Les adultes hyperactifs distinguent probablement mieux que personne le bon grain de l'ivraie, car ils éprouvent eux-mêmes les symptômes décrits. Et s'ils lisent par exemple que l'hyperactivité est un diagnostic fantaisiste et une mode médiatique de plus, ils s'en laissent rarement compter car ils savent, pour subir douloureusement ce trouble depuis l'enfance, que c'est pure bêtise. Ils savent aussi que le sport, les oméga-3, la flûte à bec et la relaxation ne sont que promesses illusoires.
La passion pour la lecture des enfants précoces n'est pas plus autistique que la passion des jeux vidéos de leurs camarades moins "intellos", mais curieusement on s'inquiète des enfants grands lecteurs, tandis que l'on se contente de gronder les enfants qui ne "décollent" pas de l'écran.
L'école impose aux enfants une forme de standarisation de la progression des acquisitions scolaires.
Si l'écriture obéit à l'intellect, elle est également soumise à l'habileté graphomotrice.
Ces sont des enfances sacrifiées sur l'autel de l'ignorance ou de l'idéologie. Il faudrait tout un livre pour rapporter les témoignages des parents sur le sujet. Ce médecin qui explique savamment que "l'hyperactivité a été inventée pour donner des excuses aux parents qui élèvent mal leurs enfants", cette psychologue scolaire qui donne le bon conseil de "priver enfant agité de cadeaux de noël pour qu'il puisse comprendre qu'il faut changer de comportements" et ces innombrables psychiatres et autres psychologues qui se hasardent en d'improbables causes affectives et s'assoupissent en d'interminables psychothérapies.
Le déficit d'attention correspond à deux excès, soit l'excès de distraction, soit l'excès d'absorption. Pour un élève, l'excès de distraction c'est l'incapacité de suivre un cours sans que l'esprit ne vogue dans les nuages ou ne s'égare dans les bavardages. L'excès d'absorption c'est la difficulté à interrompre ou à solliciter un enfant lorsqu'il s'adonne à un jeu ou à une rêverie.
L'excès de distraction et l'excès d'absorption caractérisent deux troubles de l'attention, le premier par manque de constance, le second par manque de flexibilité.
L'hyperactivité peut désigner une vitalité bruyante ou un enthousiasme brouillon et ne mériter alors guère plus qu'une considération amusée. Elle peut aussi être dénoncée comme un trouble factice, conçu par des "psys" en mal de modernité. Elle peut enfin, et c'est ce que nous soutiendrons dans ce livre, représenter un authentique syndrome psychologique.
Le plus souvent, l'enfant est jugé "immature" et l'on attend le "déclic", le "moment ou il comprendra que l'école, c'est fait pour travailler", que "l'école, c'est pas fait pour s'amuser", que "dans la vie, il faut savoir faire des efforts", un peu plus tard on ajoutera le "manque de motivation" et ainsi, l'on pourra tenir des années sans que même l'hypothèse de l'existence d'un trouble ne vienne effleurer l'esprit de toutes les bonnes fées (enseignants, psychologues scolaires, médecins scolaires, etc.) que l'on a sollicitées.
Dans la foulée, les parents ne son que rarement épargnés, l'un des classiques étant de suggérer ou d'affirmer un "manque d'autorité" ou de faire un lien de cause à effet avec telle ou telle caractéristique familiale. Le psychologisme familial est l'un des loisirs préférés des professionnels de l'enfance.