Julie Légère

Dans les campagnes, les pratiques et croyances païennes sont reléguées au rang de superstitions pour ne pas faire ombrage aux rites chrétiens qui s'imposent alors. Pourtant, certaines pratiques magiques sont relativement épargnées, car considérées comme savantes. C'est le cas de l'alchimie et de l'astrologie, issues des premiers traités de magie traduits de l'arabe. Souvent utilisées par des hommes instruits et bénéficiant d'un statut privilégié dans la société, ces magies trouvent crédit auprès des puissants de ce monde et tolérance auprès de l'Église, là où nous, magiciennes et magiciens du peuple, voyons notre savoir dénigré...

Ce qui nous faisait accuser

Vivre en marge de la société, avoir refusé les avances d'un homme, les avoir acceptées, ne pas aller à l'église, trop aller à l'église, porter un chapelet abîmé, changer fréquemment de domicile, avoir trop d'amants, se disputer avec ses voisins, être insolente, se promener la nuit, ne pas avoir réussi à guérir quelqu'un... mais également avoir réussi à le guérir.

La magie n'est ni bonne ni mauvaise. C'est ce que nous en faisons qui détermine sa valeur, car elle consiste avant tout en un lien harmonieux avec la nature, une façon de voir le monde et les forces qui l'animent.

Encore et toujours, ignorance et superstition se joignent à l'envie et la cupidité pour former une arme pointée sur l'émancipation des femmes.

"Dans la flamme d'une chandelle, toutes les forces de la nature sont actives." Cette phrase écrite par le poète romantique allemand Novalis résume à merveille le caractère sacré de la bougie: les quatre éléments, incarnés par la cire, la mèche, le feu et l'air, sont réunis en un mouvement ascensionnel unique, vibrant et animé. Symbole du lien entre les mondes matériel et spirituel, les bougies sont indissociables des rituels religieux, mais également de la pratique magique.

Pourtant, sorcellerie paysanne et magie savante tirent leur source de la soif de découverte des secrets de l'univers. Dans le domaine des soins, nombre de "potions" se fondent sur l'empirisme, c'est-à-dire sur des observations tirées directement de l'expérience et donc des sens, dont l'Eglise se méfie. Parallèlement, ces potions dérangent par le lien profond qu'elles entretiennent avec la nature, à un moment où les philosophes et les scientifiques la considèrent comme une force à soumettre et à discipliner ... et, avec elle, les femmes qui en connaissaient les secrets.

Matilda Joslyn Gage
D'aussi loin que je m'en souvienne, les injustices de mon époque m'ont toujours révoltée. Et, toujours, j'ai refusé de rester à la place que la société m'attribue en tant que femme. Les lois de mon pays, les États-Unis, ne sont l que pour protéger les hommes, riches, libres et privilégiés, au détriment de la dignité de tous les autres individus.

Le vampire n'a pas de reflet parce qu'il est le reflet de nos peurs.

La sorcellerie n'existe pas encore en tant que telle, mais déjà la sorcière se dessine dans les mythes gréco-romains : à la fois femme fatale à la beauté trompeuse et vieille femme laide aux pratiques démoniaques.

Les lois de mon pays, les Etats-Unis, ne sont là que pour protéger les hommes, riches, libres et privilégiés, au détriment de la dignité de tous les autres individus.