Erik Kriek a eu toute sa vie beaucoup d'admiration pour le très sombre monde de Lovecraft. Raison pour laquelle il avait décidé de re-raconter certaines des histoires du Maître de l'horreur à sa façon, dans des "graphics novels". le recueil a vu le jour en 2012...soixante-quinze ans après la mort de Lovecraft...
Les dessins en noir et blanc sont précis, détaillés et complètent le texte en un continuum. C'est particulièrement vrai quand on observe avec quel attention Kriek a placé ses personnages dans les paysages et/ou leur environnement. Il en résulte une atmosphère faite de menaces et effrayante. L'auteur a également su saisir ces moments dans les récits de Lovecraft où l'invisible se meut en réalité : un univers peuplé de créatures monstrueuses que Kriek a dessiné avec un "affreux" réalisme.
Le choix des histoires ne s'est pas fait au hasard : le dessinateur a choisi des nouvelles représentatives de l'oeuvre de Lovecraft : science-fiction ("la couleur tombé du ciel"), son amour pour la science ("l'Invisible") ou encore le monde de Cthulhu ("Dagon", "le cauchemar d'Innsmouth").
Il est de notoriété publique que Lovecraft ne conférait que peu de profondeur psychologique à ses personnages, mais dans le dernier et plus long récit ("le cauchemar d'Innsmouth"), Kriek a su développer la personnalité de son "héros" en mettant l'accent sur ses traits et ses yeux, au moment où le jeune homme de l'histoire se rend compte de l'aliénation de son entourage.
Je suis restée bouche bée et admirative devant cet oeuvre graphique plutôt personnelle et devant la subtilité avec laquelle Kriek a su rendre hommage, en peu de pages finalement, à un écrivain considéré comme excentrique, admiré par les uns, détesté par d'autres...
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L'adaptation en bande-dessinée de ces quelques textes, "Je suis d'ailleurs", "la couleur tombée du ciel", "Dagon", "L'invisible", "Le cauchemar d' Innsmouth" d' Howard Phillips Lovecraft par Erik Kriek est si réussie que l'on dirait, si l'on ne le savait impossible, presque une collaboration entre les deux hommes.
Le pari était périlleux, peut-être même un peu présomptueux.
Cet album, au format atypique, est un très bel hommage au maître de l'invisible, à l'écrivain de "l'au-delà".
Dès la première page, la silhouette émergeant sur la couverture d'un monde de cauchemar fait place au portrait de l'auteur mythique élégamment crayonné au crayon gris.
Erik Kriek prévient, il a osé quelque chose de périlleux : "mettre en dessins ce qui peut-être laissé aussi bien, et avec davantage d'efficacité, à l'imagination du lecteur".
Mais après avoir découvert ce magnifique album, l'imagination du lecteur n'en est que décuplée et l'envie de se replonger dans ces textes formidable est multipliée.
Le choix du noir et blanc s'imposait.
Le graphisme du dessin de Kriek colle à la peau de la narration et des dialogues. L'ensemble est sombre, moite et inéluctablement fantastique.
Erik Kriek se permet, en page de garde, sous forme d'un clin d’œil malicieux de se dessiner. Peut-être s'est-il représenté suant et l'air anxieux , face au regard de Lovecraft, par peur d'avoir trahi et pêché par orgueil ?
Qu'il se rassure, il signe un album brillant, intelligent, fidèle et passionnant.
Quoi d'étonnant car Erik Kriek est aussi le dessinateur hollandais qui a fait ce portrait superbe de Will Eisner en couverture du premier numéro de "Eisner Beeld Verhalen" le magazine créé en 2008 aux pays-bas par le maître américain de la BD.
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J'aime beaucoup tout l'univers écrit par Lovecraft, ici Erik Kriek nous présente un ouvrage d'une très grande qualité qui respecte et rend hommage aux histoires de Lovecraft.
Les dessins sont fournis, précis et bien détaillés, le noir et blanc est ici une bonne idée qui aide à s'immerger encore plus de ce monde d'angoisse et les textes respectent les originaux.
Se plonger dans les mondes du Chtulu est pour moi toujours un plaisir et ici j'ai eu le même plaisir à découvrir la bande dessinée alors que je connaissais déjà chaque histoire présentée, ce qui veut dire que le pari est réussi et que Mr Lovecraft aurait certainement été fier de voir l'hommage rendu à une partie de son œuvre de cette si belle manière.
Un ouvrage à posséder et à lire à tout amateur de Lovecraft et plus largement à tout amateur de récit d'angoisse et de terreur !
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Huub et Sara déménagent. Ils s'installent à la campagne, dans une maison au milieu d'une forêt, avec l'espoir de repartir de l'avant après le décès de leur fils Ruben. Mais les lieux semblent chargés de souvenirs et de légendes. D'étranges dessins sont gravés sur les arbres au bord d'une mare...
Après "l'exilé", un récit de vengeance viking, Erik Kriek sème le trouble avec ce drame aux frontières du réel. Deuil, résilience, couple, psychose, l'histoire de Huub et Sara abordent différents sujets au travers de situations dans lesquelles le fantastique côtoie l'épouvante. Sara sombre peu à peu dans un monde parallèle, attirée par cette mare à l'eau noire...
Erik Kriek propose un environnement graphique très réussi, sombre et oppressant avec un spectre de couleurs restreint. La belle couverture, qui fait penser à celles de Charles Burns, plante le décor: une forêt épaisse et pesante et une femme au bord du précipice.
"La mare" est une excellente lecture pour ceux qui aiment les récits où oscillent les frontières avec le réel. Une narration maîtrisée, un univers graphique impressionnant et un très beau livre, dos toilé !
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L'auteur hollandais de Dans les pins - 5 ballades meurtrières a également réalisé une série de nouvelles adaptées de H.P. Lovecraft, le maître de l'effroi de la côte est américaine. J'avoue que c'est plutôt réussi.
Encore une fois, je trouve que cet auteur nordique a des influences dans le comics qui sont flagrantes. Si on ignorait qu'il vient des Pays-Bas, on pourrait penser que c'est une oeuvre américaine. Il est réellement imprégné par la culture de ce pays. Cela fait toujours du bien de découvrir de nouveaux auteurs qui élargissent leurs horizons.
J'ai grandement apprécié le trait ainsi que la mise en scène de ces contes fantastiques.
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J'avais adoré lire "L'exilé" à la sortie, donc j'étais ravie de retrouver la patte graphique si singulière d'Erik Kriek, toujours aux éditions Anspach.
Je me doutais d'avance que ce nouveau récit allait moins me plaire, par la nature des thématiques abordées, mais je m'y suis toutefois lancée avec plaisir.
Pour la blague, j'ai trouvé que la couverture faisait très Burns, très esprit éditions Cornélius (ce qui n'est pas une mauvaise chose ni tout à fait délirant dans l'idée).
Comme je m'y attendais, j'ai en effet été moins touchée par ce one-shot se déroulant dans la campagne néerlandaise, autour d'un couple frappé par un deuil terrible. Environ six ans auparavant, Huub et Sara ont perdu leur fils unique à la suite d'un accident. On comprend rapidement que si Huub a réussi à avancer, Sara n'arrive pas à s'extirper de son deuil, qui la dévore. Elle n'a plus d'envie, ni d'inspiration pour peindre, elle qui touchait une carrière internationale du bout des doigts.
Suite au décès d'un grand-oncle d'Huub, le couple quitte Amsterdam pour la campagne profonde. La maison a besoin de gros travaux et Huub, architecte, s'y attèle avec entrain. Sara, elle, semble plus fascinée par la sombre forêt qui les entoure, dérivant doucement vers la folie...
Si l'histoire en elle-même de m'a pas touchée plus que ça, j'ai trouvé intéressant le parallèle entre l'aspect irrémédiable du deuil de Sara, qui la fait graduellement basculer dans la folie, dans les visions et malgré toute l'horreur autour, vers son fol espoir de rejoindre son fils.
D'ailleurs, malgré l'évidence d'un élément fantastique, voire horrifique, on pourrait presque se demander si les personnages n'ont pas "juste" eu des hallucinations et que tout s'est déroulé de façon tristement rationnelle. J'ai bien aimé cette ambivalence jusqu'au bout du récit, le fait de ne pas trop s'appuyer sur le surnaturel : juste assez pour nous faire froid dans le dos et faire avancer l'intrigue, mais pas jusqu'à trop nous en dévoiler.
En résumé, une narration toujours bien maîtrisée et un univers graphique toujours aussi beau et percutant. Vivement le prochain !
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Je dois bien avouer que ces ballades meurtrières au coin des bois sont parfaitement réussies. Il y a 5 récits qui ont chacun leur personnalité bien qu'ayant le même thème. Il n'y aura pas de distorsion graphique bien au contraire. A noter que j'ai beaucoup apprécié cette bichromie qui est tout à fait adaptée au récit. L'auteur est pourtant néerlandais mais il a totalement assimilé la culture américaine.
En effet, il faut savoir que les murder ballads constitue une grande partie du répertoire américain de la chanson. Les textes de ces ballades ont pour point commun le meurtre. Les faits divers peuvent être assez horribles. Ils ont d'ailleurs été véhiculés jusqu'en Grande-Bretagne grâce aux immigrants.
Bref, du bon travail sur le fond comme sur la forme. Se promener dans les bois n'est jamais anodin.
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C'est pour rendre hommage à Lovecraft, auteur culte de nouvelles horrifiques, qu'Eric Kriek les a mis en images. En BD, plutôt. Et le résultat est vraiment bon : graphisme comics 50s, atmosphère glauque, collante, personnages ravagés physiquement et psychologiquement... La qualité ne se dément pas au fil des nouvelles adaptées ici.
Pour les amateurs d'horreur et ceux qui veulent se faire peur !
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"L'exilé" c'est l'histoire d'un homme, Hallstein, bannit d'Islande pour avoir assassiné un ami, qui revient au pays après avoir purgé sa peine, mais c'est aussi l'histoire des familles gravitant autour de ce drame. Il est dans un premier temps possible de s'y perdre parmi les nombreux protagonistes de cette saga, mais chacun y trouve sa place et sa raison d'être. Nous n'avons pas ici à faire à un récit héroïque ou fantastique, mais bien une histoire à échelle humaine où la haine, la rancune et la jalousie sont autant de maux pouvant briser des familles.
Ce roman graphique nous transporte au cœur d'un pays hostile, où la loi du clan est plus importante que tout. Une histoire forte porté par un dessin somptueux, tout en nuance de bleu/gris et de noir... ponctué de temps en temps de rouge.
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Islande, Xe siècle.
Hallstein Thordsson revient sur sa terre natale après un exil de sept ans pour le meurtre d'un ami d'enfance. Accompagné de ses fidèles compagnons Bjarki et « le Finnois », Hallstein n'aspire qu'à la tranquillité de la vie de fermier auprès de sa belle-mère et de son demi-frère. Cependant, son retour va raviver d'anciennes blessures ainsi que le désir de vengeance d'Einar, frère de la victime de Hallstein ; ce dernier comprendra vite que ce qui l'attend n'est pas un havre de paix, mais une chasse à l'homme.
Au premier coup d’œil, la superbe couverture plante le décor ainsi que l'ambiance brumeuse qui subsistera une fois l'album refermé. Le contraste des encrages et entre les deux trios de couleurs (noir/blanc/gris et noir/blanc/rouge) représente parfaitement le climat rugueux, froid et sauvage dans lequel se déroule l'intrigue.
Ce roman graphique se situe à mi-chemin entre western version scandinave et drame aux accents shakespeariens, loin du manichéisme et des clichés qui entourent souvent les vikings. Ici, les vikings ne sont pas des guerriers assoiffées de sang, mais des fermiers, pêcheurs, artisans... Les locaux et leur quotidien sont authentiques, simples, jusqu'au retour bouleversant de « l'exilé ».
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J'ai eu dû mal à le trouver en bibliothèque mais je l'ai enfin !
Un excellente adaptation, et en noir et blanc, il y a une chose que je n'aime vraiment pas dans les comics c'est bien les couleurs criardes des années 80/90, une chance pour moi, ça m'a permis de mieux apprécier ce livre.
Dans un univers complet, l'auteur à su adapter l'immense œuvre de Lovecraft, allant jusqu'à faire des yeux étranges pour chaque numéro de page (en allant très vite on voit l’œil s'animer).
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Adapter Lovecraft n'est pas chose aisée tant, comme le fait d'ailleurs justement remarquer l'introduction de cet album à la présentation très soignée, l'écrivain de Providence a crée un panthéon et un bestiaire aussi étrange que délirant. L'exercice a déjà été tenté maintes fois en bandes dessinées parfois par des auteurs talentueux (Corben, Breccia, Lalia...) avec plus ou moins de réussite. Il faudra maintenant compter avec la version de Kriek, artiste néerlandais, qui nous livre ici cinq nouvelles très représentative de l'oeuvre de HPL où son style graphique et son utilisation du N&B, très dans l'esprit des Creepy et autres Eerie d'époque, font merveille. Tout l'horreur et le malaise des textes originaux est là et c'est avec des frissons que l'on (re) découvrira ces histoires.
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Jolie nouvelle graphique que celle ici commise par cet auteur néerlandais que je n'avais pas le plaisir de connaître jusqu'alors.
Cette intrigue classique du banni de retour sur ses terres natales et de la vendetta familiale qu'il entraîne est ici enrichie de multiples références à la culture médiévale islandaise, sur laquelle l'auteur s'est largement documenté.
Il annexe d'ailleurs une petite bibliographie et un glossaire des termes d'époque qui sont fort bienvenus.
La bichromie utilisée renforce l'impression de rudesse du climat et des hommes, et l'immersion du lecteur dans ce cadre austère, dont le charme rural mais guerrier saura le dépayser.
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Ce récit se passe en Islande à l’époque charnière de l’arrivée du christianisme. C’est une histoire de familles, d’héritage, de fils prodigue qui revient après un bannissement de sept ans, il revient, retrouve sa mère encore jeune, celle-ci est harcelée par ses voisins, qui verrait bien un mariage forcé entre les deux clans, pour pouvoir récupérer ses terres.
Le graphisme est fait de grandes surface de noirs imposants, quelques couleurs en applats, gris reposants, ocres rouges agressifs, rarement plus d’une couleur en plus du noir par page, comme des bichromies, cette forte présence du noir renforce la dureté du climat, du mode de vie, des traditions, des lois, de l’économie. L’ambiance est très réussie, mais je suis un peu moins séduit par l’intrigue : une histoire de rancoeur, de vengeance, qui pourrait tout à fait se situer dans un autre contexte, comme un western par exemple, et les lois et la structure sociale sont un peu compliquées à assimiler, le fait qu’on confonde parfois les personnage ne facilite pas la compréhension, ma lecture a été hachée, hésitante, et l’intrigue ne m’a pas soulevé autant que le contexte me laisser espérer. Une légère déception au final.
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5 balades meurtrières mises en image par Erik Kriek, forment un ensemble cohérent, en bichromie, différente pour chaque histoire. C'est agréable à lire, sympathique à feuilleter. Des petites histoires traitant des meurtres, des vengeances, des adultères, sans forcément avec une fin heureuse mais une morale apparaît pour chaque nouvelle.
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Après un exil de sept ans, Hallstein revient dans le domaine paternel, en Islande. Il y retrouve sa marâtre et son demi-frère, son père ayant été emporté par un ours. Solveig dirige à présent les affaires mais cette jeune et jolie veuve est courtisée par le violent Einar. L'Islandais, comme l'appellent ses compagnons de voyage, tente de se refaire une "virginité" en sa contrée mais le passé le poursuit, que ce soit dans ses songes ou dans la vie quotidienne.
Rédemption, vengeance, violence, sorcellerie, amour : c'est une vraie saga islandaise condensée en 184 pages que nous conte Erik Kriek. Elle tient relativement la route malgré quelques incohérences et revirements abrupts dans le scénario.
Le dessin est sombre, les paysages magnifiques mais une fois encore, j'accroche peu aux visages des personnages sous certains angles.
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