Citations de James Morrow (155)
A en croire M. Shakespeare, l'humanité était une remarquable oeuvre d'art, douée de raison, aux capacités infinies, mais Jennet en doutait depuis peu.
Quelle ruche avait dressé des gibets? Quel merle avait jamais chanté que sa propre belle-soeur était une sorcière ? Le buisson de roses les plus épineuses du monde n'avait jamais gravé le mot malfaisante dans la chair d'une femme.
Les orchidées rêvaient-elles ? Les papillons de nuit
pleuraient-ils ? Les abeilles avaient-elles des regrets ? Les vers
étaient-ils facilement amusés ? Elle n’avait aucune réponse,
mais à cet instant, elle avait l’impression de pouvoir entendre le
rire des créatures souterraines. Et ce n’était pas un doux
gloussement vermien, mais un rugissement d’allégresse,
comme si les vers comprenaient qu’ils étaient de grandioses
fragments dans la mosaïque de la création, comme si, depuis
leur point de vue boueux, ils appréhendaient la totalité du projet transmutationnel des choses – comme s’ils connaissaient
leur propre prodige.
Le destin d'une personne ne fait que se mettre en travers de ce qu'elle est censée faire.
— Je ne vous vois plus à la messe.
— C’est comme pour baiser, mon père. Faut en avoir envie.
Cet intervalle abominable a vu renaître le projet Manhattan, et l'équipe Oppenheimer concoctait un engin explosif rempli de plutonium, un système testé avec succès le 16 juillet dans le désert près d'Alamogordo au Nouveau-Mexique. Ils ont nommé cette première explosion atomique Trinité. Au nom du Père, du second soleil, et des fantômes profanes d'un millier de rats-kangourous, lézards à corne, monstres de Gila et renards nains. Amen.
— La façon d'agir la plus sage est souvent l'inaction.
La religion a pris un tour bien trop abstrait depuis quelque temps, insista l'ange. Dieu est esprit, lumière, amour... oublions ces fadaises néo-platoniciennes. Dieu est une personne, Anthony. Il vous a fait à Sa propre image, Genèse 1,26. Il a un nez, Genèse 8,20. Des fesses, Exode 33,23. Il défèque, Deutéronome 23-14.
[Incipit]
Les vies secrètes des livres, comme les écarts libertins des évêques, sont des sujets qu'il vaut mieux, en règle générale, laisser à l'imagination.
Je me suis placé comme apprenti auprès d'un serrurier, dont j'ai quitté le service quand il m'a dit que les cambrioleurs boiraient un jour à ma santé
Alors que la matière dont était constitué le monde visible était perpétuellement en mutation, - de là les phénomènes dynamiques comme les marées, les orages, les tremblements de terre, la digestion, le coit, la parturition et les désirs de l'âme -, les immortels ne connaissaient pas de tels mouvements; p. 111
Si Dieu n'a joué aucun rôle dans la cavalcade de la vie sur Terre, des protozoaires aux primates, il nous revient de nous demander pourquoi il se fatigue à exister
Elle chérissait de même la rencontre entre un marteau et une pomme, le premier accusant la seconde de la chute de l'homme, tandis que la seconde accusait le premier de collaboration à la crucifixion - un débat rapidement résolu par la transformation de la pomme en purée par le marteau qui annonçait ; "Et ainsi, une fois de plus, le pouvoir papiste en termine avec le folklore juif."
La foi n’est thérapeutique que pour les gens en bonne santé.
Selon Eschyle, avant l’intervention de Prométhée, tout le monde sur terre connaissait la date et l’heure exacte de sa mort, un état de fait qui plongeait la plupart des humains dans une léthargie chronique. Quand ils furent enfin débarrassés de cette annihilante prescience, les gens se mirent peu à peu à se comporter comme s’ils allaient vivre éternellement. Ils construisirent des cités, pratiquèrent les arts, réfléchirent et défièrent les dieux.
Mieux valait l’épreuve de la sincérité que l’opium des commérages.
Dieu, que la guerre était belle et comme elle savait balayer l’ennui et combien tout devenait clair quand il s’agissait seulement de faire le plus de mal possible à l’autre !
— Il n’y a rien de plus pernicieux que de penser et d’espérer en même temps.
[Darwin] Mes recherches m’ont convaincu que quasiment tous les membres du règne végétal accordent leur vie selon le soleil. Quand vient la nuit, certains dorment, même.
— Si les orchidées et les plantes grimpantes dorment, cela veut-il dire qu’elles rêvent ?
— Je n’ai pas d’opinion, mais vous avez posé une question formidable.
La seule excuse de Dieu est qu'il n'existe pas.
Pourquoi, repris-je, nos thélogiens prorationalistes, et parmi eux le Dr Pielmeister, attendent-ils que nous nous prosternions devant une divinité qui, du point de vue darwinien qu'il déclare endosser, se révèle à nous comme une espèce de dilettante cosmique (...) qui met au monde des plantes et des animaux pour ensuite les condamner à disparaître dans l'environnement dégradé qu'il a lui-même pourvu ?