Elle plisse les paupières sous l’éclat du soleil. Une vingtaine de petites huttes rondes, faites de bois et de jonc, s’échelonnent autour de la grand-place. Des arbres verdoyants les baignent de leur ombre, et des plants de tomates, de piments, des avocatiers ponctuent la terre brune à leurs pieds. Au-delà des dernières habitations se dessine la ligne courbe de la jungle. Des oiseaux volent en piaillant au-dessus des cimes.
Au centre de la place, à l’ombre d’un ficus géant, sont assises les marchandes de Huaxca. Des grappes de fruits, de légumes, des coquillages nacrés, des plats emplis de poudres colorées ornent les tissus disposés à même la terre. Des parfums d’épices dérivent dans l’air chaud, vibrant du matin.
Espère le mieux et prévois le pire !
- Qu'est ce que c'est ? demande Hamilton. Des zombies ?
Lombardi secoue la tête :
- Vous vous croyez dans Resident Evil ?
- Pas la moindre idée de ce que ça peut être, répond Fields. Je suis pas zoolophile.
- Zoologue, corrige Lasios.
- Rien à foutre !
Il est coutume, en ce monde, que les uns montent et les autres descendent.
- Si les IA (Intelligences Artificielles) sont capables d'apprendre toutes seules, qui dit qu'elles ne chercheront pas à nous dépasser? A quelle catastrophe faudra-t-il arriver pour que de réelles précautions soient enfin prises ?
Être concubine, c'est être appréciée comme une œuvre d'art vivante.
Tu es comme l'eau de cette rivière. Même prise au piège, tu trouves un nouveau passage.
Je soupçonne les gardiens de m'avoir nourri dans le seul but de me garder sur le fil de la vie. Juste ce qu'il faut pour qu'ils puissent décharger, sur moi, les colères qui les étranglent et les frustrations que le monde leur a infligées; insatisfactions sociales, affectives, sexuelles... juste ce qu'il faut pour libérer, sur moi, leurs pulsions les plus animales, les plus terribles, les plus meurtrières. Les vengeances les plus abjectes.
Au harem, la connaissance et le pouvoir se confondent.
- Tene jouait à un jeu lorsqu'elle m'a convoquée.
- Elle jouait sans doute au patolli.
- Ca consiste en quoi ?
- Il s'agit de lancer des haricots numérotés et d'avancer les pions sur un plateau. Le plateau représente les cinquante-deux années d'un faisceau. Tene s'en sert pour connaître l'avenir. Tu étais sans doute sur le plateau, ce soir-là.
Un silence se fait, seulement agrémenté du bruit des pierres sur le basalte. Ameyal revoit Tene lancer des haricots et avancer ses pions dans le salon doré. Elle revoit son regard avant qu'elle ne balaye le plateau des mains. Ne sont-elles toutes que des pions dans les mains d'une vieille folle ?