Citations de Francis Hallé (79)
[...] je dirais que ce qui compte dans la sauvegarde des forêts tropicales, ce n'est pas tant que nous ayons un besoin immédiat de ces forêts tropicales, mais que nous ayons besoin des qualités humaines nécessaires pour les sauver ; car ce sont précisément celles-là qu'il nous faut pour nous sauver nous-mêmes.
Quel que soit votre métier, à un moment donné vous allez vous demander
si vous n’êtes pas en train de perdre votre temps, et même si vous n’avez pas une activité pernicieuse. Vous pouvez être commerçant, archevêque, marin pêcheur, musicien ou médecin, tôt ou tard vous aurez l’impression de perdre votre temps. I l existe une seule exception : si vous plantez des arbres, vous êtes sûr que ce que vous faites est bien
Les réalisations de l'être humain - même les plus complexes - sont très simples si on les compare à une forêt équatoriale.
Je voudrais une science unifiée, ouverte au monde entier mais refusant l'obscurantisme, rigoureuse mais sans jargon, accueillante aux compétences de l'amateur, capable de satisfaire aux passions de la jeunesse, réhabilitant l'observation, associant le travail de terrain aux recherches en laboratoire...
Quel meilleur témoignage que celui des plantes, belles et utiles, discrètes et autonomes, silencieuses et d'une totale non-violence !
Je ne fais que planter des arbres : je sais que je suis trop vieux pour jamais pouvoir profiter ni de leurs fruits ni de leur ombre, mais je ne vois pas de meilleur moyen de m’occuper de l’avenir
Vivre pleinement sa vie n'est pas vivre pour le futur.
Observer un animal crée une tension, car nous savons à quel point cet instant est fugace ; observer une plante engendre la sérenité : c'est le temps lui-même qui apparaît. Sa croissance est très lente, mais cependant perceptible avec de l'attention, nous permet de renouer avec le rythme temporel paisible qui était celui de notre enfance.
S'emparer d'un moment éphémère, comme fait le photographe, c'est se résigner à devoir se satisfaire d'une information limitée ; au contraire, le temps long du dessin est celui du dialogue avec la plante, le temps de la réflexion, bien nécessaire lorsqu'on est en face d'un alien ! Le dessin est une oeuvre de la pensée humaine : le dialogue avec le "motif" dessiné y requiert une place ; si une question se pose en observant l'alien, je tiens à ce notre entrevue se prolonge suffisamment pour que la réponse ait le temps de surgir.
Lorsqu'elles commencèrent à se répandre, à partir de 1859, les idées de Darwin sur l'évolution biologique devinrent immédiatement un sujet de scandale dans l'Angleterre de l'époque victorienne : le grand public, les scientifiques, le clergé, tout le monde était furieux à l'idée de participer d'une quelconque nature animale. La Bible étant considérée comme l'expression de la vérité, il convenait d'en prendre le texte au pied de la lettre, notamment sur ce point essentiel : Dieu avait créé l'Homme à Son image et il n'y avait pas à revenir là-dessus.
les hommes s'intéressent surtout aux plantes pour ce qu'elles peuvent leur apporter. Ainsi, on utilise les plantes médicinales mais on ne se demande pas à quoi cela leur sert de synthétiser des molécules coûteuses et bénéfiques ! Dans le monde animal, tout à une fonction, rien n'est inutile. Mais l'accumulation chez les plantes d'exemples comme l'hévéa avec le latex dont on ne comprend pas la raison d'être me laisse penser qu'elles ne fonctionnent pas comme les animaux. Sont-elles capables d'actes gratuits ? Ce n'est pas une hypothèse très satisfaisante mais peut-être diffèrent-elles des animaux en ce domaine ?
La forêt mérite une définition ambitieuse car c'est bien plus qu'une collection d'arbres vivant côte à côte ; ces arbres doivent appartenir à des espèces diverses et être d'âges variés ; c'est pourquoi une plantation monospécifique dont tous les arbres ont le même âge ne doit pas être considérée comme une forêt.
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S'intéresser aux plantes, c'est aussi se situer dans une tradition : on éprouve spontanément une attirance envers les animaux, mais on apprend à aimer les plantes.
Qu'il s'agisse de plantes ou d'animaux, la beauté visible et fonctionnelle n'est nullement subjective. Il s'y ajoute un acquis important: si nous apprécions cette beauté, c'est bien que l'être humain a les mêmes critères esthétiques que les animaux et que, si pour nous les fleurs sont belles, c'est que les plantes ont, en matière de formes, de couleurs et de parfums, des charmes auxquels nous sommes aussi sensibles que le reste de la faune.
Lorsque vous rencontrez un bavard ou un frimeur, dites-leur que la modestie sied à qui disposait d’un anus avant même d’avoir une bouche, et n’avait comme moyen d’expression, avant de pouvoir parler, que le pet. Les animaux sont rigolos.
L’arbre est un organisme tellement généreux qu’il offre son ombre à ceux qui viennent l’abattre
Toute l’histoire de notre évolution biologique tient dans la vie d’un arbre.
L'arbre peut se subdiviser en autant de nouveaux plans distincts qu'il possède de rameaux ; à son tour le rameau peut en fournir autant qu'il porte de bourgeons ; mais le bourgeon n'est plus divisible, il périt par le fractionnement. L'individu végétal est donc le bourgeon.
On retrouve l'anthropocentrisme dans ce que les écoles forestières enseignent aux futurs ingénieurs : "Une forêt que l'on n'exploite pas va s'étouffer et mourir." Si l'on se souvient que les forêts mondiales existent depuis le Dévonien, il y a 380 millions d'années, on admettra que l'anthropocentrisme atteint ici les dimensions de l'arrogance.
Par contre, une homologie fonctionnelle indiscutable unit la surface interne et digestive de l’animal à la surface externe et assimilatrice de la plante. Sur le plan de l’appropriation de l’énergie, ces deux surfaces s’équivalent. L’animal ? Une plante ahurissante, retournée comme un gant, qui aurait enfoui ses feuilles et ses racines dans son tube digestif. La plante ? Une sorte d’animal fabuleux, retourné dedans-dehors, et qui porterait ses entrailles en guise de pelage.
Combien existe-t-il d'espèces d'arbres ?
Soixante-dix mille mais, comme je l'ai dit, cela augmente très vite, il faut en rajouter une centaine par an, découvertes par des botanistes qui travaillent dans des régions forestières encore peu connues.