Citations de GennaRose Nethercott (24)
La superstition est l'apanage des véritables gens de théâtre.
Au fil des générations, on oublie. Seul le corps se souvient. Le corps, et les fantômes. Flammes dansantes.
Isaac ne manquait jamais de charmer son auditoire. Son élocution était aussi précise, aussi agile qu'un trapéziste ; sa langue dansait, rarement interrompue, sur la corde raide. Quand il parlait, on l'écoutait.
Il y a le temps du chagrin et il y a le temps de la colère. Les deux sont nés du deuil. Le chagrin dure plus longtemps.
Il peut, si vous le laissez faire, devenir un compagnon, un chat errant qui ne vous quitte plus. Le temps du chagrin viendra : comme le chat, il a plusieurs vies. La colère, elle ne dure pas. Elle détruit le corps, comme un feu dans la maison, puissante, avide.
Et maintenant, son temps est venu.
Une meute n'a pas d'oreilles auxquelles on puisse parler, juste une bouche qui hurle.
Les contes, on ne les oublie pas ; ils se contorsionnent et se pelotonnent autour du cœur jusqu'à y être tranquillement logés. Ils sont fluides, changeant, ils peuvent s'adapter à toutes les circonstances qu'ils traversent. Ils changent dans la bouche des conteurs et se font au contour des oreilles des auditeurs. Les faits peuvent différer (les lieux, la couleur du manteau d'Untel, les espèces qui fleurissent dans un petit jardin circulaire) mais leur noyau reste le même. Ainsi survivent-ils. S'assimilent-ils. Et avec eux - le souvenir.
Les hommes les plus dangereux, les plus violents, sont ceux qui croient n'avoir aucune peur au monde.
C'est un peu comme des fantômes, non, les histoires qu'on répète sans cesse et qui ne se taisent pas ?
Quelle sorte de bête transforme des citoyens ordinaires en meute enragée, en éveillant leurs peurs ? Dans le monde réel, ce ne sont pas des monstres. Ce sont des hommes en quête de pouvoir.
Une citation à découvrir sur Babelio : La Maison aux pattes de poulet de GennaRose Nethercott
https://www.babelio.com/auteur/-/647825/citations/3211283
Je vous avais prévenus. L'histoire, telle qu'elle est, ce n'est pas toujours l'histoire telle qu'on voudrait qu'elle soit. Mais ce n'est pas une histoire, c'est notre monde. Un enfant mort. c'est un enfant mort. Un massacre, c'est un massacre. Les souvenirs, on doit les raconter. Les mains engendrent des mains. Les mères engendrent des enfants, qui à leur tour engendrent des filles. Les générations passent et, soudain, nous oublions. Nos descendants naissent en proie à des désirs qu'ils ne comprennent pas, car ils ont oublié. Leurs mains sont pleines de feu. Leurs jambes brûlent de fuir. Le corps se souvient. L'air aigri se souvient. Nous ne pouvons pas oublier. Je ne peux pas oublier. Et s'il faut que je me rappelle, vous aussi, j'en fais le serment.
Aujourd'hui, on dit que l'air, dans ce qui était autrefois Gedenkrovka, est plus lourd que la normale, et si différent qu'il vous pèse, humide, sur la peau. On dit aussi que la douleur peut se transmettre par le sang. Qu'un chagrin peut être si intense parfois qu'il transforme toute une lignée, qu'il peut réapparaître dans les corps des générations plus tard, longtemps après que le nom même de ce chagrin a disparu. Combien de temps faut-il au corps pour se rendre compte qu'il est indemne ? L'est-il d'ailleurs jamais ?
Sa peau... sa peau ondulait, comme soulevée par les flammes d'un feu de broussaille. Les veines saillaient, privées cependant du bleu outremer du sang qui les parcourt – le visage de l'homme était strié de cordes d'un blanc immaculé, comme si ses vaisseaux sanguins avaient été vidés, puis remplis de fumée. Ses lèvres laissaient échapper des volutes blanches, ses paupières des larmes gazeuses.
Je vous avais prévenus. L'histoire, telle qu'elle est, ce n'est pas toujours l'histoire telle qu'on voudrait qu'elle soit. Mais ce n'est pas une histoire, c'est notre monde. Un enfant mort. c'est un enfant mort. Un massacre, c'est un massacre. Les souvenirs, on doit les raconter. Les mains engendrent des mains. Les mères engendrent des enfants, qui à leur tour engendrent des filles. Les générations passent et, soudain, nous oublions. Nos descendants naissent en proie à des désirs qu'ils ne comprennent pas, car ils ont oublié. Leurs mains sont pleines de feu. Leurs jambes brûlent de fuir. Le corps se souvient. L'air aigri se souvient. Nous ne pouvons pas oublier. Je ne peux pas oublier. Et s'il faut que je me rappelle, vous aussi, j'en fais le serment.
Ce n’est pas seulement en lui prenant la vie qu’on tue un peuple, c’est en lui volant son histoire.
Ah, la puissance d'une histoire lorsqu'elle est murmurée à l'oreille d'un homme armé !
Dans une histoire, qu'il soit ou non soldat, celui qui veut faire du mal arrive toujours en uniforme.
Les docteurs de votre région ont accompli de grandes choses. Ils avaient imaginé un avenir radieux. Une humanité plus parfaite. Ils voulaient créer un meilleur pays pour leurs enfants, par la sélection biologique.
Ce n'est pas seulement en lui prenant la vie qu'on tue un peuple, c'est en lui volant son histoire.
Raison pour laquelle Ombrelongue avait besoin de détruire Pieds-de-chardon. Parce que la maison se souvenait. Tuez l'histoire, vous tuerez la culture.
– Les voleurs s'enrichissent en laissant des trous, dit le garçon, le doigt levé. Mais au bout d'un moment, ça se déséquilibre. La nature, elle met son nez là-dedans. Elle rétablit les droits. C'est le début du manque de bol. Tu commences à perdre des trucs, ton sac à dos, tes godasses ou pire encore carrément un bras, bordel, une jambe. Mais si tu mets quelque chose dans les vides, même un truc qui ne vaut pas grand-chose – Benji rendit la pièce à Isaac –, y a plus de trous noirs. Plus de manque de bol. Plus de fouille au corps par les flics.
Je sais, vous êtes là à écouter une histoire, et je vous interromps tout le temps. Mieux vaut que vous le sachiez dès maintenant : je vais coller une histoire dans les trous d'une autre et élaguer mes propres contes avant qu'ils soient finis. Vous pouvez toujours appeler ça des agaceries, moi je dis : c'est le suspense ! La vie d'ailleurs ne progresse-t-elle pas de cette manière ?