Dès que tu m'apercevais, tu arborais ce sourire confiant qui m'effrayait. Je savais que tu serais un jour déçue, découragée, déseperée. La vanité et la honte se combattaient. J'avançais lentement vers un destin que tu acceptais et que je refusais pour toi, moins par générosité que par mauvais conscience. Mais ton sourire emportait tout.
Douter de son courage, c'est douter de soi-même et du monde dentier, c'est ne plus vivre, c'est déjà commencer à pourrir. J'ai cru entendre ces phrases dans le doux chuintement des choucas et les lire dans le dessin de leurs voltes.
Il y a des résolutions qui sont définitives et qui font le bonheur de ceux qui les ont prises. Les prisonniers ce ne sont pas eux, ce sont les autres, captifs de leurs caprices, de leurs incertitudes, de leurs déceptions. La rébellion est nécessaire, elle est la vie même, mais la rébellion digne de ce nom, c'est la rébellion contre le fatalisme de l'usure et de l'échec, c'est l'obstination au lieu du désenchantement. La liberté s'enracine dans la résolution sans retour.
Nous vivons dans la civilisation de l'effacement ou plutôt de l'effaçage. Les mots essentiels, âme, amour, respect, honneur, sont soigneusement effacés. On se garde bien de les attaquer, on les efface. Mais, sous la couche de poussière qui les recouvre, ils continuent à vivre, prêts à servir, prêts à prendre leur place au combat.