Nous nous promenons sur la plage avec cet écrivain roumain. Regardant la mer, il demande : Vous avez des requins ici ?
Oui, beaucoup, mais il ne faut pas regarder dans cette direction
.Ah, bon, pourquoi ?
Chez nous les requins vivent à l’intérieur des terres.
Qui n'aime pas lire dit qu'il n'a pas le temps de lire.
Qui aime lire dit qu'il n'a jamais assez de temps pour lire.
Il y a tout de même un avantage non négligeable à cette faillite : Je n'aurai plus à me préoccuper d'une actualité littéraire débile, des livres dont on parle. Je peux désormais me foutre de savoir si Anémie a un nouveau chapeau, si Christine angoisse toujours, si Muzeau est encore Placide, si Marc lévite dans les salons, Si Béchamel a changé de décolleté, et si Michel a regonflé ses particules, si le Goncourt est - comme d'habitude - de circonstance, si le prix de l'Académie n'est pas donné à un croûton (merci Desproges), si le Renaudot est bien tourné, et si le Médicis est conseillé pour les Catherine.
Ouf. Quel repos ! Quel bonheur !
Je peux enfin recommencer à lire juste ce qui m'attire.
Il écrit des polars régionaux. Sur l'insistance de sa femme, je l'invite à faire une signature à la librairie. Sa femme l'accompagne. Je leur offre un verre : Elle, "Non, merci.Et pour lui, un seul !" Il veut sortir fumer une cigarette. Sa femme : "Pas question, tu vas louper des ventes !" et, à moi : "Si je ne veillais pas à la rentabilité, il ne ferait rien, celui-là !"
Nathalie Sarraute meurt. M'inspirant des surréalistes, j'affiche en vitrine : "Nathalie Sarraute est morte, Claude Sarraute est vivante. C'est un double malheur pour la littérature."
Je récidive à la mort du solide Bizeau auquel survit malheureusement le bateleur Bizot. On va encore me prendre pour un intello.
Je pense à cette anecdote que raconte un auteur : Sur un salon quelqu'un lui demande si c'est son éditeur qui met la ponctuation dans ses livres. Non, dit-il, je ne mets que la ponctuation. Je laisse l'éditeur écrire le reste.
Je croise ce vieil ami qui a longtemps été libraire. Je lui dis que je viens d'ouvrir une librairie. Il a ce cri du coeur : t'es con ou quoi ?
Quand il n'y a pas de clients, on a le temps de commander tranquillement les livres qu'on ne vendra pas.
Ils aimaient la musique qui sentait la sueur et l'alcool, la fumée et les nerfs (...)