Citations de Dominique Conil (8)
La mère lisait tout, les courses, les choses à faire, les gens à appeler, les lettres à envoyer, les dates limites de paiement, les livres à lire, les rendez-vous chez le dentiste, les dates de vaccination, les rappels, la vermifugation du chat, elle notait tout, les poches de ses vestes débordaient de papiers froissés et d’enveloppes timbrées. Et puisqu’elle avait noté, elle oubliait.
La meilleure façon de faire attention, c’est de ne pas céder.
Et puis, les droits de l’homme, ce n’est jamais fini. Il y a toujours des combats à mener. Nous allons bientôt travailler côte à côte, Anna et moi, elle écoutant une femme au visage bouleversé, moi les yeux papillotant sur une liste de noms.
Tout ne va pas bien, dans sa vie. Lorsque les députés se sont révoltés contre l’autorité de Boris Eltsine maintenant à la tête du pays, on leur a envoyé l’armée.
Nos yeux étaient encore à la hauteur des poignées de porte, mais nous connaissions dix façons d’assassiner proprement. Les meurtres se répétaient d’un bouquin l’autre, comme dans les contes, avec une part raisonnable de mponstres et de malheur dans des forêts urbaines obscures. Voilà tout, c’était moins effrayant que ces chansons qui s’interrompaient sur les blocs Rhodia, blanc vertigineux ; Le crime s’achevait, lui, prévisible et circonscrit, en page 182.
Notre père (…) ne pouvait œuvrer ni coupé du monde, ni dans le bruit du monde. Il lui fallait occuper un espace central,avec vue aérienne sur nos vies. Chez lui, la toute-puissance de l’écrivain avait curieusement dérapé, et il nous préférait en muet, mais sa rage de produire se nourrissait des fureurs que lui inspiraient nos grattements, soupirs, portes claquées, sons cliquetants ou répétitifs.
Notre grand mot, c’est choisir : sa vie, ses chaussures, son parti politique, tout. Moi, je me demande parfois si le couvercle ne va pas retomber. Mais Anna est une fille de la perestroïka, elle y croit. Nous passons des après-midi à parler, elle me raconte par bribes son enfance, celle d’une princesse à la soviétique – bonne école bilingue, musique –, pionnière9 enthousiaste, et lectrice assidue à la bibliothèque Kroupskaïa.
La mère lisait tout, les courses, les choses à faire, les gens à appeler, les lettres à envoyer, les dates limites de paiement, les livres à lire, les rendez-vous chez le dentiste, les dates de vaccination, les rappels, la vermifugation du chat, elle notait tout, les poches de ses vestes débordaient de papiers froissés et d’enveloppes timbrées. Et puisqu’elle avait noté, elle oubliait.
C'est une vue panoramique, prise sans doute d'un point élevé. Vaste ciel et ciel du sud, qui écrase le paysage de rocaille, chênes verts ou oliviers, il n'est p as sûr. Au bout d'un chemin qu'on devine très sec, une grosse bâtisse carrée, fermée sur elle-même, domine une constellation de points noirs et la masse sombre des voitures et fourgons garés plus bas. A gauche de la maison, trois terrasses cultivées, on distingue des rangées, peut être un potager.