AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Guillaume Ancel (23)


Alors ce n’est plus qu’un réflexe de survie. Je me lève à moitié. Ils ne tirent pas. Je me lève complètement et je crie au pilote allongé derrière moi de courir , mais il me regarde hagard. Il est tétanisé.
Je le relève avec une force que je ne me connais pas, j’accroche ses mains à une sangle de mon gilet et je cours vers la sortie du réceptacle, 300 m, dans le sens de la descente. J’accélère, je sens mon compagnon d’infortune qui suit mécaniquement mes mouvements. Je le tire vers’ l’avant , j’essaie de m’accrocher jusqu’au tournant . Ma tête bourdonne, mes tempes bouillonnent , mes yeux se voilent , le tournant est tout proche , ma bouche est sèche, une branche casse comme un coup de feu...
Commenter  J’apprécie          50
Le plat est remarquablement préparé et relevé, il a une saveur que je ne connais pas. Je m'apprête à demander ce que c'est, quand Sethy m'arrête du regard et me conjure de ne pas poser la question. Je ne comprends pas sa réaction, alors il me traduit avec nervosité les propos du guide :
- Toi finir et nous partir !
C'est vrai que ce foie ne peut pas provenir de cochon ou de poulet, car nous n'en voyons aucun sous les pilotis des maisons. J'ai peur de comprendre à quoi Sethy fait allusion, mais pour une fois je me garde de le vérifier.
Commenter  J’apprécie          43
Un vieux professeur du lycée du Parc m'avait fait remarquer pendant mes études à Lyon, que le monde continue à tourner même lorsque nous n'en étions pas informés. Réciproquement, je découvrais que le monde pouvait ignorer sans problème ce que nous étions en train de faire.
Commenter  J’apprécie          40
Alors que tout était sous mes yeux, j’ai mis des années à faire le lien entre l’opération Turquoise et cette intervention lors du siège de Sarajevo. (...) une politique d’intervention dont on ne sait plus réellement qui la dirige, dans une tradition d’opacité peu propice à la clairvoyance ; un mandat humanitaire de complaisance pour détourner l’attention de l’opinion publique et camoufler la réalité.
Commenter  J’apprécie          40
Comment avons-nous fait pour ne jamais nous en prendre aux génocidaires alors que nous devions faire cesser les violences ? Pour quelles raisons avons-nous protégé leur fuite, les avons-nous laissés organiser cet exode dévastateur ? Et surtout, pourquoi leur avoir livré des armes dans des camps de réfugiés, au cours d’une mission humanitaire ?
Commenter  J’apprécie          40
Le bourgmestre nous accueille en compagnie du prêtre en charge de cette paroisse.
...
‒ Ici, capitaine, nous vivons en paix et nous faisons tout pour la préserver.
Je suis aussi surpris que ravi, je félicite nos hôtes qui nous raccompagnent vers l’entrée du village où nous avons laissé la P4 sous la surveillance du conducteur. Mais quelque chose m’intrigue sans que je sache exactement quoi, et je finis par demander au bourgmestre quel est le nombre de Tutsi dans son village.
‒ Il n’y a pas de Tutsi dans notre bourg, capitaine.
Et le prêtre de rajouter avec le plus grand naturel,
‒ Ils ne couraient pas assez vite…
...
‒ Les Tutsi ne couraient pas assez vite pour nous échapper, nous nous en sommes complètement débarrassés.
Commenter  J’apprécie          30
Ecrire pour saisir, écrire pour se souvenir et réfléchir.
Commenter  J’apprécie          30
En mai 1992, ce que découvre le jeune officier est un pays ravagé, en proie au chaos, où la mort de masse des années khmers rouges, suivies par les diverses formes d'oppression vietnamienne et les ravages d'une guerre civile incessante, ont dévasté l'existence des survivants. Ce qu'il voit, c'est un pays où les chances d'une reconstruction politique, économique et sociétale paraissent infiniment minces.
Commenter  J’apprécie          30
« Un casque bleu chez les khmers rouges », vu par Patrick de Saint-Exupéry

Le 13e RDP, une unité des plus prestigieuses, voulait recruter le jeune lieutenant artilleur Guillaume Ancel. Son corps d’origine refusait, préférant le voir revenir à Saint-Cyr comme instructeur. Guillaume Ancel avait 27 ans, il rêvait d’aventure écrit-il dans Un casque bleu chez les khmers rouges (Ed. Les Belles Lettres). « Dans ce milieu (militaire) très contraignant où la norme dépasse largement l’entendement », il parvient miraculeusement à décrocher une mission de « soldat de la paix » au Cambodge. C’est cette aventure d’il y a bientôt trente ans que Guillaume Ancel narre dans son livre au pages imprégnées de la moiteur de la jungle.
Je l’ai lu avec plaisir, et y ai retrouvé cette atmosphère propre aux missions menées par cette Internationale de soldats de métiers rassemblés le temps d’un mandat sous la bannière bleue de l’Onu dans les coins les plus tortueux du monde. Ces missions de la paix coûtent horriblement cher et, on le sent bien en lisant Guillaume Ancel, elles sont aussi en apparence foutraques. Une Babel militaire bricolée avec les chéquiers des nations sur les terres du Mordor – celles du Mal. Tout y est plus ou moins pourri, plus ou moins vicié, totalement brinquebalant.
Arrivant de France peu après Saint-Cyr, Guillaume Ancel découvre ce monde. Et plus qu’une aventure – même si c’en est une - c’est une expérience qu’il raconte. On y croise la petitesse d’hommes venus de tous horizons et qui, bien pourvus par la vie, restent cantonnés à leurs égoïsmes ataviques reproduits sans états d’âmes à des milliers de kilomètres. Ils ne voient rien du Cambodge qui les entourent, sauf ce qui pourrait leur profiter. Ils sont là, ils existent, mais il faut les oublier, les dépasser pour en croiser d’autres qui, eux, tentent l’impossible.
Sans négliger les premiers, c’est aux seconds que Guillaume Ancel s’attache. Il les raconte, il s’attarde sur eux et leur rend hommage.
Parce qu’il est fier d’avoir été soldat de la paix, et parce qu’au final, laisse-t-il entendre, le métier des armes consiste à faire tomber les armes.
C’est ce qu’il nous raconte.
Et il nous donne envie de le croire.

Patrick de Saint-Exupéry, juin 2021
Commenter  J’apprécie          30
Là sur le côté gauche est posée sa plus belle pièce, un saphir énorme, bleu comme l’océan. Le joaillier la fait tourner entre ses doigts boudinés, la pierre s’éclaire d’une lumière infinie, si profonde que mon regard s’y perd…
L’espace d’un instant, il me vient à l’esprit que je pourrais m’en emparer, en tuant le joaillier avec cette déconcertante facilité à laquelle j’ai trop souvent assisté durant toute cette opération au Cambodge. Personne ne sait que je suis ici et mon avion part dans l’heure qui suit.
Mais peut-être ai-je déjà entamé mon retour et je n’ai pas envie d’agir comme un criminel. Je me contente de lui acheter un très beau rubis pour Emmanuèle, il me recommande une pierre rouge sang…
Commenter  J’apprécie          30
Guillaume Ancel
Nous – Français – ne connaissons toujours pas le rôle que nous avons joué au Rwanda, parce que des zones d’ombre sont soigneusement entretenues et gardées, alors même que ces opérations ont été menées en notre nom.
Commenter  J’apprécie          30
Nous finissons de traverser la frontière quand un attroupement se forme sous nos yeux, avec la soudaineté stupéfiante d’un arbre qui s’écroule en forêt : un jeune Rwandais a eu l’outrecuidance de résister aux douaniers zaïrois lorsque ceux-ci ont voulu confisquer le madrier en bois qu’il portait sur l’épaule. Ils le rouent de coups de pied et de trique. La foule se précipite pour assister au lynchage, elle hurle, crie, vocifère au rythme des coups qui pleuvent. Florence est sous le choc, elle me saisit par le bras et demande pourquoi nous n’intervenons pas.
J’y réfléchis depuis le début, mais cela se passe du côté zaïrois et nous ne sommes que trois à être armés, alors qu’il y a plusieurs centaines de personnes dans cette émeute et des soldats zaïrois tout autour… Je l’explique sobrement à Florence qui réalise notre impuissance, elle a les larmes aux yeux. La foule se retire aussi rapidement qu’elle s’était rassemblée. Il ne reste plus qu’une masse informe sur la chaussée mal goudronnée.
Commenter  J’apprécie          20
Elle est entourée de vieux fonctionnaires de l’ONU, de ceux qui ont accepté depuis longtemps que leur vraie plus-value soit d’assumer leur inutilité en échange d’un salaire confortable.
Commenter  J’apprécie          20
Ce dispensaire accueille rapidement une vingtaine de patients sur lesquels ce médecin réfugié est chargé de veiller.
Belle histoire, réconfortante et inspirante, si ce n’est que nos médecins militaires constatent une nette augmentation de la mortalité postopératoire de leurs patients. Les décédés ne présentent aucun signe particulier, ni de syndrome commun en dehors du fait qu’ils sont hébergés au dispensaire.
Le père Popielsko décide d’enquêter, sous couvert de ses insomnies connues de tous. Dans la nuit, il entre au séminaire comme si de rien n’était et fait le tour des patients. Il est plus de 1h du matin et le médecin rwandais dort, ce qui n’a rien de surprenant. Sauf qu’il a pris soin de débrancher les perfusions de ses patients, « pour ne pas être dérangé »…
Commenter  J’apprécie          10
Nous débarquons l’arme au poing, avec les trois soldats qui m’escortent, pour sauver l’évêque.
Retranché dans la maison, celui-ci nous accueille avec soulagement ; il est énorme, fébrile et transpire à l’excès. ...
D’un geste ample, il désigne des voitures rutilantes garées contre le bâtiment et m’explique avec angoisse… qu’il ne veut pas qu’elles tombent aux mains des Tutsi.
...
‒ Monseigneur, quelle est votre voiture préférée, celle dont il faut s’occuper en tout premier ?
L’évêque m’indique sans hésiter une grosse berline.
...
Je m’installe calmement au volant, démarre la limousine qui ronronne avec élégance. L’évêque opine du chef en écoutant le moteur tourner. J’engage la boîte automatique en marche avant et je ressors aussitôt de la voiture qui démarre doucement. Sous le regard médusé de son propriétaire, la berline dévale la pente du jardin, traverse la haie, défonce la balustrade en arrachant quelques fleurs et s’envole vers le lac. Nous avons à peine le temps de nous avancer pour la voir plonger majestueusement dans les eaux grises du lac Kivu.
Commenter  J’apprécie          10
Je commence à expliquer notre mission d’application des accords de paix quand l’officier roumain ouvre une discussion parallèle avec son interprète, ce que nous évitons en général. Je continue de mon côté avec deux autres Khmers rouges concentrés sur mes propos.
...
Je suis focalisé sur notre dialogue quand je perçois sur ma droite le mouvement d’un Khmer rouge qui se lève. J’aperçois qu’il sort son arme tandis que je suis encore absorbé par notre propre discussion. Je n’ai rien le temps de faire, la détonation me fait sursauter, l’officier roumain s’écroule en arrière, la terre rougit déjà de son sang.
Par réflexe je cherche mon arme, ma main sur la ceinture vide me rappelle que nous sommes désarmés et que les soldats pakistanais qui devraient nous protéger ne nous ont pas accompagnés.
Commenter  J’apprécie          10
En revenant vers Kampot, j’aperçois sur le bord de la route quelque chose d’inhabituel, je comprends avec un peu de retard qu’il s’agit d’une tête humaine. David s’arrête.
Elle est posée sur une planche à même le sol et paraît avoir été fraîchement tranchée. Elle n’a plus vraiment de regard.
...
À proximité, une femme travaille la terre. San l’interpelle à ma demande : sait-elle à qui appartient cette tête ? Elle nous dit de ne pas s’en inquiéter, « c’est celle de mon mari »…
— Il s’est disputé hier avec un ami, et l’ami de mon mari n’avait qu’une hache avec lui, alors il lui a coupé la tête.
Moment de stupéfaction, puis de réflexion, je voudrais savoir si elle n’a pas été blessée, si elle a porté plainte ou si elle a besoin d’aide, mais elle répond, avec le même visage impassible :
— J’ai de la chance, l’ami de mon mari, il est parti avec sa hache, moi je suis encore en vie, alors ça va.
Commenter  J’apprécie          10
Les soldats pakistanais ont établi un camp fortifié à l’allure de Babaorum, en bordure immédiate d’un village dont ils ne sortent manifestement jamais.
...
je suis intrigué par un détail. Plusieurs enfants cambodgiens circulent dans l’enceinte du bataillon, comme d’ailleurs chez les parachutistes uruguayens qui en prennent volontiers soin, mais ce qui retient mon attention ici est qu’il n’y a que des jeunes garçons, arborant la même mine, triste et renfermée.
Alors je pose la question au commandant de bataillon, qui me répond avec un naturel désarmant :
— Vous savez mon capitaine, chez nous, les femmes c’est pour avoir des enfants et on ne doit pas jouer avec, tandis que les petits garçons, c’est pour le fun.
Commenter  J’apprécie          12
Nous avons avancé dans cette forêt sans fin dont on ignore les chemins
Commenter  J’apprécie          10
‒ Ces armes sont livrées aux FAR qui sont réfugiées au Zaïre, cela fait partie des gestes d’apaisement que nous avons acceptés pour calmer leur frustration et éviter aussi qu’ils ne se retournent contre nous.
Je suis sidéré.
‒ Attendez, on les désarme et ensuite on va leur livrer des armes, dans des camps de réfugiés, alors que ce sont des unités en déroute, sans doute liées aux milices et, pire encore, au ravage de ce pays ?
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Guillaume Ancel (103)Voir plus

Quiz Voir plus

Le 6 juin 2024

Le 6 juin est la journée mondiale: 👭

de l'eau
de l'environnement
du recyclage
de la sécurité au travail
de la mini-jupe

1 questions
18 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}