, les jeux vidéo et la télé HD qui rivalisent pour prendre possession de notre âme, on n'a plus de temps à perdre avec le diable et ses insanités.
Même la marelle était préférable à ça – et la marelle était le jeu le plus nul de tous les temps. Un hamster se serait ennuyé à jouer à la marelle. (Cela étant dit, une roue géante m’aurait certainement tenue occupée pour de longs mois.)
À en juger par mes piètres performances jusqu’ici, il semblait plutôt que je sois née pour être médiocre, et personne n’avait écrit un livre sur ma tribu, celle des gens ordinaires. « Toutes sa vie, elle a tenté de devenir une grande athlète. elle n’y est jamais parvenue, mais elle a été heureuse quand même et tout le monde l’aimait et tout le monde rêvait d’être à sa place. ». Il était où ce livre?
À la maison, j’endurais les comparaisons continuelles avec ma sœur : « Celeste a tellement d’énergie, et Dawn… Dawn aime vraiment beaucoup lire en tout cas. » Le verbe « lire » était prononcé sur le même ton qu’on aurait utilisé pour décrire quelqu’un avec une jambe dans le plâtre.
Peu importe si on aimait marcher, peu importe à quel point on était endurantes, c'était impossible de rendre visite à un beau gars et d'arriver chez lui avant que les coyotes se mettent à hurler.
[...] celle dont on disait qu'elle était un beau brin de fille aussi utile qu'un cendrier sur une moto [...]
Regarder les surveillantes faire le tour de la cour d’école, c’était presque une forme de méditation. Je me demande si elles apprenaient ça à l’université : Posture de récréation 101 – comment créer une impression d’autorité grâce à votre démarche.
J’ai mieux à faire que de me stresser avec une couple de livres en trop.
-La mère de Dawn.
Finalement, quand le Canada a annoncé la mise en place du « Paiement d’expérience commune », mes parents ont rempli les formulaires et ont diligemment inscrit les années qu’ils avaient passées au pensionnat. On savait bien qu’ils méritaient cet argent. On les agaçait quand même en soulignant leur hypocrisie.
— Je pensais que tu m’avais dit que c’était pas si pire que ça, ai-je commenté.
Maman m’a lancé un regard blessé.
— C’est vrai que j’avais faim tout le temps, et mes parents pouvaient venir me voir juste une fois par an.
Mon père a ajouté :
— Ils m’ont empêché de parler ma langue. Ça m’a manqué, ça.
Maman a acquiescé.
— Honnêtement, j’aimerais plus ton père s’il parlait cri. Beaucoup plus.
J’ai choisi mes mots avec beaucoup de soin :
— Si elle perd la garde des gars, est-ce qu’on peut les adopter ?
Maman a pincé les lèvres et s’est tournée sans rien dire, ce qui veut dire « non » dans toutes les langues.
Jouer au Sasquatch m’a beaucoup appris sur la navigation nocturne et le travail de reconnaissance. Plus important encore, ça m’a appris que j’étais capable de courir et de pisser dans mes culottes en même temps.
Pendant que je mangeais mes Cheezies, je réfléchissais à ce qui venait d’arriver. Y avait-il une leçon à tirer de cette expérience ? Je voulais des Cheezies. Ma mère m’avait dit d’attendre de gagner. J’avais pleuré. Et puis j’avais gagné. Est-ce que c’était la morale de l’histoire ? Si je pleure, je gagne ? Une équation dangereuse, dans la mesure où ça m’obligeait à me promener avec des mouchoirs dans les poches pour le restant de mes jours.
Ma tante et Maman se sont regardées et ont secoué la tête de dépit. Qu’est-ce qui arrivait aux enfants d’aujourd’hui ? Dans leur temps, les enfants pouvaient s’estimer heureux de sortir de la maison. On grandissait dans des familles de douze et on avait de la chance si notre mère se souvenait de notre visage, alors penses-tu qu’on s’imaginait l’accompagner au bingo ? Et si l’envie nous prenait d’y aller quand même, au bingo, ce n’était pas un petit cinq minutes en voiture ; c’était un périple de deux jours impliquant un cheval, un chariot et trois portages.
Je rejetais la faute sur le catholicisme. Quand on croyait que le vin se changeait en sang, il ne restait plus qu'un pas à faire avant de croire qu'on pouvait voler sur un balai.
À une certaine époque, le Canada en entier nous appartenait, et maintenant on vivait sur de minuscules réserves. Et si les réserves n'étaient pas aussi invivables que, disons, un camp de travail dirigé par des prêtres stygiens, on avait tendance à se contenter d y survivre.