Lewis Shiner

On a l’impression de voir le Rêve américain, ici. Si proche qu’on peut presque le toucher. Mais pas tout à fait. Il s’évapore sitôt entrevu. Je découvre toute la tristesse que contient ce rêve.

Un gosse n’a besoin que d’une seule chose. Que les siens lui disent qu’ils l’aiment, quoi qu’il puisse faire. C’est tout. Le reste, c’est du superflu.

On dit que trois choses guettent les enfants privés d’un domicile fixe : l’alcoolisme, le rejet de l’autorité et le divorce. Les deux premières s’appliquent à moi, et mon couple bat de l’aile.

Elle dépose un baiser sur ma joue et redescend. La vacuité de ce baiser m’exaspère. Dès l’instant où elle refuse de m’embrasser pour de bon, elle ferait mieux de me laisser tranquille.

J’ai toujours aimé la musique. Elle me faisait oublier la triste réalité.

On pourrait croire que les hommes et les femmes ne parlent pas le même langage. Bien qu’identiques, les termes ont des acceptions différentes et notre vocabulaire est moins étendu.

C’est un peu comme ce machin, le zen. On est censé faire le vide mais c’est impossible. On a toujours des conneries qui trottent dans la tête.

La fièvre donne des hallucinations.

La mélodie est secondaire. Même les paroles importent moins que ce qu’apportent les guitares et la batterie, le son d’un disque. Il est bien plus évocateur que les mots.

Etre bons envers les animaux est un luxe inaccessible aux pauvres

Et l'autre chose qu'on fait quand on est noir et qu'on a un diplôme de sociologie, c'est qu'on a une opinion sur les choses. C'est le problème avec l'éducation. Vous finissez par estimer que votre opinion a plus de valeur que celle d'un pauvre imbécile ignorant. (p. 203)

La renaissance. C’est toi et moi, nous vivons tous les deux une deuxième vie. Et je crois que ce qui fait si mal, c’est que ni l’un ni l’autre n’avons encore achevé cette transformation.

On fait ce qu’on peut, non pas dans l’espoir d’accomplir quelque chose, mais parce que faire autre chose serait en définitive... inacceptable.

L’honnêteté n’est pas toujours la meilleure politique...

Parfois il faut admettre qu’une chose est sans espoir. Ça sert à rien de se mentir, de se dire qu’on a une chance quand on en a pas.

Les Noirs étaient pour elle aussi mystérieux que des extraterrestres. Sa mère lui avait dit qu’elle devait être gentille avec eux car leur vie était difficile. Et Ruth se les imaginait accomplissant le même labeur que les bêtes de somme, tirant des charrues, arrachant des souches, portant des fagots de bois sur leur dos.

Le chaos passera. Il passe toujours.

Je n’ai pas besoin de me voir à travers les yeux d’un Blanc.” Les Blancs n’ont pas de magie à eux, tout ce qu’ils veulent, c’est voler celle des autres.

Pour chaque pas en avant, il y a eu un pas en arrière. Après l’esclavage il y a eu le métayage et les lois Jim Crow2. Maintenant qu’on est en passe d’abolir les lois Jim Crow, il se passe autre chose, quelque chose d’encore pire, une sorte de guerre économique totale, une guerre contre les Noirs et les pauvres, et si nous ne voulons pas que ça se transforme en une véritable guerre civile, nous devons faire quelque chose.

D’un côté, il y a le mensonge sur lequel l’Amérique est bâtie, le mensonge qui dit que tous les hommes sont égaux, que l’individu est sacré, qu’on ne doit pas écraser les autres. Derrière ce mensonge, il y a l’homme riche, l’homme puissant, l’homme avide.
« Et de l’autre côté, il y a le fait que quand les pauvres, les Noirs, les parias s’unissent, aucune force sur Terre ne peut les arrêter. Nous sommes plus nombreux que les riches et nous le serons toujours. Ce pays est toujours une démocratie, plus ou moins, et nous avons la possibilité de voter avec nos cerveaux et non au nom de quelque idéalisme confus qui nous pousse à aller à l’encontre de notre propre intérêt. Et nous pouvons nous organiser, de sorte que quand les riches et les privilégiés ne respectent pas leurs promesses, nous avons le moyen de les forcer à nous écouter.