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Citations de Romain Garnier (23)


— Vous voulez dire le Rudolf Hess ? Le demi-fou qui a pris son avion en pleine guerre pour offrir la paix du Führer aux Anglais ?
— Vous en connaissez un autre ? Moi pas.
— Mais Hitler dans tout ça ?
— Ces occultistes sont bien capables d’avoir inspiré à Hitler sa théorie d’ascension de l’humanité – c’était là son grand œuvre secret. Il voulait la réaliser en pactisant avec les supérieurs inconnus évoqués à mots couverts par la Bible, et qui demeurent profondément enfouis sous terre ou sous les eaux.
— Comme dans le Livre de Job. Mon Dieu, quelle horreur…
— Voyez-vous, l’obsession de la Vril-Gesellschaft était de produire l’homme nouveau, c’est-à-dire une nouvelle race de seigneurs, appelée à servir les grands anciens quand ces derniers sortiraient de terre, mus par un cataclysme inimaginable. L’idée de cette confrérie était qu’il fallait à tout prix contracter une alliance avec ces entités primordiales, les grands anciens, afin d’en être épargnés quand ils dévasteraient la terre que nous connaissons.
— Et alors ce sous-marin ? Il était parti en mission, mais pour quoi faire ? Réveiller les grands anciens qui dorment sous la glace depuis des millions d’années ? C’est n’importe quoi.
— Je vous ai dit que c’est une des nombreuses expéditions envoyées par le IIIe Reich pour produire l’ascension d’une nouvelle humanité.
— Ils auraient selon vous gaspillé des milliers de litres de carburant en pleine guerre pour courir après de pareilles chimères ! Ce qui est sûr, c’est qu’ils n’ont jamais rien trouvé, sinon les nazis auraient gagné la guerre.
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— C’est une forme de sagesse initiatique ?
— Tout à fait : dans le très controversé Livre des Dzyan, elle décrit sa vision mystique de l’Histoire. L’humanité actuelle ne serait que la version dégénérée des hommes de jadis. Des géants initiateurs, comme Énoch lui-même, auraient enseigné aux humains les anciens usages, dont l’écriture, mais aussi la divination et la sorcellerie. Ces rois géants affrontaient pour leurs peuples humains des monstres gigantesques, dragons ou bien serpents des mers. Les bâtards de ces géants, progéniture à demi humaine, étaient leurs serviteurs.
— C’est complètement fantastique. Ça ne repose sur rien…
— N’en soyez pas si sûr, mon cher John !
— Il n’y a pas de tels monstres dans la Bible…
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La mort, cette vieille ennemie, songerait-elle bientôt à lui ? Il lui faudrait l’affronter quelque jour, mais, sauf à tout dévoiler, il disparaîtrait de la mémoire des hommes, sans laisser plus de traces qu’un caillou jeté dans l’océan. L’anéantissement : était-ce donc la seule issue ? Certainement pas ! Mû par un incommensurable orgueil de savant, il décida de demander audience aux autorités américaines. Après avoir été écarté du funeste projet par les nazis eux-mêmes, il allait être au cœur des événements.
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Oskar ne pouvait plus rester sans savoir. Mille pensées fugaces l’environnaient, sans qu’il puisse arrêter son esprit sur aucune d’entre elles. La longue succession des événements qui avaient précédé ce jour fatal lui semblait se perdre dans l’oubli et le secret.
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Toute sa vie, il avait comparé les langues entre elles, et l’étymologie était sa passion. Il avait d’abord étudié les langues indo-européennes, manifestant une nette prédilection pour le système linguistique du sanskrit et de l’iranien ancien. Auparavant, il lisait déjà son latin et son grec comme d’autres lisent leur journal… De là, il s’était pris de passion pour les langues sémitiques anciennes, l’akkadien en particulier. Il en était alors venu à l’antique sumérien, qui ne relève d’aucun groupe connu, et qui apparaît dans l’histoire comme un météore avec sa langue qui ne ressemble à rien d’autre, son prodigieux système graphique et sa civilisation étonnante. Comme une falaise à découvert, les murs de son bureau reflétaient les strates de ses études. Il prit au hasard le volume III de son édition du Mahābhārata, et l’ouvrit en plein milieu, pour en lire la première strophe venue. Ce qu’il lut le fit frissonner d’effroi :

« À la fin des temps, il ne fait pas de doute que les humains deviendront des barbares cruels, omnivores et dépourvus de pitié dans tous leurs actes. »
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Cette fois, les choses avaient changé : l’Allemagne n’était plus sous les ordres d’un despote paranoïaque, mais vivait en démocratie. En 1990, elle avait même été autorisée à se réunifier. Berlin était alors en liesse. Aujourd’hui, près de vingt ans après, le réalisme avait effrité ce bel enthousiasme, de même que le temps avait délité le mur haï, qu’on s’efforçait à présent de préserver. Décidément, il ne comprenait plus rien à cette époque.
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Toutes ces années de calme n’avaient été qu’une parenthèse entre deux moments critiques, où toutes ses précieuses connaissances ne lui seraient chaque fois d’aucune utilité. Sa vie n’avait été qu’un lent compte à rebours. L’appel du devoir claironnait à nouveau ses ordres absurdes.
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Après la guerre, que sa douloureuse claudication lui interdisait aussi, Oskar avait fait carrière à l’université de Heidelberg, où il s’était de nouveau plongé dans la philologie des langues indo-iraniennes avec délice, avant d’accepter un poste de professeur à la Freie Universität de Berlin. Aucun de ses nombreux étudiants n’aurait pu soupçonner que ce vieil iranologue plein d’humour et de délicatesse avait jadis approché l’horreur absolue et conservait des secrets abominables.
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Il ne pouvait décidément rien faire, comme à l’époque où la mission s’était interrompue brutalement et qu’il avait cessé de recevoir les inquiétants rapports de son vieux maître, le professeur Wüst, spécialiste des textes sacrés de l’Orient, qui l’avait initié au sanskrit dans les années trente à Munich.
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Il fallait agir. Même après tout ce temps, il ne saurait être question de rester assis à ne rien faire, quand le sort de l’humanité était en jeu. Mais que faire qui ne soit dérisoire ?
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Ce qui n’était pour le reste de l’humanité qu’une découverte archéologique des plus inattendue plongeait Oskar Manstein dans des abîmes de réflexion. Ce sous-marin qui venait de briser la calme surface de sa conscience était comme un souvenir pénible, issu du passé, et que tous les efforts de l’oubli ne peuvent jamais tout à fait oblitérer.
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C’est dans cette époque d’indicible déraison qu’on décida de se ménager tous les moyens possibles pour gagner la guerre. La technologie la plus avancée s’associa un temps à l’hermétisme le plus reculé. Des opérations incompréhensibles pour un esprit sain furent alors planifiées avec une logique invraisemblable.
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La folie de la guerre semblait devoir accoucher d’une folie plus grande encore : des cultes mystérieux gangrenaient la SS, et l’esprit luciférien contaminait tous les cadres du parti nazi. On croyait alors au royaume d’Agartha, que les récits bouddhistes font s’étendre sous l’Himalaya, à des profondeurs que l’esprit humain ne saurait concevoir.
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Les glaces n’avaient pas encore pris les divisions de Hitler dans leur étau implacable, et rien d’humain ne semblait devoir arrêter sa marche vers l’est. On disait qu’il s’appuyait sur des moyens magiques pour mener sa guerre éclair ; tout ce que l’Europe et l’Asie comptait de mages, occultistes et autres shamans se pressaient à Berlin : tapis dans les profondeurs du Reichstag, des moines hindous et tibétains priaient avec ferveur contre les glaces éternelles, préparant la venue de l’homme nouveau et psalmodiant des chants de victoire.
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Oskar Manstein était de ceux-là. Il savait très bien ce qu’un tel engin pouvait faire dans ces parages à l’été 1941, quand il était encore un tout jeune homme et que la guerre faisait rage : les Américains n’avaient pas encore accaparé le territoire de Thulé pour en faire une base aérienne, et l’Allemagne nazie était alors à l’apogée de sa puissance militaire ; les légions blindées de Guderian déferlaient sur les steppes russes à une vitesse prodigieuse, et leur victorieuse avancée tenait du surnaturel.
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Il n’y avait plus aucun doute ; on avait retrouvé un sous-marin allemand qui demeurait pris dans la banquise depuis plus de soixante ans : un gigantesque U-Boot de classe IX, long de plus de soixante-dix mètres, qui gîtait intact par vingt-cinq mètres de fond sous la glace du Groenland. Le journal disait que c’était le réchauffement climatique qui avait fait s’effondrer la corniche de glace lui tenant lieu de cercueil. Cet effondrement du littoral arctique révéla au jour ce qu’aucun homme n’avait aperçu depuis bien longtemps, et fit resurgir des entrailles gelées de l’océan ce qui aurait dû y rester pour toujours. Sans doute fort peu de gens étaient encore en vie qui connaissaient l’existence de ce sous-marin, avant que la nouvelle de sa découverte ne fût publiée par toute la terre.
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Ce morne matin-là ne fut pas semblable aux autres pour Oskar Manstein, octogénaire berlinois à la silhouette frêle et timide. En lisant les nouvelles du matin, il acquit très calmement la certitude qu’il ne serait plus jamais en repos, si tant est qu’il l’ait jamais été depuis toutes ces années. Paradoxalement, à la lecture de cet article anodin et presque dérisoire qui revêtait pourtant à ses yeux tant d’importance, il se sentit comme soulagé, l’objet de la peur étant parfois moindre que la peur elle-même. Au moins, il n’aurait plus à attendre. Par réflexe, il réajusta ses lunettes à l’épaisse monture sombre, conscient d’être à un tournant de sa vie au moment où il en faut plutôt prendre congé.
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John Ackroyd. Ces deux mots lui semblèrent totalement vides de sens. Par un étrange paradoxe, c’était la première fois depuis longtemps que quelque chose lui était incompréhensible, en quelque langue que ce fût. Cette idée le fit sourire, mais la brûlure lancinante qui engourdissait son bras se rappela à lui. Il soupira péniblement et se mit à la tâche sans plus songer à lui-même, bien décidé à se distraire de son fatal destin par l’exercice de son intelligence sans bornes. Il était absolument seul dans cette nuit de silence.
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Tel un automate, il saisit une boîte à cigares posée sur le rebord de son bureau. À l’intérieur reluisait une lame de rasoir aux reflets bleutés. Il s’en saisit sans crainte, résigné. Son bras portait déjà de bien nombreuses cicatrices éphémères. Il se coupa la chair avec application, et le métal glacé lui infligea sa morsure coutumière. L’expérience ne peut atténuer la douleur elle-même, mais seulement l’appréhension qu’on a d’en ressentir. Il avait fini par accepter ce pénible rituel, non qu’il fût porté à souffrir de son plein gré, mais par sujétion à une nécessité supérieure. Pourtant, nul mal étrange ne le rongeait, et seule la pudeur l’empêchait de confesser à autrui la raison de sa singulière conduite.
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Il ouvrit les yeux. Aucun bruit, aucune lueur : la chambre était emplie de ténèbres qui se mêlaient à des lambeaux de rêves. Il se leva avec peine malgré son jeune âge, et chercha à tâtons comme un aveugle. Il plaça son index sur le commutateur et la clarté électrique lui sauta au visage. Il n’en conçut pourtant aucun soulagement.
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