Michael Pollan

L'amour est plus fort que tout.


[...]
"J'ai entendu cela toute ma vie, s'exclame-t-on, mais je n'en avais pas compris le sens profond jusqu'à aujourd'hui."

J'ai eu le sentiment que des mystères m'étaient dévoilés, mais ils me paraissaient familiers ; j'avais plutôt l'impression qu'on me rappelait des choses que je savais déjà. J'ai eu l'impression d'être initié à des dimensions de l'existence dont la plupart des gens n'ont pas connaissance, notamment la nette sensation que la mort est illusoire, dans le sens où c'est une porte que nous franchissons vers un autre niveau d'existence, et que nous sommes éjectés d'une éternité où nous retournerons.

One in every three American children eats fast food every day.

Trente années de conseils nutritionnels nous ont rendus plus gras, plus malades et plus mal nourris.

Grof, qui a supervisé des milliers de séances sous LSD, a un jour prédit que les psychédéliques "seraient pour la psychiatrie ce que le microscope est à la biologie ou le télescope à l’astronomie. Ces outils permettent d’étudier des procédés essentiels qui, dans des conditions normales, ne peuvent être observés directement".

si vous avez le sentiment de mourir, de fondre, de vous dissoudre, d'exploser, de perdre la tête, etc allez y

Griffiths note que la culture américaine n'est pas la première à se sentir menacée par les psychédéliques : si R. Gordon Wasson a dû redécouvrir les champignons hallucinogènes au Mexique, c'est parce que les Espagnols en avaient efficacement réprimé l'usage, qu'ils considéraient comme un dangereux instrument du paganisme.
" Cela montre à quel point les cultures répugnent à s'exposer aux changements que ces composés sont susceptibles de provoquer ", m'a-t-il dit le jour de notre première rencontre. " L'autorité qui découle de l'expérience mystique première est telle qu'elle menace les structures hiérarchiques en place. "

Les habitudes mentales nous empêchent de faire l'expérience du monde et il suffit, pour s'en rendre compte, de partir e voyage dans un pays inconnu. Soudain, nous voilà réveillés ! Les algorithmes du quotidien sont alors complétement réinitialisés, raison pour laquelle la métaphore du voyage s'accorde si bien avec l'expérience psychédélique.

L’un des bienfaits des
psychédéliques est la façon dont ils réaniment le monde, comme
s’ils distribuaient plus largement et plus uniformément la
bénédiction de la conscience dans le paysage, brisant au passage ce
monopole humain de la subjectivité

«Imaginez que le cerveau soit une colline recouverte de neige
et que nos pensées soient des luges dévalant cette pente. Au fur et à
mesure que les luges descendent les unes après les autres, un petit
nombre de pistes principales sont tracées. Chaque fois qu’une
nouvelle luge descendra, elle sera alors attirée par les pistes
préexistantes, presque comme par un aimant.» Ces pistes
principales représentent les connexions neuronales les plus
fréquentées de notre cerveau, dont beaucoup transitent par le
réseau du mode par défaut. «Avec le temps, il devient de plus en
plus difficile de descendre la colline par une autre piste ou dans une
autre direction.
«C’est comme si les psychédéliques damaient provisoirement la
pente. Les pistes les plus marquées disparaissent, et la luge peut
alors aller dans d’autres directions, explorer de nouveaux paysages
et, littéralement, tracer de nouveaux chemins.»

Le modèle semble en effet indiquer que notre
perception du monde ne serait pas une transcription littérale de la
réalité, mais plutôt une sorte d’illusion harmonieuse de celle-ci,
tissée à partir des données issues de nos sens et des modèles
préalablement ancrés dans notre mémoire. L’état d’éveil ordinaire
nous paraît parfaitement transparent, mais il est pourtant moins
une fenêtre sur la réalité que le produit de notre imagination – unesorte d’hallucination contrôlée.

Il semble donc que,
lorsque l’activité du MPD diminue rapidement, l’ego disparaît
provisoirement et que les frontières habituelles entre le moi et le
monde et entre le sujet et l’objet s’effacent.

L’ego tout-puissant et son arsenal de peurs, de ressentiments et
d’inquiétudes n’était tout simplement plus, et il ne se trouvait
personne pour le pleurer. Quelque chose d’autre lui avait succédé:
une conscience nue et désincarnée, qui contemplait ce spectacle de
la dissolution du moi avec une indifférence bienveillante.

Les psychédéliques prennent toutes ces boîtes, les
ouvrent et les vident de leur contenu, en particulier des choses
familières, qu’ils retournent et que, imaginativement, ils polissent
jusqu’à ce qu’elles brillent comme au premier jour. Ce travail de
réexamen de l’ordinaire est-il une perte de temps? Je pense pour ma
part que ce grand dépoussiérage a beaucoup à nous apprendre, à
fortiori lorsqu’avec l’âge nous sommes de plus en plus convaincus
d’avoir tout vu.

Après tout, quel est le sens du
détachement ou de l’ironie chez l’adulte, hormis qu’ils constituent
l’un et l’autre deux des défenses de l’ego pour éviter de se faire
submerger par nos émotions et nos sens, ces derniers étant toujourssusceptibles de nous surprendre en nous révélant les merveilles du
monde?

Les émotions vous sautent au visage dans tout leur
dépouillement, désarmées face au tranchant de l’examen critique et
du mordant de l’ironie. Des platitudes dignes de cartes de vœux
brillent soudain de l’éclat de vérités révélées.
L’amour, c’est tout.
D’accord, mais qu’est-ce que vous avez appris d’autre?
Vous avez dû mal comprendre: c’est tout.

Fritz m’avait
expliqué que le sens littéral du terme «halluciner» signifiait «errer
dans son esprit», et c’était exactement ce que j’étais en train de
faire, avec la même désinvolture que celle d’un touriste.

À quel point ma santé mentale n’est-elle qu’un simple
vernis?

«Les drogues
psychédéliques provoquent la panique et entraînent une démence
temporaire chez ceux qui n’en prennent pas .»

«Les psychédéliques
ont ouvert au tourisme de masse des territoires mentaux
jusqu’alors réservés à quelques aventuriers particulièrement
intrépides, pour la plupart des mystiques religieux .» Ainsi qu’à
des artistes visionnaires comme William Blake, Walt Whitman ou
Allen Ginsberg.