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Citations de Katrina Kalda (68)


Comme si, dans les comptes du Tout-Puissant , dans l'arithmétique des Dieux, le nombre des morts et des vivants avait été fixé d'avance et que la sauvegarde d'un être humain y avait pour corollaire le sacrifice d'un autre.

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Charlotte prenait August pour un créateur et s'extasiait devant son génie. Pourtant, moi, qui suis une créature d'August, je puis prouver qu'il n'en était rien. Moi, la figurine de papier mâché, qui ne suis littéralement personne et qui ressemble en tout point à n'importe qui, moi l'être aux idées de papier mâché, moi l'assemblage de lieux communs qui font le caractère de tout un chacun, et dont pas un seul d'entre nous n'est exempt si ce n'est peut-être à ses propres yeux parce qu'il se regarde d'un peu trop près. Moi donc, dans la capsule de papier mâché, dont la liberté très surveillée se limite aux omissions d'August, j'atteste que l'invention n'existe pas. Tout se fabrique, rien ne se crée.
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Mon destin était peut-être de me consacrer à l’art et de faire tout ce qui était susceptible de m’en distraire.
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Chaque jour j’apprends les vertus du temps. Je regarde les fossiles incrustés dans la craie, ceux qui remontent quand je retourne un lopin de terre : la moindre chose dans la nature a besoin de temps. Et nous, les artistes, nous les humains, nous voulions que nos entreprises aillent vite. Nous voulions produire, sans nous soucier du fait que rien de vrai ne peut naître d’un substrat mai digéré. J’ai appris à être humble. J’ai appris la joie. J’ai appris qu’elle n’est rien d’autre que le sentiment inconditionnel de la vie qui persiste une fois réduits au silence les bruits qui la rendaient inaudible. La joie est le bruit de la rivière quand les grillons se sont tus et que l’on perçoit à nouveau l’aigu du clapotis, la médiane du courant et les basses du flot sur les grosses pierres. J’ai appris à connaître toutes les pierres de la rivière. J’ai compris que ces pierres n’ont pas besoin d’apprendre à me connaître; que la nature n’a pas besoin de moi. Que moi seule ai besoin d’elle. » (p. 269)
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(Le livre débute) en périphérie d'une ville à laquelle il ne restait rien de son ancienne splendeur si ce n'est la pluviométrie la plus importante de France...
Tout le monde devinait à la mauvaise marque de baskets à mes pieds que mon père avait trouvé mieux à faire que s'occuper de moi... Maman... cousit des logos Nike sur un jogging acheté au supermarché. Elle les avait découpés sur un pantalon déniché chez Emmaüs. Mais... en une seule récréation, la supercherie fut éventée.
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Les chemins de fer soviétiques de l'époque n'avaient pas pour fonction d'acheminer des voyageurs, de les faire arriver en tel point à telle heure, mais simplement d'exister.
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J'avais grandi, je voulais interroger Hilda sur le secret d'Oncle Oskar, sur la petite pièce cachée, les tableaux et le mur peint de briques rouges. Mais il était impossible de parler d'autre chose que de la vie à l'étranger. Pour Hilda, nous appartenions à une même communauté initiée aux merveilles de l'Occident. Afin de ne pas la décevoir, j'oubliai le temps de la conversation les immeubles en parpaings de la banlieue, le collège construit en préfabriqué (...), le brouillard stagnant sur le canal, (...) le désœuvrement et la lassitude élevés au rang de valeurs morales (...). Pour ne pas décevoir tante Hilda, je confirmais que la ville où nous habitions était une métropole prospère où la vie n'était qu'une suite d'événements heureux
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En rentrant de l école , je déplaçais toutes nos affaires, dépliais et repliais les vêtements en commençant par ceux de maman que j étalais d'abord soigneusement sur le lit, avant de les redisposer en une pile dont l'ordre variait selon les jours , le lundi le rouge en bas, le noir en haut, le jeudi le noir en bas, le bleu en haut. .... Je découvris que le rangement n'a pas pour but d'organiser l'espace, ni de lutter contre le trop-plein d'objets, mais de mettre de l'ordre dans le vide, de tendre des filets au dessus du précipice abyssal de la vie.

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Je regarde la nuit et une phrase curieuse me vient : à partir d’aujourd’hui, me dis-je, je vais vivre ma propre vie
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Le solstice d'été approchait. Le soleil ne se couchait presque plus, les moustiques se préparaient pour la Saint-Jean, où tout le village passerait la nuit dehors.
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Sais-tu où se situe l'âme en nous ? L'âme est dans ce petit compartiment sous la tempe où on sent un pincement chaque fois qu'on souffre, qu'on est triste ou désemparé. L'âme n'est pas comme le corps. L'âme n'a pas les limites du corps ; elle peut ressentir aussi les souffrances des autres. [...] L'âme est serrée sous la tempe mais elle est capable d'ouvrir des précipices en nous, si larges qu'on ne croirait pas que le corps puisse les contenir. La douleur de l'âme pèse comme une ombre sur la poitrine, elle est comme une pierre lancée dans un puits -- et c'est alors seulement qu'on connaît le poids de la pierre et la profondeur du puits.
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Les hommes cherchent des occasions de démontrer leur force. Les femmes n'ont pas besoin de chercher ces occasions, elle les portent dans leur corps mais il leur est impossible de le dire. Les vraies occasions sont enfermées dans l'expérience intime ; si on cherche à les raconter, elles restent loin en deçà de la parole et semblent ridicules.
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Certains livres, sans le savoir, s'attendent les uns les autres. Quand on en trouve un, on reconnaît le goût qu'on avait dans la bouche la première fois qu'on en a lu un de la même espèce. Et surtout les livres permettent de savoir des choses qu'on apprendrait pas par d'autres voies.
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Ce qui rend la vie dans la Plaine presque insupportable, ce n'est pas la nourriture faite à partir d'aliments recomposés, le travail pénible à l'usine ni même l'absence d'intimité dans les logements mais la conviction que notre vie n'est que la perpétuelle transformation de ce que d'autres ont conçu, fabriqué, utilisé ailleurs : les produits de la ville.
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Une maison en désordre est une maison qui vit. Peu après avoir signé le registre des mariages, Kersti découvrit que prendre un époux équivalait à s'enterrer vivante. L'ordre de papa la rendait folle. Elle ouvrait le placard, jetait les gilets et les robes au sol en faisant cliqueter l'aluminium des cintres; saisissait à pleine main des tas de partitions qu'elle laissait tomber en pluie et mélangeait ensuite du pied pour qu'elles soient de nouveau dans un désordre parfait.
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Après la guerre, en URSS, on nous a appris que le passé n'avait pas existé, que le présent non plus n'existait pas, du moins pas comme nous le croyions, et que nous mêmes n'avions pas le droit d'exister. Certains ont bien retenu la leçon, d'autres ont fait semblant, et quelques uns s'en fichaient éperdument. Je crois qu'Ilmar a si bien retenu la leçon qu'il n'osait plus savoir ce qu'il ressentait, ce qu'il était, ni ce qu'il avait fait, il savait seulement ce qu'il devait ressentir, c'est-a-dire, la culpabilité. C'était le propre de l'époque : ceux qui avaient souffert avaient honte d'être des victimes, et ceux qui n'avaient pas souffert avaient hont , par ce fait même, d'appartenir au clan des bourreaux. Seuls ceux qui commettaient les véritables crimes n'éprouvaient pas de culpabilité car, à la place de la conscience, ils avaient le pouvoir et ils dictaient ce qu'on devait penser. Notre époque elle-même était coupable, mais c'étaient les hommes qui vivaient dedans qui portaient le poids de la culpabilité.
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Carlotta ne devait pas être au courant de l’essentiel, à savoir que dans ce monde à la limite du cercle polaire, il faut savoir se prémunir contre l’hiver et le noir, que la nuit et le jour sont des draps qu’on tire à soi, de sorte que nous qui dormons au bord du lit, au-delç de sept monts et cent rivières, nous sommes découverts pendant l’été, où le soleil qui ne se couche plus nous empêche de dormir, et étouffés pendant l’hiver, lorsque le drap ressemble à une couette rembourrée d’où l’on ne croit pas ressortir vivants. Les légendes sur le soleil qui disparaît deviennent de nouveau vraies et les ciseaux, dans un tiroir de la cuisine, prennent une expression luisante, rusée, qui donne envie de grimper jusqu’au toit pour percer la couette épaisse du ciel. mais lorsqu’on enfonce les lames pointues dans le duvet, les plumes de volatile qui le farcissaient s’échappent, et les enfants, qui ont le nez collé aux vitres, crient d’un étage à l’autre : « Il neige ! Il neige ! »
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Les questions se bousculaient dans son esprit - la mémoire de l'aïeule était une porte donnant sur une histoire que Hannah avait crue perdue pour toujours. Maintenant qu'elle avait la possibilité d’ouvrir cette porte, elle était à la fois impatiente et effrayée de ce qu'elle allait trouver derrière.
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On ne peut pas forcer une graine à germer ;
on ne peut pas forcer un esprit à apprendre.
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Maman m'appelait plusieurs fois par jour. J'essayais de deviner à la plus ou moins bonne articulation de sa voix combien de verres elle avait bus (p. 66).
... (les) maris qui pensaient sincèrement que les chaussettes sales rejoignaient le lave-linge toutes seules en trottinant (p. 76).
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