Jérôme Fansten parle de "Manuel de dramaturgie à l'usage des assassins"
partie 1
Le crime le plus débile devient parfait s'il n'a pas de suites. Le crime le plus élaboré est une barbarie merdeuse si l'assassin se fait choper.
Le reste? Littérature.
Taper sur les faibles est un bon moyen de se faire connaître. Je suppose qu’on passe pour pragmatique. Ça fait sérieux, intégré. Les autres, les courageux, les rêveurs, on les évite.
C'est quoi, les "enquêtes de J." ? De l'auto-fiction ? Un hommage aux grands auteurs du Noir, Dashiel Hammett en tête ? Une manière de récupérer par la bande l'héritage surréaliste pour raconter des histoires d'amour ? Une parodie de polar ? Eh ben, c'est tout ça... C'est une autobiographie amoureuse, racontée avec le prétexte du hard boiled. A moins que ce soit un polar pur et dur, avec ce qu'il faut de baroque pour bien parler de l'amour et du désir sexuel. (p.293)
- Ça vous fait quel effet d'entrer chaque jour au 36 quai des Orfèvres...?
- Sans doute le même effet qu'un lavabo à un plombier.
Le Père suit mon regard et me présente La Bête. La Bête, putain. La Bête est son homme de main, son bras droit. La Bête est un sadique. C'est un homme, comment dire ? Immobile. Voilà, c'est ça : La Bête est "immobile". (p.53)
Fabriquer une bombe est un jeu d’enfant, de la chimie amusante : bicarbonate de sodium à mélanger dans une bouteille de verre avec du vinaigre. La réaction est telle que la bouteille vole en éclats sous la pression gazeuse. A priori rien de dangereux. Mais dans de bonnes proportions, avec de petits adjuvants corrosifs et un vicelard aux commandes, ça peut avoir des effets assez désagréables.
Il y a bien des façons de s’avarier, et les moins confortables ne sont malheureusement pas les plus rares. Si dans le domaine du meurtre, les assassins se renouvellent, ils retournent en revanche toujours aux mêmes litières. Il s’agissait donc pour les médecins légistes d’observer de visu et en temps réel les actions combinées de la faune et de la flore sur la décomposition humaine.
L’humanité en tas, c’est une chose – elle a le mérite de l’abstraction. Dans le détail, c’est différent. Plus abordable. Plus précis. Moins trompeur aussi. On perd à ne pas rester dans le flou ! Les approximations nous mettent en valeur, quoi qu’on en dise. À trop connaître les autres, et leur odieux potentiel, on en vient vite à se dégoûter soi-même.
Quand une femme dit « Jamais », c’est une promesse solide, alors que le « Jamais » des hommes est souvent une menace pathétique…
Nos bactéries décomposent les protéines en acides aminés. Quand on vit, quand on se lève le matin pour se recoucher le soir, en un mot : quand on ne moisit pas dans les phosphorescences puantes d’un parc comme celui-là, cette décomposition ne pose pas de problème. Elle ne concerne même que l’estomac et les intestins. Ça se passe entre eux.