Sourire de l'aube
Noires sont les pierres
Dents de la terre
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Frêles asphodèles
Protègent les pierres
Fragiles sentinelles
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Rêve de la pierre
S'allonger dans l'herbe
Et regarder les étoiles
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Gerçures du vent
Sourires des lichens
Sur la pierre dressée
***
Danse de Saint-Guy
Soleil fidèle
Au rendez-fous des pierres
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Mouton blanc
Mouton noir
La pierre se grise
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Quel Grand Poucet
Sema dans sa course
Ces pierres levées ?
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Souvenirs envolés
Mémoire pétrifiée
Disque dur des pierres
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Saxifrage
Fraction de pierre
Mon souvenir s'effrite
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Le peigne du vent
Couche d'épi
Sur le crâne de la pierre
Le soleil s'égoutte
le chat ouvre un oeil
je reste dans mon rêve
Dans l'ivresse de la nuit
Chat Noir chatte blanche
Se grisent.
Le chat ouvre son œil
Pour me laisser voir
à l'intérieur.
La feuille est morte
Ce matin
Un chat la veille.
Sous sa patte
Le chat a effacé
Tous les bruits
Coussinets noirs
Sur le papier
Le chat appose sa griffe
Dans l'ivresse de la nuit
Chat Noir chatte blanche
Se grisent.
Tremper les pieds dans la mer
garder la tête dans les étoiles
et laisser monter l'écume des jours.
A Ouessant
on ne gaspille rien
mais il y a des mots que l'on partage
des mots qui traînent
dans le bourg de Lampaul
des mots qu'on cogne
comme les sabots à l'entrée du bistro
des mots qui ouvrent le rire
du patron de la Boulange
des mots partagés comme du bon pain
avec les allongés du cimetière d'à côté
quand on leur apporte
des nouvelles fraîches des vivants.
Les mots du vent
Marcher, marcher
sur les grèves de Pern
avancer, avancer
avec peine
lutter contre le vent
les bras ouverts
vouloir saisir le corps du vent
et ne rien saisir du tout
et tout comprendre
c'est la vie que tu accroches là
tu t'en approches si fort
tu veux parler au vent
et tu ne peux pas
tu veux lui crier tes mots
il te les enfonce dans la gorge
et t'impose les siens
c'est le vent qui te parle
dans une langue que tu ne connais pas
mais que tu comprends
des mots de sel
collés sur ton visage
par les embruns.
ICI
on aime son labyrinthe
il n'y a pas de murs
il n'y a que des détours
un pays où tout est
définitivement provisoire
comme la brume
une île où les rochers
nous apprennent
que même la pierre
peut rêver et divaguer
un île où le vent
nous apprend à résister.
A Ouessant
on ne se perd pas
on se cherche
on se trouve.