Leurs mouvements se firent aussi naturels que ceux des voyageurs. Un peu moins souples et gracieux peut-être, mais, en obéissant au chant du tambour, ils perdirent leur rigidité de militaires occidentaux. Ils régressèrent, remontèrent l'évolution humaine. Sorciers, hommes primitifs, sauvages, animaux puis, lorsqu'ils lâchèrent leurs instruments, esprits fantomatiques dansant dans un monde de silence. Jusqu'à cet instant où le temps s'arrêta. Ils tombèrent à terre, crispés et terrifiés, tremblant sous l'effet des drogues.
Terrorisé, Bahm chercha instinctivement à se retenir. Il hurla. Ses doigts s'enracinèrent dans le sol, mais l'attraction terrestre n'avait de prise que sur son corps. Lentement, aspiré par le grand Rien au-dessous de lui, sa partie psychique glissa à travers les chairs, perdit tout lien avec cette enveloppe qui n'était déjà plus la sienne.
Le ciel étoilé s’ouvrait vers l’infini au-dessous d’eux.
Seul le sable contre leur dos les retenait encore. Ils y avaient enfoncé leurs doigts dans un effort désespéré pour ne pas tomber, mais lentement leur âme glissait vers ce vide qui les terrifiait.