"En silence, on sort de la ville et on s'engage dans le désert. Les falaises rouges de Tse Bonito laissent la place à des petites collines et à de vastes étendues de terre brune et craquelée parsemées de broussailles. Le ciel est d'une clarté sacrilège ; on a laissé la fumée de l'incendie derrière nous."
Nous déclarons que toutes les routes sur Terre et dans le Ciel mènent à la Tour Céleste à Tova. Nous déclarons que le devoir sacré des Observateurs de la Tour est de maintenir l'équilibre entre ce qui se trouve au-dessus de nous et ce qui se trouve en dessous. Ce sont eux qui étudieront les mouvements du Soleil et de la Lune et en tireront des prophéties ; eux qui veilleront à ce que la Pluie tombe et le Maïs pousse ; eux qui célébreront la Raison et la Science et œuvreront pour renverser les anciens dieux assoiffés de sang. S'ils échouent, nous savons tous que la Guerre reviendra et que les peuples en souffriront. Mais nul ne souffrira davantage que les Observateurs, car ils seront les premiers à Mourir.
Il paraît que les corbeaux se souviennent de ceux qui les ont maltraités. Ils ne pardonnent pas ; ils en veulent à leurs persécuteurs jusqu'à leur mort et transmettent cette rancune à leurs enfants. C'est leur manière de survivre.
– La triste vérité que tu refuses d’admettre, Magdalena, c’est que, parfois, ceux que nous appelons nos héros sont les plus grands monstres de tous.
Maintes et maintes fois, Tova avait forcé Naranpa à mériter sa considération. La jeune femme se réconfortait en se disant qu'elle n'agissait pas pour la gloire, ni pour le pouvoir. En vérité elle œuvrait pour la pire des raisons, au nom de la foi, parce qu'elle croyait en cet endroit qu'elle considérait comme son foyer.
Nos ancêtres ne nous enseignent-ils pas que tout existe sous forme de dualité ? La terre et le ciel, l'hiver et l'été ? Parmi les clans, l'éclat de l'Aigle Royal n'est-il pas contrebalancé par l'ombre du Grand Corbeau ? Le feu du Serpent à plumes par l'eau de l'Araignée ?
- Certaines personnes pensent qu'on peut détruire ses ennemis en se liant d'amitié avec eux.
- C'est ce que tu faisais tout à l'heure ? Tu détruisais un ennemi ?
- Tu n'es pas d'accord ?
- Je trouve qu'avec un fusil ça marche bien aussi.
Quand ma peau est trop froide, ils m'appellent Faiseur de Nuit. Ou Dévoreur du Soleil quand je suis en colère. Ils disent que mon corps est froid mais que ma colère est chaude.
- C'est bien comme ça que tu as surnommé Tse Bonito lors de ta dernière visite, n'est-ce pas ? Un trou à rats ?
[...]
- En même temps, j'ai dit ça parce que je me faisais tirer dessus.
- Ouais, mais j'ai l'impression que, chaque fois que tu traînes dans les parages, on essaie de te tuer.
- Pas cette fois-ci, lui dis-je, pleine d'espoir.
- Il est encore tôt.
Il comprenait à présent pourquoi sa mère lui avait dit que tout le monde était son ennemi, car il était son propre adversaire aussi.