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Critiques de Jérôme Attal (379)
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La petite sonneuse de cloches

L'amour sonne toujours deux fois



Préparez vos valises. L'eurostar vous attend. Direction Londres.

Vous allez accompagner Joachim dans une enquête qui lui tient à coeur.

Son père, un grand professeur de littérature française, a laissé à sa mort un carnet dans lequel il a jeté les premières esquisses d'un projet d'écriture sur les amours de Chateaubriand.

Un chapitre qui se résume à une question énigmatique dédiée à une sonneuse de cloches de l'abbaye de Westminster attire alors son attention.

Une jeune fille dont Chateaubriand évoquera le tintement d'un baiser dans ses "Mémoires d'outre-tombe " quelques décennies plus tard.



Les investigations de Joachim nous emmeneront dans les rues de Londres à la recherche de l'identité de cette mystérieuse sonneuse et nous permettront peut-être de savoir à quel point ce baiser qui résonne encore a pu embraser le coeur de l'écrivain...ou de manière beaucoup plus surprenante le sien ...



Un petit vent londonien rafraîchissant nous pousse à tourner les pages de ce roman qui pétille d'humour et de beaux sentiments. Une fiction originale, tour de passe-passe magique, qui n'hésite pas à solliciter l'imagination du lecteur pour donner à la réalité un air de légèreté revigorant.













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La petite sonneuse de cloches

A la mort de l’éminent professeur de littérature française Joe J. Stockholm, son fils, en l’occurrence le narrateur, découvre le plan de l’ultime ouvrage que préparait le vieil homme, et qui devait être consacré aux amours de Chateaubriand. Curieusement, il semblait beaucoup s’intéresser à un détail des Mémoires d’Outre-Tombe : l'allusion à un baiser et à une petite sonneuse de cloches de l’abbaye de Westminster. Le fils décide de se rendre à Londres sur les traces de la mystérieuse jeune fille. Ses découvertes vont bouleverser sa propre existence.





Jérôme Attal s'empare d'un véritable mais infime élément de l'oeuvre de Chateaubriand, pour broder une histoire dédoublée, au travers de plus de deux siècles, par un habile jeu de miroirs. Avec pour point focal la découverte du grand amour romantique, vont s'entremêler l'évocation historique, faisant revivre avec réalisme le Chateaubriand de 1793, émigré à Londres pour fuir la Terreur française, écrivain en devenir pour l'heure dans le plus grand dénuement, et la quête contemporaine du narrateur.





J'ai beaucoup aimé l'originalité du sujet et de la construction, la force et la crédibilité de l'immersion historique, ainsi que l'humour et la belle écriture travaillée, ornée de jolies trouvailles et de tournures poétiques. Malheureusement, après (et sans doute en raison de) mon enthousiasme du début, une certaine frustration s'est peu à peu installée chez moi, alors que tension et mystère disparaissaient rapidement pour céder la place à une intrigue romantique, certes jolie, mais somme toute assez banale. Après une alléchante mise en appétit, je suis en quelque sorte restée sur ma faim, un goût de trop peu ou d'inachevé en bouche.





Brillant sur la forme, tant par la construction du récit que par le style de l'écriture, La petite sonneuse de cloches ne m'a pas semblé tenir toutes les promesses que son idée originale avait fait résonner en moi : je garde l'impression globale d'un bon livre certes, mais après avoir cru pendant tout le début qu'il serait un coup de coeur. La déception est toute relative, mais dominante néanmoins. Dommage.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Lettre à ce prof qui a changé ma vie

Avant même d'ouvrir ce livre, je savais déjà que je lui attribuerai la note de 5/5 ; ma très modeste et ô combien infime contribution à l'hommage rendu à Samuel Paty.

Et, si j'ai lu avec beaucoup d'intérêt toutes ces lettres, celles qui m'ont le plus touchée ont été celles d'Irène Frain, Romain Slocombe, Franck Thilliez, Henri Loevenbruck et Philippe Torreton.



Toute ma scolarité s'est déroulée, de 1959 à 1969, à Issy les Moulineaux dans les Hauts de Seine. C'était une époque où nous étions quarante élèves par classe, rien que des filles (la mixité n'existait pas), le professeur était juché sur une estrade et écrivait, chaque matin, à la craie sur le grand tableau noir, la morale du jour, souvent extraite d'une fable de La Fontaine. Époque bénie où les parents n'avaient pas encore investi l'école ; le boulanger faisait le pain, le garagiste réparait les voitures, le maçon construisait les maisons, l'enseignant enseignait, et aucun d'entre eux n'avait la prétention d'apprendre à l'autre comment faire son métier.



Malgré toute la considération que je leur porte, ayant moi-même œuvré durant toute ma scolarité à me faire oublier d'eux, j'ai beau chercher, je serais bien incapable de témoigner d'une relation particulière que j'aurais pu entretenir avec un professeur.

Il faut dire que ça avait très mal commencé, ainsi qu'en atteste ce mot de ma maîtresse, en date du 3 octobre 1959, alors que je n'avais pas encore 6 ans et que mon entrée en CP à la "grande école" remontait à tout juste un mois :

"Monsieur, Madame,

Je vous communique à nouveau le cahier de votre fille pour que vous preniez connaissance de son travail. Rien qu'en regardant l'écriture (si on peut appeler cela écrire) vous vous rendrez compte qu'elle se moque totalement des conseils et des punitions, puisque tous les jours ce sont les mêmes griffonnages. Si cela persiste je serai obligée de ne plus m'occuper de son cahier où je ne vois jamais aucune application mais seulement les signes de l'indifférence, de la paresse et de la mauvaise volonté la plus évidente.

L'institutrice."

Comme vous pourrez le constater, mes parents ont dû, très tôt, revoir à la baisse leurs illusions quant à mon brillant avenir.

Quoique, cette institutrice dont la pédagogie reste très discutable, s'était au moins foulée d'une lettre. Celles qui ont suivi étaient nettement moins inspirées et me résumaient en un mot : fumiste ! Un peu décevantes, ces braves dames ; elles auraient pu développer. Ma constance méritait mieux que ce jugement laconique.



À dire vrai, je ne dois ma passion de la lecture qu'à mon père qui, dès mon plus jeune âge, m'a fait découvrir les contes des Milles et une nuits, ceux d'Andersen, le merveilleux Livre de la Jungle de Rudyard Kipling et son extraordinaire poème "If".

En conséquence de cela, les seules matières qui, à l'école, ont suscité mon intérêt se limitaient au Français, à l'Histoire et au Dessin. Ce qui m'a valu, durant toute ma scolarité, une certaine connivence avec mes professeurs de Français vu que ce n'était qu'à leurs seuls cours que ma participation était active.

Et je leur suis infiniment reconnaissante de m'avoir donné toutes les clefs, astuces et moyens mnémotechniques pour, au sortir du Primaire, maîtriser très honorablement la lecture et l'écriture.



Me revient une petite anecdote avec ce professeur de Français que j'aimais beaucoup, madame Celtan, d'origine Martiniquaise, dont l'accent prononcé occasionnait une prononciation des "R" différente de la nôtre :

- Dictée : "De ma fenêtre, je voyais des vagues de toits..."

En mode "traduction automatique", toute la classe écrit : "De ma fenêtre, je voyais des vagues de trois..."

Madame Celtan de s'énerver : "Mais enfin ! Je ne vous ai pas dit des vagues de t'ois, je vous ai dit des vagues de t'oits !"

Chuchotements dans la classe : "Qu'est-ce qu'elle a dit ? Trois ou toits ?"

Il a fallu qu'elle l'écrive au tableau pour mettre un terme à la confusion générale.



Beaucoup moins joyeux comme souvenir a été celui de madame Brigand, professeur de mathématiques, tailleur bleu marine, chignon mémère et gros mollets, qui, en fin de 6ème, a convoqué ma mère afin de lui "conseiller" de m'orienter vers un collège d'enseignement commercial (voix de garage de l'époque). Si mon prof principal avait été celui de Français, le bilan aurait été tout autre.

J'avoue que j'en ai beaucoup voulu à cette dame qui, parmi la centaine d'élèves dont elle avait la charge, devait ignorer totalement qui était cette gamine au fond de la classe qui rêvassait en dessinant sur un coin de cahier pendant ses cours. Ce qui ne l'a pourtant pas empêchée de se sentir légitime à décider de manière péremptoire et arbitraire de ce que devait être mon avenir.

Après trois ans d'études commerciales où j'ai continué à ne m'intéresser qu'au Français et n'ai absolument rien retenu des cours de sténo, de compta ou de Droit, je me suis retrouvée dans la vie active à 16 ans ; bien contente d'être enfin libérée des contraintes scolaires.



Il en ressort néanmoins que toutes les bases solides de ce que je sais aujourd'hui, et que j'ai eu la curiosité d'approfondir par la suite, m'ont été inculquées par l'École. Cette École de la République à qui je voue, à tout jamais, une profonde reconnaissance et un non moins profond respect.



Je dédie ce billet à mon fils qui, après une licence de biologie, ne sachant trop quelle orientation prendre, est parti, sac au dos, parcourir le monde et en est revenu, deux ans plus tard, en me disant, résolu : "Maman, je veux être enseignant. Instit ! Car c'est avec les petits que tout commence vraiment. Seule la connaissance sauvera le monde."

Il a donc repris ses études, obtenu tous ses diplômes et concours du premier coup ; la motivation était là et bien là. Cela fait quelques années maintenant qu'il exerce en qualité de directeur d'école et après une mutation durant deux ans au Lycée Français de New York où il a pu élargir ses connaissances pédagogiques, il est de retour à Bordeaux où il a repris la direction d'une école et y enseigne en classe de CP.

Malgré toutes les embûches et les problématiques liées au climat actuel auxquelles s'ajoute l'intrusion abusive et chronophage de certains parents, sa détermination et son investissement restent intacts.

L'homme qu'il est devenu, sa vocation, son état d'esprit, sont pour moi une incommensurable fierté.
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La petite sonneuse de cloches

Au début des années 2000, un professeur de lettres meurt dans un hôpital où il a laissé un carnet de liaison avec son infirmière car il ne peut plus parler.

Ce n'est pas seulement un carnet de liaison car son fils Joachim découvre que son père travaillait sur le séjour qu'a effectué Chateaubriand , réfugié à Londres en 1793 pour échapper à la Terreur.

Il parle de la petite sonneuse de cloches de l'abbaye de Westminster et de son baiser furtif. Il est aussi question de cet épisode dans les Mémoires d'outre-tombe.

Joachim décide de continuer le travail de son père et part à Londres où il rencontre un ami de son père et s'aperçoit qu'une jeune bibliothécaire s'intéresse aux mêmes recherches que lui.

Certaines scènes sont étonnantes comme les sonneurs de cloches de Westminster à notre époque . Le moment où Chateaubriand arrive à Londres en 1793, affublé d'une rage de dents est très colorée. Il arrive chez un dentiste très original qui le qualifie d'émigré. Et oui, il arrive d'une France en plein tumulte après tout, où les nobles et les nantis ont intérêt à disparaître pour quelques temps.

Ce détail de la vie de Chateaubriand m'a bien intéressée.

Le texte est remarquable, très harmonieux, admirablement exprimé, très original.

J'ai dû faire des efforts pour rester dans l'ambiance du livre mais c'est très personnel.

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L'histoire de France racontée aux extra-terre..

♫Elle a des valises toutes prêtes

Pour les voyages qu'elle se raconte

Elle a des flammes sur les joues

La nuit le soleil est en nous

Sous sa robe sombre bleu froissée

Elle cache son âme cabossée



Elle sort d'un tableau de Hopper

Elle attend quelque chose de beau

Un rêve qui ne fasse plus peur

Un amour qui lui tienne chaud

Elle sort parfois de sa torpeur

Pour faire un mouvement de danse

Mais d'une toile de Hopper

On ne sort pas sans mot d'absence♫

Un tableau de Hopper - Johnny Hallyday - 2012



Après tous les souvenirs souvenirs et les kili kili kili watch

Tu peux la prendre, mais qui mettre à ta place !?

C'est bientôt fini, Johnny

Vois-tu encore la lumière ?

C'est bientôt fini, Johnny

Sens tu venir la poussière ?

A l'heure qu'il est, je sais qu'il est déjà trop tard

je m'associe à tous tes copains sans jeux de motards

On nous a retiré la Tour Eiffel dans la nuit

jamais du fond du coeur, nous on t'oublie...

La Tour Eiffel ayant, à l'heure où j'écris ces lignes, disparu sous un épais manteau de brume (p199)

ces quelques mots, pour nos joies et pour nos peines, un dernier verre posthume.

Silence, avant une dernière anecdote

mot non approprié qui n'a pas sa place,

Avec son histoire de FRANCE à la Kaamelott

Jérome Attal me félicite pour mes goûts Littéraires géniaux dans sa dédicace !

Ah aussi...après cette Johnny's homélie

sans jeux de mots, ni mélo-méli

C'est Jérome Attal, le parolier du tableau de Hopper...

écrire pour notre Johnny Rockeur,

prouve que cet Auteur est riche en couleurs !

Reste à lui insérer Johnny dans notre Histoire

La raconter aux Extra-terrestres il va falloir,

Je vous préviens, n'y touchez pas ! Noir c'est noir...









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La petite sonneuse de cloches

L’idée de départ est originale : alors que son père Joe J Stockholm, spécialiste de Chateaubriand, vient de mourir, Joachim s’aperçoit que dans son dernier opus, il s’intéressait à une petite sonneuse de cloche.



Tout part d’une phrase dans les « Mémoires d’Outre-tombe » : « J’entendis le bruit d’un baiser, et la cloche tinta le point du jour ». S’agit-il d’une histoire d’amour méconnue de Chateaubriand, alors qu’il était en exil à Londres en 1793 ?



Joachim, aidé d’un ami de son père, qui croit que cette jeune fille n’existe pas, et qu’elle sort tout droit de l’imagination fertile du Chevalier, dont la vie sentimentale fût mouvementée. Il nous emmène donc sur les traces du grand homme, via l’Eurostar, et tente de refaire le parcours de François-René dans les rues de Londres de l’époque.



Tout commence par un rendez-vous chez le dentiste (le gentil dentiste dit-il) pour Chateaubriand, pour un arrachage de dent, avec en guise d’anesthésie une « ébauche d’hypnothérapie ». Il se rend ensuite à l’Abbaye de Westminster, où reposent des hommes célèbres, s’y laisse enfermer et un baiser le réveille.



On va ainsi alterner le parcours de Chateaubriand dans le Londres de l’époque, à la recherche de la jeune fille dont il pense être tombé amoureux et ses conditions de vie on ne peut plus précaires et celui de Joachim qui se lance sur ses traces, pour vérifier si la petite sonneuse de cloches existe vraiment.



J’ai choisi ce livre pour Chateaubriand, évidemment, et découvrir un petit secret dans sa vie, pourquoi pas ? Mais, déception car on a droit à une « historiette d’amour » dans histoire d’amour…



Dommage, car Jérôme Attal écrit vraiment très bien et son sujet était prometteur. J’ai lu, il y a longtemps, un livre sur les histoires d’amour du Chevalier, écrit par un autre spécialiste de Chateaubriand, alias Jean d’Ormesson, : « mon dernier rêve sera pour vous » qui m’a laissé un grand souvenir…



Il m’avait convaincue de lire « Les Mémoires d’Outre-tombe » qui trônent fièrement dans ma bibliothèque et que…. Je n’ai pas encore lues !



J’ai quand même passé un agréable moment de lecture, car la plume de l’auteur m’a plu. Jolie petite histoire. Et, la couverture est très jolie.



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Robert Laffont qui m’ont permis de découvrir ce livre et son auteur.



#LaPetiteSonneuseDeCloches #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Lettre à ce prof qui a changé ma vie

Devoir sur table, au lendemain du décès de Samuel Paty, professeur d'histoire-géo assassiné pour avoir 'blasphémé' :

« Quel(le) prof a changé votre vie ? »

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Quarante célébrités se sont collées à l'exercice, répondant en quelques pages. Appartenant pour la plupart au milieu littéraire, les auteurs de ces lettres citent essentiellement des profs de français, théâtre & lettres classiques, et d'Histoire.

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Au-delà de la matière enseignée, sont vantées les qualités de ces enseignants inoubliables : leur sens de la pédagogie, bien sûr, en tant que 'passeurs' de culture, mais aussi leur talent pour accompagner, éduquer, susciter la curiosité & l'envie d'apprendre, éveiller l'esprit critique, donner confiance (y compris, et surtout, aux plus rétifs).

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Que je connaisse ou non son auteur, que je l'apprécie ou pas, chaque texte m'a captivée, éveillant des souvenirs de ma vie d'élève.

Certains sont particulièrement touchants.

Je retiens les méthodes d'Albert Algoud pour faire aimer lecture & livres aux enfants.

J'ai aimé l'inventaire sincère de Jul (l'auteur, pas le chanteur), qui n'oublie pas les 'mauvais' profs : ceux qui ont perdu la foi en leur métier (si tant est qu'ils l'aient eue un jour), ceux qui blessent. Eux aussi nous ont construits, ont forgé notre caractère (pensée amère & dégoûtée pour le prof de latin de 4e - cruel, vicieux, méprisant, probablement pédo, et doté d'un talent certain pour faire détester sa matière).

Parmi toutes ces lettres, c'est celle de Henri Loevenbruck que j'ai préférée, je vous laisse découvrir pourquoi, tout en remerciant à mon tour tous ceux qui m'ont "élevée".

.

A faire circuler très largement. Et à offrir, notamment aux jeunes profs, parfois découragés. 😉😘
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37, étoiles filantes

Sensible à la magie des mots, Jérôme Attal promène sa plume sur des terrains de toutes sortes : romans, nouvelles, poèmes, chansons – qu’il interprète parfois ! –, sans oublier les scénarios de films. Son dernier roman, 37, étoiles filantes, est l’occasion d’une agréable déambulation culturelle et romanesque dans les rues et les cafés de Montparnasse, un quartier qui, dans les années trente, était le centre névralgique de la vie intellectuelle et artistique à Paris.



J’ai ainsi croisé nombre de personnalités qui comptent dans l’histoire de l’art et dans l’Histoire tout court. Ils sont juste de passage et l’auteur les présente sous leur identité complète, nom et prénom. En revanche, les personnages principaux de l’ouvrage sont couramment désignés par leur seul prénom – Alberto, Jean-Paul, Diego, Henri-Pierre –, comme si moi, lecteur, j’étais devenu leur intime par la seule grâce de Jérôme Attal ; pardon, je veux dire : de Jérôme.



Tout tourne autour du sculpteur Alberto Giacometti, un géant ombrageux, dissimulant sa sensibilité derrière une grivoiserie dont le bon aloi n’est pas évident. Entre deux aventures féminines, il est à la recherche brouillonne de son style. En 1937, Alberto est loin d’avoir atteint la notoriété qui sera la sienne vingt-cinq ans plus tard, lorsqu’il aura réalisé L’homme qui marche, dont l’original est de nos jours la sculpture la plus chère du monde. Pour l’instant, Alberto serait plutôt l’homme qui marche en boitant à l’aide d’une béquille, car une voiture lui a roulé sur le pied et il porte un plâtre. Ceci dit, une béquille, ça peut servir à beaucoup de choses...



Jean-Paul, c’est Sartre. Le futur pape de l’existentialisme est déjà le binoclard strabique et grimaçant dont la postérité sacralisera l’image à partir des années cinquante. Mais pour l’heure, il n’est qu’un simple prof de philo de lycée, en négociation avec son éditeur pour la publication de La nausée, son premier roman. Tout à son envie frénétique de démontrer sa supériorité intellectuelle, il tient des propos qui ne lui valent pas toujours des amis. C’est d’ailleurs le cas pour Alberto.



Diego est le frère d’Alberto. Il est sculpteur, lui aussi. Les deux frères vivent et travaillent ensemble dans un minuscule atelier à peine salubre. Timide et introverti, Diego n’est qu’un simple comparse, étouffé par la personnalité d’Alberto.



Beaucoup plus âgé, Henri-Pierre Roché (dont je dois avouer que j’ignorais le nom) promène avec élégance son personnage d’esthète bienveillant, de touche-à-tout talentueux, de riche marchand d’art et de séducteur impénitent.



Autour d’eux papillonnent des femmes : Isabel, Nelly, Olga, Julia, et d’autres. Séduisantes, séductrices, mystérieuses, elles sont modèles, mondaines, artistes... ou femmes fatales. Certaines pourraient même être des espionnes : c’est l’année 37, des puissances étrangères menaçantes activent des réseaux de renseignement. La tension monte. Les groupes et les partis politiques extrémistes grondent.



A Montparnasse, on préfère ne pas savoir. On s’amuse, les cafés sont pleins. Accompagnés de leur cour, artistes confirmés ou en devenir vivent la tête dans les étoiles sans souci du temps qui file. On parle, on parle, on chante. Avec humour, Jérôme Attal n’hésite pas à placer, dans la bouche de l’un(e) ou l’autre, des formules paraissant bien senties mais ne voulant rien dire : « la liberté c’est juste la possibilité non négociable de choisir sa propre servitude » ou « s’expliquer sur tout sans avoir le besoin de se faire un avis sur rien ». Parfois, c’est une sentence artificiellement prémonitoire : « dans le monde moderne, les cages d’escalier seront les nouveaux territoires apaches ».



La lecture de 37, étoiles filantes est un surprenant moment de plaisir. Les personnages virevoltent dans des péripéties tantôt cocasses, tantôt émouvantes. L’ensemble forme une fantaisie légère et jubilatoire. La syntaxe et le vocabulaire sont éblouissants.



Un récit à nul autre pareil, une écriture aérienne, une atmosphère germanopratine (l’esprit de Montparnasse ne s’est-il pas, après la guerre, déplacé à Saint-Germain-des-Prés ?). Voilà qui est de bon augure pour un grand prix littéraire cet automne.


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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La petite sonneuse de cloches

J’aurais aimé me perdre dans les rues de Londres, me cacher dans ce brouillard si propice aux rencontres, aux intrigues, mais le fog londonien ne m’a pas enveloppée de son étrange sensation. Je suis restée hors de sa portée et je le regrette. Oui, je le regrette car cette petite histoire entre François-René de Chateaubriand et cette sonneuse de cloches qui lui aurait donné un baiser dans l’abbaye de Westminster, avait quelque chose de romantique, de doux, de surnaturel...



« J’entendis le bruit d'un baiser, et la cloche tinta le point du jour ».

Quelle belle idée de développer une accroche des Mémoires d’Outre-Tombe ! Rien qu’un détail pourtant, mais une fiévreuse recherche de l’amour, la nostalgie d’un bref moment partagé.

Une construction de roman originale aussi : deux histoires construites en parallèle, celle du Chevalier exilé à Londres en 1793 (fuyant la Terreur qui sévit en France) et celle du narrateur en 2003.

Une écriture soignée, riche de mille tournures, parfois teintées d’humour...



Tout cela est très bien, rien à dire. Mais je ne ressens pas ce sentiment de plénitude qui me traverse quand j’ai terminé un bon roman. Il me manque quelque chose que je ne sais définir... Peut-être faut-il laisser les fantômes dormir.
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Le voyage près de chez moi

L'histoire du déménagement en caddie qui avait attiré mon attention sur ce livre n'est finalement qu'anecdotique, comme un élément déclencheur pour raconter tout le reste. Cela ne m'a pas empêché d'adorer ce roman, quoiqu'on puisse se demander s'il s'agit d'un roman ou d'un récit autobiographique (les info glanées sur Internet prouvent que Jérôme Attal s'est beaucoup inspiré de ses propres expériences).



J'ai donc adoré ce roman amusant et bourré de petites anecdotes et de références culturelles (des incontournables et des choses plus actuelles). le texte est tour à tour drôle, désabusé, tendre ou ironique donnant une image très attachante du narrateur.
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La petite sonneuse de cloches

Je connaissais l'émouvante " petite cloche au son grêle " de Paul Vacca, et pas encore cette petite sonneuse de cloches, dont on a beaucoup parlé. C'est chose faite! Je n'avais rien lu jusqu'ici de l'auteur.



Dès le départ, j'ai apprécié le style pétillant, plein d'humour , que l'auteur prête à son narrateur contemporain, Joachim, fils d'un professeur de littérature qui vient de décéder. Le voilà embarqué dans une quête mystérieuse, à Londres, sur les traces De Chateaubriand.En effet, d'après une phrase énigmatique laissée par son père , le célèbre auteur aurait vécu un épisode amoureux avec une adolescente, remplaçant son père pour sonner les cloches dans l'Abbaye de Westminster.



Jérôme Attal alterne passé et présent. Il restitue à merveille l'ambiance londonnienne de 1793, alors que Chateaubriand, dans un dénuement extrême, ayant fui la révolution française, survit difficilement.



Les premières pages m'ont enthousiasmée. Cependant, les deux rencontres amoureuses en parallèle, celle de Joachim et de Maribel pour l'époque contemporaine, et De Chateaubriand et sa sonneuse, ont affadi le propos, je trouve. Et j'ai fini par m'ennuyer un peu, l'aspect sentimental primant sur le reste. Et certains détails ( comme le cimetière) m'ont paru peu vraisemblables.



Dommage! J'ai néanmoins eu plaisir à découvrir l'auteur. J'ai aimé son écriture virevoltante et malicieuse. Si vous avez un autre livre de lui à me conseiller, je suis preneuse!
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La petite sonneuse de cloches



Jérôme Attal a l’art de débusquer l’entrefilet qui débouchera sur un roman.

Pour 37, étoiles filantes, c’est une anecdote méconnue autour de la brouille entre Sartre et Giacometti qui lui sert de prétexte.



Pour ce roman, c’est une ligne trouvée dans un paragraphe des Mémoires d’outre-tombe, que l’auteur cite « J’entendis le bruit d’un baiser, et la cloche tinta le point du jour ».



Le récit d’ouverture campe un personnage dont on ne connaît au début, que le prénom, se dirigeant chez un « gentil dentiste ». Son apparence physique ( teint cadavérique) et son accoutrement choquent une patiente. Elle lui trouve cependant « du charme » émanant de ses « yeux ardents ».

Ce chevalier de vingt-cinq ans, qui a déjà bourlingué, redoute la séance de torture qui l’attend. Moment d’incompréhension et d’effroi quand on lui parle d’introduire « un pélican » dans sa bouche ! Le dentiste, mal perruqué, en guise d’anesthésie, lui conseille de se focaliser sur un souvenir agréable. Pour Chateaubriand et non « Chat O’Bryan », ce sera le BAISER qui a scellé sa rencontre avec la petite sonneuse de cloches dans l’abbaye de Westminster tout dernièrement.



Ce fait divers intéresse d’autant le professeur Joe J.Stockholm qu’il a entrepris de publier un nouvel ouvrage sur ce Français exilé à Londres, relatant les amours de « l’écrivain, grand coureur de jupons ». Projet qu’il n’aura pas pu, hélas, mener à son terme. La canicule de 2003 l’emporte, plongeant son fils, Joachim, dans un total désarroi qui « siphonne son coeur ».

En possession du cahier de liaison de son « Daddy », il découvre le plan détaillé de son projet, ce qui va le motiver pour entreprendre de poursuivre les recherches de feu son père. Le narrateur brosse un portrait de son paternel pétri d’amour : professeur célèbre, à « la générosité au-delà de la moyenne », au charme irrésistible ». Il avait

la littérature chevillée au corps, on pourrait dire jusqu’au pied, avec « sa pantoufle frappée de l’effigie d’Edgar Allan Poe » ! C’est grâce à sa bibliothèque que le fils a rencontré la littérature et a été biberonné à la poésie de Brautigan !





Et voici le romancier qui nous embarque à Londres en Eurostar pour suivre Joachim dans son « enquête familiale ». IL tient à honorer la mémoire de son père, comprendre sa fascination pour cette quête et espère résoudre cette énigme laissée en suspens. D’un côté, le doute le taraude : « la gamine n’aurait jamais existé » ! De l’autre il est galvanisé par le passager croisé qui lui conseille de foncer.

Il sera secondé par un collègue de son père, Marin Maret qui lui a donné rendez-vous au Wolseley, endroit chic, fréquenté en son temps par Lucian Freud, cité en exergue.

Les rencontres providentielles se multiplient : avec Damien, un des sonneurs de cloches et avec Miss Silsburn, la gardienne des trésors de la bibliothèque de Westminster.



Le récit devient haletant quand celle-ci constate le vol des registres qu’elle

voulait exhumer des archives pour permettre à Joachim d’effectuer ses recherches !

Quelle étrange coïncidence ! Qui peut bien être la personne qui s’intéresse au même sujet que lui ? Serait-elle Mirabel, la bibliothécaire de Marylebone, aux « cheveux fins couleur miel »? Plutôt que de prévenir la police, Joachim promet de remonter jusqu’à elle. On est embarqué dans cette chasse au trésor, toujours dans des dédales de couloirs, cette fois dans une autre bibliothèque. Aussi futé que Sherlock Holmes, il les tient les documents volés sauf qu’une collision frontale avec la « petite voleuse » s’avère brûlante et douloureuse.

Il lui reste à comprendre pourquoi elle voulait consulter les mêmes archives que lui !

Serait-elle une descendante de Chateaubriand ? Elle alimente le mystère, lui promettant de lui remettre « quelque chose » lors d’une fête à laquelle elle le convie. Posséderait-elle des lettres ?

Rebondissement : méprise de Marin, quant au contenu de cet objet, ce qui lui vaut la colère de Joachim qui l’accuse d’être « un chateaubrigand ».



Au chapitre II, on retrouve le jeune chevalier, croisé en ouverture du roman, « la joue enflée comme la poche d’un pélican », à la recherche de pitance et désireux d’écrire et totalement tourneboulé par sa rencontre avec la petite sonneuse. Il ressent « le premier feu de l’amour ». Comment la retrouver ? En pistant le père !

Au chapitre IV, on suit le déménagement de Chateaubriand pour une mansarde dans le quartier de Violet, celle pour qui son coeur bat. Vont-ils se croiser ? Se parler ?



Joachim arpente, écume tous les quartiers que le migrant Chateaubriand et Violet ont fréquentés ainsi que celui où Mirabel travaille. Un conseil : consulter une carte pour repérer tous ces lieux cités : Soho ,Holborn, Chinatown St James’s Park, the Strand, les quartiers de Bloomsbury, de Marylebone, Shaftesbury Avenue, Cavendish Square Gardens, Oxford Street, Regent Street, Carnaby street, Piccadilly Circus, Covent Garden, Drury Lane…



La mise en parallèle du Londres fréquenté par Chateaubriand ( aux « venelles infâmes », avec ses chaises à porteurs, ses colporteurs, « les cabriolets jaunes de filles de Covent Garden », un Londres, en novembre, noyé dans une « purée de pois mouchetée de charbon », où l’on croise des renards faméliques le long de la Tamise) et du Londres actuel où se fond Joachim, permet de capter sa métamorphose. Londres sous la pluie avec « des passants plus lestes que des gouttes de pluie sur un carreau » et « des sirènes iridescentes ». Londres gourmand avec les stands de cupcakes, de carrot cakes, les pyramides de « gingerbread muffins », les « marmelades de Fortnum and Mason ».

Quant à la libraire Deboffe dont Chateaubriand «  parle abondamment dans ses Mémoires », elle a fait place à un restaurant chinois.

Jérôme Attal aime apporter une trame historique à ses romans : ici il distille en filigrane des allusions à « la France qui chavire inexorablement dans la terreur », « pays de la beauté et de la terreur. De la splendeur et de l’incendie. », d’où ces migrants qui trouvent refuge en Angleterre.

La précision avec laquelle il décrit les lieux (abbaye de Westminster, bibliothèques de Westminster et de Marylebone) donne de la force au récit. La beauté irradie des portraits de Violet et Mirabel aux prénoms savoureux et au charme magnétique.







Dans ce livre-ci on devine « le garçon sensible » qui y a mis « tout son coeur », qui lui aussi, à la période de Noël, arbore « un pull de Noël », qui ne cesse de convoquer les souvenirs de ses parents. Il nous fait partager la culture britannique, comme les « soldiers » qui correspondent à nos « mouillettes » ou «  les Scottish eggs », la porcelaine Emma Bridgewater. Il rend un hommage indirect à sa Majesté la reine, rappelant la date du 17 novembre, jour anniversaire de son accession au trône.





Jérôme Attal distille des réflexions sur la vie, l’amour : « Il n’y a pas de permanence à la félicité. » Il explore l’état amoureux (« On ne prémédite pas de tomber dingue d’une personne. ») et s’interroge sur l’empreinte que nous laissons. Il garde son sens de la formule qui fait mouche et le lecteur, conquis, se surprend à souligner sans fin toutes ces expressions originales, inattendues (« des cheveux montés en cumulonimbus », « un croissant de lune en travers de la gorge » !). De plus, il jongle avec les comparaisons et les jeux de mots et nous en amuse !Par exemple :« aimable et usant. Aimusant », ou « embauchée/débauchée », «  Gog et Magog/démagogues », Mirabel/Mira-Bell ».



Jérôme Attal, le plus British de nos écrivains français, un amoureux invétéré de Londres souligne la propension des Anglais à finir leurs phrases par une interrogation, ce que l’on enseigne comme des « question tags » !



En revisitant une tranche de la vie de Chateaubriand, l’auteur nous incite à lire ou relire ses Mémoires. Avec cette immersion dans Londres, l’écrivain nous donne une envie d’escapade sur les traces de son enquêteur afin de visiter Westminster Abbey. Jérôme Attal gagne notre empathie avec sa touchante confession en clôture du roman. Il nous offre une déambulation éclectique dans la littérature (Duras, Salinger, Austen, Bataille) et la peinture (National Gallery, Boudin, Monet, Staël) et une réflexion sur le rôle de l’écrivain poète : « Laisser au lecteur quelque chose de beau dans la tête, quand il tourne la page ». Pari gagné avec cette passionnante et haletante double quête amoureuse au souffle romanesque puissant. Dans ce roman, le troubadour des lettres « a logé tout son coeur. », sa fantaisie, sa sensibilité, son humour et sa poésie.

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Des mots par la fenêtre

Un recueil de textes, presque tous écrits pour l'occasion, publié au bénéfice des hôpitaux ; cela ne se refuse pas !

C'est assez hétérogène : beaucoup de nouvelles, quelques poèmes, d'autres formes. La qualité est variable, mais l'urgence à publier cet ouvrage explique sans doute beaucoup d'inégalités littéraires...



Pour ma part, j'ai particulièrement apprécié quelques textes, dont :

- L'autre monde de Jim Fergus : en liberté dans son Amérique sauvage ;

- Sentence de Karine Gienel : mesurons notre chance de vivre en liberté, loin du "confinement" des traditions et religions ;

- À qui tu pense, Philo ? de Anne Icart : confiné dans son handicap, mais libre de rêver ;

- Lettre à mon inconnu de Yasmina Khadra : en recherche de l'autre ;

- Libre dans la jungle de Louison : le "déconfinement" vécu par un chimpanzé ;

- Le type le plus prévisible du Centre Commercial de Charlie Ménétrier McGrath : un temps d'enfermement peut-il rendre imprévisible ?



Un bon moment de lecture solidaire, sans ennui !

Recueil disponible uniquement en version numérique.
Lien : http://michelgiraud.fr/2020/..
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La petite sonneuse de cloches

Quelle belle idée de départ !

Un vénérable professeur de littérature française est interpellé par les dernières phrases du chapitre cinq du livre dixième des Mémoires d'outre-tombe.

Voici ses phrases : " j'entendis le bruit d'un baiser, et la cloche tinta le point du jour. La sonneuse fut épouvantée  lorsque je sortis avec elle par la porte du cloître.  Je lui contai mon aventure; elle me dit qu'elle était venue remplir les fonctions de son père malade : nous ne parlames pas du baiser.

Nous sommes à l'abbaye de Westminter à Londres.

Notre vénérable professeur de littérature française travaille à l'écriture d'un livre sur les amours de Chateaubriand.

Il est gravement malade et va mourir avant d'avoir terminé son livre.

Son fils Joachim va trouver les épreuves du livre et un chapitre en friche s'ouvrant sur l'interrogation : la petite sonneuse de cloches ?

Joachim part alors pour Londres afin de répondre  à cette interrogation.

A partir de cette idée Jérôme Attal va développer deux fictions :

 La recherche par Joachim  des documents et archives pouvant valider l'existence de cette petite sonneuse de cloche.

Mais surtout la recherche de Chateaubriand  qui veut retrouver le goût de ce baiser  et le visage de la petite sonneuse.

Tout au long du roman les deux recherches se répondent. Recherche d'amour, de romantisme.

Malheureusement Jérôme Attal reste sur l'écume des sentiments et des situations.

Et quelque soit la fiction, en 1793 ou de nos jours,  l'histoire ne décolle pas.

Le Londres de 1793 est bien documenté,  la vie de migrant de Chateaubriand de même.

Quand à Joachim, on s'aperçoit rapidement que sa recherche est l'exact reflet de celle de Chateaubriand.

Peut être que cette écume des sentiments et des situations correspond  la frivolité du milieu artistique et aristocratique du Londres de 1793.

Dans une interview  Jérôme Attal indique que son roman aborde Deux révolutions,  la révolution française,  et la révolution du sentiment amoureux. Celui ci passant du libertinage, des liaisons dangereuses au romantisme.

Je n'ai trouvé que partiellement dans son livre cette révolution du sentiment amoureux.

La recherche magnifiée de la petite sonneuse de cloches ou de la femme du 21ème siècle me paraît vraiment partielle pour parler du romantisme.

On revient à l'écume des choses.

Néanmoins La petite sonneuse de cloches reste un roman très agréable à lire.

C'est peut-être l'essentiel mais je crains que dans quelques semaines le roman sera comme l'écume,  évaporée.


Lien : https://auxventsdesmots.word..
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Petit éloge du baiser

Quel joli projet que celui de Jérôme Attal de traiter du baiser! “Ceux donnés et ceux “non donnés””.

L’auteur de textes de chansons aime nous interpeller : “A quand remonte votre dernier baiser clandestin ?”

Saviez-vous qu’il existe une science du baiser : la philamatologie ?

Saviez-vous que le baiser le plus long au monde a duré plus de 50 heures ?

Si vous avez besoin de la recette du baiser inoubliable, allez à la page 48.



Ce traité est un peu un inventaire à la Prévert où l’on trouve des souvenirs, des réflexions, des anecdotes.

C’est donc un peu foutraque avec des chapitres autonomes.

Son épilogue est à l'aune de ses clins d’oeil :

“Bon, c’est bien beau la littérature,

Le petit éloge, la lecture,

Mais qu’est-ce qu’on attend, maintenant,

Pour s'embrasser ?”

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Lettre à ce prof qui a changé ma vie

Bon, je vais d'abord donner un aperçu de ce qu'ont écrit les 40 personnalités, puis j'irai, légèrement j'espère, de ma patte personnelle.

Ils sont tous touchants, mais la lecture m'est lente, car, évidemment, le style change, d'un auteur à l'autre. J'ai aimé les « cadeaux », faits par les enseignants ( je n'aime pas le mot « prof » ), la liberté pour plusieurs, l'affirmation par le blasphème pour Nicolas Beuglet, la pensée par soi-même pour la « blacksheep » Sophie Blandinière, les graines plantées, le gai savoir pour Irène Frain, l'empathie, l'écoute, le poids des mots pour Marius Jauffret, un superbe discours sur l'apparence et une belle mémoire pour Jul (n'est-il pas auteur de BD ou à Charlie ? ), que je trouve quand même un peu pompeux, une autre a fait de son enseignante d'Anglais sa marraine ! Je remarque la professeure d'histoire griote de Marc Lévy, l'hommage à ses parents enseignants d'Henri Loevenbruck, la prise de conscience de Tibault de Montaigu, le transport chez Zola de Tatiana de Rosnay, etc... Ce sont majoritairement les enseignants de lettres qui ont « le beau rôle », car beaucoup, parmi ces élèves écrivent maintenant.

.

A mon tour !

Pour moi, ce fut en première, Mr Freu, un vrai CAPEPSIEN d'EPS, qui me révéla la discipline que j'allais enseigner. Auparavant j'avais eu des maîtres d'EPS qui m'ont fait pratiquer peu de disciplines différentes. Mr Freu m'a ouvert l'esprit à tout un champ des possibles, que j'ai élargi par la suite.

Je vous passe rapidement les coups de baguette de Monsieur Majid en primaire ;

les trois enseignantes dont je fus amoureux ;

le prof qui m'a mis 09.5 / 20, que j'ai supplié de mettre 10, et je vous dis pas quand mon père l'a appris !

le professeur de 4è Techno qui, après « la paumelle », nous laissa un sujet libre et où je m'éclatai à dessiner les côtes d'une voiture de circuit 24 ;

celui de math de première et terminale qui semblait être injuste avec moi et que j'ai étonné au bac...

… et des enseignants assez connus dans le supérieur comme Christian Pociello qui a fait escale à Nancy pour nous donner un cours magistral de sociologie du rugby avant de s'envoler vers les Vosges, deltaplane sur le toit de sa voiture ;

l'impressionnante brochette Famose-Vigarello-Parlebas qui nous attendaient tous les trois derrière un bureau, Jean-Pierre Famose, l'inventeur de la trace bleue, Pierre Parlebas, en survêtement impeccable mais démodé, et surtout Georges Vigarello, qui me faisait penser au César dessiné par Albert Uderzo, expert en philosophie et en EPS, passionnant !

Je n'oublie pas Jean-Yves Nérin, qui m'a appris à « écrire », Dominique Durand qui m'a fait aimer Edgar Morin, les systémiques et... l'escalade !

Marc Durand, qui m'a permis de différencier la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque ;

Pierre Arnaud ;

… et Jean-Louis Dieu, le bien nommé !

.

Je termine l'évocation de ma carrière d'élève par le début, par la honte de ma vie... Oserai-je ?

J'ai fait pipi en classe de huitième, en plus devant une maîtresse super-jolie, parce que nous venions d'arriver dans un pays hispanique, et que je ne savais par dire «  Por favor, puedo ir al bano ? »

.

A l'inverse, pour ma carrière d'enseignant, je serai bref  :

En Picardie dans un collège sensible, où les enfants étaient défendus bec et ongles par leurs parents, l'administration ouvrant le parapluie, c'était un peu l'ambiance pourrie de la série « Sam », la pauvre, qui fait tout ce qu'elle peut pour défendre les harcelés, et se retrouve confrontée à la police. J'ai fait le grand écart, « instruisant » les élèves attentifs et essayant « d'éduquer » les élèves irrespectueux.

Par contre, je me suis éclaté à La Réunion, et, passionné, j'ai fait découvrir plein de sports à des élèves ébahis qui n'en avaient pratiquement jamais fait, et ce fut un plaisir, pour eux comme pour moi !
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J'aurais voulu être un Beatles

All you need is Love



Dans cette version augmentée de «Le Rouge et le Bleu ou comment les chansons des Beatles infusent dans l’existence» paru en 2008, Jérôme Attal revient sur son amour pour les «fab four» et nous offre de (re)découvrir leur parcours et leurs chansons.



Jérôme Attal a semble-t-il trouvé le moyen de nous surprendre chaque année avec un livre bien différent du précédent. Il y a deux ans, dans «37, étoiles filantes», il racontait comment Alberto Giacometti courait derrière Jean-Paul Sartre pour lui casser la figure, l’an passé avec «La petite sonneuse de cloches» il nous faisait découvrir les amours de Chateaubriand en exil. Et cette fois, s’il revient à Londres, c’est pour mieux nous entrainer dans ses souvenirs d’enfance, du côté de Saint-Germain-en-Laye, au moment où il découvrait le premier album des Beatles. Les éditions Le Mot et le Reste ont eu la bonne idée de demander à Jérôme Attal de corrigée et compléter «Le Rouge et le Bleu ou comment les chansons des Beatles infusent dans l’existence» paru en 2008.

Avec lui, en courts chapitres qui sont autant de bonbons sortis d’un paquet aux couleurs bleu et rouge, on revisite une histoire dont nous partageons tous un peu quelque chose, surtout si l’on approche ou dépasse le cinquantaine.

Et ce quelque chose est d’importance. Car «la pop culture, la musique, le cinéma, nous construisent, assurent les transitions, la couture entre l’enfance, l’adolescence et tout le bordel qui s’ensuit. La culture pop donne de l’élan, des bases, des modèles, un mode de vie, un horizon…»

La démonstration est lumineuse et nostalgique, brillante et riche d’anecdotes qui raviront aussi ceux qui ne sont pas des afficionados. On prend la mesure du phénomène en même temps qu’on replonge dans la France de la seconde moitié du XXe siècle. Quand Paul Mc McCartney, John Lennon, Ringo Starr et George Harrison faisaient souffler un vent de liberté avec des airs passés aujourd’hui au rang de classiques.

Jérôme Attal revient aussi sur la rivalité entre les Beatles et les Stones qui a aujourd’hui trouvé sa place dans des évaluations – plus ou moins sérieuses – des agences de recrutement. Je me souviens avoir dû répondre à la question, êtes-vous plutôt Beatles ou Rolling Stones?, êtes-vous plutôt Coca ou Pepsi? À en croire Jérôme Attal, on aurait pu y ajouter êtes-vous plutôt Tolstoï ou Dostoïevski? Car il «existe un lien étroit et une opposition révélatrice entre d’un côté les Stones et Dostoïevski, de l’autre les Beatles et Tolstoï.»

L’auteur souligne encore combien les quatre anglais ont poussé des milliers de jeunes français – dont lui-même – à se perfectionner dans la langue de Shakespeare, de suivre avec plus d’assiduité les cours d’anglais avant de partir se perfectionner dans des séjours linguistiques qui étaient aussi autant d’occasions de découvrir la Grande-Bretagne et le charme des petites anglaises. Sur le ferry qui le ramène en France, il a cette belle idée d’écrire la plus belle des lettres d’amour à partir des titres de son songbook. Ce qui donne cette petite merveille: «Hello little girl, I call your name. All you need is love. From me to you, I want to hold your hand. Please please me, don’t let me down. Do you want to know a secret? I wanna be your man, here, there, and everywhere, across the universe. It’s only love. We can work it out. I ’m happy just to dance with you. Oh! Darling. I want you. I ’ll be back. Goodbye.

P.-S. I love you.»

On ne révèlera pas ici toute la poésie de la réponse à cette carte postale brûlante d’amour.

Au fil des ans, on y voit aussi défiler la grandeur et la décadence du groupe mythique et on découvrira comment s’est construit le mythe. Que depuis des décennies les fans ont leurs lieux de rendez-vous, à commencer par le fameux passage piétons devant les studios d’Abbey Road que les «fab four» ont emprunté le 8 août 1969. Cet instant, immortalisé par le photographe écossais Iain Macmillan, fera la pochette du dernier album studio du groupe. Quant au passage piétons, il sera classé aux monuments historiques anglais en 2010. L’autre lieu de culte, le Vintage Magazine Shop, du côté du Borough Market, a été remplacé par un magasin de vêtements. Une disparition douloureusement ressentie par les habitués qui «se sentent amèrement dépossédés, orphelins d’une partie stable de leur existence.» bien qu’il reste le Beatles Store en haut de Baker Street.

Et puis, s’il ne fallait s’attacher qu’à un seul titre, ce serait «Michelle» dont on comprendra en fin de volume l’émotion particulière qu’elle peut susciter pour l’auteur qui nous livrera par la même occasion quelques clés de son travail de romancier et comment ses proches deviennent par la magie de l’écriture des personnages de roman. Voilà aussi de quoi relire avec un œil neuf L’Appel de Portobello Road et La Petite sonneuse de cloches.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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Neuf rencontres et un amour

"Neuf rencontres et un amour" m'a fait retrouver Antonin Artaud et découvrir Anaïs Nin.

Ces deux-là se voient et immédiatement leurs regards sont aimantés. Si Anaïs est cette femme mariée qui attire les regards, admirée et désirée de tous, Antonin Artaud est lui, différent, singulier, mystérieux, quelqu'un d'à part qui attire tout autant qu'il intrigue. L'attirance entre les deux est indéniable, mais pour Antonin il faut 9 rencontres pour que l'amour soit vrai, beau, intense et pas une simple relation.

Entre Anaïs et Antonin, neuf rencontres où l'on va croiser Hugo Ian son mari, Henri Miller son amant et bien d'autres.

Jérôme Attal nous amène dans le milieu artistique parisien, dans ces salons où les artistes se rencontrent, le libertinage, les grands discours se côtoient.

J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre ce jeu du chat et de la souris.

Antonin Artaud m'a bien sûr moi aussi attirée, sa beauté, sa fragilité, son mystère envoûtent tout autant qu'il font fuir.

J'ai eu envie de mieux connaître Anaïs Nin cette femme pétillante solaire je suis donc allée faire quelques recherches sur internet pour la découvrir.

Jérôme Attal nous offre un roman qui nous amène à réfléchir sur l'amour, la liberté, sujet sans fin.

Il nous donne envie de mieux connaître Anais et Antonin.

Antonin Artaud que je connais très peu je n'ai jamais rien lu de lui, il fait partie de ceux qui me semblent inaccessibles. Quant à Anaïs Nin , je la découvre ici.
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La Griffe Noire : 30 ans



Il faut indiquer le taux de cacao sur les romans noirs !

Telle est la revendication absurde d'un terroriste d'un nouveau genre. Une fois entré dans la librairie, il exige également que les romans policiers soient retirés de la vente, que les thrillers soient disponibles uniquement sur réservation après examen psychologique du lecteur.

Et pour se faire entendre, cet ancien professeur de lettres ne lésine pas sur les moyens ! Il massacre les plus grands titres de la littérature française et demande L'impôt de chagrin De Balzac, Les minables de Victor Hugo, En rouge et noir de Stendhal, L'entonnoir d'Emile Zola ...

Prêt à tout pour se faire entendre, ce forcené menace même de faire écouter aux libraires un album de Jul, volume à fond. Vous connaissez ce jeune rappeur marseillais ? Ses paroles font froid dans le dos.

♫ Alors wesh alors

Viens dans mon del' allez let's go

Ils parlent de moi mais je les laisse gros

Tiens ta gadgi j'ai pas la laisse gros

Ouais ouais ouais je baise tout ♪

Comment vont réagir les libraires de la Griffe Noire face à cette menace ?

Jamais ils ne pourront supporter qu'on martyrise à ce point la langue française.

Les académiciens trouveront-ils un compromis pour calmer ce fou furieux ?

Vous le saurez en lisant la nouvelle de Dominique Maisons, l'une des trente de ce recueil.



Si je me suis procuré "A peine entré dans la librairie", je vous avouerais que ça n'est pas parce que je voue un culte particulier à Gérard Collard ou à son acolyte Jean-Edgar Casel. Je n'ai jamais mis un pied dans leur célèbre commerce, et je n'ai jamais été au salon du livre de Saint-Maur-des-Fossés. Comme beaucoup j'ai en revanche déjà suivi quelques chroniques littéraires enthousiastes de l'homme à la houpette, et même si je ne rejoins pas toujours son avis il a le mérite de défendre tous les genres au-delà des best-sellers déjà hyper médiatisés et de donner envie de lire pour se faire plaisir.



Pour célébrer les trente ans de leur librairie , ce sont donc des auteurs dont les livres ont été défendus par La griffe noire qui ont été invités à écrire une nouvelle, et lorsque j'ai vu qu'au sommaire figuraient Claire Favan, Barbara Abel, Jacques Expert, Karine Giébel ou Olivier Norek, je n'ai pas résisté bien longtemps, avide de découvrir ce qu'ils avaient pu rédiger.



Ce sont donc principalement des auteurs de polars qui sont présents, à quelques exceptions près, et ils ont rivalisé d'imagination pour nous concocter des nouvelles originales, humoristiques ou portant à réfléchir.

Le thème, comme l'indique la couverture, c'est l'entrée dans une librairie ( qui sera 50% du temps celle de Saint-Maur-des Fossés ) mais s'étendra souvent à la défense des livres et des petites librairies de quartier face aux géants sans âme de la distribution.

Ces auteurs s'éloigneront majoritairement un instant de leur univers de prédilection, beaucoup se feront des clins d'oeil les uns aux autres.

Et c'est plutôt une belle réussite dans l'ensemble puisque les textes plaisants à lire sont vraiment majoritaires.



Je ne m'attarderai pas sur les trente textes, mais principalement sur ceux que j'ai préférés tout en en survolant quelques autres afin de montrer à quel point un sujet comme celui-là peut donner un échantillon extrêmement varié, beaucoup plus en tout cas que ne l'avait été celui du recueil québecois Crimes à la librairie.



J'évoquais la complicité entre les auteurs, et c'est ce que fait avec beaucoup de malice Olivier Norek qui choisit pour personnage principal de son récit son pote Nicolas Lebel. Ce Nicolas semi-fictif est un écrivain malmené par sa maison d'édition, dont les ventes ne décollent plus. Il est en cours de rédaction de son cinquième roman, "Une histoire triste", mais sans conviction aucune. Et puis le destin le conduira jusqu'à la commune de Saint- Griffe où il se rendra dans une étrange librairie. Il y découvrira avec stupeur "Dans mes mains, ton coeur bats", un roman de Claire Favan dont il n'a jamais entendu parler alors qu'il a toujours suivi de très près son actualité littéraire. Et ça n'est pas tout. Qu'est-ce que c'est que ce roman de Maud Mayeras intitulé La monstre et l'Enfant Nuit ? Par ta faute de Barbara Abel ? Prisonnière dans un puits de Karine Giébel ? Mourir debout de Jacques Saussey ? Il n'a jamais entendu parler de tous ces titres. En consultant les dates de publication, il se rend compte qu'il a fait un saut de dix ans dans le temps.

"J'ai devant moi les dix prochaines années du polar francophone."

Et si c'était la solution pour sortir de sa panne d'inspiration ?

J'en rêverais de me retrouver dans une librairie du futur pour avoir un aperçu de ce que nous réservent tous les auteurs que je suis avec assiduité !



A noter que Nicolas Lebel, présent également dans le recueil, est déjà l'auteur de cinq romans. Avant L'heure des fous ( premier livre avec le capitaine Mehrlicht ) il avait en effet déjà rédigé Les frères du serment, un roman moyennageux rédigé en alexandrins. Je l'évoque ici parce que sa nouvelle est ainsi composée ici, toute en rimes, et relate la délectation du diable lui-même à la lecture des romans tordus et machiavéliques ... d'Olivier Norek, Nicolas Takian, Sire Cédric, Claire Favan, Barbara Abel, Joseph Incardona ...

A peu de choses près, on retrouve les mêmes !



Jacques Saussey également va rendre hommage à ses collègues écrivains, mais d'une façon encore différente, et tout aussi imaginative. Deux policiers sont appelés sur une scène de crime dans une librairie et sur place, ils rencontreront une joyeuse bande hétéroclite de fous. Soit disant des collègues à eux. Qui est ce grand costaud qui joue avec une petite locomotive ? Ce dandy moustachu ? Ce loubard au blouson de cuir griffé "Code 93" ? Et il y en a beaucoup d'autres ! Une vieille anglaise qui boit du thé, un amateur de Gustav Mahler, un homme au visage de batracien, un solitaire d'un mètre cinquante, un amateur de lait de chèvre ... A vous de deviner qui ils sont ! Mais quel délice d'imaginer tous ces célèbres enquêteurs réunis dans la même pièce et interagissant de façon totalement surréaliste !



A l'instar de la nouvelle de Norek, un petit côté science-fiction sera également choisi par Jérôme Camut et Nathalie Hug. Un grand-père raconte à son petit-fils sa rencontre avec sa grand-mère. Il lui explique également ce qu'est un livre, puisque ces derniers ont aujourd'hui disparu, laissant place à une totale dématérialisation. La dernière des librairies, faute de clients, a du fermer ses portes.

Dans la même lignée, en plus pessimiste encore, Ingrid Desjours invente un monde d'anticipation régi par un système de castes. Léa, dernière lectrice et détentrice de livres, s'acharne pourtant à se rendre dans sa petite librairie chaque jour alors que la lecture est devenue obsolète. Et un jour, un sauvageon se présentera aux portes de sa boutique et elle essaiera de lui apprendre à lire, de lui transmettre son savoir. Reste-t-il un espoir de communiquer le goût de la lecture ? Tout n'est peut-être pas perdu.

Ces auteurs partagent leur appréhension de voir un jour les livres disparaître, alors que les lecteurs sont de moins en moins nombreux.



Karine Giébel n'a pas eu à chercher très loin l'inspiration puisqu'un passage de son dernier roman se déroulait dans une librairie. Alors si vous avez aimé Toutes blessent, la dernière tue vous devriez comme moi être ravi de retrouver un instant le personnage de Tama, cette esclave qui a appris à lire seule. Vous aurez cette fois le point de vue du libraire Tristan, celui-là même qui montrait un peu trop d'intérêt à la jolie Marocaine au goût d'Izri, son violent protecteur. Même si vous connaissez déjà l'histoire, c'est toujours intéressant de la lire racontée par un narrateur différent, malgré lui au centre d'un drame dont il ignorait tout.



Les séances de dédicaces seront également récurrentes. le recueil commence d'ailleurs très fort avec, ordre alphabétique oblige, Barbara Abel qui se rend compte que la lectrice en face d'elle, Bérénice, possède de nombreux points communs avec l'héroïne de son futur roman. Son prénom, son métier, le prénom de son époux ... C'est forcément une farce !

Mais en discutant, l'auteure belge se rend compte que les coïncidences sont trop nombreuses. Comme si elle avait jusqu'alors écrit exactement la vie de cette admiratrice. Si vous avez vu l'excellent film L'incroyable destin de Harold Crick, c'est exactement le même principe : L'auteure a le pouvoir de décider du destin de son personnage, qui s'avère être une personne réelle.

Alors que feriez-vous à sa place ? La douce et jolie Barbara Abel décevrait ses lecteurs avec une happy end, ce n'est pas ce qu'ils attendent d'elles. Elle doit malmener ses personnages, et plus si affinités ! D'une profonde gentillesse dans la vraie vie, d'une monstruosité sans limite dans ses romans, quel sera son choix ? Quelle suite donnera-t-elle à son manuscrit ?

Philippe Jaenada nous livre quant à lui une anecdote personnelle, un instant de solitude bien réelle qu'il a vécu, j'en ai bien peur. Avec énormément d'humour, il nous relate son invitation dans une librairie bretonne pour la promotion de son roman Sulak. Personne ne l'attendait. Il s'est retrouvé relégué dans l'arrière salle du bistrot d'en face, pour ne pas déranger les clients. Et seule une amie se rendra sur les lieux. Depuis, il choisit beaucoup plus minutieusement les endroits où il se rend. Mais il a une telle façon de raconter ce moment, à la fois pince sans rire et totalement désabusé, que le lecteur ne peut que rire de ses déboires.

A l'inverse, David S. Khara, qui doit en partie le succès inattendu de son roman le projet Bleiberg aux éloges de Gérard Collard, raconte timidement sa venue pour une séance de dédicaces dans une librairie. Avec émotion, il a découvert que son livre trônait entre Stephen King et Maxime Chattam. Et il a même provoqué l'évanouissement d'une libraire encore plus émue que lui de le rencontrer. Avec beaucoup d'humilité, il a compris l'espace de ce court instant ce que devaient ressentir au quotidien George Clooney ou Brad Pitt.



Jacques Expert, dans son style toujours si reconnaissable, nous parlera d'une séance de dédicace de Bernard-Henri L. ( un personnage de fiction, assurément ) qui se rend dans une librairie sans son assistante pour dédicacer son dernier chef d'oeuvre, le jardin d'éternité. Avec stupeur, il s'aperçoit que son roman a été classé au rayon jardinerie. Et qu'il n'y a strictement personne à l'exception d'un idiot avec une houpette, qui s'interroge sur la qualité de son livre ...

Vous découvrirez la face cachée de Gérard Collard et de Jean Casel dans ce petit bijou plein d'humour noir.

Jean-Philippe Blondel relate quant à lui la rencontre fictive entre le célèbre écrivain Philippe Dulery et son plus grand fan, Antoine, tremblant à l'idée de rencontrer enfin son idole, l'auteur de romans dans lesquels il s'est reconnu, qui l'ont bouleversé. Et rappelle malicieusement que les lecteurs doivent avant tout aimer les livres et non les auteurs qui les ont écrit, qui peuvent s'avérer décevants.



Le surnaturel sera le choix de quelques auteurs, à l'instar de R. J. Ellory qui signe une nouvelle pleine d'émotion, décrivant de sa plus belle plume l'improbable histoire d'amour d'un photographe de guerre anglais et d'une libraire parisienne. Mais son terrible métier persiste à hanter l'artiste. Dante et Elise pourront-ils surmonter son envie de retourner en enfer ?

Laurence Peyrin décrira quant à elles les étranges circonstances lors desquelles son héroïne Bonnie sera embauchée dans la plus grande librairie d'occasion du monde : Chez Strand, à New York.

Dans le texte de Bernard Prou, lire un extrait de roman permet de le voir se matérialiser sous nos yeux.

Très inspirée, Dominique Sylvain raconte quant à elle la rencontre entre un libraire et Diane Duranger, auteure qu'il adore au-delà de toute raison, et qui lui réserve un sort pour le moins inattendu.



Certains incorrigibles restent dans la littérature noire, à l'exemple de Sonja Delzongle où un homme est le seul à voir un chat dans une librairie qui lui tient particulièrement à coeur, et également à l'entendre lui parler. Sa folie ne fait guère de doute. Mais quelles extrémités franchira-t-il, lui qui semble si inoffensif, et pour quelle obscure raison ?

Maud Tabachnik a pris quant à elle un malin plaisir à mettre le couteau sous la gorge de Gérard Collard. Celui d'une mère désespérée qui veut à tout prix que son fils soit publié, alors que son roman est refusé par tous les éditeurs. Et elle voit dans le co-gérant de la Griffe noire son ultime espoir de voir les rêves de son fils se concrétiser, quitte à prendre en otage ce dernier. Beaucoup d'humour à nouveau dans ce texte, ainsi qu'un bel hommage à John Kennedy Toole.

Quant à Valentin Musso, il réserve une belle surprise au terme de "Parenthèse poétique", nouvelle dans laquelle un homme cherche le recueil de poèmes le plus approprié pour sa chère correspondante Yvonne. Quel poète sera susceptible de la toucher le plus ? Yvonne succombera-t-elle à ses avances ?



Claire Favan et Jean-Michel Guenassia vont tous les deux dire ce qu'ils pensent des livres de développement personnel, la première insistant sur la bêtise voire les dangers de ces derniers en mettant en scène un jeune homme que son épouse va quitter pour son frère en public, et qui espérera trouver le remède à sa tristesse dans le livre "Reprendre sa vie en main, retrouver la joie de vivre". Ce qui ne va pas se passer tout à fait comme prévu.

"Pour lire des trucs pareils, faut vraiment être au bout du rouleau."

Moins sévère, le second met en scène un SDF tout juste sorti de prison, qui se persuade que le livre "Découvrez le trésor qui sommeille en vous" va lui permettre de faire fortune. Toute référence à un titre de Laurent Gounelle serait bien sûr fortuite. Mais comment se procurer cette ultime solution sans un sou en poche ?



Le reste des nouvelles est majoritairement "Feel-good" et donc guère convaincant à mes yeux.

Aurélie Valognes et Gaëlle Nohant sont toutes les deux parties sur une idée similaire : les romans qui soignent et que les libraires délivrent comme une ordonnance. Ils prescrivent donc des auteurs à consommer matin, midi et soir pour guérir de l'ennui, de la solitude, des insomnies, de la dépression. Mais aussi des laxatifs, des vomitifs. Attention toutefois aux effets secondaires.



Et je n'insiste pas davantage, je pense avoir déjà laissé un bel échantillon de ce qui vous attend dans ce recueil.

S'il rend en effet hommage aux trente ans de la Griffe Noire, chaque auteur sélectionné le fait à sa façon. Exprimant pour les uns leur crainte de voir disparaître ces petites librairies de quartier qui ne se contentent pas de vendre des livres mais qui assurent la promotion de romans de qualité qui, sans eux, auraient pu passer inaperçu.

La peur de voir le livre papier disparaître, ou même la lecture devenir facultative, semble hanter quelques uns des écrivains.

Mais au-delà de ces réflexions pessimistes, les auteurs ont souvent eu des idées géniales et inédites pour parler de leurs expériences, pour concocter d'improbables scénarios, choisissant souvent l'humour ou le second degré, parfois le drame ou la tristesse, pour s'exprimer en moyenne sur une dizaine de pages.



Je sais bien que les nouvelles sont souvent boudées par les lecteurs, mais ici les trois quart des textes valent le détour. Ils s'adressent à tous, même si j'avoue que bien connaître l'univers du polar francophone actuel peut aider à saisir davantage quelques petites subtilités.



Et pour résumer le plus simplement du monde, j'ai passé majoritairement un excellent moment avec ces textes, petite pause bienvenue entre deux épais romans !

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Petit éloge du baiser

Baiser, baiser la bouche aimée,



Baiser la bouche convoitée,



Baiser la bouche dérobée,



Baiser la personne rêvée,



Boire le baiser,



S'y abreuver,



S'y perdre,



Un enchantement !



Alors pour ne pas oublier sa saveur,

Embrassons !!!







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