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Critiques de Jean-François Dupont (14)
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L'Échappée

« D’abord avec ironie, puis comme si cela allait de soi. On parlait des Sarrasins, des Bohémiens ou des Hébreux…Certains médias s’étaient empressés de propager ces mots surannés. L’air de rien on s’était mis à parler comme au Moyen Âge et c’était loin d’être bon signe.»

Tel est le constat sur l’état de la société que fait François un prof d’université spécialiste d’histoire du cinéma . François a tout perdu. Et cela bien avant que la société connaisse la déliquescence dont il est un témoin impuissant à défaut d’en être un acteur.

La mort de sa femme Faustine a été un premier traumatisme. Il n’a pas supporté de vieillir et s’est retrouvé livré à lui-même, incapable de gérer sa déconnection progressive d’avec un monde qu’il ne reconnaissait plus et dans lequel il ne se retrouvait plus.

Je n’en dirai pas plus au risque de dévoiler des pans de l’histoire qu’il faut laisser découvrir aux futures lectrices et lecteurs.

La société n’a pas été tendre avec lui et après plusieurs péripéties qui le conduisent aux marges de ce qui est admis, il se retrouve sur la route avec ses certitudes, son savoir et rien d’autre pour tout viatique.

Le danger est partout pour un homme seul alors que le phénomène de bande devient une règle de vie. Il a un objectif mais le chemin qui l’y conduit est parsemé d’embuches.

Il imagine encore pouvoir prendre un train, mais lorsqu’il demande la direction de la gare dans la ville de Belgrand où il a réussi à parvenir, un facteur lui répond :

« C’est tout droit. Mais si c’est pour prendre un train… »

C’est là qu’il rencontre Constance Dreyer, une jeune suissesse, violoncelliste en rupture de famille.

Cette association baroque, si elle leur permet de faire face aux événements, ne manque pas de susciter des convoitises. Lorsqu’ils se retrouvent prisonniers de la « section Jura libre » une bande d’adolescents dirigés par un homme plus âgé « le révérend Richard Moll» qui les mystifie en les assurant de l’importance de leur rôle contre «(…) la chute de notre civilisation. »

François se trouve confronté à l’ignorance de ses gardiens, à leur méconnaissance de l’histoire et de ce fait à leur fragilité face au savoir « Ils avaient soif de savoir des choses, un peu tout et n’importe quoi. La situation du pays ne les préoccupait qu’à moitié. Miro avait préféré revenir sur le premier western de l’histoire du cinéma. »



Jean-François Dupont a écrit un conte tout à fait crédible en tirant à peine sur la corde. Ce que nous vivons actuellement, avec le développement croissant des théories complotistes et le délire qu’il induit est traduit de façon réaliste dans la confrontation entre François, Constance et leurs jeunes gardiens. Ceux-ci reconnaissent la culture de leur prisonniers et la perçoivent comme une arme redoutable qu’ils ne possèdent pas « Je vous préviens, avec vos petits sourires en coin…Arrêtez de me prendre pour un con… » dit le chef de la troupe, Himmler…

Le roman pose la question du rôle du savoir et de la connaissance, de son statut dans la société. Sont-ce seulement des instruments de domination ou des moyens de compréhension de l’univers et de facilitation de la communication entre les différents groupes sociaux ?

François se pose cette question « À quoi cela servait d’avoir tous ces films en tête et de ne pouvoir en parler à personne ? »

Un livre à lire qui apporte une contribution pertinente aux débats qui nous agitent quotidiennement.
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Villa Wexler

Alors qu’il s’apprête à commencer une nouvelle rentrée scolaire en première, Matthias vit un été comme les autres, dans sa petite ville de province sans histoires. Mais il va vite découvrir que cette rentrée ne sera finalement pas comme les autres, en la présence d’un nouveau professeur de français, M. Wexler, ô combien charismatique et inspirant, installé avec sa famille dans une villa qui prendra, au fil de l’année, des allures de plus en plus mystérieuses. Et plus encore parce que Matthias, en tombant amoureux de Charlotte, camarade de classe et fille de son professeur, va pénétrer dans le cercle fermé de la famille qui deviendra, au même titre qu’Aurore, une autre camarade de classe, son univers, pour le meilleur comme pour le pire. C’est du moins ce qu’il nous raconte, vingt ans plus tard, alors qu’il est de retour dans sa ville natale, et qu’il cherche toujours à comprendre qui sont les Wexler.



Tout comme le narrateur, qui oscille entre les souvenirs de cette année si particulière, du reste de sa vie, et le déroulement actuel de son existence, la narration flotte dans une sorte de réminiscence paradoxale, tout autant agréable que désagréable, dans laquelle l’on a parfois du mal à se situer, cependant la plus à même de nous présenter l’état de confusion dans lequel se trouve encore Matthias au sujet de cette famille qui a bouleversé sa vie, même vingt ans après les faits. Car malgré les années passées, il est toujours sous son emprise, de manière moins insidieuse et directe que son amie Aurore, ce que nous découvrirons au fil du récit, plus précisément sous l’emprise du mythe à la fois lumineux et ténébreux qui auréole le père, surtout, mais aussi sous celui de Charlotte, son premier amour non pleinement accompli qui aura des conséquences sur les relations futures de l’adolescent.



De même, le récit oscille de manière bienvenue entre les genres romanesques, et de fait, les registres : récit d’adolescence dans lequel Matthias nous décrit en détail ses sentiments, ses pensées ; récit d’une enquête qui fait entrer le jeune homme non seulement dans les tréfonds de son esprit, mais aussi ceux d’Aurore, pour enfin connaître, vingt ans plus tard, la triste réalité sur les Wexler ; récit d’amours obsessionnelles, desquels peu est finalement raconté, mais dont l’on ressent toute la puissance, parfois destructrice, au fil des pages. La narration, bien qu’assez brève, est de fait plutôt riche, même si j’ai parfois regretté une certaine économie stylistique.



Roman tout à fait agréable à lire que cette Villa Wexler en somme : je remercie les éditions Asphalte et Babelio de m’avoir permis cette découverte via la Masse Critique de Septembre.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Villa Wexler

De retour dans son village natal, un homme s’en retourne sur son passé. Il lui faut faire la lumière sur un épisode de sa jeunesse qui n’a cessé de le hanter : son histoire avec la famille Wexler, qui percuta de plein fouet l’adolescent qu’il était.

Les Wexler ? Une famille débarquée de nulle part qui entrera brutalement dans sa vie. Notamment le père, professeur de français provocateur et ambigu qui poussera les élèves dans leurs retranchements.

Les souvenirs remontent, de plus en plus précis ; de plus en plus lugubres aussi. L’auteur semble avoir fait le choix de maintenir le lecteur dans le malaise pour entretenir le mystère.

Et ça marche : parvenue à la moitié du roman, je suis totalement captivée. Je veux autant avancer que faire durer ma lecture, et je suis encore stupéfaite par la fin qui nous est réservée.

Un grand roman d’atmosphère, certes pas des plus punchy, mais dont les images me resteront collées longtemps à la rétine.
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L'Échappée

Quand l'histoire commence, François est en prison. Alors que des troubles menacent d'y éclater, son directeur, Béllier, s'arrange pour libérer François et ils prennent tous les deux la poudre d'escampette (pardon j'adore cette expression!). Les voilà jetés sur les routes, dans une France livrée au chaos, où la guerre civile fait rage.



Très vite lassée de la compagnie de son ex-geôlier, François se lance dans une ultime échappée. Son projet à lui, c'est de rejoindre la Suisse pour en finir de cette vie sans saveur qu'il a prise en horreur depuis quelques années. Dans ce périple qui commence sur les ruines de son ancienne maison, on découvre au fil des pages le passé de ce vieil universitaire à la retraite : l'implosion de sa famille, le tragique (et hilarant) accident qui l'a conduit en prison et tous les regrets qui lui restent sur les bras, sans perspective aucune. Dans un pays qui semble dans le même état.



Et puis sur la route, il est rattrapé par d'autres personnages : une jeune violoncelliste flamboyante qui tente de rejoindre son foyer, puis un groupe de terroristes tellement mauvais et à côté de la plaque qu'ils en deviennent attachants.



Bien plus que l'issue de ce périple, c'est le voyage qui vaut le détour. Jean-François Dupont n'est pas tendre avec ses personnages : entre la mélancolie ambiante largement dûe au regard de François sur le monde et l'inconséquence du petit groupe de terrorristes, on a bien envie nous aussi de faire comme François et de faire nos adieux au monde.



Mais c'est sans compter avec l'humanité et la drôlerie qui se dégagent de cette folle aventure et qui nous rappelle qu'au détour du chemin, tout peut encore arriver! Une écriture pleine de surprises et de clins d'œil au cinéma et à la littérature (coucou Robert Walser) que j'ai trouvée exquise.



Une très belle découverte, un roman mélancolique et doux, qui me donne envie de découvrir désormais le premier roman de l'auteur, "Villa Wexler".
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Villa Wexler

La grande force de ce roman, c’est son ambiance. L’on s’aperçoit assez rapidement que le narrateur est un jeune adulte un peu perdu, remettant en cause sa vie professionnelle et essayant de construire une vie personnelle. Son retour dans sa ville natale apparaît comme un pèlerinage, avant même de devenir une enquête. Mathias est un adulte paumé car il a, avant cela, été un enfant malmené et un adolescent éprouvé.



Déchiré par les disputes parentales, c’est au lycée que le jeune homme prend l’oxygène qui lui est nécessaire. Là, il retrouve son ami Diximus, toujours drogué, et Charlotte la sublime fille de l’intrigant nouveau professeur de français. Son premier amour : la jeune fille, belle, amoureuse, manipulatrice peut-être, trouble sûrement, secrète évidemment.



D’emblée le narrateur nous annonce toute la bizarrerie de la situation : la mort de Diximus, la disparition du garde forestier, le mystère Wexler. Cette ambiance presque gothique, cette absence de repères, d’éléments clairs nimberont l’intégralité du texte d’une brume qui ne se dissipera qu’à l’extrême fin. Tout est étrange et tout met mal à l’aise.



Wexler est un enseignant charismatique qui cherche à provoquer, envoûter ses élèves pour mieux les manipuler, et cela fonctionne. Avec son projet de film, il crée une osmose entre les élèves et s’octroie le droit de ne pas suivre strictement le programme. Mais, pour Mathias, Wexler est aussi le père de la petite copine, il le fréquente dans l’intimité et ce n’est pas beaucoup plus rassurant. En-dehors de Charlotte, tous les membres de cette famille sont atypiques et dangereux. A son insu, Mathias se retrouve dans des situations improbables et d’une grande violence. Les appels de Charlotte deviennent de plus en plus tardifs, de plus en plus brefs…



Et puis il y a Aurore, la lumineuse copine, fascinée par le professeur charmeur, hypnotisée par l’homme, actrice principale du film, meilleure amie de la fille et disparue soudainement, avec tout le reste de la famille.



En parallèle de la reconstruction de Mathias, de la naissance d’une relation avec Ida la jeune réceptionniste de l’hôtel, le narrateur rassemble les diverses pièces de puzzle. Pour être un homme accompli, il a besoin de comprendre que ses intuitions d’adolescent étaient justes, qu’on a bien cherché à faire du mal, qu’il ne pouvait pas lutter.



A mi-chemin entre récit rétrospectif et enquête policière, ce texte m’a inquiétée et m’a tenue en haleine. Très court, il ne regorge pas de rebondissements à n’en plus finir, mais il m’est vite devenu urgent de savoir, de comprendre qui étaient ces gens, comment cela s’était déroulé et comment cela allait pouvoir finir. J’ai beaucoup aimé !

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Villa Wexler

Voici un livre que j'ai bien apprécié.



Ce n'est pas le genre d'histoire que je lis habituellement et c'est un tort car j'ai beaucoup aimé cette lecture. Ce fut une véritable découverte et j'ai passé un super moment.



Déjà j'ai trouvé la plume de l'auteur très agréable à lire. Elle est tellement fluide qu'on ne voit pas les pages passer. c'est un pur bonheur.



Ensuite, les personnages sont très intéressants parce qu'ils ne sont pas faciles à cerner. Que ce soit la famille Wexler, Aurore ou encore Mathias, on sent qu'ils ont vécu quelque chose d'étrange et qu'ils ont une grande part de mystère. Certains sont assez torturés et personnellement, j'aime ce genre de héros. Apprendre à les connaître au fil des pages est un plaisir car plus on en apprend plus on se pose de questions et même à la fin tout n'est pas ultra clair.



Enfin, l'histoire est prenante. On n'a pas énormément d'actions ni d'événements mais il y en a assez pour titiller la curiosité du lecteur. On avance dans une atmosphère incroyable un peu pesante mais pas trop. Tout cela donne une lecture qui vous englobe dans son univers. D'ailleurs le lire avec une lumière tamisée en plein automne à été tout simplement parfait.



En résumé, c'est un livre que j'ai beaucoup aimé et que je conseille. C'est le premier que je lis de chez Asphalte éditions mais pas le dernier.



Je remercie la maison d'éditions et Babelio pour cette belle découverte.
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Villa Wexler

C'est le premier roman de Jean-François Dupont et c'est une réussite . Une histoire qui tient le lecteur en haleine même et peut-être surtout il ne s'y passe pas grand-chose d'extraordinaire . Un jeune homme revient dans la petite ville de son enfance et revoit son adolescence entre autres son premier amour dans le même temps qu'il ébauche une histoire d'amour avec une jeune femme . On passe subtilement de l'époque actuelle à quelques années en arrière et petit à petit on comprend que sa jeunesse ne s'est pas passée sans problème même s'il ne s'en était pas rendu compte à l'époque . C'est très bien écrit et Jean-François Dupont manie le mystère à merveille . Un bon moment de lecture.
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Villa Wexler

J'avais reçu ce livre dans la box lumière il y a quelques mois. Et quelle belle découverte ! J'ai adoré ce roman. Un roman malaisant quelque part. Suffocant. Le personnage Matthias, retourne dans son adolescence afin d'y éclaircir quelques points. Et on est happé par son récit. Par les faits qu'y s'y sont produits 20 ans auparavant et on a envie de découvrir ce qu'il s'est passé. Comment ? Pourquoi ? Et le roman nous tient en haleine à chaque page avec cette ambiance malaisante. Cette impression que quelque chose cloche.. Un très bon roman très bien écrit. Très bien construit. On est à la fois dans la vie présente et dans la vie passée de Matthias et tout s'imbrique parfaitement.

Un roman à découvrir.
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L'Échappée

La France est sous tension et la guerre civile fait rage. C'est dans ce contexte que l'on fait connaissance avec François, le détenu d'une prison qui voit le directeur de cette même prison, lui proposer de l'aide pour s'évader. François s'empresse d'accepter, mais fausse rapidement compagnie au directeur de la prison. Il se retrouve seul dans la nature, et décide de se rendre en Suisse pour une euthanasie. Il n'a plus grand-chose à perdre. Sa maison a été incendiée, il a perdu sa femme dans des circonstances tragiques avant son incarcération et ne voit plus ses enfants qui habitent loin. Sur son chemin il va faire des rencontres, de Constance une violoncelliste au caractère bien trempé à un groupe de jeunes adolescents dirigés par un mystérieux révérend, le trajet de François s'annonce assez sport. La mort souhaitée au bout du périple en Suisse s'annonce plus compliquée à atteindre. Je découvre la plume de Jean-François Dupont avec ce second roman et on se régale en découvrant ce regard désabusé sur notre monde. François, le personnage principal en bout de course sert parfaitement ce propos. Une atmosphère désenchantée plane sur le bouquin et en même temps, plusieurs passages très bien vus laissent un sourire en coin, notamment les dialogues. François n'était déjà pas en grande forme avant son évasion, pas certain qu'il se refasse une santé dans ce périple à venir pour la Suisse. "L'échappée" est un singulier roman où les personnages tentent de survivre dans un monde dévasté.



extrait : "Cette scène se déroulait entre la dépouille d’un chevreuil et celle d’un directeur de Shopi."
Lien : https://lesmafieuses.wordpre..
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Villa Wexler

Pépite littéraire en vue ! Roman d'une intensité telle qu'il est difficile de lâcher prise et de faire une pause en pleine lecture. Les fresques familiales, j'adore ça. Quand il y a des secrets, c'est encore mieux !

Mathias est un personnage complexe mais que dire des Wexler ?!

Le roman parle de secrets, de l'adolescence où l'on vit sans se poser de question, et de ce jour fatidique où l'on grandit et où l'on cherche enfin à savoir... Sombre est la réalité !

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Villa Wexler

Matthias, la trentaine, un peu paumé, revient dans la petite commune de montagne où il a grandi et tente de trouver des réponses concernant une période de son adolescence qui l'a beaucoup marqué, sa relation avec la mystérieuse famille Wexler.



Nous sommes projetés dans le passé au moment de son entrée en classe de première. Alors que ses parents se disputent beaucoup, il trouve plaisir à traîner avec ses copains de lycée et tombe vite amoureux de Charlotte... Wexler.



Le père de Charlotte est prof au lycée. Il s'agit d'un homme beau, charismatique, le genre ténébreux qui charme tout son monde, les adultes mais également ses élèves, notamment la très belle Aurore. Une ambiguïté malsaine s'installe entre l'adulte et l'adolescente mais le jeune Matthias est bien trop insouciant pour s'en rendre compte.



D'apparence parfaite, cette famille semble cacher de nombreux secrets et les agissements du père sont suspects, bien au delà de son semblant de relation avec Aurore. Mais Matthias est amoureux et se voile peut-être la face.



C'est un roman d'ambiance que j'ai lu avec plaisir. En même temps que Matthias, on perce petit à petit le mystère Wexler. Ce retour aux origines aide Matthias a trouvé ses réponses et le fait évoluer positivement. Les aller-retours entre sa vie actuelle et sa jeunesse sont plutôt habiles et les scènes d'adolescence sont très bien dépeintes et empruntes de nostalgie. J'ai facilement pu m'y identifier.



Je conseille ce roman un peu hybride mais efficace, entre le roman psychologique, le récit initiatique et le polar. Un livre qui attise la curiosité et dont on tourne les pages sans s'en rendre compte.



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L'Échappée

Sombre et puissant, d’une force inégalée, « L’échappée » est un rêve blessé.

Entre la fiction et ce qu’elle engendre d’exutoire, le vertige d’un roman sur le désenchantement.

L’existentialisme, le point d’appui, un livre de bord dont l’exemplarité terriblement humaine, happe et sidère.

Tant d’émotions, dans ce livre, serrent le cœur.

Contemporain, spectral, âpre, les échappées à l’instar de rais de lumière qui percent les pages subrepticement. Ici, le vif des êtres en perdition. Une histoire en corps à corps, feu, de bois, de craintes et d’anéantissement sociétal.

L’essentialisme comme l’issue de secours. « L’échappée » est cruellement semblable aux vacillements du monde.

Une guerre civile, insidieuse, prend ses marques. Le chaos, la vulnérabilité du jour présent.

François est ici. Juste sorti de prison (et pour cause). Il part à pied pour la Suisse. C’est un homme d’un âge certain, happé par les affres. Son passé est un bagage trop lourd. Il avance dans une cadence de renaissance. Il ne le sait pas encore. Le décorum est précis et radical. Il ne se soit aucun faux pas. Les dangers sont dans chaque angle. Il voit ce qu’il est devenu. Déstabilisé et fragile. La quête, pas à pas, vers la Suisse où il sera dans les temporalités de paix et financières.

Lui, qui vivait dans cet avant avec Faustine, sa femme, décédée brutalement et ses deux enfants. Un pavillon, un travail, le roulement d’une quiétude musicale, l’échappée vers le bonheur.

Ses enfants devenus vastes et éloignés, ombres et silence. Ils ne savent pas pour les années de prison. Ils ignorent ce que François est devenu. Un homme prisonnier de ses malheurs et de sa honte, de ses regrets et remords.

Universitaire à la retraite, un homme intelligent, mais sans énergie ni distance. Il marche et se terre, bête aux abois.

« Je lisais des romans, je revoyais des films où des personnages jeunes et beaux se désiraient…. J’avais eu le ventre plat, les cheveux épais et bruns, le sentiment d’éternité… Quelqu’un avait écrit que dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s’est passé. »

Il voit le paysage défilé dans sa conscience. Il se heurte au passé, franchit la ligne d’une nostalgie où il ne peut plus spéculer.

Revenir parmi les vivants. Il est seul et pourtant il rayonne dans la grandeur sentimentale.

Fortuitement, il rencontre « L’échappée », Constance, une violoncelliste qui elle aussi, est en partance vers la Suisse. Elle veut retrouver les siens, ses parents et son frère. Renouer avec la généalogie. Reprendre vie dans la matrice familiale. Mais le jour est sournois. La traque et les milices, les ordres et les craintes, le basculement dans le chaos. Ici, tout est fragile et risqué. L’idée de dépassement, franchir l’autre rive, l’immanence sacrée.

« Ça venait d’elle, de cette fille, Constance Dreyer, de ce qu’elle était devenue désormais, pour moi. Mon enfance, ma jeunesse, mon âge de déraison. Tout ce que j’avais aimée dans la vie se coagulait dans le chant presque humain du violoncelle. Elle était la dernière jeune femme, et d’elle s’échappait tout ce à quoi je n’aurais plus jamais accès. »

Le périple est l’expérience vitale de la confiance. Ils vont être retenus, prisonniers d’une bande de garçons à peine adultes. Dans cette fécondité de se croire des caïds. Alors qu’ils sont eux aussi, à l’instar d’animaux traqués. Comment ce réel incertain et lugubre va-t-faire saillir la fraternité et l’apprentissage de la survie ?

Constance et François sont lianes et de connivence. La fusion des détresses et la mélancolie comme une couverture de survie sur leurs corps fragilisés par les diktats d’une guerre civile et de leurs tourments intérieurs.

« C’est l’heure François… Nous avons trouvé la route qui avait été ensevelie par les éboulements… J’imagine qu’affublés comme nous l’étions, nous devions ressembler à un cortège de lépreux ou de pauvres hères. »

Que va-t-il se passer dans cette échappée où le temps fige l’âge ?

Ce roman est un hymne à la rédemption. D’une beauté certifiée, tremblant de pluie, il est le sacre de l’autre. Celui ou celle dont on ne sait rien avant l’heure du jour. Le prodigue presque charnel d’une renaissance en advenir. Le sentiment indicible d’une lecture poignante et spéculative.

« L’échappée » de Jean-François Dupont, dont les crépitements sont un requiem.

Publié par les majeures Éditions Asphalte.



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L'Échappée

L'écrivain projette un universitaire à la retraite sur les routes d'une France en proie à la guerre civile.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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Villa Wexler

Livre complexe à lire pour moi. Des phrases courtes, directes, ce qui permet de créer une certaine ambiance.

Une ambiance pesante, lourde et intrigante.

Mathias est de retour sans sa ville natale et replonge dans ses souvenirs d'adolescent et ses nombreux questionnements.

Aurore, Charlotte, la famille Wexler, Clémence, un prof, en était-il seulement un? Une relation trouble avec une élève...

Tous ces personnages sont liés à un moment ou un autre.

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