AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Jean-Jacques Sempé (504)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Musiques

Jean-Jacques Sempé, un sourire, une bonté débordante, c'est déjà un mythe… Ça touche à la grâce, « avant que la légèreté devienne suspecte ». C’est la phrase que Sempé dit au sujet de Charles Trenet mais c’est ce que moi je dirais des dessins de Sempé ! Qu’il raconte son Amérique, son Paris, célèbre l’enfance ou les amitiés, revisite l’œuvre de Marcel Pagnol, Sempé reste lui-même : un humaniste encore plus qu’un humoriste. L’humour conduisant à l’humanité.

Dans ce livre, il s’agit de ses conversations avec Marc Lecarpentier (ancien président et directeur des rédactions de l'hebdomadaire Télérama et président de l'association Mot-et-MOTS qui a pour objectif la promotion, la diffusion et la défense du Mot). Sempé nous confie qu’il rêvait d’être pianiste ! Grâce aux questions interpellant de Marc Lecarpentier, on apprend la passion de Sempé pour le jazz, sa vénération de Debussy, son enthousiasme pour l’orchestre de Ray Ventura. Sempé dit carrément que la musique lui a « sauvé la vie » ! Il parle volontiers de sa jeunesse et fait référence à des moments biographiques avec une naïveté touchante. L’intérêt autobiographique de cet album est évident.

Le classique, les variétés, tout est mêlé dans un imbroglio d’amour : Duke Ellington, Ravel, Satie, Paul Misraki et Charles Trenet, les compositeurs célèbres et les musiciens amateurs ou même les débutants. « Longtemps, j’ai prétendu que c’étaient les musiciens que je vénérais. Mais au fil du temps je me suis rendu compte que c’était une absurdité : sans musique, il n’y a pas de musiciens ! Alors, disons que j’aime autant la musique que les musiciens. Avec une petite admiration supplémentaire pour les musiciens. » Les héros de Sempé sont ces violoncellistes, ces guitaristes, qui portent leur musique sur le dos, ces pianistes qui s’attablent au piano, ces violonistes qui s’envolent portés par leur archet…

Lorsqu’il parle, Sempé a un ton enjoué que j’apprécie particulièrement. C’est un très bon conteur. Mais on apprend aussi qu’il est lui-même l’auteur de beaucoup de chansons (l’une sur les chats m’a amusée et émue bien plus que les autres !)

Quand j’avais découvert le style de Sempé, ses personnages au nez pointu qui me faisait toujours penser aux corbeaux, j’avais imaginé la tête du dessinateur comme un reflet de ses « corbeaux ». Parce qu’il existe une idée assez persistante selon laquelle un artiste peintre crée partout son propre portrait même s’il représente un autre. Et lorsque j’ai vu pour la première fois la photo de Sempé quelle était ma surprise de constater que son visage était rond sans rien de pointu !

Même si Sempé idéalise un peu les musiciens comme s’ils ne connaissaient ni jalousie ni découragement, son regard est si apaisant ! Regard d'amour, regard qui relève, regard qui appelle… Dire que je vous recommande ce livre ce serait insuffisant. Il faut faire connaître les musiciens de Sempé aux petits pour leur donner le goût de la musique. Je suis d’avis que les dessins de Sempé devraient être accrochés aux murs dans les conservatoires pour détendre l’atmosphère ! Car l’ambiance des conservatoires n’est pas toujours bon enfant.

Les musiciens, ce ne sont pas des bêtes trop excellentes, aux neurones enchantés, inaccessibles dans leur grande dextérité, ce sont des êtres bons qui sauvent le monde. Vive la bonté des musiciens ! Tel est le message de Sempé.



Commenter  J’apprécie          886
Le Petit Nicolas

Le petit Nicolas est dans "Pilote", mâtin, quel journal !

Dans les années 60, il se trouve en bonne compagnie, avec notamment Astérix et Obélix, Barbe rouge le démon des Caraïbes, l'inspecteur Robillard dont les enquêtes sont racontées par Pierre Bellemare, Michel Tanguy, zappy max dans "ça va bouillir" une mini BD signée Tillieux, Kopa pour des leçons de foot-ball, le fameux pilotorama qui fait, déjà lui aussi la double page centrale, Tromblon le bandit toujours accompagné de son fidèle corniaud "La Truffe" et de Bottaclou qui ne cessera jamais de le pourchasser, Blueberry, les dingodossiers, Achille Talon le cerveau choc, le grand Duduche, Oumpah-pah le peau rouge, P'tit Pat, Belloy le chevalier sans armure et bien d'autres...

J'ai eu la chance de grandir avec le petit Nicolas au fil des numéros de"Pilote" qui traînaient partout, abandonnés depuis de nombreuses années dans la maison, sans télé, des vacances de mon enfance.

Lorsqu'en 1975, "folio" sort un premier recueil de poche j'ai réuni mes quelques économies pour l'acheter et lorsque j'ouvre aujourd'hui ce livre dont les pages s'enfuient aussitôt, l'émotion reste intacte.

Le petit Nicolas est devenu au fil des années un grand frère qui revient me raconter périodiquement notre enfance.

Que dire pour en remercier Goscinny et Sempé, qui n'a pas déjà été dit ?
Commenter  J’apprécie          811
Raoul Taburin

Denoël l'avait publié en 1995 puis relancé cette année comme Gallimard Jeunesse, après une édition en 1998 et… revoilà Raoul Taburin découvert en version Folio Jeunesse grâce à Lecteurs.com et aux éditions Gallimard que je remercie car ce livre est un véritable petit bijou !



À Saint-Céron, Raoul Taburin, marchand de cycles, répare tout. Tout de suite, Sempé, s'appuyant sur des dessins paraissant simplistes et pourtant inimitables, fait sourire : « D'ailleurs sa réputation était telle que, dans le canton, on ne disait plus un vélo, mais un taburin. » Il en était de même pour Auguste Frognard et son jambon, du frognard, et Frédéric Bigaille, opticien, dont les lunettes sont appelées des bigailles…

Hélas, Raoul Taburin a un secret : « il ne savait pas monter à vélo. Il était incapable de faire du taburin. » Sempé nous conte alors la vie de son héros, son enfance, sa jeunesse. Un champion local a même gagné une étape du Tour de France sur un taburin !

Lorsque Josyane, la fille de son patron, avait espéré qu'il lui déclare son amour, il lui avait révélé son secret mais celle-ci, surprise et fâchée, ne l'avait pas cru et Sempé nous offre une très belle page, un vrai tableau où fourmillent des détails si bien croqués.

C'est drôle, plein d'un humour très fin avec des dessins au style si particulier, de simples croquis tellement fouillés qu'ils en sont vivants ! Les quelques bulles sont très pertinentes et ajoutent à l'histoire. Les dessins sont colorés sauf les portraits du photographe, Hervé Figougne… On ne disait plus une photo mais une figougne… C'est d'ailleurs par ce nouveau venu dans le village que le scandale va arriver.



Raoul Taburin, de Sempé, est un petit régal, une sucrerie qui se dévore gentiment et s'apprécie tendrement. de plus, pour les amateurs de vélo dont je suis, c'est une très belle histoire un peu folle mais tellement spirituelle, placée dans un de ces gros villages de France qui tentent de survivre mais qu'on prive peu à peu des services indispensables.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
Commenter  J’apprécie          765
Marcellin Caillou

Marcelin Cailloux est un petit garçon qui s'interroge. Pourquoi rougit-il à tout bout champ, sans rime ni raison, alors que les situations embarrassantes le laissent de marbre ? Marcelin ne sait pas. Ce qu'il sait en revanche c'est que cela le prive d'amis. Jusqu'à sa rencontre avec son nouveau voisin René Rateau. Un enfant délicieux, violoniste délicat, qui lui souffre d'éternuements intempestifs…

Bravo Monsieur Sempé, nous vous regrettons d'autant plus à la relecture de Marcelin Caillou, drôle, tendre, poétique, un véritable bijou que les années n'ont aucunement terni.

Commenter  J’apprécie          692
Rien n'est simple

Rien n’est simple, et rédiger une critique sur un recueil de dessins humoristiques vieux de plus de cinquante ans, d’un auteur qu’on apprécie, moins qu’autre chose.



À son trait, Jean-Jacques Sempé est identifiable quasi instantanément par une large frange de la population, et ce notamment en raison de l’énorme succès de son association avec le scénariste René Goscinny pour la série Le Petit Nicolas.



Mais il avait une vie aussi en dehors des sentiers de l’école pour Sempé : le dessin de presse humoristique. Ce recueil est à ma connaissance l’un des tout premiers voire le tout premier de son auteur, publié originellement en 1962.



Si j’ai évoqué le trait si caractéristique aujourd’hui de Sempé, c’est par ce que si je le regarde avec des lunettes du début des années 1960, le trait de Sempé n’a absolument rien de très caractéristique par rapport à celui de ses contemporains. Je le répète, vous avez bien lu, RIEN de très caractéristique. Il est totalement dans l’air du temps, de ce temps-là, les trente glorieuses, la société paternaliste, les dessins de presse bon enfant, le dessin publicitaire sympathique, etc.



Comparez-les, par exemple, à ceux de Jacques Faizant dans le Figaro en ce temps-là, à celui de nombreuses publicités d'époque, même à ceux d'auteurs jeunesse tels que Tomi Ungerer dans des albums contemporains comme Crictor ou Émile et vous verrez que c’est vraiment la mode du moment.



J’oserai même pousser la comparaison encore un peu plus loin, du côté d’un journal moins connu et pourtant cher à mon âme : le Paris Normandie. On y trouvait à l’époque et depuis déjà une grosse dizaine d'années des dessins d’humour de Bindle avec son personnage mythique (enfin, je me comprends, mythique pour moi et pour quelques irréductibles Normands comme Lecassin ou Gill, par exemple), j’ai nommé, oui, vous l’avez reconnu, c’est bien lui, attention ! roulements de tambours…………………………….



……………………....…...……. l’inimitable…………….......................……………..

………………….......…………. l’inégalable……......................……………………..

……………………….......……. l’inaltérable………….......................……………….



Poustiquet !



Je suis intimement convaincue que Sempé connaissait ces dessins et ce style et qu’il s’en est inspiré. Même le ton du Sempé de l’époque est très comparable à celui de Bindle.



Bon, maintenant que je vous ai dit cela, il me reste à vous dire si la mayonnaise prend toujours, si la sauce a toujours le même goût, bref, toutes sortes de questions relatives à la saveur de l’ensemble.



Et là, à ma grande peine, pour être tout à fait sincère, il me faut confesser que c’est assez plaisant, c’est gentillet, ça se mange sans faim, mais ce n’est tout de même pas renversant de drôlerie, ni même particulièrement captivant.



C’est très bon enfant, et d’ailleurs, à propos d’enfants, on sent tout de même beaucoup la prégnance du Petit Nicolas, ce qui est peut-être un peu dommageable pour des dessins, a priori, un tantinet plus destinés aux adultes.



Ici, du dessin d’idée, souvent toute simple l’idée, sans forcément beaucoup d’impact, puis une autre, et ainsi de suite. Pas trop de suite, justement, dans les idées, c’est un peu gratuit, et ça ne tient pas tellement au corps.



À telle enseigne que je me retrouve bien en peine pour tenter de dégager deux ou trois thèmes centraux qu’évoqueraient plus particulièrement ces dessins. On peut sans doute regrouper le premier gros tiers de l’ouvrage sous une rubrique fourre-tout du genre « transports urbains et foule », et le restant, sous le chapeau on ne peut plus vague de « psychologie humaine ». Vous constaterez qu’on a déjà vu moins nébuleux comme assemblage, mais je ne suis pas capable de faire mieux.



Excusez-moi, Jean-Jacques Sempé de vous éructer mon fait, moi qui vous aime tant par ailleurs, mais j’ai eu peu d’intérêt à feuilleter ce livre, sans pour autant y trouver du déplaisir, alors, bien modestement, je l’exprime, mais rien n’est simple, et seulement l’avouer est pour moi une manière de déchirure. Ne m’en veuillez pas Jean-Jacques.



Au reste, ce n’est là que mon avis, c’est-à-dire, bien peu de chose.
Commenter  J’apprécie          633
Le Petit Nicolas

René Goscinny,

Notre enchanteur public. Il écrit "le petit Nicolas" à hauteur d'enfant.

Il nous raconte les péripéties d'une joyeuse équipe de garnements potaches prompts à lancer de gros pavés dans la mare absurde d'un monde adulte trop souvent desséché.

À l'opposé de nombreux contemporains, René Goscinny fera sans cesse grandir son enfance.

Parmi toutes ses oeuvres, "le petit Nicolas demeurera celle qu'il préférait.

De là-haut, lui, l'éternel généreux doit dépenser tout son ciel à organiser des banquets avec Astérix, Obélix et tous les Gaulois, sauf Assurancetourix, toujours bâillonné et ligoté à son arbre ! décidément même là, il ne progresse pas !

De temps en temps, René ouvre la fenêtre d'un nuage pour contempler ce que le monde devient… Alors, soudain, de longues larmes roulent sur ses joues…
Commenter  J’apprécie          563
Le Petit Nicolas

Sur la couverture, ce petit personnage mignon semble nous prévenir : « En ouvrant ce livre, vous allez retrouver le temps de votre enfance, de votre innocence perdue » Les illustrations de Sempé sont naïves et expressives, totalement en symbiose avec les textes de René Goscinny. Les aventures de ce Petit Nicolas sont racontées à la première personne, avec la candeur et l'innocence d'un enfant d'école primaire. le style d'écriture est volontairement enfantin et cette astuce nous permet de retomber en enfance, de sentir et d'éprouver les sensations des bancs de l'école, avec les disputes, les bagarres, les insolences, les bêtises et les punitions à la pelle. Les personnages, avec des prénoms à coucher dehors, sont tous bigarrés, haut en couleurs, souvent caricaturaux et tellement drôles. Et même si l'école décrite ressemble plus aux écoles des années 50-60, l'humour et les gags n'ont pas pris une ride, et la fraîcheur de cette série semble éternelle.
Commenter  J’apprécie          510
Le Petit Nicolas

Décidément, ça ne vieillit pas, ou plutôt, ça vieillit bien !

J'ai découvert Le Petit Nicolas au début des années 60. Une monitrice lisait ça à des petits, éparpillés en train de grimper dans les arbres, et nous pré ados (mais on ne disait pas encore ça !) nous écoutions sans broncher. Bravo à elle d’avoir déniché ça, il était tout jeune à l'époque ce Nicolas !!



Et 2 générations plus tard : ma petite-fille (8 ans) n'était pas très tentée ; je lui en ai lu deux histoires, et ça y est, elle s'est lancée. A fini dans la foulée le livre; Et a emporté le tome suivant pour le lire chez elle.



J'ajoute que c'est une jolie peinture des années 60.



Pour ma part, en tant qu'adulte, j'aime bien le relire, mais quelques histoires à la fois, pas tout le livre d'affilée comme un roman.
Commenter  J’apprécie          443
Quelques mystiques

La flèche de l'église projette sur la place du village son ombre et crée ainsi une... flèche pointée vers le bistrot du coin. Une bigote, d'un pas décidé, suit la direction indiquée en s'exclamant "Message reçu !".



Je ne sais pas pour vous mais moi c'est le genre de gag tout en finesse que je trouve non seulement bien trouvé mais aussi très drôle.



Tout comme cet autre qui décrit une fidèle préfèrant passer à la pâtisserie avant de se rendre à la messe de peur de ne plus trouver ses éclairs au café préférés à la sortie mais qui, oublieuse de son achat anticipé, se repose de sa génuflexion en s'asseyant sur... le carton à pâtisseries.



Le trait si fin et si délicat de Sempé tient une fois de plus ses promesses, alliant réalisme et émotion. De très belles planches "spirituelles" à découvrir.





Challenge ATOUT PRIX 2016 - 2017

Challenge MULTI-DÉFIS 2017
Commenter  J’apprécie          380
Saint-Tropez

Cinq fruits et légumes par jour, c'est d'accord ! Mais alors, je veux aussi une « critique » sur Babelio par jour. On y va, je me jette à l'eau. Le 20 mai 1968 était « achevé d'imprimé » à Poitiers ce superbe album avec sur-couverture en couleur, chez Denoël. Sur un air de Sinatra, on fait la révolution ensoleillée. Je retiens l’échange de ces deux (vacancières ?) : « Tu trouves ça normal, toi : dans certaines usines, les femmes qui font le même travail que les hommes sont payées moins qu'eux !…/Je ne vois pas pourquoi, si je fais un travail, et si je le fais aussi bien qu'un homme, je serais payée moins !…/Mais tu ne fais rien…/ Justement... ». Bon amusement, à vous aussi.

Commenter  J’apprécie          380
Quelques optimistes

Toujours aussi incroyable ! Un humour aussi fin et dépouillé que le trait du dessin qui le fait naître et pourtant une force d'évocation incroyable qui illumine dans l'instant votre visage d'un sourire heureux. Voilà le secret de Sempé ! Un détail, objet ou moue, suffit à animer tout le sketch qui tient le plus souvent en un seul dessin.



Loin de l'univers du Petit Nicolas, ce recueil de dessins nous offre des instantanés amusants et tendres sur l'optimisme ou comment parfois, l'espoir, même ténu, d'obtenir rapidement une petite satisfaction nous fait faire ou dire des choses un peu ridicules. Les planches monochromes de Sempé ont vraiment le charme désuet des conversations entre amis que nous affectionnons au-delà de leur banalité. Instants du quotidien, scènes de la vie de tout le monde... c'est du comportement humain croqué avec justesse et justice que naissent ces drôles de dessins humoristiques qu'il est toujours aussi amusant et agréable de (re)découvrir.
Commenter  J’apprécie          370
Quelques jours de congé

Oui, il s'agit bien ici d'un vrai "petit plaisir" lu dans le cadre du challenge éponyme. Comme un acte manqué à voir autant de gens en congés autour de moi, et la nostalgie de mes derniers aidant, j'ai dévoré cet album qui offre au lecteur une escapade pleine d'humour en bord de mer, au fond des forêts, en pleine campagne ou encore au sommet des montagnes.



L'humour subtil de Sempé trouve ici un terrain idéal pour s'ébattre car il faut bien avouer qu'il y a toujours un voire des moment(s) où nous nous trouvons tous ridicules dans notre costume de touriste et dans des situations inhabituelles qui nous désarment et donnent facilement dans le cocasse. Une bonne occasion de rire de soi-même !





Challenge PETITS PLAISIRS 2014 - 2015
Commenter  J’apprécie          361
Raoul Taburin

Raoul Taburin est un citoyen de province lambda, réparateur de vélos. Autrement dit, le vélo, c'est toute sa vie. Sauf que derrière les apparences conformistes se cache un drame, le drame de Raoul Taburin, incapable de tenir sur un vélo. Un comble pour cet as de la mécanique ; une honte qui lui empoissonne l'existence. En effet, comment révéler ce lourd secret à son entourage, à ses clients, à ses confrères artisans ? Plus le temps passe, moins il trouve le courage de passer aux aveux, craignant pour sa crédibilité, voire sa respectabilité. D'un naturel rusé et espiègle, Raoul parvient pendant des années à tromper son monde mais, fatalement, arrive un jour ce moment tant redouté où Raoul se trouve mis au pied du mur...



Ce roman graphique de Sempé laisse la part belle à l'illustration et minimise la narration de telle sorte que c'est cette dernière qui vient étayer la première et non l'inverse, comme c'est le plus souvent le cas. Et quelle illustration ! Toujours, on retrouve avec délice cette délicatesse du trait, ce souci du détail, ce soin apporté aux sourires et aux regards, la couleur disséminée en légères notes pudiques et la douce ironie qui croque avec poésie bourgeois et commerçants, enfants et vieillards.



"Raoul Taburin", c'est le récit ordinaire et pourtant touchant d'une certaine France des Trente Glorieuses où tout semble simple, où les crises les plus graves sont les querelles entre époux et où la sérénité plane sur une vie harmonieusement partagée entre travail et loisirs. Pour cette raison, cette histoire n'est pas tout à fait un conte, elle trahit les accents d'une certaine réalité passée, évanouie et qui n'échappe pas à un léger sentiment de nostalgie.



L'humour de Sempé est bien sûr omniprésent et se révèle à la fois dans le texte et dans les dessins, certaines planches se suffisant largement à elles-mêmes. Une charmante lecture poétique et récréative.





Challenges PETITS PLAISIRS 2014 - 2015

Challenge de lecture 2015 - Un livre drôle
Commenter  J’apprécie          350
Quelques sentiments de culpabilité

Et puis surtout, j’en ai marre de tous ces gens, autour de moi, qui ont des problèmes.

-

Ce tome constitue une anthologie de scénettes et de gags, à partir de plusieurs albums précédents de l’auteur, parus entre 1962 et 1999. Sa première édition date de 2023. Il est l’œuvre de Jean-Jacques Sempé (1932-1922). Il s’agit de dessins en noir & blanc, il comprend vingt scénettes en une ou plusieurs pages.



Une femme maigre s’est allongée sur le divan de son psychothérapeute. Elle a enlevé ses chaussures qu’elle a laissées au pied du divan. Elle a les mains jointes sur le ventre. Deux des murs du cabinet sont pourvus d’étagères couvertes de livres. Le bureau comporte une pendulette, un téléphone, des calepins, un calendrier journalier et quelques papiers. Le psychologue a pris place dans un fauteuil confortable, à la tête du divan de manière que sa patiente ne puisse par le voir. Alors que la séance commence, il lui demande ce qu’elle pense de ce divan, tout d’abord. Ou lui a livré le matin même. – Dans une ville avec des gratte-ciels, dans une très large avenue, un homme rendu minuscule par les constructions, marche la tête baissée. À quelques dizaines de mètres de lui, se trouvent une église et un pavillon avec un unique étage, abritant un cabinet de psychothérapeute à l’étage. Le thérapeute s’adresse à l’homme d’église qui se tient lui aussi devant son bâtiment, en lui faisant observer : Ou il a l’impression d’avoir péché, et alors l’homme est pour le prêtre, ou il n'arrive pas à pécher et alors il est pour lui, le thérapeute. – Dans un pavillon, un homme est accoudé à la fenêtre grande ouverte, avec son épouse derrière lui, et les arbres autour de la maison, les étoiles et la Lune brillant dans le ciel. Elle s’adresse à lui en lui faisant observer : L’air est doux, il dit à l’homme : courage. Les fleurs lui disent : courage. Les oiseaux, les étoiles, le mouvement même de la vie, lui disent : courage. Et elle, elle lui dit : va voir un psychiatre.



Dans le cabinet d’un psychothérapeute, un homme est allongé sur le divan, et le thérapeute est assis sur une chaise derrière lui, son carnet à la main, en train de lui parler. Le patient est allongé et détendu, les bras le long du corps. Le thérapeute continue de parler, et soudain le patient se raidit. Le discours continue, et le patient semble comme énervé, peut-être en colère. Il se tourne vers le thérapeute, celui-ci étant toujours affable, pour lui faire comprendre qu’il se sent comme poignardé dans le dos. Le praticien lui met une main sur l’épaule pour l’apaiser, mais le patient redit qu’il se sent poignardé dans le dos. Finalement, il se lève et sort, le thérapeute continuant de lui prodiguer des paroles réconfortantes. Un ressort sort de la banquette du divan, étant passé inaperçu des deux hommes. - Dans un autre cabinet, un homme est allongé sur le divan et le psychothérapeute est assis dans un fauteuil au motif assorti à celui du canapé, les mains croisées sur ses jambes. Le patient raconte : Toujours le même rêve : Pelé feinte plusieurs adversaires, il passe le ballon à Platini qui, à son tour, le lui donne dans d’excellentes conditions pour marquer le but.



Ce recueil se compose de vingt scénettes extraites de dix recueils : Rien n’est simple (1962), Sauve qui peut (1964), La grande panique (1966), Des hauts et des bas (1971), Comme par hasard (1981), De bon matin (1983), Luxe, calme et volupté (1987), Insondables mystères (1993), Grand rêves (1997), Beau temps (1999). Treize de ces scénettes se présentent sous la forme d’un dessin en pleine page, et deux sont dépourvus de légende. Les sept autres scénettes sont toutes silencieuses et sont en quatre pages pour six d’entre elles, avec entre six et onze dessins, la septième comptant huit pages et quatorze dessins. En 2023, l’éditeur a publié seize autres recueils thématiques des dessins de Sempé : Quelques amis, Quelques artistes et gens de lettres, Quelques campagnards, […], Quelques philosophes, Quelques représentations, Quelques romantiques. Le rabat de la couverture précise que ses dessins sont piochés au travers de quatre décennies. Le lecteur qui est venu pour les gags vient à bout de cette anthologie d’une soixantaine de pages, en moins de dix minutes. Il remarque que douze des récits mettent en scène un individu en train de consulter, allongé sur un divan, cinq femmes, six hommes, un divan vide. L’absence de tout mot, tout texte dans neuf récits sur vingt permet une lecture très rapide, car les dessins sont lisibilité exemplaire. Les textes accompagnant les illustrations s’avèrent brefs et concis, pour une lecture également très rapide.



Le lecteur de passage risque donc de trouver ce recueil un peu léger. D’un autre côté, l’art de conteur de Jean-Jacques Sempé invite à prendre son temps, à respecter son propre rythme, à savourer, et aussi à se poser comme le font les personnages sur le divan du thérapeute. D’ailleurs, le premier praticien n’est pas pressé, il préfère commencer par le début, et savoir ce que la patiente pense de son nouveau divan. Le nombre de livres sur les étagères et le fauteuil confortable laisse supposer qu’il prend également le temps de la lecture. Le lecteur novice en Sempé prend le temps de s’attarder pour jeter un coup d’œil au dessin lui-même. De scénette en scénette, il se rend compte qu’il n’est pas en mesure de rattacher tel ou tel dessin à une décennie plutôt qu’à une autre. À chaque fois, l’artiste utilise une plume très fine pour tracer des traits délicats et fragiles, parfois non jointifs, laissant souvent la place pour le blanc, ajoutant à la légèreté. D’ailleurs, pour aller dans ce sens, la forme des livres dans les bibliothèques n’est qu’évoquée, sans aucun titre apparent, parfois réduite à un simple trait vertical pour rappeler un des deux côtés du dos. Tout du long de ces pages, le lecteur peut relever de nombreux autres exemples d’évocations par un simple trait fin : les étages d’un immeuble par un simple trait horizontal, le feuillage des arbres par de de petites et courtes ondulations, un dossier de canapé figuré par un simple trait arrondi derrière le buste des deux personnages assis dessus, un arbre surgissant sur la page avec juste un trait pour un côté de son tronc et des traits en fourche pour les branches, de minuscules ellipses irrégulières pour les feuilles d’une plante verte, etc.



Dans le même temps, certains dessins contiennent une multitude d’informations visuelles, tracées avec la même délicatesse. Une dame allongée sur un divan dans un magasin de meubles : une demi-douzaine de canapés de modèle différent, une douzaine de fauteuils de quatre modèles différents, une quinzaine de chaises de nombreuses lampes avec abat-jour, une quinzaine de visiteurs, une cuisine d’exposition. Le dessinateur va au-delà de l’évocation basique d’un espace d’exposition pour le représenter dans une vue générale. En fonction des cabinets de psychothérapeute, ils peuvent être représenter de quelques traits s’il s’agit d’une histoire en plusieurs dessins, ou avec un luxe de détails précis ou esquissés quand il s’agit d’un dessin en pleine page. Les personnages sont représentés avec la même légèreté, voire nonchalance de surface, et la même sensibilité engendrée par de nombreuses heures passées à observer son prochain, à s’essayer à en reproduire la richesse d’une expression de visage, jusqu’à en capturer la justesse. Le lecteur se rend compte qu’il éprouve une sensation de liberté, de pouvoir se promener, et il se rend compte que l’artiste ne trace aucune bordure à ses dessins. D’ailleurs il pense plus à chaque image en tant que dessin, plutôt qu’en tant que case. Il remarque également l’attention portée à la mise en page, une approche aérée, laissant de grandes zones blanches autour de chaque dessin, comme s’ils étaient indépendants, pour inciter le lecteur à les apprécier un par un, installant une distance entre chacun pour aboutir à une sensation de lecture notablement différente de celle d’une bande dessinée traditionnelle, un ressenti effectivement distinct.



Capturer l’indicible, les petits riens, les pensées fugaces, les états d’esprit fluctuants : le dispositif du divan s’y prête bien, avec des déclarations inattendues sur une préoccupation saugrenue, ou futile, ou à l’importance relative, parfois une obsession dérisoire. En fonction de l’histoire ou du moment, le lecteur est saisi par la justesse de l’instant montré, ou par la pantomime dont le naturel peut évoquer Sergio Aragonés en moins burlesque. Le lecteur prend la mesure du talent de l’artiste avec cette scénette en dix images : un homme et une femme sont assis côte à côte, avec un espace d’une quinzaine de centimètres entre les deux. Ils sont immobiles tout au long de ce plan fixe, cadré sur leur buste. Une expression de curiosité se lit sur son visage à elle alors qu’elle regarde son mari en coin, sans tourner la tête, alors que son front à lui se barre de rides de plus en plus nombreuses et profondes. Ses rides à lui s’effacent progressivement, et elles apparaissent avec un léger décalage sur son front à elle. Pas un mot, pas un geste, et l’esprit du lecteur se met à vagabonder, à s’interroger, à faire des suppositions, sur le lien qui unit cette femme et cet homme, sur l’investissement émotionnel de la femme qui la fait réagir par mimétisme, et par réaction son absence de réaction à lui, est-ce de l’indifférence, de l’insensibilité ? Autre chose ? Un incroyable échange inconscient présenté à la perfection qui touche le lecteur au cœur, avec de simples traits légers et fragiles.



Cette anthologie thématique des dessins de Sempé peut sembler une mise en bouche un peu frugale. D’un autre côté, le lecteur s’immerge intégralement dans la perception du monde exprimée par l’auteur. Des dessins délicats qui montrent des individus dans toute leur banalité, avec prévenance, gentillesse, sans jugement, agrémenté par une touche de poésie, une note d’absurde ou de licence artistique. Un recueil qui offre l’occasion de faire l’expérience du monde vu par Sempé, de déguster les saveurs d’instants fugaces et évanescents. Délicieux.
Commenter  J’apprécie          330
Par avion

Vous l’aurez compris, c’est une lecture hommage que celle de ce livre de Sempé, disparu le 11 août.



Il disait qu’il ne savait que dessiner, alors lisons ses dessins, dont certains furent publiés par le New Yorker.

Ce sont les impressions de Jean Paul Martineau, on ne peut plus français, débarquant à New York.

Chaque dessin est servi par un petit texte.



On y voit du Woody Allen avec une séquence où l’ami fait connaître qu’il est joignable téléphoniquement en donnant le numéro des amis visités : “This is Bob, rappelle-moi, je suis chez moi dans deux heures, avant je serai au eight, one, two, one, six puis au …”



Les dessins sont reconnaissables aux traits fins mais pleins de détails signifiants. Avec de la malice mais jamais de méchanceté.



Commenter  J’apprécie          330
Marcellin Caillou

Rougissez-vous ? Rougissez-vous comme moi ?



Marcellin est un enfant qui rougit sans raison, à contretemps.

Cela donne à Sempé le plaisir d’ajouter un petit point rouge dans une pleine page de dessins en noir et blanc, car son personnage mesure 5 mm alors imaginez sa tête dans une pleine page !



Marcellin, a-typique, rencontrera un ami à même de le comprendre parce que René éternue sans raison…



Un petit moment de douceur, avec des traits tendres et légers pour un petit personnage sensible, perdu dans notre monde.

Commenter  J’apprécie          321
Les Musiciens

J'ai bien aimé ce joli recueil de dessins de Sempé sur le thème des musiciens.

Il y a une grande variété dans les œuvres réunies ici : couleurs ou noir et blanc, épurés ou fourmillants de détails, orchestres classiques, fanfares, jazz-band, orchestre de bal, solistes, etc.

A chaque fois, Sempé nous offre des portraits pleins d'humour et de tendresse pour les musiciens virtuoses ou amateurs qu'il croque avec une justesse si touchante.

Commenter  J’apprécie          320
Les Vacances du petit Nicolas

Chaque été, j'essaie de choisir un livre à lire à mes enfants qui ait une thématique liée aux vacances et à l'été. Cette année j'ai opté pour "les vacances du petit Nicolas". Cela faisait une éternité que je n'avais pas lu de petit Nicolas, depuis l'enfance en fait. Et ce fut un plaisir que de retrouver ce sympathique personnage.



La réussite du livre tient avant tout à l'écriture de Goscinny. Il parvient à donner rythme très particulier à son texte, comme un parler enfantin. Effectivement, on jurerait que c'est un petit garçon qui nous raconte ses aventures. Et c'est d'autant plus vrai lorsqu'on lit le livre à haute voix.



Quant aux histoires, elles sont savoureuses. Exagérées bien sûr puisque racontées par le petit garçon mais finalement si justes. Goscinny avait indéniablement compris l'âme enfantine et la part de magie qui l'habite.



J'aimerais croire que ces petites histoires de bêtises d'enfants qui font la part belle à l'imagination sont intemporelles mais à l'époque des portables, des réseaux sociaux et de la télé-réalité à l'heure du goûter, j'ai peur que bien peu d'enfants se reconnaissent dans l’œuvre de Goscinny. Les miens ont beaucoup aimé mais ils ne sont pas vraiment représentatifs de leur époque (pas de télé à la maison, personne dans la famille n'a de smartphone, personne n'est sur facebook ou twitter...). J'essaie de les laisser être des enfants avec des préoccupations d'enfants sans polluer leur imaginaire avec l'actualité anxiogène ou le robinet à débilités qu'est la télé. Arrêtons de vouloir faire de nos gosses des mini-adultes, laissons-les plutôt être des Tom Sawyer ou des petits Nicolas avant qu'ils ne soient rattrapés par la mocheté et la bêtise du monde des adultes. Ce genre de livre contribue un peu à ça, à entretenir la magie que les enfants ont naturellement en eux et qu'ils perdront bien assez tôt.



Commenter  J’apprécie          302
Raoul Taburin

J'ai la fâcheuse manie, lorsque je commence un folio illustré par Sempé, de le faire un peu trop légèrement, comme on prend un magazine qui traîne par là, prêt à le délaisser aussitôt qu'une alternative se présente.

Ce n'est pas que je n'aime pas les dessins de Sempé, au contraire, ce sont ceux qui m'inspiraient le plus de mystère et de respect quand j'étais petite et que j'ouvrais Paris Match! Mais ces Folios sont si menus, les pages si blanches, avec si peu de texte, que je me dis en moi-même, "vite lu vite digéré".

Et pourtant, voilà trois fois que je me fais avoir!

Dans Raoul Taburin en particulier, j'ai ressenti une forte mélancolie, douce et tendre, au moment de tourner les dernières pages. Et pourtant, la lecture n'a duré que le temps d'un aller-simple en train pour aller au travail, 20 minutes pour être précise!

C'est que ce Raoul Taburin, le meilleur réparateur de vélos de la région, de taburin dit-on dans le coin, cache un douloureux secret... un secret honteux qu'il dissimule, comme le font bien souvent les êtres les plus sensibles, sous un humour qui lui apporte popularité et solitude...

Je n'ai pas envie de vous dévoiler l'intrigue, mais juste envie d'écrire que ce Raoul Taburin est profondément humain, dans ses défauts, ses faiblesses comme dans ses qualités, et que Sempé n'est pas qu'un très bon illustrateur mais aussi un merveilleux conteur.

Merci Gwen pour ce partage!



Commenter  J’apprécie          302
Le grand livre du Petit Nicolas

Très bel album jeunesse grand format à la couverture souple et renforcée.

Goscinny et Sempé vous invitent à entrer dans l'univers du héros, ses amis , les autres personnages particuliers de l'histoire.

L'ouvrage livre des extraits emblématiques et humoristiques des livres correspondants.

Il est parcouru de nombreuses fenêtres pop up qui ouvrent sur la vie de notre héros ; théâtre, enveloppes contenant des cartes, etc. D'autres découvertes jalonnent l'album.

Pour les fans de beaux livres et du Petit Nicolas
Commenter  J’apprécie          290




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean-Jacques Sempé Voir plus

Quiz Voir plus

MARCELLIN CAILLOU

Comment s'appelle le personnage principal ?

René Rateau
Marcellin Caillou
Rolant Bracot

8 questions
8 lecteurs ont répondu
Thème : Marcellin Caillou de Jean-Jacques SempéCréer un quiz sur cet auteur

{* *}