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Citations de Jean Balde (25)


Il est le sauvage ami du bassin vert glauque, gris de lune ou bleu ; l’ami des dunes boisées, odorantes et violettes, à l’âme solitaire ; l’ami des nuages cendrés et couleur de boue que le vent pourchasse. Il voit aller et venir les petites barques pareilles à des fourmis noires. Il voit s’élever et s’abaisser les voiles grises, les voiles rousses, les hommes courbés jeter le filet et le retirer. Il les dépasse et les domine. Il est par moments plein de joie, d’orgueil et de cris. Il est le goéland gris argent que nulle main humaine n’a touché. Son poitrail n’a jamais trempé que dans le vent, le soleil et l’eau. Il est la vie vierge. Le ciel est à lui, et l'océan, et le monde... p 98-99
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La lune montait, perle flottante, dans le ciel gris-bleu. Le soir créait entre l'eau, les dunes et les grandes surfaces aériennes ces rapports fondus, impalpables, qui donnent au moindre reflet brillant le prix d'un joyau. Une pinasse appareillait, et la brise secouait la voile folle, l'écoute échappée balayant le clapotis de grands coups de fouet. p 161
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Le temps s'éclaircit. Dans la céruse enfumée du ciel, une fissure se creuse, grotte d'argent vierge, d'où tombent des rayons blancs comme des feux de phare. Michel a passé sa tête dans l'ouverture de l'abri. Une ondée de vent filtré par les pins rafraîchit sa face. Le sous-bois respire. Mais comment la brise atlantique imprégnée de sel et d'un goût de larmes, passant et repassant sur lui depuis son enfance, n'a-t-elle pas encore lavé son sang de sa souillure ? p 30
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Les rosiers et la vigne vierge tapissaient les murs. On ne voyait aussi que de vieilles fleurs dans les massifs de la terrasse. La gerbe d'eau des arrosoirs passait éternellement, les soirs de chaleur, sur la pourpre opaque des géraniums, les grappes bleu-violet des héliotropes et le doux cornet des pétunias, flexibles, fripés par le grand soleil, tout englués de sève sucrée, dont le crépuscule développait l'odeur délicate. Les bordures étaient faites d'une plante basse, dont les feuilles semblaient des langues de feutre grisâtre. p 14
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Cette culture de la vigne, elle est pour nous, Girondins, une passion innée.
Chaque année, nous nous attachons aux même espérances, pour aboutir presque toujours aux mêmes déceptions. L'intérêt est toujours nouveau, les péripéties continuelles, et cette récolte que nous couvons de notre regard, que nous défendons, a un attrait qui l'emporte sur toute sagesse.
Ces émotions sont notre vie, et aucun découragement ne nous en éloigne.
Peut-être ce sentiment vient-il de très loin, de tous les nôtres qui ont fait ce que nous faisons, lutté sur ce sol, aimé cette aventure de chaque printemps et de chaque été que tant de gens ne soupçonnent pas.
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... les mots se dérobaient, les vrais mots pour dire ce qui était remué au fond de lui-même : pudeur, jalousie, appel obscur vers la vie normale. C'est le grand malheur, quand on souffre, de ne montrer de soi qu'une grossière image. La douleur a des contractions qui déforment la source des larmes. p 46
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Le déjeuner fut ce que sont dans ce pays de gibier et de recettes séculaires tous les déjeuners de » retour de noce », substantiel, savoureux, embaumé par le fumet des poulardes boursoufflées devant un feu vif et des sauces fortes. Ce fut le repas de cérémonie pour lequel les vieilles dames arborent les broches de famille et les corsages scintillants de jais ; les messieurs, leur épingle de cravate la plus distinguée. Le sauterne était d’une grande année ; les bordeaux décantés par le maître de maison et tiédis à point (…)
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L'air vif rafraîchissait son esprit.
Chaque fois que quelque circonstance le ramenait au milieu du monde, il en revenait mécontent, blessé, avec l'impression que tout ce qui faisait à ses yeux le prix de la vie, les choses nobles, élevées, dignes de respect et d'admiration, personne ne voulait plus les compter pour rien.
- Où allons-nous ? disait-il souvent à sa femme.
Ou encore :
- Ma pauvre amie, nous ne sommes plus de ce temps.
Ainsi discutait-il avec lui-même, s'arrêtant sans voir, prenant à témoin les feuillages paisibles qui l'entouraient, ce qui faisait dire aux paysans que Monsieur le Maire questionnait les arbres.
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Le temps était doux. Tout ce paysage de ciel, de dunes et d'eau paraissait imprégné d'un ton gris radieux, saturé d'or pâle, avec des dégradations, des partis plus denses, des tonalités puissantes du côté des pins, qui venaient se fondre dans une immense impression d'espace.
(...) Le ciel prenait l'éclat blond qu'on voit dans les tableaux des maîtres hollandais. Tout cela ample, largement ouvert sur l'horizon, avec le charme des choses immergées dans l'air qui en modifie et accorde les sourdes nuances. Une tiède et vide journée de mars. p 129
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Ce qui pesait sur nous - je le sens aujourd'hui - c'était la fatalité de la guerre proche. Les être d'une sensibilité frémissante savent tout d'avance. Cette ombre immense montait dans le ciel. Encore invisible, elle jetait sur nous tous, et particulièrement sur ceux qu'elle avait marqués, son filet d'angoisse. Comment n'eussions-nous pas été tristes ? Tout conspirait contre nos élans naturels. En ces années 1908-1914, que certains dépeignent aujourd'hui comme un âge d'or, les circonstances ne nous inclinaient qu'au découragement et à l'inquiétude. Aucun de ceux qui m'entouraient, s'il m'en souvient bien, n'attendait rien de bon de la vie. Si forte était notre conviction que la réalité nous meurtrirait que nous ne cherchions que des évasions !
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Cette semaine, commencèrent à courir des bruits inquiétants. Un banquier des Landes venait de suspendre ses paiements. On savait qu'il menait grand train diverses opérations financières avec Richeblague.
Comment le millionnaire ne l'avait-il pas renfloué ? Quelqu'un osa dire : " Ne serait-il pas lui-même en difficulté ? ". On le traita de fou. Richeblague ! Le vertueux Richeblague ! Un homme fort comme Samson, honnête comme l'or ! Toutes les banques sauteraient avant la sienne.
Mais les ondes vibraient, se propageaient, semant des craintes vagues. Ce fut d'abord le doute, un léger frisson, puis l'inquiétude, la peur, la panique.
Au guichet de la banque, se pressaient des gens atterrés, le visage décomposé. La queue s'allongeait d'heure en heure, comme au théâtre, quand un acteur en renom donne sa soirée d'adieux.
Et cette cohue se faisait houleuse, fiévreuse : on craignait d'arriver trop tard, de voir distribuer les derniers billets. Un matin, il y avait cinq cents personnes dans la rue, assiégeant la porte fermée. Des gens vociféraient, des femmes claquaient des dents, fondaient en larmes. C'était une émeute.
Derrière les murs, on devinait les fastueux bureaux désertés, la caisse vide.
Richeblague, arrêté dans la nuit, venait d'être conduit au fort du Hâ.
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Au sortir de la gare, c'est une impression délicieuse de verdure, d'air vif et de lointains bleus.
Une route en lacets monte vers la ville, et aussi un raidillon, bordé par un filet d'eau sautant sur des cailloux plats. Qui a vu Lectoure, un matin de mai, dans sa ceinture d'arbres en fleurs, ne peut oublier cette vision d'une Gascogne cuirassée de pierres féodales, cependant toute riante et printanière.
La vie rustique recouvre l'histoire.
Les potagers en terrasse s'étagent au midi, au pied de la forteresse. Sur les remparts, jaillissant par touffes, les giroflées jaune et les mufliers alternent avec des fleurs de muraille d'un rose fraise.
Et toutes ces glycines, tous ces lilas de petite ville, font de l'ancienne capitale de la Lomagne un énorme bouquet ronronnant d'abeilles.
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Il s'appelait Auguste Crochard, et toute sa personne chétive et noire, infiltrée de bile, était faite en effet pour mordre et pour dévorer.
Veuf d'une femme qui chargeait comme rien un quintal de son, et se levait à trois heures pour soigner les bêtes, il entrait en fureur à la pensée qu'il l'avait perdue. Une maladie de foie qui le ravageait aigrissait encore son humeur.
Ses voisins le haïssaient, pour sa cupidité et les querelles qu'il engageait à tout propos.
Levé avant le jour, rossant son chien, allongeant de grands coups de fouet aux chats d'alentour, il était rongé de désirs et de convoitises. Il lui fallait se sentir le maître. Mais si âpres que fussent ses ambitions, son commandement ne dépassait pas les trois pièces de son logement et le pâturage qu'il avait loué. Toutes les vignes qui l'entouraient, les pièces de terre, il avait envie de les tondre, de les décharner. Il supputait quelles pouvaient être sa chance de s'établir.
Tous les propriétaires du pays, il les connaissait pour avoir fait des labours chez eux ou leur avoir apporté du bois. Il s'était formé une idée de leur caractère, de leur ressources.
Parfois un vertige lui prenait l'esprit à la pensée que certaines terres hypothéquées pourraient être vendues pour ce que les paysans appellent un morceau de pain; mais jamais l'occasion d'une grande réussite ne s'était encore présentée.
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Dans l’après-midi, à Bazas, les conversations allèrent de telle façon que M. Dutauzin rentra dans sa grande maison balzacienne, un quart d’heure avant que la pendule en marbre sonnât six heures, ce qui était une dérogation presque incroyable à ses habitudes. Il sortait du club des Pommes de terre, qui avait son siège au coin de la place, où les messieurs de la ville échangeaient chaque jour les nouvelles du pays, et causaient politique entre eux sans rien dépenser.
— Il paraît, confia-t-il à sa femme après avoir fermé la porte, que le ménage Sourbets ne va pas.
— Qui te l’a dit ?
M. Dutauzin hocha la tête. C’était une chose répandue dans l’air. Depuis le clerc de Me Rivière, un bon garçon, que l’on rencontrait dans les rues, son grand nez au vent, regardant passer les alouettes, sans autre souci que d’organiser de temps à autre une pêche au goujon ou à l’écrevisse, jusqu’au rentier le plus assoupi, tout le monde en parlait.
— C’était inévitable, trancha Mme Dutauzin de sa voix aiguë.
Sans rien savoir, elle bâtissait l’histoire du jeune ménage : elle, une femme qui ne s’était jamais occupée de rien ; lui, une forte tête. p 222
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Ces derniers jours de février sont gris et pluvieux. Les parqueurs ne pensent pas à se plaindre du mauvais temps.
Il faut bien que l'hiver se passe.
Mais qu'on leur parle des huitres qui se vendent mal et de l'Etat qui menace d'enrayer la surproduction, leur lamentation se déchaîne : qui s'occupe d'eux sinon pour les entraver ? Leurs députés sont vaillants à table !
Quand à ceux qui mangent des huîtres, s'imaginent-ils qu'elles poussent toutes seules ?
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Septembre glissait, pâlissant le ciel, insinuant dans les feuillages ses touches d'or roux, et affinant de sa grâce un peu languissantes les lourdes parures de l'été.

Les matins surtout n'étaient plus les mêmes.

La campagne respirait, mystérieuse, dans des mousselines. Une brume plus dense se pelotonnait dans le lit du fleuve. On entrevoyait au-dessous le glissement d'une eau gorge-de-pigeon.

La terre fumait.
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Jean Balde
Quand il se rappela plus tard l'arrivée à Bordeaux, Michel revoyait un fiacre obscur roulant sur les quais, des tramways comme des bateaux illuminés fendant les ténèbres, et des guirlandes de feux blancs et rouges, étoilant, fosse profonde, le fleuve encombré de masses noirâtres.
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Il lui racontait que l'hiver fut si rude que l'Adour se glaça, que les hommes et les bêtes y passaient par-dessus la glace; Qu'il fallait remettre le pain dans le four pour le faire dégeler ou le rompre avec une cognée, et que jamais plus auparavant ni depuis on n'a vu une telle glace; que la même année devant la peste, il plut tant pendant quelques jours que l'eau entrait par toutes les maisons de la ville et passait par-dessus le pont de l'Adour, et que jamais plus on n'a vu une telle quantité d'eau
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Il s'appelait Auguste Crochard, et toute sa personne chétive et noire, infiltrée de bile, était faite en effet pour mordre et pour dévorer.
Veuf d'une femme qui chargeait comme rien un quintal de son, et se levait à trois heures pour soigner les bêtes, il entrait en fureur à la pensée qu'il l'avait perdue. Une maladie de foie qui le ravageait aigrissait encore son humeur.
Ses voisins le haïssaient, pour sa cupidité et les querelles qu'il engageait à tout propos.
Levé avant le jour, rossant son chien, allongeant de grands coups de fouet aux chats d'alentour, il était rongé de désirs et de convoitises.
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Elle se promena au bord de l'eau. Le ciel était d'un bleu de mois de Marie. Un arôme indéfinissable noyait la campagne, cette pénétrante odeur de la vigne en fleur, que la brise déplace en entraînant comme des écharpes de parfum, que le soleil exalte, et dont les effluves baignent les feuilles de délices subtiles et presque secrètes.
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