Réalisation de la couverture du recueil de nouvelle "Interstices" de Denis Labbé
Couverture et vidéo réalisée par Jimmy Rogon
Je suis le dernier de mon groupe de recherches.
Au départ, nous étions six étudiants en mal d'étrange, passionnés par les manuscrits insolites, les livres dits apocryphes et les traités d'ésotérisme
Ne dites pas à ma mère que j'ai fait le con. Elle vous répondrait : comme d'habitude.
Comme vous pouvez vous en douter, mes courses à travers le monde ne s'arrêtèrent pas là. Je vécus bien d'autres aventures avant de venir m'établir ici, sans trop jamais repenser à cette étrange nuit. Cependant, je dois vous avouer que depuis que je ne cours plus, je sens son aura grandir peu à peu en moi.
Peut-être vous seriez-vous attendu à ce que je sois un prof de sport aguerri, un ancien membre des forces spéciales ou un chercheur en génétique, mais non, je ne suis rien d'autre qu'un enseignant qui s'est trouvé par hasard au mauvais moment et au mauvais endroit avec un groupe d'adolescents instables et turbulents.
Alors que le soleil s’arrachait avec peine d’un horizon chargé d’ombres morbides, la silhouette décidée du chanoine Urbain Grandier se faufilait dans les rues désertes de la cité de Loudun. Coiffé d’un chapeau qui le protégeait du vent matinal, il examinait chaque porte, chaque recoin, à la recherche d’une âme qui put être sauvée, comme il le faisait presque tous les jours depuis que l’épidémie de peste avait commencé. Dans ses habits ecclésiastiques, il donnait l’impression d’être invincible, comme protégé par la puissance divine.
Au bout de trois ou quatre kilomètres nous sommes tombés sur une maison isolée, une de ces vieilles fermes retapées par des gens de la ville qui espèrent trouver le bonheur à la campagneet qui, la plupart du temps, ont envie de se tirer une balle au bout de six mois parce que le coin est trop tranquille. Il faut dire qu'ils ne sont pas toujours au courant de ce qu'est la vie au grand air, comme on dit. Habiter dans un petit village n'est pas donné à tout le monde, encore moins à un citadin qui a pris l'habitude de vivre au milieu d'une atmosphère aseptisée. Dès que l'on sort des faubourgs bétonnés et glacés, une force séculaire s'empare de vous, en vous faisant comprendre qu'elle commande et que vous devez suivre. Si vous ne l'acceptez pas, c'en est fini de votre rêve rural.
- Merci pour tout, docteur. Et faites bien attention à vous.
- Bien entendu. Mais pourquoi vous me dites ça ?
- Pour rien, lui dit Delphine en me tirant par la manche. C'est la version enseignante de l'abbé Pierre : il s'inquiète toujours pour tout le monde.
Assise derrière la fenêtre de son atelier perpignanais, Zeyno observait les nuances changeantes du ciel printanier. Par endroits, le bleu délavé tirait sur l’incolore, tandis que plus loin, vers les récifs pyrénéens, l’outremer se teintait déjà de gris. Il ne lui manquait que la mer.
Englués dans notre fuite et notre volonté de survivre, nous n'avions ni les moyens, ni l'envie , de faire de la zombielogie. Lorsqu'on a une créature de la sorte à nos fesses, on pense d'abord à courir, puis à l'étudier.
- En cas d'épidémie, il faut appeler la Garde nationale ! Je l'ai lu dans Guide de survie en territoire zombie de Max Brooks.
- Nous ne sommes pas aux Etats-Unis, Tanguy. Il n'y a pas une telle armée de réservistes en France. Je vais plutôt demander à la gendarmerie de s'en occuper. Et puis, nous ne sommes pas un film de George Romero. S'il te plaît, arrête de sortir tes inepties, nous avons d'autres problèmes à régler.
- N'empêche que rien ne ressemble plus à une épidémie qu'une autre épidémie, marmonna-t-il.