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Critiques de Elsa Triolet (109)
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A Tahiti

Langueur et nostalgie pour une Russe amoureuse qui suit son mari dans une île si étrangère à son vécu, à l'opposé de son pays, aux coutumes étranges. Entre ennui et désenchantement, elle conte ses tentatives d'adaptation et ses étonnements renouvelés.
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A Tahiti

Elsa Triolet et son mari partent pour Tahiti. Pour Elsa, c'est un monde nouveau, loin, très loin de sa Russie natale. Elle ne dépeint pas les charmes exotiques de l'île, elle raconte les maoris, le colonialisme et ses travers. L'écriture simple donne une grande force au récit.

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Anne-Marie, tome 1 : Personne ne m'aime

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Anne-Marie, tome 1 : Personne ne m'aime

Le roman, entièrement raconté à la première personne du singulier, d’après le point de vue d’Anne-Marie se divise en deux grandes parties : la première se déroule avant la guerre. On y suit la vie relativement frivole d’Anne-Marie auprès de la despotique Jenny Borghèze. La seconde suit le basculement d’Anne-Marie dans sa nouvelle vie, après un événement assez traumatisant. La France entre en guerre et Anne-Marie se voit contrainte de quitter Paris.



Que dire de ce roman ? J’ai du mal à déterminer si je l’ai aimé ou non. Le personnage d’Anne-Marie est celui d’une femme qui semble assez naïve, peu au courant de la manière dont la France métropolitaine a évolué durant les 10 années qu’elle a passées outre-mer et peu versée vers les questions politiques [elle répète à plusieurs reprises que ce ne sont pas des sujets pour les femmes]. Or, nous suivons les événements d’après son regard : en tant que lectrice ou lecteur, nous voyons venir les choses mais Anne-Marie ne comprend pas ce qui se joue autour d’elle. Son récit se révèle parfois brouillon, ce qui m’a frustrée à plusieurs reprises. Elle se retrouve alors dans des situations qui frôlent l’absurde tant la jeune femme paraît inconsciente des dangers dans lesquels elle plonge, malgré elle.

Pourtant, à travers ce personnage, Elsa Triolet a souhaité faire honneur à la résistance. Au début du roman, nous pouvions imaginer que c’était le personnage de Jenny qui représenterait cette faction de la population qui a refusé le joug allemand. Mais, elle a choisit la douce et naïve Anne-Marie. Ce choix a de quoi surprendre. Jenny, elle, lui sert plutôt à dénoncer les diktats qui pèsent sur les femmes et leur corps [la pression à enfanter, l’obligation d’être mince et belle, etc.].



Le titre, Personne ne m’aime, qui revient comme une litanie tout au long du roman, est une phrase prononcée par Jenny, consciente que l’intérêt que lui portent la plupart des personnes autour d’elle n’est dû qu’à son statut d’actrice renommée. Il fait aussi référence à la situation personnelle de l’autrice qui était de plus en plus critiquée, après le succès du Goncourt obtenu en 1944.



J’avoue ne pas avoir été pleinement convaincue par ce récit : j’ai trouvé que toute la partie consacrée aux actions des résistants était remplie de clichés et de facilités. C’est une vision fantasmée de la résistance qui me paraît assez peu réaliste.



C’est dommage car le sujet était prometteur et c’était assez audacieux de la part de l’autrice de l’aborder aussi rapidement après la guerre, à une période où la France n’était pas encore prête à regarder ses erreurs en face et souhaitait tirer un trait sur ces heures sombres. D’ailleurs, ce choix n’a pas été fort apprécié par le grand public car il n’a pas connu un franc succès d’autant qu’il propose une vision assez pessimiste du retour à la paix.



Il y a une suite à Personne ne m’aime, je ne sais pas encore si je la lirai. Même si je suis curieuse de connaître la suite des aventures d’Anne-Marie, je ne suis pas sûre d’avoir envie de passer le temps d’un autre roman avec elle.
Lien : https://www.maghily.be/2021/..
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Anne-Marie, tome 2 : Les fantômes armés

Je tiens tout d'abord à remercier les éditions "Le temps des cerises" qui m'ont envoyé le livre dans le cadre "Masse critique".

Le livre est de qualité, en papier gros grain et la police est bien choisie. Une belle réédition de ce livre, Merci .



L'auteure de ce livre est Elsa Triolet, née à Moscou le 11 Sept 1896 et morte à St Arnout en Yvelines le 16 Juin 1970.

Issue de la bourgeoisie russe, Elsa Triolet née Ella Kagan apprend le français dès 6 ans.

Elle quitte son pays natal pour la France en 1918, elle épouse l'officier André Triolet qu'elle quittera dès 1921.En 1928, elle rencontre Louis Aragon qui sera son grand amour. Résistante pendant la seconde guerre mondiale, elle militera à sescotés pour le communisme.

"Les fantômes armés" sont la suite de "Anne-Marie, personne ne m'aime" et se situe à la fin de la seconde guerre mondiale.

Anne- Marie est retournée aux îles mais son mari est ses enfants lui sont devenus étrangers. Elle revient alors sur Paris et le redécouvre en pleine ébullition lors de la libération.

Elle prend un amant "pour s'amuser ", le colonel de Chamfort (Célestin ) qui la présente aux yeux des autres comme reporter photographe.

A l'automne, elle apprend sérieusement la photo dans le Paris du froid et des restrictions. Elle essaie de reconstruire sa vie, voit beaucoup de gens de tous les milieux mais ne se se sent d'aucun milieu.

Elle retrouve Avignon invitée par Célestin, elle y est bien mais cela ne dure pas longtemps. Elle prend alors le train pour rentrer sur Paris mais les conversations qui s'y déroulent , les français parlant des allemands avec le même enthousiasme comme auparavant la perturbe beaucoup.

Désespérée, elle va au petit bourg où elle a passé de longs mois pendant l'occupation. Là, des intrigues se sont noués et elle va y participer.



Ecrit avec finesse, ce livre dépeint bien la fin de la guerre et la libération avec toutes ses intrigues dissimulées et la place qu'Anne Marie peine à trouver dans cette France devenue libre mais encore dévastée par tous les petits arrangements avec les collaborateurs.La France qui malgré la libération est encore sous le choc avec toutes les restrictions de toute sortes est bien décrite. Les difficultés qu'a Anne Marie à se trouver une place dans cette France nouvelle sont bien dépeintes.

Le style d'Elsa Triolet est abondant, spontané et familier. Il y a beaucoup de descriptions. Pour l'époque, son style était nouveau et direct.

Juste un bémol en ce qui me concerne, les répétitions voulues par l'auteure m'ont lassée je l'avoue. J e me suis un peu ennuyée mais que cela ne gâche pas votre envie de le lire, il y a l'atmosphère de la fin de la guerre qui est formidablement bien dépeinte.

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Anne-Marie, tome 2 : Les fantômes armés

Elsa Triolet évoque la situation en France et en Allemagne après la Libération à travers un personnage complexe, Anne-Marie. Madame François Bellanger pour les uns, Ammamie pour les autres, elle est aussi appelée la Demoiselle par les membres de la Résistance dont elle a partagé les convictions ( FTP) et l'action à sa sortie de prison.

1945 : De retour à Paris après la guerre et un séjour aux colonies dans sa famille , elle se retrouve seule et désemparée : "que sont mes amis devenus ?" Installée dans l'appartement d'une Américaine, elle fréquente la haute bourgeoisie dont elle est issue et retrouve Jacquot, résistant communiste influent et lucide. A travers les conversations et ses questions naïves, on comprend les dissensions entre gaullistes et communistes, le danger représenté par les membres de la Cagoule, le fascisme latent , les haines sous-jacentes et les complots ourdis dans l'ombre par ces "fantômes armés" tant en France qu'en Allemagne.

Les personnages rencontrés reflètent cette époque : les profiteurs comme le commandant Lebeau, les ouvriers et petites gens victimes de l'anticommunisme comme Joseph, les militaires, comme Célestin qui désoeuvré maintenant peut devenir dangereux. Quelques femmes aussi : la lingère enrichie par le marché noir, l'aristocrate Mme de Fonterolles qui reçoit de nouveau dans son salon le jeudi malgré la pénurie de nourriture et l'absence d'électricité, la plantureuse Mme Doyen qui a perdu beaucoup des siens et son château, la frivole Colette toujours en quête d'amants.

La romancière plante le décor : Paris au quotidien, un village allemand, Avignon, le village natal où Anne-Marie a mené son action de résistante. Elle utilise souvent des métaphores empruntées au théâtre dans ses descriptions. Chacun y a joué son rôle et il n'est sans doute pas facile de faire la part entre réalité et illusion ?

Pourtant elle s'inspire de faits réels, de témoignages et de sa propre expérience : visite dans l'Allemagne vaincue, dans les prisons où des résistants sont arrêtés pour des vols commis au profit du maquis alors que les collaborateurs sont petit à petit relâchés.

Admirable roman pour tous les amateurs de littérature et d'histoire contemporaine. La préface de Marie-Thérèse Eychart en fait une présentation claire et précise qui facilite l'entrée dans la lecture. A lire ou à relire pour comprendre aussi la société actuelle.
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Anne-Marie, tome 2 : Les fantômes armés

Je continue ma découverte de l’œuvre de Elsa Triolet (et de la saga de Anne-Marie par la même occasion) et ce fut encore une lecture incroyable ! Ce deuxième tome est clairement plus politique que le précédent (Personne ne m'aime). Triolet met en lumière une période de l'histoire de France assez peu présente dans la littérature : l'après de la Deuxième Guerre. C'est un témoignage écrit très rapidement après les évènements et qui atteste d'une grande lucidité de la part de l'autrice sur la complexité de la situation.



Le personnage de Anne-Marie gagne en profondeur ainsi que sa relation avec les autres et elle ne me paraît plus aussi passive que dans le précédent tome. Il y a également des réflexions extrêmement intéressantes qui résonnent encore aujourd'hui et qui mettent en lumière une autre vision de la période que celle des manuels d'histoire.



Ce livre est très lié à certaine des nouvelles présentes dans le recueil de nouvelles Le premier accroc coûte deux cents francs qui sera donc sûrement ma prochaine lecture de cette autrice !
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Camouflage

"Pour oublier Maïakovski et pour échapper aux terribles conditions de vie de la Russie post-révolutionnaire, Elsa épouse à Paris, en 1919, André Triolet, un officier français rencontré deux ans plus tôt à Moscou. Après l’avoir quitté en 1921, elle vit à Londres puis, en 1922-23, à Berlin où elle retrouve Lili et Ossip Brik et ses amis Maïakovski, Vladimir Pozner, Ilya Ehrenbourg…



Entre 1924 et début 1929, elle occupe la minuscule chambre 12 de l’hôtel Istria, 29 rue Campagne-Première. Ses voisins s’appellent Picabia, Man Ray, Marcel Duchamp… Son roman Camouflage décrit la vie dans ce quartier. "
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Camouflage

Une lecture bien énigmatique... Je serais incapable de raconter l'histoire ! D'ailleurs, la quatrième de couverture ne propose même pas de résumé. Le roman (qui, au fond, n'en est peut-être pas un) se focalise sur deux femmes : Lucile mariée, riche et qui s'ennuie ; Varvara, expatriée russe, seule et fréquentant les bas-fonds de Paris. Il ne se passe pas grand chose. Grammaticalement parlant, les phrases ne sont pas toujours logiques. Bref, l'écriture reste fine et j'étais très intéressée de découvrir Elsa Triolet en tant qu'écrivaine et non juste "pour ses beaux yeux" !
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Un brin surannée, lecture malgré tout agréable...



l'on découvre les années 60 à travers une jeune femme un peu perdue....



Un petit livre qui se lit vite, qui est simple mais qui malheureusement je crois ne restera pas longtemps dans ma mémoire.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Second livre qui m'ait fait pleurer! J'en garde un souvenir de tristesse infinie, de gâchis, un sentiment de révolte également contre cette vie matérielle qui détruit des corps, des gens ou des âmes....

Un roman à redécouvrir et à faire lire à tous. Il serait temps en ces années #meToo de sortir cette incroyable écrivaine qu'est Elsa Triolet de l'ombre d'Aragon!
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Lire Elsa Triolet, c'est se rappeler que les femmes autrices ont décidément été trop vite misent de côté dans le monde littéraire. Selon moi, ce roman mériterait vivement d'être conseillé aux lecteurs désireux de se plonger dans la littérature du XXe siècle, au même niveau qu'un roman de Camus, de Céline et d'Aragon qui, à travers ses vers amoureux, a pourtant oublié de mentionner le talent de sa compagne.

Rose à Crédit n'est pas seulement un portrait de femme, il est le portrait de la France des années 50-60, qui après avoir vécue dans la boue, la violence et l'inacceptable est à la recherche d'un monde moderne lissé, nacré, poli, ou rien ne dépasse... bref, à la recherche d'une perfection qui permettrait d'effacer ce douloureux passé.

Bien qu'il m'ait fallut un certain temps avant d'entrer pleinement dans l'écriture d'Elsa Triolet, je ne regrette pas d'avoir poussé plus loin ma lecture.

J'ai aimé voir l'amour tendre de Martine et Daniel s'épanouir, sentir cette tension qui grandi au fil des pages, où les meubles et le confort viennent progressivement s'insinuer entre eux. J'ai été fasciné et touché par Martine devenue elle-même un objet, une poupée rose et fardée dans une boite étriquée. le suspens se met en place et nous emmène vers l'effondrement : la rose est fanée, ne reste plus que les crédits à rembourser.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

De temps en temps cela fait du bien de lire autre chose que de la littérature de l’imaginaire et de se tourner vers de la littérature française. Remarque avec Elsa Triolet je ne prenais pas de risque car c’est un talent bien assis.



L’histoire de Martine est celle d’une fille qui cherche à tout prix remplir le vide de sa vie. Issue d’une famille miséreuse et manquant de tout, elle a la chance d’être adoptée par la coiffeuse du village qui va la lancer dans la vie. Martine est un personnage, qui au début, ne peut être que plaint. La description de sa famille et de leur « maison » frôle l’horreur même si cela a existé et existe encore. On ne peut que souhaiter qu’elle s’en sorte, qu’elle ne soit pas une victime du déterminisme social.



Elle va réussir à se trouver une situation professionnelle et un mari bien plus qu’amoureux. Mais le bonheur va être vite gâché avec les achats à crédit faits par Martine. Il lui faut des meubles, des vêtements, une voiture et cela à tout prix car cela lui permettra de se détacher d’une manière encore plus définitive de son milieu social d’origine. Avec les achats inconsidérés, Elsa Triolet en profite pour glisser une critique de la société de consommation des années soixante. Critique qui ne paraitrait pas si déplacée dans notre société actuelle.



Les achats à crédit ne sont pas sans conséquences sur la vie de Martine. Ils entrainent une fuite en avant. Il faut de nouveaux biens mais il faut de l’argent pour rembourser ceux déjà achetés. Alors on finit par détester cette Martine qui n’a pas su prendre en compte les avertissements de ceux qui l’aiment. et la fin, bien qu’on l’ait détestée, est glaçante, très dure.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Un très bon roman, une fable sur la société de consommation, certes vue d'une manière assez simpliste mais pourquoi pas réaliste, compte-tenu de la psychologie du personnage de Martine et de ce qu'elle subit pendant son enfance.

On adhère ou pas au sens politique sous-jacent à l'intrigue. Toujours est-il que ce roman fait réfléchir. La fin des années 50 ici dépeinte trouve une certaine résonance avec notre quotidien.

L'écriture est assez simple mais prenante. Le début de l'intrigue "à l'eau de rose" n'est pas non plus surjoué et il laisse place ensuite à un destin plus tragique du personnage alors que les fleurs du mariage entre Martine et Daniel sont déjà bien fanées.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Je me suis replongée avec grand plaisir dans "Rose à crédits" d'Elsa Triolet que ma professeure de français de seconde nous avait fortement conseillé. Je n'en avais, à l'époque pas saisi toutes les subtilités et toute la souffrance.

"Rose à crédits" c'est le récit d'une vie, celle de Martine qui vit dans une cabane entre sa mère, aux mœurs légères, ses nombreux frères et sœurs et les rats. C'est aussi Cécile et Maman Donzert qui la sortiront de ce milieu et l'emmèneront à Paris avec elle où elle deviendra esthéticienne. C'est aussi Daniel Donelle, son amour depuis toujours.

Le roman décrit avec froideur, brutalité et réalisme la société de consommation d'après-guerre.

Elsa Triolet nous livre une critique acerbe de son héroïne, superficielle qui s'entoure à outrance d'objets derniers cris ne lui procurant aucun plaisir ou bien-être.

A l'inverse, son époux Daniel, est un amoureux de la nature, de ces belles roses, rêvant de créer cette fameuse rose qui aura la forme de la rose moderne et le parfum inégalable de la rose d'antan. Un jour, pourtant, la rose Martine Donelle verra le jour mais elle ne sera plus qu'un hommage à la souffrance.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Tant que j'en suis à lire du Aragon, autant lire du Elsa Triolet: j'ai trouvé sur un marché Roses à crédit, que je me suis empressée d'acheter, bien évidemment.

Alors je l'ai lu en une journée et... je ne sais pas trop quoi en penser, du fait sans doute de la simplicité de l'intrigue qui laisse un vague sentiment de fatalité à la fin de la lecture. Cela se lit très facilement et très rapidement, le style n'est pas marquant mais tout à fait appréciable au fil de la lecture.



C'est l'histoire de Martine, une jeune fille qui a tout pour elle, mais qui habite dans une vieille cabane au fond des bois avec sa mère, son père adoptif et ses nombreux frères et sœurs. Dégoûtée par ce milieu, elle décide d'aller vivre chez sa meilleure amie, Cécile, dont la mère, Mme Donzert, est un peu comme une mère adoptive pour elle.

Elle travaille alors dans le salon de coiffure familial, jusqu'à ce que Mme Donzert se marie et parte à Paris avec les deux filles. Là, Martine se fait employer le prestigieux Institut de Beauté. Martine semble réussir sa vie sous tous points de vue, d'autant qu'elle se marie avec Daniel, l'homme qu'elle a toujours aimé.

Mariée, Martine va habiter un petit appartement, mais seule car Daniel préfère rester à la campagne pour s'occuper du domaine familial, une roseraie renommée, afin de créer de nouvelles roses. Commence alors la décadence pour Martine, car, pendant que sa vie sociale et amoureuse s’effiloche, elle succombe à l'émergence de la société de consommation et au fameux "crédit" qui permet de tout acheter et de rembourser sur le long terme, alors même qu'elle n'en a pas les moyens...



J'ai été assez sceptique au début de ma lecture, car j'y voyais une sorte d'apologie de la femme parfaite, de la beauté, de l'intelligence. En vérité, c'est tout justifié par cette trame de l'oeuvre qui est celle du conte de fée qui tombe en miette. Martine a tout de la princesse (M. Georges, le mari de Mme Donzert la compare à la princesse au petit pois, et, par sa folie maniaque, c'est ce qu'elle est), elle a tout pour vivre un conte de fée, mais elle s'autodétruit d'une façon qui m’horripile assez, au point que je n'ai eu aucune compassion pour elle. C'est pour moi un personnage qui se situe entre Emma Bovary et Scarlett O'Hara, sauf qu'elle ne procure pas cet attachement que l'on peut avoir pour des personnages pourtant désagréables (comme Scarlett O'Hara ou Catherine Earnshaw).



C'est en effet un personnage totalement vide, qui ne sait pas aimer, une pure égoïste qui ne suscite pas la moindre compassion. Ce passage résume bien tout le personnage et sans doute tout le roman lui-même:

"Sur le papier glacé, lisse, net, les images, les femmes, les détails étaient sans défauts. Or, dans la vie réelle, Martine voyait surtout les défauts... Dans cette forêt, par exemple, elle voyait les feuilles trouées par la vermine, les champignons gluants, véreux, elle voyait les tas de terre du passage des taupes, le flanc mort d'un arbre déjà attaqué par le picvert... Elle voyait tout ce qui était malade, mort, pourri. La nature était sans vernis, elle n'était pas sur papier glacé, et Martine le lui reprochait".



On voit bien ici que le personnage de Martine est rongée par son caractère manique: tout doit toujours être parfait, mais le revers de cette perfection, c'est que tout n'est que façade (comme son appartement). Le point intéressant dans cette description, c'est que Martine se faisait appeler Martine-perdue-dans-les-bois car, petite, elle avait disparu dans la forêt et tout le village était parti à sa recherche pour finalement la trouver endormie au pied d'un arbre, absolument pas paniquée. Une vraie petite princesse (on se souvient de Blanche-Neige qui chante avec les animaux de la forêt). Mais en vérité, elle n'est jamais sortie et ne sortira jamais de ces bois, des bois de la société de consommation, des bois du crédit.



Martine est une jeune femme qui ne lit pas, parce que "les histoires des autres [l']embêtent, [elle a] déjà assez de mal avec la [sienne)" (ce qui est assez ironique car sa vie est un conte de fée, ce qui prouve qu'elle met l'idéal si haut qu'elle ne pourra jamais l'atteindre). Finalement, il lui manque sans doute cela: le romanesque. Si Emma Bovary succombe au rêve d'une vie romanesque, au moins a-t-elle un monde intérieur riche, bien qu'elle passe à côté de sa vie; Martine passe à côté de sa vie, et n'a rien pour elle: elle est vide. Cela me fait penser à ce passage que je trouve assez drôle: Daniel l'emmène dans un musée (car lui aime l'art), et lui demande ensuite ce qu'elle a aimé: "Rien, dit Martine, j'aime mieux la toile sans peinture dessus, propre...". A l'image de ce qu'elle aime, j'ai le sentiment que Martine est une toile sans peinture, et c'est pourquoi je n'ai pas réussi à établir de lien avec elle.



En fait, je dirais que le lecteur se retrouve dans Daniel, car il essai de l'aimer, mais la personne de Martine est tellement hermétique, fermée, qu'on se heurte à un mur, et on finit par la délaisser sans peine. Daniel et Martine n'ont rien en commun: Daniel a pour passion la rose, et il cherche de toutes ses forces à créer une nouvelle rose (c'est-à-dire quelque chose d'après tout éphémère, de vivant), mais Martine ne comprend en rien cette passion et refuse de le soutenir dans cette entreprise (d'où le fait qu'ils vivent séparément), car pour elle, seuls les biens matériels qui font d'elle une petite bourgeoise exemplaire ont de la valeur. En somme, elle met toute sa vie dans des objets monstrueux là où Daniel comprend qu'il ne faut pas grand'chose pour vivre, et que la création et l'amour suffisent à l'Homme.



"[...] lui, ne souhaitait qu'une chose: la voir heureuse. Et c'était incompréhensible qu'un bonheur qui dépend d'objets inanimés, que l'on peut simplement acheter, fût disputé à qui que ce soit... Daniel se sentait mesquin, pauvre de générosité. Et en même temps révolté de voir le bonheur à la merci d'un frigidaire. Qu'est-ce qu'il y pouvait, mais qu'est-ce qu'il y pouvait!

Que pouvait-il contre l'idéal électro-ménager de Martine? C'était une sauvage devant les babioles brillantes, apportée par les blancs. Elle adorait le confort moderne comme une païenne, et on lui avait donné le crédit, anneau magique des contes de fées que l'on frotte pour faire apparaitre le démon à votre service. Oui, mais le démon qui aurait dû servir Martine l'avait asservie. Crédit malin, enchantement des facilités qui comble les désirs, crédit tout puissant, petite semaine magicienne, providence et esclavage.

Daniel se sentait battu, bêtement battu par des objets. Sa Martine-perdue-dans-les-bois convoitait follement un cosy-corner".



Pour conclure - et parce que je ne veux pas donner le sentiment que je n'ai pas aimé ce livre, ce n'est qu'envers Martine que j'ai développer une certaine répulsion - je dirais que c'est un livre à lire, trop peu connu sûrement, ce qui est fort dommage car c'est un livre simple, accessible à tous, dont la thématique de la société de consommation permet d'expliquer une époque (les Trente Glorieuses) mais permet aussi de réfléchir sur notre propre époque qui ne permet guère aux individus de faire mieux que Martine. C'est agréable aussi, de retourner vers une écriture simple qui pose simplement l'intrigue: l'Homme a tout pour être heureux, mais la société est un obstacle propice à sa chute. En outre, c'est un livre que l'on peut aisément utiliser dans une dissertation de lettres, de philo, d'histoire selon le sujet, et je pense que la simplicité de l'oeuvre est ici un avantage pour la démonstration. Par conséquent, je recommande!
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Elsa Triolet n'était pas une inconnue pour moi, mais je n’avais rien lu d'elle, ni d'Aragon d’ailleurs! J'ai beaucoup aimé cette lecture. J'ai trouvé ce regard sur la société de consommation très juste et même toujours d'actualité, cette soif d'avoir plus, toujours plus! Martine à force de volonté sort de sa condition, cependant prise dans on élan elle trébuche sur les marches de la vie. L'amour qu'elle porte à Daniel lui aussi passe à la trappe. Je ne peux pas dire que cette Martine attire la sympathie, la fin est terrible. J'aime le style d’Elsa Triolet, les mots sont justes, les descriptions très parlantes, bref je vais continuer à lire Elsa Triolet
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit



A la façon d’un conte moderne, Elsa Triolet narre l’histoire de Martine, petite fille qui vit dans un milieu misérable, sœur de nombreux autres enfants et fille d’une mère semi prostituée. La crasse, les rats, l'alcool, la faim sont au rendez-vous au début du roman. Martine va rencontrer sa « bonne fée » grâce à l'école et à ses bons résultats ; elle va découvrir une meilleure amie, la fille de la coiffeuse du village. Dans l’univers de « M’man Donsert », tout est propre et sent bon, tout est beau. Martine découvre le confort moderne, allant du gaz à l’eau chaude, en passant par les produits de beauté, des meubles neufs ou encore, l’électro-ménager. L’héroïne, aidée par la coiffeuse et son amie, échappe à son milieu. Partie à Paris avec sa famille d’adoption, elle va devenir manucure dans un salon parisien. Son obsession de la propreté et du travail bien fait lui permettront de se construire une vie totalement inverse de celle de son enfance et de sa famille dont elle n’entendra plus jamais parler, jusqu’à la mort de sa mère. Ainsi, Martine se crée un monde à elle qui doit être immaculé, au prix d'achats inconsidérés et à crédit.

A travers ce roman, Elsa Triolet nous raconte l’histoire d’une jeune femme belle mais peu cultivée, sympathique mais incapable de supporter le monde réel et c'est pour celui qu'elle finira par rompre avec le seul homme qu’elle ait jamais aimé depuis son enfance, Daniel, jeune horticulteur qu’elle a fini par épouser mais tout en vivant séparée de lui (celui-ci courant après la gloire de la création d'une nouvelle rose). La jeune femme, en fuite de sa propre histoire, sera mise en garde à plusieurs reprises par un des personnages du récit, souvent à l’aide d’exemples tirés des contes merveilleux. Le roman se termine par la ruine absolue de Martine et par la perte de son emploi, son retour dans la maison de sa mère qui vient de mourir. La fin effroyable est à la fois réelle et métaphorique : les rats, à l’instar des créanciers, attaquent et dévorent Martine.

Ce roman qui pourrait, au premier abord, sembler simpliste, évoque la période de fin de guerre, la grande misère d’une majorité de la population qui n’a pas les moyens de se nourrir ou de se loger, vivant parfois dans des cabanes, en lisière des villes ou villages. Certaines femmes ayant perdu leur époux à la guerre, sont contrainte de vendre ce qui leur reste de charmes ou de dignité pour faire bouillir la marmite ou payer des vêtements à leurs enfants. Il s’agit aussi du début de la société de consommation qui ne peut qu’attirer davantage ceux et celles qui ont manqué de tout, les piégeant grâce aux multiples crédits et intérêts à rembourser, dans une sorte de tonneau des Danaïdes.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Dialectique matérialiste contre mysticisme consumériste.



France. Années cinquante. La société meurtrie de l'Après-guerre glisse dans le consumérisme. Martine-perdue-dans-les-bois, issue de la plus basse extraction miséreuse, se retrouve plongée progressivement dans le monde doré du superflu et de l'apparence-reine. En opposition, se trouve son mari Daniel, très attaché à sa ferme et à ses expérience en génétique comme rosiériste. Le temps passant, le fossé de leur relation se creuse, entre une Martine revenue du pays des mystères et s'accommodant d'une vie futile "à crédit" et, d'autre part, d'un Daniel convaincu du progrès humaniste se devant d'être au centre d'une vie sincère et vraie, harmonieux avec la Nature.

Compagne d'Aragon, Elsa Triolet développe une idée chère au mouvement communiste de l'époque, à savoir le triomphe de la dialectique matérialiste face aux visages multiples du mysticisme multiséculaire.
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L'âge de nylon, tome 1 : Roses à crédit

Triste réalité des crédits à la consommation mêlée d'une histoire d'amour un peu hors du commun... C'est un classique et je vous conseille vivement de le lire !
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