Citations de Mathieu Rigouste (33)
Le mot "police" à lui seul contraint chaque fois qu'il est prononcé et par sa seule existence. Toute la police est violence jusque dans ses regards et ses silences.
Le camp d'internement pour étrangers illégalisés est un espace d'exception permanente, un laboratoire où toutes sortes de matériel et de techniques de violence peuvent être testées et combinées sur les corps des internés : des corps sans droit en attente d'être déportés.
Il est vain, stérile et absurde de critiquer l’idéologie sécuritaire sans attaquer système économique, politique et social qu’elle protège et propulse.
La peur constitue un outil politique fondamental pour les classes dominantes. C’est une technique de gouvernement, une machine de légitimation sur la chaîne de production du contrôle.
Les grenades définies par leurs fabricants et les institutions qui les emploient comme “lacrymogènes“sont en réalité des armes toxiques, interdites dans le droit international de la guerre mais pas en situation de “maintien de l’ordre“ domestique. Les grenades dites de “désencerclement“laissent penser qu'elles sont uniquement défensives alors qu'elles sont employées pour attaquer et blesser.
-- Qu'est-ce que la police , quelles sont ses fonctions ?
-- Tout dépend de ce qu'on appelle la police . Je pars de la définition selon laquelle , parmi d'autres institutions participant à la reproduction d'une société inégalitaire , la police est celle qui utilise la violence et la coercition pour maintenir l'ordre social , économique et politique . Pour maintenir la domination de classe , de race et de genre .On peut ainsi trouver des formes de police dès le début de la formation de tout état ..... La police plonge ses racines dans la phase D'accumulation primitive du capital , pendant la génèse du capitalisme et du colonialisme .... Dès le début , la police est conçue pour protéger l'économie de marché .
La fabrication médiatique de la “banlieue“comme “problème d'intégration ethnique et culturel“ devient un appareillage idéologique fondamental pour masquer les structures politiques, économiques et sociales de la ségrégation policière.
En septembre 1995, la Revue historique des armées a consacré un numéro entier à la guerre d'Algérie. Pour fournir des outils permettant d'analyser les attentats terroristes qui frappaient alors la France, elle publiait pour la première fois la "Directive générale sur la guerre subversive" du général Massu pour la bataille d'Alger. Et, en septembre 1998, le colonel Frédéric Guelton, un spécialiste du renseignement, publiait dans Défense un article intitulé "Une école de guerre psychologique. Algérie : 1956-1961". La revue présentait l'article en rappelant que l'armée française redécouvrait tardivement l'action psychologique en Bosnie, tandis que les Américains, "ardents pratiquants des Psyops (psychological operations)", considéraient les Français comme "les maîtres en ce domaine depuis... la guerre d'Algérie"
Loin de produire de “l’ordre public“, les polices de choc provoquent de l’humiliation et de la colère partout où elles passent.
Les racines de la domination policière contemporaine puisent dans un mélange de techniques de dressage, de captures, de coercition, d’enfermement, de bannissement et d'élimination pratiquées sur les corps des Noirs, des paysans insurgés, des femmes paysannes et esclaves, des homosexuels et des prostituées, des étrangers et des misérables.
Cette mise en scène macabre marque une étape importante dans le déploiement de la machine médiatico-sécuritaire française : la célébration du rétablissement de la force souveraine de l'État sur le territoire et la population, par la destruction physique et symbolique d'un bouc émissaire post-colonial, a amorcé un engrenage déterminant, qui normalisera progressivement l'idée d'une « purge » nécessaire de l'ennemi intérieur global. Et elle a posé les bases d'un rituel associant l'internement et l'expulsion de ceux que l'État désigne comme les « indésirables de la mondialisation » et la mise en scène publique de leur bannissement.
La transformation de la violence policière est liée au développement d’un marché mondial de la coercition. Ce phénomène est porté par de puissants complexes industriels, médiatiques et politico-financiers qui tirent profit de la prolifération des guerres policières en vendant des doctrines, des techniques, des équipements et des armes de coercition. Ces marchandises sont expérimentées, rénovées et leur excellence est mise en scène dans les laboratoires intérieurs des grandes puissances impérialistes. Elles peuvent ensuite être vendues aux États et aux entreprises du monde entier.
L’industrialisation des BAC participe d’une expansion générale de la férocité policière.
Le parechocage des deux-roues est bien une technique de capture jugée efficace, normalisée, instituée, banalisée dans la police des quartiers.
L'expérimentation d'une contre-insurrection médiatique et policière a mis en œuvre une tactique de la tension : un programme de renforcement autoritaire basé sur “la provocation“, c’est-à-dire l'agression délibérée, la fabrication médiatique, politique et policière d'une menace et son attribution à un ennemi de convenance.
Les dispositifs d’occupation et de maillage des quartiers populaires par une présence policière visible ont fortement participé à forger une conscience commune de l'oppression collective.
Les doctrines de contre-insurrection sont des régimes de violence d'État conçus comme “guerre dans et contre la population“. Elles reposent sur la militarisation de la surveillance, du contrôle et de la répression de groupes sociaux, désignés comme “subversifs“. Mises en pratique, industrialisées pour soumettre les résistances populaires et les mouvements révolutionnaires aux colonies, elles influencent continuellement l'encadrement des prolétaires ségrégués et des mouvements jugés “subversifs“ en métropole.
L’enclave endocoloniale désigne cette forme particulière de domination qui a émergé dans les puissances impérialistes : elle assure la ségrégation socioraciste des prolétaires issus de la colonisation, des travailleurs étrangers et plus généralement des couches les plus pauvres des classes populaires. Elle croise les répertoires de la guerre et du contrôle colonial avec les répertoires historiques de la domination des misérables, des indésirables et des résistants.
En même temps qu'elle accompagne le déploiement de la ville capitaliste, la police émerge comme le produit d’une conception patriarcale de l’État-nation.
La construction de la figure de l'ennemi intérieur postcolonial est en effet liée à la prise de conscience du caractère définitif de l'installation des immigrés postcoloniaux sur le territoire et à l'institution de la catégorie de « jeunes issus de l'immigration », qui a permis de reconstituer une dissociation entre « vrais » et « faux français » sur le principe de la structure coloniale.