Citations de Richard Brautigan (662)
La plus petite tempête de neige jamais recensée
Il y a une heure de ça, dans le jardin de derrière chez moi, s'est produite la plus petite tempête de neige jamais recensée. Elle a dû faire dans les deux flocons. Moi j'ai attendu qu'il en tombe d'autres mais ça n'a pas été plus loin. Deux flocons : voilà tout ce qu'a été ma tempête.
Ils sont tombés du ciel avec tout le poignant dérisoire d'un film de Laurel et Hardy : même qu'à y songer, ils leur ressemblaient bien. Que tout s'est passé comme si nos deux compères s'étaient transformés en flocons de neige pour jouer à la plus petite tempête de neige jamais rencensée dans l'histoire du monde.
Avec leur tarte à la crème sur la gueule, mes deux flocons ont paru mettre un temps fou à tomber du ciel. Ils ont fait des efforts déséspérément comiques pour tenter de garder leur dignité dans un monde qui voulait la leur enlever parce que lui, ce monde, il avait l'habitude de tempêtes de neige beaucoup plus vastes - genre soixante centimètres par terre et plus -, et que deux flocons, y a de quoi froncer le sourcil.
Je ne sais pas ou est votre mère et franchement, pour reprendre le mot célèbre de Clark Gable dans Autant en emporte le vent, "je m'en contrefous".
Quoi! Traiter ma mère de Clark Gable! Là, elle a essayé de me taper dessus.
Au temps des cygnes
Je
me souviens être un enfant
dans
un parc
où il y avait un lac
où flottaient
de beaux cygnes blancs
sur
l'eau sombre.
Je
me souviens être assis sur la rive
avec
des images d'enfant
qui volaient
comme des papillons dans mon cerveau.
Je
me souviens faire le vœu d'être
un beau cygne blanc
flottant
sur
l'eau sombre.
Une bougie qui parlait bien
J’avais une bougie qui parlait bien
hier soir dans ma chambre.
J’étais très fatigué mais je voulais
quelqu’un pour me tenir compagnie,
alors j’ai allumé une bougie
et écouté son agréable voix de
lumière jusqu’à m’endormir.
Ah oui, pas de doute, il y avait de l'avenir à l'asile de fous. Un hiver passé là-dedans ne pouvait pas être complètement raté.
A mon avis, la chance, c'est comme la marée. Quand ça monte, ça monte .
C'est étrange comme les choses simples de la vie continuent simplement tandis que nous, nous compliquons.
Cameron avait son fauteuil attitré dans le salon. Il était recouvert d'une couverture de laine. Personne d'autre n'occupait jamais ce fauteuil, et de toute façon on aurait dit qu'il était lui-même toujours assis. Son esprit avait pris possession de ce fauteuil. Les vieux ont cette façon de s’approprier les sièges sur lesquels ils finissent leur vie.
Les gens que joseph Francl rencontre sur la route de l'Ouest ? Coté cervelle, ça louche beaucoup : archétypalement parlant, on est plutôt pété. Il ne semble pas que les ceusses qui vous défrichent le pays appartiennent aux classes les plus équilibrées de la nation.
Cela aurait pu être une histoire drôle, n'était le fait que les gens ont besoin d'un peu d'amour, et bon Dieu que c'est triste , parfois, de voir toute la merde qu'il leur faut traverser pour en trouver.
Son visage était si délicat. La bouche, les yeux, le nez, le menton, la courbe de ses joues, tout cela était beau. Cela faisait presque mal à regarder.
La nuit devient bien longue quand l’amour surit.
Quelque chose
Il y a quelque chose en moi
qui ne trouve la paix que lorsqu’il
est dans la forêt, que lorsqu’il
marche sur le sol de la forêt
et est entouré d’arbres
Je préfère de loin me trouver dans l'antique Babylone, plutôt qu'au XXème siècle à essayer de rassembler vingt-cinq cents pour me payer un hamburger.
There is darkness on your lantern
and pumpkins in your wind,
and Oh, they clutter up your mind
with their senseless bumping
while your heart is like a sea gull
frozen into a long distance telephone
call.
I’d like to take the darkness
off your lantern and change the pumpkins
sky fields of ordered comets
and disconnect the refrigerator telephone
that frightens your heart into standing
still.
Il y a de l'obscurité sur ta lanterne
et des potirons dans ton vent,
et Oh, ils encombrent ton esprit
avec leur secousses insensées
pendant que ton cœur est comme une mouette
congelée dans un appel téléphonique longue distance.
J’aimerais ôter l’obscurité
de ta lanterne et changer les potirons
en champs célestes de comètes ordonnées
et débrancher le téléphone réfrigérateur
qui glace d’effroi
ton cœur.
All Watched Over by Machines of loving Grace
I like to think ( and
the sooner the better! )
of a cybernetic meadow
where mammals and computers
live together in mutually
programming harmony
like pure water
touching clear sky.
I like to think
( right now please! )
of a cybernetic forest
filled with pines and electronics
where deer stroll peacefully
past computers
as if they were flowers
with spinning blossoms.
I like to think
( it as to be!)
of a cybernetic ecology
where we are free of our labors
and joined back to nature,
returned to our mammal
brothers and sisters,
and all watched over
by machines of loving grace.
Tous surveillés par des machines d’amour et de grâce
Il me plaît d’imaginer (et
le plus tôt sera le mieux !)
une prairie cybernétique
où mammifères et ordinateurs
vivent ensemble dans une harmonie
mutuellement programmée
comme de l’eau pure
effleurant un ciel serein.
Il me plaît d’imaginer
(tout de suite s’il vous plaît !)
une forêt cybernétique
peuplée de pins et d’électronique
où le cerf flâne en paix
au milieu des ordinateurs
comme s’ils étaient des fleurs
à boutons rotatifs.
Il me plaît d’imaginer
(et ça doit arriver !)
une écologie cybernétique
où, libérés de nos labeurs
et retournés à la nature
auprès de nos frères et sœurs
mammifères,
nous sommes tous surveillés
par des machines d’amour et de grâce.
Elle porte une paire de pantalons d'un bleu très léger. À son corps ils collent aussi étroitement que le ciel est ajusté à la terre.
Cerfs-volants
Dimanche chaude après-midi de pluie
4 heures une venelle Ginza
est fermée;
La sieste pour des milliers de bars,
leurs enseignes sont comme des
cerfs-volants
aux couleurs vives.
Enroulées en pelotes les rues étroites
et les ruelles: de la ficelle.
Calme
juste quelques passants
pas de vent.
Tokyo, le 16 mai 1976
LA COURBE DES CHOSES OUBLIEES
Les choses s'incurvent lentement hors de vue
jusqu'à disparaître tout à fait. Après
ne reste plus
que la courbe.
Nous partions l'après-midi même pour le lac Josephus, à la limite du parc naturel de l'Idaho, et lui partait pour l'Amérique, qui n'est souvent qu'un lieu imaginaire.