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Critiques de Ian Kershaw (92)
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Hitler

Lire Hitler de Ian Kershaw relève de l'expérience psychologique et sociologique.

Psychologique d'abord parce que ce livre est admirablement documenté et écrit, certes, mais surtout très fin dans sa façon de nous faire entrer dans les pensées d'Hitler. Son parcours, ses errements, ses complexes, ses humiliations, ses passions. Le personnage se construit et finalement la puissance de cette biographie est de nous faire réaliser à quel point le monstre est né d'un homme presque banal. Pour le reste c'est aussi une épreuve psychologique car la descente aux enfers est longue, documentée, détaillée. Et comme on en connait tous (enfin presque) le récit à l'avance, on se prépare, on s'accroche, mais rien n'y fait, l'horreur revient et nous ramène à notre condition de spectateur impuissant d'une tragédie qui dépasse l'imagination.

L'expérience sociologique, ensuite : j'ai eu la naïveté de croire que je pouvais lire tranquillement ce bouquin dans les transports en communs, mal m'en a pris. à deux reprises, interpellée, presque insultée... Comment expliquer que je lis ça parce que je pense que c'est important, fondamental...? C'est le seul livre que j'ai lu (avec Mein Kampf d'ailleurs) avec une pointe de culpabilité. Presque de peur.

à lire impérativement.
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Choix fatidiques : Dix décisions qui ont chan..

Ce grand historien analyse, sources nombreuses, cartes fort utiles et quelques photos à l'appui, dix décisions décisives qui ont conduit la guerre de 1939-1945 à devenir une guerre mondiale.

Qu'ils s'agisse de démocrates, comme Churchill et Roosevelt, de dictateurs, tels Hitler, Staline, Mussolini, ou d'entre les deux comme le consistoire monarchique du Japon de l'époque, un seul homme (ou exceptionnellement un groupe d'hommes) a, par sa seule décision, changé le cours de la guerre. D'ailleurs, la conclusion explique très bien cela.

La chronologie s'étend du printemps 1940 à l'automne 1941.

Avec des si...

- Si la Grande-Bretagne avait décidé de négocier l'armistice,

- Si Hitler n'avait pas lancé l'opération Barbarossa contre l'Union Soviétique,

- Si le Japon n'avait pas refusé de renoncer à l'annexion de la Mandchourie,

- Si Mussolini ne s'était pas à son tour engagé dans la guerre en précipitant ses troupes sur la Grèce,

-Si Roosevelt n'avait pas envoyé d'armes aux Anglais,

-Si Staline n'avait pas voulu tout décider par lui-même (le propre des dictateurs),

- Si Roosevelt n'avait pas protégé les convois de matériel à destination de la Grande-Bretagne,

- Si le gouvernement japonais n'avait pas programmé l'attaque sur Pearl Harbor,

- Si, en fin de compte, Hitler n'avait pas déclaré la guerre eux États-Unis et

- S'il n'avait pas eu en tête la solution finale, à savoir l'anéantissement des Juifs d'Europe...

Toutes ces décisions s'imbriquent les unes dans les autres, l'une étant la conséquence d'une autre.

Cela, Ian Kershaw l'explicite magistralement. Ce livre s'avère indispensable aux étudiants et à toute personne intéressée par le sujet pour comprendre les tenants et les aboutissants de la seconde guerre mondiale.

La France est (presque) la grande absente, comme d'habitude !
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Le mythe Hitler

La traudction de cet ouvrage pionnier de Ian Kershaw était attendue. Initialement publié en 1980 en langue allemande "Le mythe Hitler" s’intéresse moins à Hitler lui-même – auquel Kershaw allait consacrer en 1999 une monumentale biographie – qu’à la façon dont les Allemands ont vu Hitler. A l’époque Ian Kershaw travaillait avec Martin Broszat, à Munich, sur la Bavière à l’époque nazie, et plus spécialement sur l’opposition au régime. Et c’est à l’occasion de cette recherche – qui allait déboucher en 1983 sur la publication, en anglais, d’une étude remarquable traduite en 1995 seulement au CNRS "L’opinion allemande sous le nazisme Bavière 1933-1945" – que Kershaw s’est intéressé à « l’autorité charismatique » de Adolf Hitler. La version qui nous est aujourd’hui livrée de ces recherches est celle, légèrement remaniée, de l’édition britannique de 1987.



Dans un style d’une parfaite limpidité, Kershaw montre comment Hitler a répondu à une demande du peuple allemand : celle d’un chef héroïque et visionnaire capable de sortir l’Allemagne du marasme économique des années 20, de rompre avec les manœuvres politiciennes de la République de Weimar, d’éloigner le spectre du communisme et de restaurer l’orgueil national trahi par l’infamant Traité de Versailles.

Bizarrement, l’opinion publique a entretenu à l’égard de Hitler et à l’égard du NSDAP des sentiments différents, quasiment jusqu’à la défaite. Alors que les « petits Hitler », au contact direct de la population, furent bien vite rendus responsables de l’écart grandissant entre les grandioses promesses du programme nazi et la lamentable réalité de la vie quotidienne, Hitler était expressément exclu de toute critique. L’idée s’était en effet très tôt répandue que Hitler était maintenu dans l’ignorance des abus incessants de ses subalternes. Cette croyance protégeait Hitler de l’impopularité dont étaient l’objet les membres de son parti.

La vérité était bien différente, le fonctionnement extrêmement centralisé de l’Etat hitlérien, décrit par Martin Broszat garantissant une information assez fine du Chef de l’Etat. Mais les Allemands ne l’ont réalisé que tardivement, avec Stalingrad, lorsque la responsabilité directe de Hitler dans la débâcle n’a plus pu être rejetée sur son entourage.



La séduction exercée par le Führer reposait sur une image faussée du véritable Hitler. Alors qu’il a été démontré que l’impérialisme et l’antisémitisme ont, depuis 1919 au moins, structuré la pensée politique de Hitler, le Führer n’a pas construit sa popularité sur ces deux idées. Bien au contraire. Face à une Allemagne dont on ignorait qu’elle avait été si pacifiste, Hitler prit soin d’apparaître comme un homme de paix, soucieux certes de laver l’humiliation subie à Versailles, mais veillant à y parvenir sans que soit tiré un seul coup de feu. D’ailleurs si l’Anschluss ou le règlement de Munich lui valurent une popularité accrue, elle était due au soulagement d’avoir évité la guerre. Quant à l’antisémitisme viscéral de Hitler, Kershaw montre qu’il ne fut guère partagé par la population et que, pour ce motif même, Hitler l’occulta de ses interventions publiques dès 1922 lui préférant un anitimarxisme autrement plus populaire.



Le mythe peut fonctionner durablement, même si un « abîme » (p. 307) le sépare de la réalité. En revanche, comme l’avait théorisé Max Weber, le leader charismatique est condamné à voler de succès en succès.

L’effondrement du mythe Hitler était inéluctable avec la prolongation du conflit. Très finement, Kershaw ne date pas ce reflux de Stalingrad : « L’apport du choc colossal provoqué par Stalingrad (…) a été d’ouvrir les vannes à une critique qui affleurait déjà » (p. 233). Il soutient que l’opinion s’est graduellement détachée de Hitler en 1942 lorsque l’espérance d’une victoire rapide s’est transformée en désir de paix et que l’incapacité du Führer à mettre fin à la guerre, sinon à la gagner, s’est peu à peu révélée.

Dans ces conditions, la rapide rédemption du peuple allemand dans les années 50 se comprend plus aisément. L’Allemagne n’était pas peuplée de fanatiques bellicistes et antisémites, mais de pauvres gens, fragilisés par la crise économique, déçus par l’impuissance de la classe politique, qui se sont laissés subjuguer par un « sauveur providentiel » (comme Raoul Girardet en a décrit dans "Mythes et mythologies politiques") qui leur a promis, et brièvement donné, l’amélioration de leur situation économique et la restauration de leur orgueil national.
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L'opinion allemande sous le nazisme

Dans cet ouvrage,l'auteur nous parle de l'opinion des Allemands sous le nazisme au sein des différentes couches de la population.Il y parle de la recession du chomage;des obligations de travail,de la baisse des salaires,de l'augmentation des heures de travail,et de leurs conséquences au quotidien.

Il y parle ensuite de la classe bourgeoise,des paysans et des artisans.Toutes ces classes ont paye un lourd tribut a l'economie et a la politique menee pour soutenir l'effort de guerre;toutes ces classes mecotentes,n'ont rien pu faire pour ameliorer leur sort.

puis il nous parle de l'eglise protestante et la,toutes les classes confondues ont dit"non",se sont soulevees,ont manifeste leur mecontentement jusqu'à l'obtention de leur prerogative.En ce qui concerne l'eglise catholique,la population s'est soulevee,a manifeste son mecontentement quant aux mesures discriminatoires prises par l'Etat;il ne faut pas toucher a la religion.

Dans le chapitre concernant la persecution des Juifs,on apprend qu'une partie de la population s'est laissee facilement endoctrinee et eprouve réellement de la haine vis-a vis des Juifs,et l'autre partie de la population est indignee,offusquee mais rien ne sera mis en œuvre pour dire aux responsables leur mecontentement;ce qui les a le plus irrite,c'est l'incendie des synagogues,les gens cultives ne brulent pas les lieux de culte.O indignation pour un pays a la culture si superieure.

Ce livre se termine par une analyse des repercussions économiques du nazisme sur les différentes classes sociales.

Ce livre contrairement aux autres ecrits par cet auteur n'est pas une critique mais une analyse claire et precise,sans extrapolation,sans commentaires desobligeants
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La fin : Allemagne 1944-1945

A un moment donne au cours d'un conflit,un pays vaincu se resout presque toujours a capituler.L'autodestruction par la poursuite des combats jusqu'a la fin,jusqu'a la devastation quasi totale et l'occupation complete par l'ennemi est extremement rare!C'est pourtant ca que firent les Allemands en 1945.Pourquoi?Pourquoi les ordres autodestructeurs d'Hitler etaient-ils encore suivis?Quels mecanismes de pouvoir lui permettraient de determiner le destin de l'Allemagne quand il etait clair,pour tous ceux qui avaient des yeux pour voir,que la guerre etait perdue et que le pays etait ravage?Jusqu'ou les Allemands etaient-ils prets a soutenir Hitler,sachant bien qu'il conduisait le pays a la destruction?Continueraient-ils a le soutenir de leur plein gre?Ou y etaient-ils simplement contraints par la terreur?Comment et pourquoi les forces armees continuerent-elles de combattre et la machine gouvernementale de fonctionner jusqu'a la fin?

Parmi toutes les raisons expliquant que l'Allemagne ait pu et voulu combattre jusqu'a la fin,ces structures du pouvoir et les mentalites sous-jacentes sont les plus fondamentales.Tous les autres facteurs(soutien persistant de la base a Hitler,le ferocite de l'appareil de terreur,la domination accrue du parti,le role eminent joue par le quadriumvirat Borman-Speer-Himmler-Goering,l'integration negative produite par la peur d'une occupation bolchevique ou l'empressement indefectible des hauts fonctionnaires et des chefs militaires a continuer d'accomplir leur devoir quand tout etait manifestement perdu et etaient,en fin de compte subordonnes a la maniere dont etait structure le regime charismatique du Fuhrer et a son mode de fonctionnement dans sa phase d'agonie.L'attrait charismatique de Hitler aupres des masses s'etait de longue date dissous,mais les mentalites et les structures de son pouvoir charismatique perdurerent jusqu'a sa mort dans le bunker.Diviser,les elites dominantes ne possedaient ni la volonte collective ni les mecanismes de pouvoir pour empecher Hitler d'entrainer l'Allemagne vers la destruction totale

Tres bien ecrit,d'une lecture aisee;tres interessant
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Choix fatidiques : Dix décisions qui ont chan..

Pour qui s'intéresse à la Seconde guerre mondiale, voici un livre passionnant qui étudie dix moments fatidiques des années 1940-1941. Le Royaume-Uni a-t-il flanché un moment tandis que la France se faisait écraser ? Mais pourquoi Mussolini, alors que son pays était si mal préparé, s'est-il lancé dans la guerre avec la Grèce ? Et pourquoi le Japon s'est-il lancé à son tour ? Comment s'est décidée l'opération Barbarossa ?

Chacune de ces questions, plus quelques autres, ont droit à un long chapitre véritablement fouillé pour expliquer le contexte, rappeler les motivations des dirigeants, expliquer l'état du pays...L'auteur est un célèbre historien du nazisme et de la Seconde guerre mondiale et donc l'ensemble est ultra-solide sur le plan factuel et raconté de manière passionnante.

Quitte à remettre des choses bien établies en perspective : ainsi il y eut bien un moment de flottement dans le moment Churchill d'avril-mai 1940, et Chamberlain ne se réduit pas à la caricature que l'on en a souvent.

Mussolini voulait à tout prix montrer que l'Italie était une grande puissance militaire quand tous les signaux lui auraient indiqué l'inverse. D'où la catastrophique équipée vers la Grèce qui aura des conséquences lourdes notamment sur l'Allemagne obligée de s'impliquer etc...

Des moments qui sont ainsi réduits à quelques pages dans des livres sur cette période ont droit ici à un traitement détaillé tout à fait passionnant ! Et puis c'est toujours génial de se plonger dans le travail d'un très grand historien !

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L'âge global

Bel opus venant d'un maître.



Ian décrit la seconde moitié du 20ième siècle en Europe, sous bien des dimensions. Géopolitique d'abord : l'URSS de Staline poursuivant le rêve tzariste et s'étendant en Europe de l'Est, les pays subjugués tentant de retrouver un espace et de préserver leur identité, la France et le Royaume -Uni laissant leurs empires coloniaux avec plus ou moins de regrets et de dégats, l'Allemagne se reconstruisant tout en étant amputée de son flanc est, la création d'entités supranationales européennes en utilisant l'expédience. Dans la seconde moitié de cette période, la stagnation puis l'implosion de l'URSS et de son glacis. L'unification allemande. L'essor de l'Europe économique, monétaire et scientifique.



Economique ensuite : la rentrée en masse dans les processus de production de travailleurs ayant participé au conflit, la présence massive de femmes dans le monde du travail, l'application de technologies nouvelles, la reconstruction et le rattrapage des décennies perdues. Puis les chocs pétroliers, l'explosion de l'inflation ( comme maintenant) puis du chômage. La croissance anémique ( comparée aux années 1950-1960) depuis lors.



Culturel et social . Les années 1950 et 1960, où se dévelope une "contreculture" qui conteste les valeurs, religions et idéologies prédominantes . Ces mouvements seraient surtout portés par l'exode de la campagne vers la ville, l'accès plus libre aux études universitaires, et surtout les médias de masse.



Je vois dans ce livre une excellente déscription de ce qui s'est passé . Ce qui me manque, c'est une explication. J'aimerai voir comment ces diverses dimensions sont reliées entre elles. J'aimerai surtout une réponse à la question " pourquoi maintenant ?". Par exemple, je serai étonné que les femmes n'aient pas participé plus largement que de coutume à la vie économique pendant la première guerre mondiale. Apparament elles auraient réintegré leurs rôles traditionnels par après ? Pas après la seconde. Qu'est ce qui a causé cela ? Les années 1920 n'ont pas été un retour à la Belle Epoque, mais n'ont pas non plus été une révolution culturelle de masse, comme l'ont été les années 1960. Qu'est ce qui a fait la différence ?



L'auteur prévient dès l'introduction qu'il n'est pas en mesure de démeler les fils des causalités multiples. Il est donc honnête ! Mais je reste quand même un peu sur ma faim. Quelqu'un pour me proposer quelque chose de plus explicatif, et à cette échelle ? Un grand Merci de votre réflexion !
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Hitler

Après avoir lu « L’Europe en enfer (1914-1949) » et des brillants ouvrages de « Christian Ingrao » et « Johann Chapoutot », le temps de lire la biographie de référence sur Adolf Hitler est venu.

1200 pages pour une biographie de référence. Et encore le présent ouvrage est le condensé de deux livres de l’auteur.

« Biographie de référence » ? Vraiment Oui le titre n’est pas usurpé.

C’est clair, bien écrit, excellemment bien documenté.

On sent que le récit a été fluidifié. Les ruptures sont rares et justifiées.

Quelle est la structure de l’ouvrage ?



Les chapitres dans l’ensemble sont chronologiques.

Mais quand un point doit être approfondi, quand il a atteint un niveau critique alors, il a droit à un chapitre dédié.

Le livre met bien en valeur ce qui est du niveau de la conjecture ou de la rumeur ou du fait.



Mais j’en sais suffisamment sur Hitler…



Tout simplement non.

C’est vraiment une plongée dans sa vie, l’évolution de ses idées politiques, une recherche approfondie de ses motivations, de son caractère.

Le livre est brillant. Il fait la part des choses entre ce qu’a réellement fait Hitler et ce qu’il a rendu possible.

Le concept central est tous ceux qui ont « travaillé en direction du Führer ».

Et il faut absolument lire ce livre pour comprendre toute la portée du concept surtout par rapport à la personnalité et à la brute de travail (hum) que fut Hitler.

C’est en effet un des points les plus importants : il a permis, il a inspiré, il a justifié des actes qu’il n’a même pas eu besoin de diriger lui-même.

Une leçon pour ceux qui voudraient « essayer » des politiques, des partis.

Même s’ils ne font rien, s’ils ne disent rien, ils permettent, ils permettront…



Ce livre n’est pas



Un récit de la seconde guerre mondiale.

Si Hitler n’a que faire d’une offensive, d’un théâtre d’opération, d’une population alors, vous ne trouverez pas dans ce livre d’analyse de l’offensive, du lieu, des gens.

Et vous découvrirez que l’attention du « führer » est très très limitée.



Bonus



Hitler est très bien inséré dans le contexte historique.

L’arrière-plan de violence politique, de changement de société, de crises, de revanche est très bien restitué.

Et faire la part des choses entre le contexte de l’époque et les talents propres d’Hitler est à mes yeux fondamental.

Et après cette lecture, je fais la part des choses.



En conclusion



Indispensable même si j’en conviens des formats plus courts ou des livres plus spécialisés.

Oui, c’est la « Biographie de référence » sur Hitler.

Je pense qu’il me faut trouver un livre sur Goebbels.
Lien : https://post-tenebras-lire.n..
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La fin : Allemagne 1944-1945

Ian Kershaw, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Sheffield, est l’auteur d’une biographie d’Hitler qui a fait avancer la compréhension du personnage (1999-2000). Il a publié en 2009 un essai brillant intitulé « Choix fatidiques » où il explique comment se sont formées, au Parlement britannique, dans l’Etat-major impérial japonais, dans l’esprit de Hitler, de Staline, ou de Mussolini, les décisions qui ont orienté le cours de la Seconde guerre mondiale.



L’ouverture des archives que nous devons à l’effondrement du Bloc soviétique enrichit les sources des historiens : ici, ce sont une foule de rapports sur l’opinion publique dans l’Allemagne en décomposition de 44-45, les interrogatoires des généraux nazis, les échanges sur les réseaux de commandement de l’armée ou des SS, qui permettent à l’auteur de dresser un tableau fiable de l’esprit public.



Pourquoi l’Allemagne, dont la situation était compromise dès l’été 44 (débarquement en Normandie, immenses pertes en Russie) a-t-elle tenu jusqu’en mai 45, en jetant sa jeunesse et sa population civile dans la fournaise (la moitié environ des pertes militaires, ainsi que la moitié des pertes par bombardements aériens, se situent dans cette période fatale) ?



Le sens de l’organisation, du devoir et de la discipline n’expliquent pas tout. Kershaw appelle notre attention sur d’autres facteurs :



- l’absence de solution négociable : aussi bien les buts de guerre nazis (domination de l’Europe, anéantissement de l’URSS) que l’accumulation des crimes (Solution finalew contre les Juifs, traitement des populations russes et des Résistances européennes) rendaient impossible et même inconcevable, de la part de tous les protagonistes, toute paix de compromis, ce que les Alliés occidentaux avaient d’ailleurs constaté, en 1943, par l’exigence d’une capitulation sans conditions ;



- la peur multiforme : celle des Soviétiques, dont les premières exactions sur la population de Prusse Orientale confirmeront la réalité, mais aussi la peur de l’appareil nazi, organisé de main de maitre par le « quatuor » Bormann, Himmler, Goebbels, Speer, et qui pendra encore les « traitres » en avril 45, face aux lignes américaines ;



- l’espoir d’un miracle par les « armes nouvelles » et la confiance dans le charismatique Führer, qui refusait obstinément de sortir de la « guerre totale ».



Le suicide du Führer, le 30 avril 1945 ; viendra dénouer la situation, en permettant aux chefs militaires de négocier avec les Alliés, alors que l’Allemagne n’existe déjà plus.



Un livre passionnant pour tous ceux qu’intéresse le drame de la Seconde guerre mondiale.

A noter l’effort rare, chez les éditeurs, de présentation de cartes parlantes, et d’excellentes photos.

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Hitler

Avoir lu Mein Kampf il y a 4 ou 5 ans m’a permis, à la lumière cette biographie, de mieux comprendre les écrits du Führer et de constater que la déformation des faits y était parfois assez flagrante.

La biographie de Kershaw désacralise cet homme qui parvient au pouvoir grâce au terrain préparé par les hommes politiques qui voulaient la mort de la nouvelle République, par l’humiliation subie lors de la 1ère guerre mondiale et par les mentalités des élites et des masses, elles-mêmes fruits de courants politiques allemands datant de 20 ans avant la 1ère guerre.

Certes, le lit avait été préparé mais c’est aussi parce qu’il avait du génie et une personnalité hors du commun que Hitler a été hissé au plus haut grâce à l’appui de certains politiques qui l’ont pris sous leur aile.

La première partie est consacrée à la jeunesse du Führer, très intéressante, ses frustrations, son opportunisme, sa capacité à vouloir changer le monde tout en profitant du système, notamment des fonds de sa tante puis de sa rémunération de soldat démobilisé bien tardivement.

Cette partie m’a rappelé le roman « la part de l’autre » de Pierre-Emmanuel Schmitt très bien documenté, soit dit en passant.

Kershaw aborde par la suite de manière très fluide la stratégie politique intérieure et extérieure ainsi que les décisions liées à la guerre. Le déroulement de l’opération Barbarossa est extrêmement captivant, bien décrit. D’autres scènes de guerre sont relatées et aident bien à la compréhension des évènements. Les atrocités des nazis ne sont pas détaillées, l’auteur reste très pudique. Pour autant, les chiffres évoqués font froid dans le dos et renvoient bien à la dureté des épreuves endurées par les Juifs et toutes les populations opprimées, allemands compris.

Une idée centrale ressort bien dans cet ouvrage : la désorganisation qui régna dans les structures, conséquence du refus de Hitler d’organiser des réunions avec les cadres dirigeants qui ne communiquaient pas entre eux par ailleurs. Il traitait tout en bilatéral si bien que les ordres étaient parfois contradictoires et une stratégie décousue en résultait. Le Führer avait du mal à prendre lui-même les décisions, ce qui générait des choix dictés par des cadres qui pensaient agir dans le sens de ce que souhaitait le dirigeant. D’où la fameuse expression du livre « travailler en direction du Führer » qui, je suppose, fait dire à certains lecteurs que la traduction n’est pas vraiment de qualité.

Kershaw met bien en exergue cette désorganisation, sa plume prend des airs de récit décousu, mais ce n’est pas le cas. On ressent bien ce que vivaient Hitler et ses généraux dans la dernière partie du livre, c’est une narration en accord avec ce qu’elle exprime.



De toutes les biographies que j’ai lues, celle-ci est la seule qui se lit vraiment comme une histoire et je ne peux que vous la conseiller avec enthousiasme.

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La chance du diable : Le récit de l'opération W..

L’histoire du coup d’État manqué du 20 juillet 1944 est infiniment complexe, mais, malgré sa concision, ce livre est très intéressant et reprend l’essentiel du déroulement des opérations. Pour bien comprendre l’opération Walkyrie, il faut savoir que tout a commencé au moins trois ans avant la tentative d’attentat. C’est un ouvrage que tous ceux qui veulent connaître les motivations des différents protagonistes et l’effroyable répression qui a suivi pourront lire avec profit. Ian Kershaw connaît parfaitement l’histoire de la terreur nazie et nous éclaire de tout son talent.
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Hitler

Ian Kershaw est un historien spécialiste du nazisme, auteur de livres qui font aujourd’hui office de référence dans ce domaine de recherche. Cette biographie d’Hitler est une synthèse (de 1200p. tout de même) d’un travail sur le chef du IIIème Reich de près de 2600p. sorti en deux tomes il y a quelques années de cela. Sa lecture y est à la fois passionnante et éprouvante tant notre sang se glace à l’idée que de telles horreurs aient pu être commises au nom d’un seul homme et de sa doctrine folle : le national socialisme. Si je n’ai pas vraiment appris grand-chose de neuf sur les années s’échelonnant de 1933 à 1945, il en va tout autrement de la lente maturation d’un tel projet politique dans la tête de cet esprit « désaxé » (selon les propres mots de Ian Kershaw). La genèse de son antisémitisme viscérale et pathologique est des plus intéressante à découvrir.
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L'Europe en enfer, 1914-1949

Je cherchais un livre qui donnait encore plus de contexte sur le nazisme et la période des deux guerres mondiales.

Sur cette période il y a toutes sortes d’ouvrages. Certains sont comme des bulletins météo très détaillés, d’autres ressemblent plus à une brève alerte d’orage.

Ici, c’est plutôt une étude climatique voire océanique de la période.

Le « claplot » ? Il n’y a ici pas de récit ou d’analyse de faits de surface. Pas de détails des combats ou presque.

La « houle » ? Il n’y a que peu de détails sur la houle du déroulement de telle ou telle campagne.

Les « courants » ? Il y a par contre une analyse profonde et riches des courants qui ont traversé cette période.

C’est ce que je cherchais !



J’avais entendu parler en bien de Ian Kirshaw par mes historiens français favoris (Chrisian Ingrao et Johann Chapoutot)

Avant de commencer la biographie « Hitler » de Ian Kirsaw faisant 1200 pages (il est dans ma liseuse), je voulais lire un livre plus court.

600 pages pour comprendre les rouages profonds de cette période ? C’est tout simplement parfait.

Le style est sobre. Le texte toujours clair voire limpide.



Les sujets sont multiples :



- économie

- changements profonds de la société

- perception des peuples quant à leur histoire, leur pays…

- impact des frontières et des redécoupages

- langue

- déplacements de population

- puissances et perceptions des puissances respectives

- régimes politiques

- l’alliance des milieux économiques avec des mouvements d’extrême droite

- …



C’est brillant.

C’est éclairant.

C’est très instructif.

Conseils



Si 600 pages de fond vous effraient j’ai de très bon ouvrages à vous recommander.



* En premier, concis et idéal pour bien commencer : « Hitler » de Johann Chapoutot et Christian Ingrao

* En second, pour approfondir l’ouvrage précédent : « Comprendre le nazisme » de Johann Chapoutot

* Ensuite, il est essentiel de comprendre ce que les nazis ont proposé à la société allemande : « La promesse de l’Est. Espérance nazie et génocide, 1939-1944 » de Christian Ingrao

* En complément l’indispensable « Comprendre l’antisémitisme » d’Agnès Maillard

* Et pour regarder en face les acteurs « ordinaires » du génocide : « Des hommes ordinaires » de Christopher R. Browning



En conclusion



En cette époque de remontée indéniable de la peste brune, une lecture indispensable pour comprendre les forces profondes qui à l’époque ont amené à la quasi-destruction de l’Europe.
Lien : https://post-tenebras-lire.n..
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La chance du diable : Le récit de l'opération W..

Massivement rejeté par le peuple Allemand au moment où il eut lieu, l’attentat du 20 juillet 1944 contre Adolf Hitler reste à ce jour, l’un des plus grands symbole d’une résistance intérieure allemande face au dictateur. Même si l’issue est tragiquement connue, il est intéressant de pouvoir embrasser l’étendu des échecs successifs pour tuer Hitler. Le moins que l’on puisse dire c’est que pour le plus grand malheur de ces contemporains, il eut la baraka, la « chance du diable » comme le sous titre de l’ouvrage de Ian Kershaw. Ce dernier explique avec minutie et forces détails les tenants et les aboutissants de ce complot malheureux qui prolongea la guerre de près de 9 mois, avec tout son lot de souffrances et de barbaries. Un témoignage qui à l’heure de fêter les 70 ans de cette tentative quasi suicidaire, nous démontre toute la complexité d’une telle opération dans un état terroriste mais également le courage et l’abnégation de ces hommes. A ce titre, le livre leur rend un vibrant hommage.
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La chance du diable : Le récit de l'opération W..

Ce livre nous permet de réaliser qu'il y avait des opposants à Hitler,et qu'ils faisaient partie de l'armée;et malgré leur serment de fidélité au fuhrer et à la patrie;ils ont osé au péril de leur vie et de la vie de leur famille,braver le diable.

Ces Hommes ont manqué de chance,manqué de préparation,de raisonnement mais on ne peut pas leur reprocher d'avoir manqué de courage.

Je remercie l'auteur d'avoir levé le voile sur ces hommes extraordinaires,et sur leurs motivations.

A lire pour leur rendre hommage,pour qu'on ne les oublie pas.
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Hitler : Essai sur le charisme en politique

Ian Kershaw est très connu par la biographie de Hitler, publiée en 2000, qu'il a écrit en deux versions, une longue en deux volumes faisant presque 4000 pages et une courte d'environ 1200 pages. C'est une des meilleures biographies de Hitler.



Ce livre dont on va parler, a été publié en 1991. Il retrace la partie de la carrière de Hitler, de la fin de la Grande Guerre jusqu'à la mort, l'évolution du rapport entre Hitler et les autres permettant d'identifier son caractère charismatique, ou pas.



Son contenu est aussi dans la biographie, par le même auteur, mais de façon dispersée au long de la vie d'Hitler. Cette présentation permet de voir plus facilement comment a évolue le "charisme" du dictateur.



Il est important de s'entendre sur le sens du mot "charisme" et "autorité charismatique" (voir la citation de la page 27). On parle ici de l'aura qui couvre quelqu'un et pas celle la plus courante : l'autorité naturelle d'une position. En tout cas il fait faire la différence entre, par exemple, Charles de Gaulle qui a été largement connu surtout par son historique lors de la deuxième guerre et Hitler. Hitler n'a jamais eu d'acte héroïque, son aura a été créé juste par sa capacité de séduction et manipulation des foules, grâce à un contexte favorable. Hitler n'a jamais même pas eu de programme politique, juste d'abord la haine raciale et la dénonciation des conditions de vie de l'Allemagne après le traité de Versailles.



Ce livre raconte l'évolution de cette "domination charismatique". La découverte, presque par hasard, de sa capacité discursive dans les brasseries de Munich, puis sa prise de pouvoir dans le parti nazi, l'élimination de ses concurrents et, finalement, la prise de pouvoir en janvier 1933. A partir de ce moment il a consolidé sa position en train que Führer, comme leader suprême en Allemagne. Puis de début de la chute, à partir de la fin 1941. A partir de ce moment, Hitler n'avait plus le contrôle, la guerre ne se passait pas toujours selon ses envies. Il a commencé à alterner des moments d'euphorie et de dépression. A partir de 1942-1943 il est devenu vraiment malade.



A partir de cette époque, 1941-1942, il y a eu beaucoup de contradictions entre Hitler et ses généraux - ils n'étaient pas nombreux à lui tenir tête.



On sait que, à cette époque, Hitler était sous l'emprise de son médecin, un charlatan de nom Theodor Morell, qu'il a connu vers 1936. A la fin de la vie de Hitler, il ingurgitait jusqu'à vingt-huit pilules différentes en plus des piqûres, dont certaines étaient de la drogue (barbituriques, cocaïne, ...). On pourrait se demander quelle serait l'évolution de Hitler sans l'emprise médicale de ce médecin (voir la page de Wikipédia concernant ce médecin).



Il y a deux messages à retenir de cette lecture. La première est que la trajectoire de Hitler n'a pas été, définitivement, une constante pendant toute cette période, même après la prise de pouvoir. La deuxième point, mais l'auteur n'en parle pas, vient du fait que Hitler n'avait que de la parole qu'il a su utiliser pour manipuler le peuple allemand. Hitler était intelligent mais n'avait aucune compétence politique et son profil psychologique faisait qu'il ne pourrait pas finir autrement.





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La chance du diable : Le récit de l'opération W..

Ian Kershaw fait partie des grands spécialistes du nazisme et, en particulier, la biographie d'Hitler qu'il a écrit est considérée comme la référence.



Adolf Hitler a été la cible de plusieurs tentatives d'attentat, il a toujours échappé miraculeusement, par chance. Il y en a deux qui ont presque réussi. En 1939, une bombe placé dans la brasserie à Munich où il faisait ses discours habituels a bien explosé mais Adolf Hitler avait quitté les locaux quelques minutes avant.



Il y a eu, pendant la guerre, une suite de plans orchestrés par des officiers de la Wehrmatch, mais que, toujours par des petits imprévus au dernier moment, n'ont pas abouti.



Ce livre raconte la dernière tentative, presque réussie, le 20 juillet 1944, commis par le Colonel Von Stauffenberg. Le moyen a été une valise placée sous la table dans une salle de briefing dans la Tanière du Loup. Encore pour un imprévu de dernier moment, Von Stauffenberg n'a pu enclencher le mechanisme d'une seule des deux bombes de la valise. C'est probablement ce qui a sauvé le Führer.



Von Stauffenberg a été fusillé, avec quatre autres, dès son retour à Berlin, lorsqu'on a appris que Hitler était toujours vivant. La vengeance souhaité par Hitler a été très faite avec grande cruauté, les condamnés ont été pendus (au lieu d'être fusillés) et accrochés à des crocs de boucher, comme raconté dans une des citations.



Près de 5000 personnes seront arrêtées et condamnés à mort. Un qui n'apparaît dans le récit est le Generalfeldmarschall Erwin Rommel. Il a été contacté par les conjurés mais s'est refusé de participer. Par la connaissance qu'il a eu de l'existence d'un complot il a été obligé de se suicider avec droit à des funérailles nationales.



Le livre présente la préparation des attentats organisés par les officiers de la Wehrmacht, son exécution, ses conséquences et comme il a été perçu par les allemands qui, vraisemblablement, soutenaient encore le dictateur.



Ce petit livre est un extrait de la biographie de Hitler par Ian Kershaw, en deux volumes avec presque 4000 pages ou la version résumée avec 1200 pages. Dispensable pour ceux qui préfèrent la biographie. En tout cas, c'est très bien écrit et assez complet.
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Hitler

Mis à la portée de tous, ce travail d'universitaire n'échappe pas aux codes du genre. il permet cependant d'avoir une vision claire d'Adolf Hitler et du nazisme et son avènement à travers des chiffres, des faits et des analyses. Pour appréhender la figure personnelle et politique d'Hitler, personnage a priori falot et médiocre, responsable de dizaines de millions de morts et d'un génocide barbare dans toute l'Europe, je trouve plus pertinent l'ouvrage de Nicolaus von Below "A la droite d'Hitler qui dit ou donne à comprendre en filigrane les mêmes choses. Il a l'avantage du vécu. Je reste de toutes façons sur ma faim car pas plus dans cet ouvrage que dans d'autres, je n'aurais la réponse à ma question: Pourquoi l'être humain et les systèmes de gouvernement consacrent-ils le laissez faire, le déni de réalité de la part des intéressés mais aussi des autres sur place et en Europe (les annexions, Munich 1938, le réarmement etc...) face à des personnes ou des groupes qui ont pourtant annoncé et même écrit noir sur blanc, la couleur et le nom de leurs victimes?
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L'Europe en enfer, 1914-1949

1914-1949 : 35 années de guerre qui caractérisent l'histoire européenne de la première moitié du XXième siècle. Dans cet ouvrage de près de 600 pages Ian Kershaw évoque l'Europe d'avant 14, la première guerre mondiale, ses effets immédiats, l'éphémère redressement des années 20, l'effet cuisant de la crise de 1929, la montée vers la seconde guerre mondiale, son déroulement puis l'effondrement dévastateur qui l'a suivie.

Ce qui a mené l'Europe au seuil de l'autodestruction, c'est, selon lui, l'imbrication sur tout le continent de quatre composants : une explosion de nationalisme ethnico-raciste, des revendications territoriales âpres et inconciliables, de profonds conflits de classe qui nourrirent la révolution bolchévique et une crise prolongée du capitalisme. Ces quatre facteurs ont engendré une crise politique, socio-économique, idéologique et culturelle sans précédents.

La trame du livre est bien évidemment chronologique, mais elle se complète à la fin par une approche thématique qui s'intéresse aux changements démographiques et socio-économiques, à la position des églises chrétiennes, à l'attitude des intellectuels et à l'essor des divertissements populaires.

Le style est agréable à lire, le propos pédagogique et structuré et la vision est, naturellement, toujours élargie à l'échelle européenne. L'auteur ne sombre pas dans une érudition exagérément détaillée et permet ainsi au lecteur de suivre facilement la trame de sa thèse et garder les idées claires.
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L'Europe en enfer, 1914-1949

Un tableau saisissant, comme peut l'être, par exemple, le « Guernica » de Pablo Picasso : la trame de ce livre est la suite des malheurs qu'a dû subir l'Europe depuis la première guerre mondiale jusqu'au « miracle » qu'a été la paix et la prospérité, pour l'Ouest européen tout au moins, à partir de 1949.

Ian Kershaw, universitaire britannique « émérite », c'est à dire jeune retraité, a consacré sa vie d'enseignant-chercheur à l'histoire européenne contemporaine. Il s'est fait connaître par un portrait analytique de Hitler, riche de clés pour comprendre le personnage.

Kershaw a aussi analysé, dans un livre paru en France en 2009,  les « choix fatidiques » opérés à certains tournants de la guerre par Roosevelt, Churchill, Hitler, Mussolini, l'état-major japonais de 1941.

Pour ce chercheur, les faits historiques ne doivent pas seulement être décrits : ils sont le résultat de facteurs qu'il faut analyser en recourant à l'économie politique, à la sociologie de la vie politique, du travail et des religions, à la psychologie : on reconnaît ici les apports de l'Ecole française des Annales (Lucien Fèbvre, Marc Bloch, Fernand Braudel).

Le livre commence à l'été de 1914, et s'achève en 1948-50, avec la réforme monétaire et la Constitution démocratique de l'Allemagne de l'Ouest, puis la fondation de l'Europe communautaire (Traité sur la Communauté européenne du charbon et de l'acier)

Pour chaque période – avant guerre, 1ère guerre mondiale, entre-deux-guerres, seconde guerre, après guerre -  et, pour chaque région européenne, l'auteur se livre à une analyse détaillée des facteurs d'évolution de l'histoire.

Et il le fait avec une impressionnante connaissance des faits et une grande lucidité de jugement. C'est un travail considérable, auquel le lecteur doit, lui aussi, consacrer du temps : il en est largement récompensé.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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